IVO
P OGORELICH VICTORIA HALL
24 FEV
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Introduction L A SAISON MUSIK A
Il y a 20 ans, au Brésil, les amateurs de musique me demandaient si nous aurions un jour le plaisir de le recevoir. Ivo Pogorelich était déjà un mythe. A l’époque, le miracle ne s’est pas produit. Après un long silence, c’est à Genève qu’il répond à mon invitation. En apprenant la nouvelle, mon père avait semblé surpris.
Pogorelich ? Un style particulier, original, surprenant. Ivo Pogorelich, l’artiste polémique, l’homme de tous les superlatifs, nous honore de sa visite, avec un programme entièrement dédié à Chopin. Comment imaginer plus merveilleuse soirée ?
Introduction – 3
IVO POGORELICH BIOGRAPHIE
« Ses interprétations suggestives formées par un goût musical raffiné, ont élargi les horizons et de la compréhension du répertoire pour piano en établissant de nouveaux standards de l’art du piano… »
Le pianiste légendaire Ivo Pogorelich a marqué la scène musicale classique de notre époque. Son talent et son approche novatrice le placent parmi les esprits musicaux les plus originaux d'aujourd'hui.
littérature pianistique en établissant de nouvelles normes. Grâce à ses critères artistiques sans compromis et sa recherche de l'idéal, ses concerts ont acquis le statut d’événements cultes.
Son esprit aventureux, sa lucidité dans la découverte de nouvelles expressions musicales, s’expriment dans un pianisme de la plus haute valeur technique et esthétique. Son goût musical raffiné, rare à notre époque, élargit les horizons de la
Né à Belgrade en 1958, fils d’un musicien, Ivo Pogorelich commence son éducation musicale à 7 ans, et fait ses débuts en concert solo à 10 ans. Il s’installe à Moscou en 1970 pour poursuivre ses études à l'École centrale spéciale de musique du
4 – Biographie Ivo Pogorelich
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Conservatoire P. I. Tchaïkovski, puis au Conservatoire de Moscou. Un changement radical dans son développement artistique s'opère lors de sa rencontre avec l'éminente pianiste et pédagogue géorgienne, Alisa Kezeradze. Son enseignement s’appuie sur les fondements de l'école de piano russe, posés à la fin du XIXe siècle par le dernier élève de Liszt, Alexander Siloti. Pogorelich s’intègre ainsi à une lignée générationnelle de pianistes illustres : septième après Beethoven et cinquième après Liszt, il occupe une place à part dans la constellation du pianisme mondial. Il remporte son premier grand succès en 1975 lors du Concours d'État à Zagreb. II enregistre ensuite son premier album ( œuvres de Debussy, Prokofiev et Kelemen ) pour le label Jugoton. Son activité de concertiste s’intensifie en 1978, lors d’une tournée à travers les EtatsUnis, avec l'Orchestre du Festival de Dubrovnik. Quelques mois plus tard, il remporte le Concours de 6 – Biographie Ivo Pogorelich
piano Alessandro Casagrande à Terni, succès qui lui ouvre les salles de prestigieux centres de musique italiens ( Naples, Milan, Festival de Spoleto entre autres ). En 1980, Pogorelich remporte 14e Concours international de piano de Montréal, sur une interprétation spectaculaire du Troisième Concerto pour piano de Serge Prokofiev. Cette même année, il participe au 10e Concours international de piano Frédéric Chopin à Varsovie. Pour des raisons mal élucidées, il est éliminé avant le tour final et certains membres du jury quittent le concours pour protester. La pianiste Martha Argerich justifie son départ en déclarant « C’est un génie ». L’écho de cet événement, sans précédent dans l'histoire des concours de musique, consacre Pogorelich comme le véritable lauréat. Sur la vague de l'énorme intérêt suscité par l’événement du Concours Chopin par ses jeux –7
extraordinaires, sa technique prodigieuse et son approche innovante dans l’interprétation du répertoire, Pogorelich est désormais reconnu comme pianiste aux capacités exceptionnelles et à l’esprit moderne. Il entame une série de concerts en Europe, en Amérique du Nord, en Australie et au Japon. Ses débuts au Carnegie Hall de New York en 1981 sont suivis de performances sur les grandes scènes du monde, en solo ou accompagné par des orchestres renommés : Wiener Philharmoniker,
Berliner Philharmoniker, London, Boston et Chicago Symphony Orchestras, New York et Los Angeles Philharmonics, et les orchestres Tonhalle et Concertgebouw. Parallèlement, Ivo Pogorelich se consacre à la réalisation d'enregistrements. Son premier album « Chopin Recital » ( Deutsche Grammophon ) en 1981, devient un best-seller et dès l'année suivante, il enregistre en continu. Sa discographie compte à ce jour 14 albums et 3 vidéos. Ces
éditions d’anthologie conquièrent les auditeurs de musique classique du monde entier, et reste jusqu'à aujourd'hui des références dans l’histoire récente de la musique. Cultivant le statut culte de l'artiste, Deutsche Grammophon édite en 2006 un double CD de compilation intitulé « Le Génie de Pogorelich », suivi en 2015 d'un coffret d’albums enregistrés entre 1981 et 1998, « intégrale » qui recevra le prestigieux Diapason d'Or français. L’année suivante, en 2016, Ivo Pogorelich réalise
8 – Biographie Ivo Pogorelich
de nouveaux enregistrements d’œuvres de Ludwig Van Beethoven en collaboration avec la plateforme de streaming Idagio devenant ainsi le premier musicien classique qui se soit tourné vers cette forme de production de haute qualité technologique et de distribution d’enregistrements musicaux. À partir de 2019, il enregistre pour Sony Classical. Un premier enregistrement voit le jour en août de la même année avec deux sonates de Ludwig van Beethoven n° 22, op. 54, et n° 24, op. 78 - et Biographie Ivo Pogorelich – 9
la Deuxième Sonate pour piano op. 36 de Rachmaninov. En février, Ivo Pogorelich sort un CD entièrement consacré à Chopin, premier du genre depuis plus de 20 ans. Parallèlement à cette carrière de premier plan, Ivo Pogorelich s’engage aux côtés de jeunes artistes. Il crée à Zagreb en 1986 un fonds destiné à financer leur formation musicale à l’étranger et en 1989, à Bad Vörishofen en Allemagne, le Festival international de musique Ivo Pogorelich qui réalise pendant les neuf années de son existence sa mission d’aider un grand nombre de jeunes musiciens, ensembles et orchestres dans leur affirmation sur la scène internationale. En 1993, Pogorelich lance la compétition internationale de piano à Pasadena aux Etats-Unis. Ce concours unique, en quatre étapes, sans limite d’âge pour les participants, et avec un fonds de prix de 100 000 USD, sans égal jusqu’à aujourd’hui, a été conçu pour soutenir les lauréats en vue de leur 10 – Biographie Ivo Pogorelich
développement professionnel en musiciens de concert du plus haut niveau. Finalement, Le Manhattan International Music Competition créé au Carnegie Hall de New York en 2016, nomme Ivo Pogorelich Président d'honneur, et baptise son Premier Prix du nom du musicien. Ces dernières années, son répertoire impressionnant, constamment enrichi de nouveaux ouvrages, se concentre sur de grands cycles pour piano de Schumann, Brahms, Debussy, Ravel, Rachmaninov et Stravinski, ainsi que sur des concertos de Chopin, Schumann et Rachmaninov dont l’interprétation est déjà suivie avec grand intérêt et suscite les réactions positives du public et des critiques. Durant la saison 2018/2019, à l’occasion de son soixantième anniversaire et de ses quarante ans de carrière, la télévision nationale japonaise NHK a réalisé un film documentaire consacré à Ivo Pogorelich, enregistré dans les localités historiques de la ville de Nara.
En 2021 / 2022, Ivo Pogorelich réalisera une tournée solo en Asie ( Chine, Taiwan et Japon ), ainsi qu’un grand nombre d’autres concerts et projets sur les scènes européennes où il interprétera un programme de récital entièrement consacré à Frédéric Chopin. Ivo Pogorelich fait preuve d’un engagement social remarquable dans le champ du travail humanitaire. Préoccupé par la
reconstruction de son pays martyrisé durant les années 90, son projet d’hôpital gynécologique également consacré à la recherche et à l’éducation, voit le jour en 1994 à Sarajevo. Son engagement dans la promotion des valeurs les plus élevées de la culture, de l'art et de l'éducation, lui vaut de recevoir en 1988 le titre d’« Ambassadeur de bonne volonté » de l'UNESCO. Biographie Ivo Pogorelich – 11
Programme 1ÈRE PARTIE
2ÈME PARTIE
Frédéric Chopin ( 1810–1849 ) Polonaise-Fantaisie, en la bémol majeur, Op. 61 ( 1846 ) Sonate No. 3, en si mineur, Op. 58 ( 1844 ) I. Allegro maestoso II. Scherzo: Molto vivace
Fantaisie, en fa mineur, Op. 49 ( 1841 ) Berceuse, en ré bémol majeur, Op. 57 ( 1843 ) Barcarolle, en fa dièse majeur, Op. 60 ( 1846 )
III. Largo IV. Finale: Presto non tanto
Entr’acte (20 min)
12 – Programme
Programme – 13
Au sujet des œuvres « Quelques compositeurs, parmi lesquels Chopin, peuvent supporter et soutenir un programme monographique, la raison étant l'extraordinaire versatilité de leur musique pour que le public puisse l'apprécier dans leur variété. » — Ivo Pogorelich Ivo Pogorelić propose ce soir un programme entièrement consacré à la musique de Frédéric Chopin (1810-1849). Des œuvres contrastées de par leurs proportions et leurs caractères, mais toutes écrites dans les années 1840, époque de la pleine maturité de l’art de Chopin.
Frédéric Chopin en 1847 ou 1849, reproduction photographique d'un daguerréotype détruit ou perdu de Louis-Auguste Bisson (Bibliothèque polonaise de Paris ).
Mazurkas, op. 59/1-3 Chopin composa des Mazurkas tout au long de sa vie. Comme les Polonaises, elles sont le reflet du sentiment national auquel sa musique reste liée. Très populaire en Pologne dès le XVIè siècle, la Mazurka est une danse à trois temps dont l’accent principal tombe sur les temps faibles, et plus sur le deuxième. Chopin en a conservé le rythme, mais, pour reprendre l’expression 14 – Biographie Ivo Pogorelich
de Liszt, « il a ennobli la mélodie, agrandi les proportions ». Il laisse près de soixante Mazurkas, toutes magnifiques par leur écriture pianistique, leur harmonie audacieuse et la variété de leur rythme, autant de pièces ( souvent écrites en mineur ) pleines de cette diversité de « motifs et d’impressions » que relevait Liszt. Les trois Mazurka, op. 59, sont éditées en 1845. Biographie Ivo Pogorelich – 15
La première, en la mineur, d’une grande élégance, est imprégnée de réminiscences de la Pologne. L’épisode central, en majeur, débute avec retenue dans le grave et se développe en dessins expressifs, passant alternativement de la main droite à la main gauche. Le retour du thème initial s’effectue avec toutes les hardiesses harmoniques caractéristiques du style de Chopin, notamment dans cette curieuse progression du ton de sol dièse au ton de la mineur. Dans la deuxième, en la bémol majeur, une première idée pleine de grâce et de douceur, réexposée à deux voix, laisse la place à un nouveau motif à la fois insistant et délicat. La courte coda accélère le tempo, mais pour conclure finalement sur quatre accords fugitifs. La troisième, en fa dièse mineur, est une longue Mazurka, proche du folklore. Son thème initial évolue sur un rythme plein de franchise et de pittoresque. Le second épisode, en majeur, est toujours animé de l’esprit 16 – Au sujet des œuvres
de la danse. Dans la réexposition du premier thème, Chopin ménage de savoureuses surprises, sur un jeu d’imitations, et avec une conclusion inattendue en majeur.
Sonata n°3 en si mineur, op. 58 Chopin a écrit trois sonates pour piano, en 1828, 1839 et 1844. La première, op. 4, est une œuvre de jeunesse, écrite à 18 ans, de loin la moins connue. La seconde, op. 35, est très célèbre notamment pour sa marche funèbre. La troisième a été écrite près de 5 ans après la précédente, durant l'été 1844, alors qu'il était en villégiature à NohantVic, avec George Sand. Elle a été publiée un an plus tard. Les sonates deux et trois sont des chefs-d’œuvre, très différents l’un de l’autre : la deuxième sonate est un poème tragique, alors que la troisième, jouée ce soir, est étincelante de vitalité. Avec les Concertos, ces deux sonates témoignent de la capacité de Chopin à maîtriser les « grandes formes ». S’appuyant sur
le canon classique de la sonate, Chopin y insuffle l’esprit romantique et une liberté formelle audacieuse (omettant, par exemple, à la fin des premiers mouvements de ses Sonates op.35 et 58, la réexposition du premier thème). Dans l’évolution de la sonate pour piano, la troisième de Chopin tient une place importante : après l’intense foisonnement marqué par les prédécesseurs, notamment Haydn, Mozart, Beethoven et Schubert, il était difficile de renouveler le genre. La deuxième sonate, bien que géniale, n’atteint pas pleinement cet objectif. Dans la troisième, Chopin réussit à concilier l’ambition formelle de la sonate, tout en s’exprimant pleinement et avec liberté. Cela en fait une œuvre comparable à peu d’autres. Le premier mouvement, Allegro maestoso, riche jusqu’à l’excès en inventivité est, dans sa forme, ce qu’il y a de plus « audacieux » dans l’œuvre. Le bref Scherzo alterne
un thème léger et étincelant et un « trio » plein de délicatesse. Le Largo offre le long développement de cantilènes d’une grande beauté. Enfin le rondo final commence par une brève ouverture théâtrale et dramatique, suivie d’une forme « couplets-refrains » dans laquelle les trois reprises du thème principal sont de plus en plus chargées en émotion et en expressivité. La sonate se conclut par une coda magistrale et virtuose.
Fantaisie en fa mineur, op. 49 Ébauchée au début de l’année 1841, elle fut achevée au mois d’octobre de la même année. Œuvre de passion et de force, la fantaisie en fa mineur est à la fois tourmentée et pleine d’espoir. On l’a malheureusement trop souvent assimilée à un programme sentimental ou à la référence à quelque fonds national polonais et cela en dépit de l’aversion du compositeur pour toute musique anecdotique et toute effusion non Au sujet des œuvres – 17
« Ce film célèbre l’amour à tous les âges avec une grande tendresse. » 20 MINUTES contrôlée. Dans cette œuvre, Chopin développe une grande liberté d’inspiration et de forme, d’où le titre de « Fantaisie ». Elle commence avec un thème solennel qui se prolonge par une transition de plus en plus passionnée, virtuose, positive. Vers le milieu de l’œuvre, un autre thème apparaît, lent et sombre, à la façon d’un choral. Le retour de la première partie fait entendre un épisode calme, plein de douceur, puis un final brillant, se terminant en la bémol majeur, la tonalité relative de fa mineur.
Berceuse en ré bémol majeur, op. 57 Cette Berceuse, vraisemblablement composée en 1843, est un des chefsd’œuvre des dernières années. Elle est merveilleuse de grâce et de délicatesse, et paraît conçue dans l’atmosphère d’une improvisation magique. Cette pièce commence par un mouvement de basse à deux
temps ternaires, maintenu pendant tout le morceau. Le thème principal, qui est joué une fois, laisse place à toutes sortes de variations plus ou moins virtuoses à la main droite. À la fin, une légère modification d'harmonie apparaît, et se conclut par deux accords en cadence parfaite, pour finir en douceur.
Polonaise-Fantaisie en la bémol majeur, op. 61 Achevée avant l’été 1846, alors que Chopin et Georges Sand se séparent, elle semble un reflet des sentiments et des désillusions du compositeur. Au dire de Liszt, qui y relevait des mouvements effrénés, des sourires mélancoliques, et des soubresauts inopinés, cette œuvre déborde d’une tristesse élégiaque. Chopin s’écarte du cadre et du rythme de la Polonaise au profit d’une liberté d’expression proche du caractère des Ballades.
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22 – Crédits
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