paperJam Economie & Finance - Mars 2007

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g r a n d a n gl e · e n t r e t i e n

G e o r g e s R a v a r a n i

«Une justice trop lente

est une justice absente» Le Tribunal administratif du Luxembourg est une jeune institution qui a tout juste fêté ses dix ans en novembre dernier. Avec environ 1.200 affaires à traiter par an, il se targue de n’accuser aucun retard. Le Tribunal administratif est présidé par Georges Ravarani. Ce père de deux enfants, diplômé de la Faculté de Droit de Grenoble II, a démarré sa carrière en tant qu’attaché de justice, avant de devenir juge au tribunal d’arrondissement de Luxembourg, jusqu’en 1992 où il a exercé la profession d’avocat pendant quatre ans. Professeur invité à l’Université du Luxembourg, il fait également partie des membres actifs de l’asbl Pasicrisie luxembourgeoise, qui édite les principaux recueils de jurisprudence luxembourgeoise. Il est l’auteur de différents ouvrages, dont La responsabilité civile des personnes privées et publiques, paru en 2006. La jeune juridiction compte aujourd’hui neuf juges qui s’attachent à ne pas laisser s’accumuler de retards. Un effectif suffisant qui perçoit un salaire assez confortable lui permettant d’être totalement indépendant. Rencontre. La justice n’a pas bonne presse auprès du public en général, on l’accuse souvent d’être trop lente. Ces griefs sont-ils justifiés? «La justice a mauvaise presse car il y a toujours nécessairement 50% des plaideurs qui sortent insatisfaits parce qu’ils ont perdu leur procès. De plus, le public attend peut-être trop de la justice. Il arrive, par exemple, que celle-ci soit sollicitée dans des domaines où elle ne peut pas apporter aux justiciables les apaisements 94 PAPERJAM MARS 2007

auxquels ceux-ci aspirent, comme en matière de divorce. Il est parfois fait appel aux tribunaux là où d’autres instances, qui pouvaient autrefois résoudre des litiges en dehors d’un procès, ont perdu l’autorité nécessaire. Paradoxalement, par les temps qui courent, on remet de plus en plus en question l’autorité du juge, mais on le sollicite, en même temps, toujours davantage. On dit que la justice est trop lente, c’est partiellement justifié, mais on fait l’impasse des difficultés inhérentes au processus de rendre la justice. La loi prévoit des délais dans l’intérêt des droits de la défense, même si, devant les juridictions administratives, les délais se sont relativement raccourcis. Lorsque vous introduisez un recours chez nous, contre une décision administrative, l’auteur de la décision a trois mois pour répondre, c’est prévu dans la loi. Ensuite, celui qui a attaqué la décision a de nouveau un mois pour répondre et l’auteur de la décision a de nouveau un mois pour contester. Donc, en raison des délais d’instruction, institués dans l’intérêt de tous, il est impossible d’obtenir un jugement en deçà de cinq mois. Une justice trop lente est une justice absente. Il est vrai que, dans l’intervalle, on peut obtenir des mesures provisoires, avec une rapidité extrême, devant le juge des référés, qui a le pouvoir de suspendre provisoirement les effets d’une décision administrative. [>>ù96]

Photo: Luc Deflorenne


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