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LA CHRONIQUE DE HIGHWAVECAPITAL

BANQUES CENTRALES, UNE INVENTION DOUTEUSE ?

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Will Rogers, contemporain de la crise de 1929, élève les banques centrales au rang d’invention majeure de l’humanité. Qu’en est-il aujourd’hui alors que la gouvernance monétaire ne parvient pas à contenir le feu inflationniste qui se renforce à travers le monde ? Explications.

Texte David Furcajg

« Il y a eu trois grandes inventions depuis le commencement des âges : le feu, la roue, la banque centrale ».

Will Rogers, humoriste américain (1879 – 1935)

Bien entendu, Will Rogers plaisantait, mais relevait de manière pertinente que les banques centrales constituent la colonne vertébrale des affaires financières du monde moderne. En réalité, l’histoire de celles-ci débute récemment : la toute première banque centrale est créée en 1609 à Amsterdam afin d’organiser la circulation des différentes monnaies métalliques. C’est en 1694 que la Banque d’Angleterre est fondée pour gérer un emprunt public et adopte le statut de banque des banques au début du XIXème siècle. Plus tardivement, la puissante banque centrale américaine, la FED, est fondée en 1914 à la suite de plusieurs crises bancaires. L’invention des banques centrales est ainsi récente, et leurs prérogatives se sont renforcées plus particulièrement au cours du XXème siècle. Aujourd’hui, la plupart des pays possèdent une banque centrale qui « normalement » doit être indépendante du gouvernement afin de s’assurer de la stabilité monétaire. Cependant, « La monnaie est une chose trop sérieuse pour la confier aux banques centrales » relève Milton Friedman, pas humoriste cette fois-ci, mais prix Nobel d’économie en 1976. Le début du XXIème siècle lui donnera raison : lors des trois dernières crises majeures (internet en 2001, bulle immobilière en 2008 et crise du Covid en 2020), les banques centrales interviennent toujours plus et perfusent les marchés financiers en déversant des liquidités de manière pléthorique. Elles dopent ainsi la sphère monétaire et financière, favorisent la formation de bulles du prix des actifs immobiliers et boursiers et, plus récemment, contribuent au retour de l’inflation : « La monnaie est selon Milton Friedman, « l’inflation est générée par une chose trop sérieuse pour la confier aux banques centrales. » une augmentation de l’offre de monnaie plus rapide que celle de la production ». Justement, l’inflation flambe à travers le monde alors même que le mandat des principales banques centrales consiste à maintenir la stabilité des prix. Dans ce contexte, on doit se questionner sur la capacité des banques centrales à respecter leurs prérogatives et si cette invention, dans sa forme actuelle, ne contribue pas à davantage d’instabilité économique. L’architecture monétaire actuelle, à savoir une banque centrale avec monopole d’émission monétaire, devrait être repensée. Dans le domaine des biens et services, on conçoit que les situations de monopole soient néfastes puisqu’elles allouent une rente de monopole : les producteurs ne sont pas incités à innover, à produire des biens et des services de qualité, ou encore réalisent un surprofit puisqu’ils peuvent pratiquer le prix fort en l’absence de concurrence. Il en est de même en situation de monopole de production monétaire : une banque centrale n’est pas incitée à produire une monnaie de qualité ou encore une monnaie non inflationniste. Depuis 2008, les programmes d’assouplissement quantitatif successifs menés par les gouverneurs des banques centrales ont contribué à affaiblir la qualité de la monnaie et dopé artificiellement l’économie. Il est temps de sortir de cette gouvernance douteuse et d’instaurer une dose de concurrence monétaire afin que la richesse créée repose sur des fondamentaux solides et non de fragiles châteaux de cartes. Après l’invention du feu et de la roue, on se passerait bien volontiers de celle des banques centrales.