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SAVEURS

CHEF | ANDREAS CAMINADA

CAMI Andreas NADA

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3 étoiles Michelin, 19 points au Gault&Millau, un restaurant, une chaîne, une fondation et un magazine. Andreas Caminada, le chef suisse au mille talents, aligne les qualités. Portrait de cet homme incroyable mais bien vrai derrière les fourneaux au Schauenstein Castle.

N

é en 1977 dans la petite ville de Sagogn en Suisse, le chef, maintenant reconnu par tous, a su se donner les moyens pour réussir. Il savait que, pour devenir le meilleur, il fallait des années de travail et de persévérance, mais son but était fixé. Juin 1998 marque le début d’une aventure incroyable pour le chef de 21 ans lorsqu’il commence à travailler dans des restaurants de renom. En 2003, c’est le début d’un nouveau challenge : lancer son propre restaurant. Il choisit de réaliser sa vision dans le château de Schauenstein à Fürstenau, une des plus petites villes au monde. Une beauté du 18ème siècle, installée dans les vallons luxuriants suisses, qui mise sur l'authenticité des produits, l’utilisation simple des ingrédients locaux d’une façon unique. Un an à peine après son ouverture, le restaurant avec ses 30 tables décroche sa première étoile Michelin. Désormais, il n’en a pas moins de 3, 19 points au Gault&Millau et se trouve classé dans les 50 Meilleurs Restaurants du Monde. Dans sa cuisine, c'est clair, les légumes et les herbes sauvages ont le rôle principal. Il admet que l'attention constante qu'il porte à la mise en valeur des différentes essences que contient chaque légume vise à prouver que la nature est déjà équilibrée et complète par ellemême, sans qu'il soit nécessaire de l'associer à de la viande ou du poisson. Une règle, cependant, dont il ne peut se passer : respecter la saisonnalité de chaque produit du potager. Ainsi, la carte du restaurant suit, comme dans une danse sacrée, le rythme de croissance de la nature au fil des saisons. Le secret de Caminada ? Jour après jour, il croit en sa terre, en ses traditions ancrées dans le sol meuble sur lequel nous avons marché, charmés par ses histoires. Et puis il prend le temps qu'il faut. Un temps qu'il consacre au potager. Son voyage en cuisine ne consiste pas à chercher des ingrédients lointains, à subir les influences des tendances actuelles ou à transformer les ingrédients de manière excessive suivant un phénomène de mode. Son équipe est un autre pilier sans lequel le chef, comme il l'admet lui-même, serait comme un capitaine sans bateau, une boussole sans destination. Pour continuer dans cette approche de “slow food”, Andreas a ouvert une cuisine végétarienne de 10 places en juin de cette année : Oz, qui est située dans une remise historique à côté du château qui abrite son restaurant principal. Pour le chef, “acheter des légumes pour mon propre restaurant végétarien, ce n'est pas mon truc”. Il a donc agrandi son jardin existant sous la direction de Thomas Moon, un naturopathe qui a travaillé pendant plusieurs années comme agriculteur dans les montagnes avant de pratiquer la permaculture en Autriche. Moon a modelé le jardin biologique sur un écosystème naturel, avec une intervention minimale. Grâce à l'homéopathie appliquée, il a “amélioré le système immunitaire des plantes pour leur permettre de pousser plus sainement”. Le jardin abrite désormais plus de 700 fruits, lé-

gumes et herbes aromatiques différents. “La libre reproduction des plantes parmi ce qu'on appelle les mauvaises herbes crée beaucoup de choses passionnantes qu'on trouve rarement autrement : bourgeons, graines, fleurs, racines. C'est assez productif pour fournir presque tout ce qu'il faut pour un restaurant”, explique Andreas. Caminada Magazine est lancé en 2012, portant sur l'univers de Andreas : un mix entre un livre de cuisine et un magazine lifestyle. Le lancement de sa chaîne de restaurant, appelée IGNIV by Andreas Caminada, se fait en 2015 : Bad Ragaz et au Badrutt’s Palace Hotel à Saint Moritz. Tous deux remportent leur première étoile dans leur première année d’existence et en ont actuellement 2 respectivement. Les activités culinaires de Caminada ne se limitent toutefois pas à un seul canton. En plus de sa chaîne de trois restaurants à travers la Suisse, il ouvre sa première antenne à l'étranger en octobre 2020 à l'hôtel St. Régis de Bangkok, où il propose des menus de dégustation à base de plantes. Un autre aspect du travail de chef aux multiples talents est la création de sa fondation en 2015 : Fundaziun Uccelin, qui signifie petit oiseau en romanche. Un nom qui en dit long sur cette fondation qui promeut la jeune gastronomie en aidant les jeunes à s'envoler dans leur profession avec l'aide d'un réseau unique de restaurants et de producteurs. Un peu comme si le célèbre colibri de la sobriété heureuse, sans cesse interrogé par nos évolutions contemporaines, prenait aussi sa place légitime dans ce développement, vecteur de sens pour l'humanité. Afin de pouvoir garantir à long terme la qualité de la haute gastronomie, il est nécessaire de promouvoir les talents de manière ciblée. Diverses formations à caractère académique sont actuellement proposées dans le monde entier dans ce domaine. La promotion individuelle des talents techniques est laissée de côté. La fondation comble cette niche. Son objectif est d'offrir concrètement aux chefs et aux serveurs suisses et étrangers la possibilité de poursuivre leur métier respectif, afin qu'ils puissent être les ambassadeurs de la qualité de la gastronomie suisse de haut niveau., habiles de valeurs porteuses d’avenir. Comme Voltaire faisait dire à Candide “Il faut cultiver son jardin”. Pari garanti.

« Acheter des légumes pour mon propre restaurant végétarien, ce n'est pas mon truc. »