LES AUTORISATIONS POUR LES ACTIVITÉS DE VALORISATION : LE MELCC PRÉCISE SON INTENTION
LE JURIDIQUE
Me Thibaud Daoust Avocat, LL. B. Daigneault, avocats inc. thibaud.daoust@daigneaultinc.com
P
ar l’adoption du paragraphe 8 de l’article 22 de la Loi sur la qualité de l’environnement 1 (ci-après la « LQE ») en mars 2017, le ministère de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques (ciaprès le « MELCC ») formalisait sa volonté d’assujettir à des autorisations environnementales les activités de valorisation de matières résiduelles. Depuis, les entreprises et les municipalités s’interrogent au sujet du risque environnemental de leurs activités de valorisation ainsi que de l’assujettissement de leurs activités à une autorisation ministérielle.
Le 19 février dernier était publié le projet de règlement sur l’encadrement d’activités en fonction de leur impact sur l’environnement 2 (ci-après « REAFIE »). Près de trois ans après l’adoption de la dernière mouture de la LQE, le MELCC précise enfin quelles activités de valorisation nécessiteront une autorisation ou une déclaration de conformité et lesquelles seront exemptées de toute autorisation. Nous aborderons d’abord quelques aspects du REAFIE et nous nous attarderons ensuite au projet de règlement concernant la valorisation de matières résiduelles 3 (ci-après « RVMR »), publié le même jour et dont le contenu se veut un complément au REAFIE. PROJET DE RÈGLEMENT SUR L’ENCADREMENT D’ACTIVITÉS EN FONCTION DE LEUR IMPACT SUR L’ENVIRONNEMENT Les parties du REAFIE portant sur la gestion des matières résiduelles se retrouvent aux articles 59 à 69 et 233 à 281. En plus de préciser les documents devant être soumis lors des demandes d’autorisation, le REAFIE liste les activités qui seront admissibles à une déclaration de conformité ou qui bénéficieront d’une exemption, en plus de détailler leurs conditions d’application. Sans toutes les nommer, on aborde par exemple les activités de compostage, de stockage de bois et de collecte sélective. Ainsi, un centre de tri de matières résiduelles issues de travaux de construction et de démolition (ci-après « CRD ») ne sera admissible à une déclaration de conformité que s’il respecte les onze conditions prévues aux articles 253 et 254 portant sur le volume, la provenance et les caractéristiques des matières, les aires de tri, le procédé de tri, etc. On peut entre autres noter, dans ces conditions, le fait que les bardeaux d’asphalte et le bois traité doivent tous deux être stockés à l’abri des intempéries et dans des conteneurs fermés ou recouverts d’une toile imperméable. PROJET DE RÈGLEMENT CONCERNANT LA VALORISATION DE MATIÈRES RÉSIDUELLES Il est important de noter que le RVMR ne s’applique qu’aux activités de valorisation de matières résiduelles faisant l’objet d’une déclaration de conformité ou d’une exemption conformément au REAFIE. Il s’agit donc
d’un règlement qui vient préciser les conditions que devront respecter ces activités pour être admissibles à une déclaration de conformité ou à une exemption. La première partie du RVMR (articles 1 à 12) énonce des normes de localisation et d’exploitation pour les activités de valorisation de matières résiduelles, que ce soit l’établissement d’un centre de tri de la collecte sélective, le compostage, le tri de résidus de construction et de démolition, etc. Il est étonnant de constater que ces activités de valorisation, à risque environnemental faible ou négligeable, devront respecter des normes de distance plus strictes par rapport aux lacs et aux cours d’eau que certaines autres activités pourtant considérées à impact plus grand sur l’environnement, comme l’exploitation d’une carrière. La deuxième partie du RVMR (articles 13 à 26) aborde spécifiquement l’utilisation des matières résiduelles issues des travaux de construction et de démolition comme « matériaux granulaires », expression utilisée dans le RVMR et le REAFIE pour désigner les résidus de pierre concassée, de béton, de brique, d’enrobé bitumineux, les croûtes et retailles du secteur de pierre de taille, les boues du secteur de la pierre de taille, ainsi que les boues de rainurage et les sédiments des bassins de béton. Cette section du RVMR est essentiellement une codification des principes depuis longtemps énoncés dans les Lignes directrices relatives à la gestion de béton, de brique et d’asphalte issus des travaux de construction et de démolition et des résidus du secteur de la pierre de taille 4 (les « Lignes directrices »). Le RVMR reprend ainsi les restrictions liées à l’utilisation des matières ci-haut mentionnées que l’on trouvait dans les Lignes directrices : les matières interdites, les teneurs maximales en contaminants et en impuretés, la granulométrie, etc. Force est de constater que l’on n’a pas cherché ici à simplifier ce cadre administratif, alors que l’introduction d’un règlement aurait pu en être l’occasion. On peut également y reconnaître la classification des Lignes directrices séparant les matériaux granulaires en quatre catégories distinctes, pour lesquelles sont précisés les usages permis et les situations où la caractérisation des matériaux est nécessaire. Mentionnons que les descriptions et les critères liés aux quatre catégories des Lignes directrices n’ont pas simplement été reconduits, mais ils ont été revus, à la hausse ou à la baisse, selon le cas. Les nombreuses dispositions du REAFIE et du RVMR nous permettent de cerner les activités ayant, selon le MELCC, des risques environnementaux faibles ou négligeables. Encore plus, elles nous permettent de nous rendre compte de la vaste quantité d’activités de valorisation qui seront désormais formellement assujetties à une autorisation ministérielle. A priori, ces deux règlements ne semblent pas mettre en place un cadre facilitant ou simplifiant l’implantation et l’exercice des activités de valorisation des matières résiduelles, bien au contraire. Nous vous rappelons que vous avez jusqu’au 17 avril 2020 5 pour soumettre vos commentaires au MELCC sur ces projets de règlements. ■
RLRQ, c. Q-2. (2020) 152 G.O. II, 452. (2020) 152 G.O. II, 600. 4 http://www.environnement.gouv.qc.ca/matieres/valorisation/lignesdirectrices/beton-brique-asphalte.pdf 5 La date limite est en fait le dimanche 19 avril, mais nous estimons plus prudent de viser le 17. 1 2 3
18 LE MAGAZINE DES MATIÈRES RÉSIDUELLES AU QUÉBEC 3RVE VOL. 16 N O 1 HIVER 2020
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