L'image d'actualité

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Aujourd’hui, cette photographie signifiante illustre bien des documentaires, des webdocumentaires, des films, des articles ayant tous pour sujet le massacre des Algériens.

blent avoir quitté la scène. Orpheline, l’inscription in situ au centre est l’élément clé de la photographie. Elle constitue l’unique légende du cliché qui, par son abstraction, s’oppose en tout point à ceux d’Élie Kagan. Le slogan « Ici on noie les Algériens » déployé tel une banderole sur une dizaine de mètres, dénonce les noyades mais surtout le fait qu’elles soient dissimulées par le gouvernement. De plus, la présence de l’article « Les » algériens désigne l’entière nation Algérienne que la répression souhaite ici noyer, supprimer. D’où la portée politique du message inscrit visiblement à la peinture noire.

C

inquante années plus tard sur Twitter, nombreux sont les commentaires sur la répression oubliée. Symbolisés par le Hashtag #17octobre1961 ou encore #17oct, beaucoup de journalistes et d’internautes s’expriment sur le sujet. L’histoire est rattrapée par les modes de diffusion actuels.

@Europe 1, par exemple, a partagé le 18 octobre dernier une photo d’Élie Kagan. Il en est de même pour un internaute sous le pseudonyme de @so_nyssa qui souhaite rendre hommage aux disparus avec pour commentaire à la photographie : « Il y a 51 ans, rafle des algériens le 17 octobre 1961 qui ont été battus, massacrés, noyés. »

Quand l’actualité rencontre l’histoire

Cette photographie est montrée pour la première fois 25 ans plus tard, dans le numéro de L’Humanité daté du 18 octobre 1985, pour illustrer un article de Claude Lecomte intitulé « Les noyés du 17 octobre ». A la fin des années 1990, l’image est utilisée par l’association 17 octobre 1961 : contre l’oubli comme outil et emblème de son action. Jean-Mi-

’image la plus reproduite à propos de la répression du 17 octobre est prise en novembre 1961 par l’ouvrier ébéniste Jean Texier. Alors qu’il est journaliste bénévole à l’Avant Garde, c’est son collègue Claude Angeli qui repère l’inscription Ici on noie les Algériens sur le quai Conti en face de l’Institut de France en se rendant aux bureaux de la rédaction. Il prévient Jean Texier qui se rend sur les lieux et fige le graffiti.

chel Mension, alors animateur du collectif revendique être l’un des auteurs de l’inscription. Sans rien montrer du massacre, cette photographie témoigne avant tout d’une réaction politique. Le cadrage ne permet pas de distinguer la Seine, suggérée cependant par la perspective des quais. Le fleuve existe surtout dans la force du verbe « noyer » présent sur l’inscription. Le ciel nuageux, la luminosité brumeuse et l’absence de circulation laissent supposer une prise de vue matinale. Les pavés au premier plan, le lampadaire caractéristique des bords de seine et l’apparition de l’étal d’un bouquiniste concourent à inscrire l’image dans la représentation d’un Paris éternel. Silencieuse, l’image est vide de présence humaine. Les responsables, les victimes, les auteurs du graffito, tous sem-

Une image inoubliable

le 11 septembre 2001

Le World trade center

Capture écran d’un tweet à propos du 17 octobre 1961 Source : Twitter

Affiche du film documentaire Ici on noie les Algériens de Yasmina Adi sorti le 19 octobre 2011

De haut en bas


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