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Couteau chien, “La épi zot, dépi, nan ni nan nan”

Remerciement : Coutellerie Pitelet pour ses photos et témoignage. Photos CD et à la coutellerie Pitelet` Couteau chien, “La épi zot, dépi, nan ni nan nan”

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S’il est un accessoire de cuisine dont tout foyer antillais est pourvu c’est bien le couteau chien. Il accompagne tout autant les faitouts familiaux que les événements de la maison. Et si le petit canidé gravé sur sa lame disparaît, si son fil est attaqué, si le manche en plastique noir se terni et se griffe, ne vous y trompez pas il sera usé jusqu’à son manche et servira toujours, en dernier recours, de pic à glace, tournevis ou pointe aux pêcheurs.

Voici l’histoire d’un couteau pas comme les autres

Née dans le Puy de Dôme, cette petite lame dodue traverse, au creux du XIXe siècle l’océan pour gagner ses lettres de noblesse et le cœur des Antillais et appartient désormais à son patrimoine. L’on raconte qu’à certaines périodes de l’année alors que les forges de Thiers s’endormaient, les hommes partaient au long cours le dos courbé par le poids des paquets colporter leurs échantillons de l’Amérique du Sud aux petites Antilles. De leur périple de deux années ils revenaient enfin le carnet noirci de commandes. Pour ce qui est de notre ustensile canin, le succès retentissant prendrait sa genèse dans une rencontre insolite, celle de l’un de ces itinérants avec un cuisinier guadeloupéen : en quelques mots, l’affaire était menée : Il fallait parvenir à concevoir un couteau d’exception pour ciseler finement herbes et condiments, que toutes les bourses pourraient s’offrir. Le colporteur s’en alla frapper à la porte de l’usine « Sabatier père et fils » et de son dessin fut forgé dans une lame estampillée du fameux canidé. C’est ainsi que ce négoce créa du liant entre les deux régions, que les temps modernes n’ont jamais distendus.

Passe-moi le chien

Le simple fait de mentionner le nom de cet outil de l’ordinaire affute la mémoire de Pierrot et perler le souvenir : « Le couteau chien ? Que me dites-vous les amis ? J’en ai en pagaille. Déjà quand ma mère m’apprenait la cuisine, je le maniais avec précaution : je bloquais mes doigts comme un bouclier histoire de ne pas me faire mordre. Mais quand même, plusieurs fois la maladresse m’entaillait par peur de ne pas me blesser. Il faut dire qu’il était affuté sur une pierre douce et brillait comme une lune de son poinçon chien. Et lorsque je pestais à la vue de l’entaille, ma mère dans un filet de voix me glissait que c’est le métier qui rentre »

Avouons que ce couteau tranche avec l’ordinaire. En effet, sa lame au cabot est née d’une plaque de métal de premier choix en inox (Z40 C13 s’il vous plait). Elle est fabriquée dans le respect de la tradition de l’acier, du meulage, polissage, surmoulage du manche et surtout de l’affilage entièrement effectué à la main : rien à dire, cela taille.

Un couteau bien trempé.

Couteau « bœuf », « rat » ou la « fourmi », le bestiaire étant déjà bien fourni, il lui fallait un poinçon pour sa trempe : alors pourquoi un chien ? Chacun y va de sa version. Serait-ce dû aux jappeurs suivant la trace des colporteurs ? Au fameux chyen fè ? Au mordant de la lame ? Chaque anecdote brille par son astuce, mais le mystère reste entier… Pour le reste, ce couteau inspirant fait parler de lui. Un groupe de musique et une bande dessinée ont emprunté son nom ! D’ailleurs, l’incontournable sauce chien, madeleine savoureuse de la gastronomie antillaise, ne peut s’imaginer sans son couteau éponyme ! Un émincé de cive, de persil, d’ail, de piment, quelques gouttes de citron, de l’huile et un bon tour de poignet, et voilà un second essentiel de la cuisine martiniquaise. Et s’il est encore si célébré, c’est que ce couteau du quotidien a su s’adapter à la demande de chaque époque : si

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le premier-né est constitué de lame en acier carbone, c’est l’inox qui le remplace dès 1920. L’on se souvient aussi de son manche en métal travaillé pour une meilleur prise en main remplacé en 1970 par le Polypropylène plus léger et facile d’entretien. Et comme plus rien n’arrête l’atelier de Thiers-Issard, récent et fervent défenseur de cette fameuse lame-chien, le couteau, pratique et bon marché, pétille désormais en rose, bleu, vert ou même violet !

À chacun son chien

Et mieux encore, une nouvelle version du couteau, luxe avec son manche en madras ou en Picana, ce bois rare d’Amérique latine pour les amateurs de belles lames au canidé. Mais attention aux imitations. Le «chien» parfois imité n’est jamais égalé. Alors, comment reconnaître le faux d’un vrai ? À la qualité de son tranchant bien entendu, mais également à son poinçon qui, raconte t’on représenterait un chien au nom de Husky entre autres… Quoi qu’il en soit, le couteau et son chien semblent avoir un avenir prometteur. Avec 50 000 pièces vendues par an dans les Antilles, on peut dire qu’il fait recette.

Couteau chien mode d’emploi

Pour une utilisation au lave-vaisselle, cycle pas trop chaud et pas de tablettes 3 en 1. Attention tout de même, entrent en ligne de compte, la qualité du produit vaisselle et la qualité de votre machine. Pour être certains de le préserver, faites comme à l'époque de nos grand-mères, nettoyez votre couteau CHIEN® à la main, et son fil se transmettra entre générations !