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Texte : Corinne Daunar Crédit Photos : JL. DELAGUARIGUE
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LE DÉBIT DE LA RÉGIE, LIEU DE COMMUNS
Iconique de la Martinique, autant rural qu’urbain, toujours populaire, le débit de la régie a construit une histoire sociale et collective unique. Le quartier, la communauté s’inscrit en plein au parvis de cette caverne aux mille trésors. Marqueur du XXe siècle, il est aussi le vivace souvenir, encore partagé, d’un monde de vie différent, d’une autre façon de faire société.
Débit de la régie Le débit de régie, c’est cet espace hors du temps, où le capharnaüm généralisé ne semble maintenu en place que part l’impassible sérénité de son tenancier. Épicerie au détail, réserve merveilleuse des denrées, matériels, outils de tous les quotidiens, il est un commun, partagé entre une myriade de destinées humaines. Véritablement apparu pendant les grandes heures de la Martinique industrieuse et sucrière, celle des usines centrales du milieu du XXe siècle, le débit se met à vivre au rythme des travaux
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de champ et des rentrées, saisonnières, de solde. L’on y consomme à l’année, et en avance, le maigre subside à toucher dans quelques mois, après la récolte éprouvante. À partir des années 1930, la crise agricole modifie le paysage de l’île et urbanise les modes d’habiter, où des milliers d’âmes quittent un espace rural sinistré pour venir gonfler les bouillonnants quartiers périphériques de Foyal. Dès les années 1950, ce sont ces petits commerces de détail qui animent ces nouvelles agglomérations humaines. Sur ces mornes et dans ces creux, l’on en compte alors près de 550 débits disséminés.