Extrait

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– C’est ce qu’on fait, mais on a besoin de ces écriteaux. Attends que j’aie terminé. – On pourrait peut-être jouer sans ces machins… – C’est impossible, Dirk. Il faut faire les choses dans les règles! Les panneaux devaient être aussi détaillés que possible car, dans mon monde, tout devait être parfait: le paysage, les écriteaux, les bruitages. Je savais exactement quel bruit faisait un car quand il avait du mal à démarrer ou quand il patinait dans la boue. J’étais imbattable pour les imitations. Je ne comprenais pas que les autres enfants fassent toujours les mêmes bruits en jouant. Lorsqu’ils «tiraient» avec un revolver ou une mitraillette, le son ne variait pas. «Ta-tata-ta!» couinaient-ils, comme si cela suffisait pour épater la galerie. C’était d’un navrant! Une mitraillette émettait pourtant un bruit bien caractéristique, surtout si, comme moi, on y avait adapté un silencieux spécial. «Pschtsch… pschtsch… pschtsch…» voilà ce qu’on entendait! Moi, on ne me racontait pas d’histoires. Quand je conduisais un car à travers les lacets d’une montagne, livrais une bataille sanglante contre des extraterrestres ou délivrais Dirk des griffes d’un dragon géant, mon monde était imagé et varié. La vie en RDA était grise, mais mon univers à moi était en couleur parce que je me l’imaginais ainsi. J’aspirais à la couleur. Je voulais une vie variée et originale, pas la vie de Monsieur Tout le monde. A 10 ans, déjà, j’en étais convaincu. Et plus je grandissais, plus mon sens pour l’originalité se renforçait. Je me sentais attiré par tous ceux qui, d’une manière ou d’une autre, sortaient des sentiers battus. A l’âge de 13 ans, j’ai fait la connaissance d’un groupe de punks qui traînaient sur l’Alexanderplatz. Leur look me fascinait. Des cheveux colorés, voilà exactement ce qu’il me fallait. Sans hésiter, je me suis fait une coloration en vert. Et

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