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Rétrospective 2021

Une année de bonnes nouvelles

Si le cru 2021 a été marqué du sceau du Covid, il n’en a pas moins réservé quelques heureuses surprises. Afin de voir les choses sous un angle positif, voici quelques faits marquants de ces douze derniers mois.

Textes: Patricia Brambilla, Catherine Hurschler, Laurent Nicolet, Pierre Wuthrich Illustrations: Berto Martinez Morales

Janvier

Voilà au moins un début d’année que l’on n’aura pas passé à geindre contre la disparition des neiges d’antan. De la poudre en abondance nous est servie, y compris à basse altitude, jusqu’à 30 cm dans la plaine du Rhône, entre 2 et 10 cm partout ailleurs, et jusqu’à 1 m 70 de neige fraîche sur les hauteurs. Il n’était plus tombé autant de flocons depuis mars 2006. Mention particulière à Coire où un total de 82 cm d’or blanc a été mesuré en trois jours, soit le plus élevé depuis le début des mesures en 1888. Ce mois de janvier en outre aura été le plus froid de ces trente-cinq dernières années. Bref, l’hiver comme on l’aime. Sans oublier qu’un épisode météorologique ne fait pas une tendance climatique. Mais sans bouder son plaisir non plus.

Le premier Dry January organisé en Suisse connaît un certain succès avec 15% de la population qui aurait participé à cet engagement d’une pause dans la consommation d’alcool.

La sortie du guide Michelin Suisse 2021 permet de constater «un nombre de restaurants Deux Étoiles jamais atteint dans le pays avec 24 établissements accédant à cette distinction».

Février

Le 7 février, un pays plus ou moins en liesse célèbre les cinquante ans du suffrage féminin.

Jours de gloire, au pluriel, pour

Lara Gut-Behrami aux championnats du monde de ski, à Cortina d’Ampezzo. Le 11 février, elle remporte la médaille d’or en super-G et remet ça, une semaine plus tard, en gagnant le slalom géant. Et complète son impressionnant tableau de chasse avec une médaille de bronze en descente. Ce n’est pas la première fois, certes, que la blonde tessinoise ramène une breloque ou l’autre lors d’un championnat du monde. Elle avait en effet déjà collectionné depuis 2009 des médailles de bronze et d’argent. Mais c’est bien la première fois que l’alchimie de son ski débouche sur le précieux métal. Elle livrera d’ailleurs le secret très simple de cette réussite: «Pour la première fois dans ma carrière, j’avais réalisé que gagner de l’or ne changerait pas ma vie.»

Mars

Chaque année, on avait pris l’habitude de voir un média disparaître, ou deux médias n’en former plus qu’un seul. Renversement de la vapeur cette fois, avec le lancement en Suisse romande de Watson, un portail d’information numérique et gratuit venu de Suisse alémanique. Une vingtaine de journalistes sont engagés, la rédaction est installée à Lausanne. Avec comme mission «de s’adresser à cette génération numérique qui consomme des news sur les réseaux sociaux et qui a délaissé les médias traditionnels». Une bonne nouvelle suivie d’une autre de même acabit quelques semaines plus tard, avec l’arrivée d’un autre média numérique, venu lui aussi d’outre-Sarine: blick.ch.

Dès le 21 mars, les CFF mettent à disposition davantage de places pour les vélos dans les trains, en triplant les capacités sur «les lignes importantes pour le trafic de loisirs».

Face à la chute des nuitées hôtelières provoquée par la crise sanitaire, Suisse Tourisme sort l’artillerie lourde en signant un partenariat avec Roger Federer, promu ambassadeur mondial de nos monts et merveilles.

Avril

Après six mois de confinement et de vie recluse, le 19 avril a vu la réouverture des terrasses, cinémas, théâtres et stades de football. Malgré une situation encore critique, le Conseil fédéral lâchait du lest sous la pression de certains milieux économiques. Bien sûr, les réouvertures étaient soumises à condition, mais on pouvait enfin retrouver un semblant de normalité et un embryon de vie sociale: boire son café du matin au bistrot du coin en grelottant – la météo de ce mois a connu un épisode de froid remarquable –, lorgner sur un spectacle reporté plusieurs fois et même courir voir Taxi 5… Après une telle abstinence, tout était bon pour retrouver les salles obscures!

Contre toute attente et malgré la sinistrose ambiante, le chômage a légèrement reculé. Il a diminué de 1,4% (chiffre du SECO) par rapport au mois correspondant de l’année précédente.

Qui l’a vue? Dans la nuit du 26 au 27 avril, à 3 h 31, s’est levée la première super Lune rose de l’année. Une pleine lune, en fait, qui paraît plus grande et plus brillante, parce qu’au plus près de la Terre.

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Mai

La Suisse se hisse enfin sur le podium de l’Eurovision à Rotterdam (Pays-Bas) devant 250 millions de téléspectateurs et un JeanMarc Richard tout ému. Un événement! Il faut dire que, depuis 1988 et l’interprétation de Céline Dion de Ne partez pas sans moi, qui avait raflé la première place, la Suisse n’était plus allée très loin dans le concours. On peut même parler de longues années de disette musicale… Qui se souvient des prestations de Dj Bobo, Gunvor ou de Vanilla Ninja à l’Eurovision? Mais cette fois, la voix lyrique et l’interprétation sensible de Gjon’s Tears ont su embarquer le public. Avec Tout l’univers, une chanson qu’il a coécrite, le Fribourgeois de 22 ans a terminé troisième, derrière la France et l’Italie, et a même remporté le vote du jury professionnel. Une belle performance pour le chanteur qui a l’air bien parti pour les étoiles: il vient également d’être sacré meilleur artiste suisse de l’année aux MTV european music awards.

Publicité + + + Au sommet d’une carrière musicale polyglotte, Stephan Eicher a reçu le Grand Prix suisse de musique de l’Office fédéral de la culture. Pourra-t-il continuer à déjeuner en paix?

+ + + Le 21 mai, la Grève

pour l’Avenir a rassemblé près de 30000 participants dans toute la Suisse. Un bilan honorable au vu de la météo plutôt mouillée.

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Juillet

Il pleut, il roille, il flotte, et

la Suisse est sous l’eau. Mais à quelque chose malheur est bon. Car il n’y a pas que le niveau des rivières et des lacs qui soit remonté en juillet. Celui des nappes phréatiques l’est aussi. Et ça, c’est plutôt de bon augure pour lutter contre les futures sécheresses.

Montreux Jazz, Festival de la Cité, NIFFF: les grandes manifestations slaloment entre deux vagues de Covid-19.

Après quinze ans de travaux de restauration, l’abbatiale de Payerne, la plus grande église romane du pays, rouvre ses portes.

Août

La Suisse a particulièrement brillé lors des Jeux olympiques de Tokyo, qui se sont terminés le 8 août 2021. Notre pays a en effet récolté treize médailles, ce qui n’était plus arrivé, pour une olympiade d’été, depuis Helsinki en 1952. On se souviendra avec fierté de l’incroyable triplé de Jolanda Neff, Sina Frei et Linda Indergand en cross-country – un exploit historique –, de la médaille d’or de Belinda Bencic qui a remporté le tournoi de tennis en simple. Et bien sûr des performances des nageurs suisses, dont celle de Jérémy Desplanches (en bronze dans le 200 m quatre nages) et de Noè Ponti (en bronze en 100 m papillon). Comme quoi, on peut briller dans d’autres disciplines que le tir à l’arbalète ou la lutte à la culotte.

Le 1er août, six cent cinquante femmes prennent possession du Grütli pour célébrer le 50e anniversaire du suffrage féminin en Suisse. Les hôtels (re)font le plein. En août, les nuitées sont en hausse de 27% par rapport à août 2020, et les visiteurs de l’étranger sont de retour (+56%).

Septembre

Oui nous le voulons. Le 26 septembre, les Suisses ont voté en faveur du mariage pour tous. Et le résultat est sans appel puisque le projet a été approuvé par plus de 64% des votants ainsi que l’ensemble des cantons. Cette belle preuve de tolérance permet aussi à la Suisse de rattraper son retard en termes de politique sociétale et familiale. Exactement vingt ans plus tôt, en 2001, les Pays-Bas étaient le premier pays du monde à autoriser le mariage homosexuel. Depuis, presque tous les autres États d’Europe occidentale (France, Espagne, Portugal, Royaume-Uni, etc.) ainsi que de nombreuses nations à travers le monde (États-Unis, Argentine, Afrique du Sud, etc.) avaient franchi le pas, sauf notre douce Helvétie. Mais le fait que la décision soit portée par le peuple luimême donne à cette victoire un goût tout particulier et une légitimité renforcée.

Juin

Une seule date à retenir: le 28 juin. C’est le jour historique de la victoire de la Suisse contre la France, en huitième de finale à l’Euro. David et Goliath. Rembobinons le fil: après un match de foot tendu, scénarisé comme une tragédie grecque, la Nati parvient à égaliser et à revenir au score, 3-3 à la fin du temps imparti. Les prolongations n’y changeront rien. C’est aux tirs au but que l’impensable arrive. Alors que les cinq frappeurs suisses ne laissent aucune chance au gardien Hugo Lloris, le dernier tireur français s’avance sur la pelouse. L’attaquant du PSG Kylian Mbappé affûte son shoot, lève déjà un bras en signe de victoire, mais c’était compter sans l’incroyable détente du gardien helvétique. À 23 heures et des poussières, Yann Sommer entrait dans la gloire. Et tout un peuple avec lui.

Sans atteindre l’immense vague violette de 2019, la Grève des femmes du 14 juin a quand même eu lieu. Le poing levé contre les inégalités salariales.

Les amateurs de cyclisme ont pu savourer la 84e édition du Tour de Suisse, qui avait été annulé l’année précédente à cause d’un peloton de virus...

Après plus de deux ans d’absence, Art Basel ouvre exceptionnellement ses portes en septembre, et Bâle de redevenir la capitale mondiale de l’art moderne et contemporain durant une petite semaine.

Au troisième trimestre 2021, l’économie suisse bombe le torse. Les exportations se sont élevées à 63,1 milliards de francs. Un record.

Octobre

C’est officiel, vous pourrez emporter votre vélo dans les trains en 2022! Pour la promotion de la mobilité douce, c’est un sacré pas en avant! D’ici à 2025, les CFF promettent de mettre à disposition plus de 400 places supplémentaires, sur les trains grandes lignes. Les premiers concernés seront les trains circulant à travers le Lötschberg en direction du Valais, dès le printemps. Voilà qui sera utile aux offices du tourisme du canton pour leurs campagnes de promotion.

+ + +

Le 4 octobre 2021, pendant sept heures, le monde s’est rappelé qu’il pouvait faire autre chose que de poster des images de chatons.

Le réseau social Facebook et ses filiales, Messenger, Instagram, Whatsapp, Mapillary et Oculus étaient hors service.

+ + + Fin octobre, la Suisse a montré qu’elle savait aller loin, au moins jusqu’à 3000

mètres d’altitude. La Rocket Team de l’EPF a remporté le championnat de construction et de lancement de fusées conçues par des étudiants.

Novembre

Au cours des dernières décennies, les effectifs de milans royaux ont fortement augmenté en Suisse, au point que les 2800 à 3500 couples nicheurs de Suisse représentent environ 10% de la population mondiale. Avec son plumage auburn, sa queue fourchue et ses taches blanches sur les ailes, le milan royal est facile à repérer.

Le robot «Bouébot » est le premier à savoir préparer une fondue moitiémoitié sans intervention humaine. Luca Poncini, un pâtissier tessinois, a remporté le 7 novembre la médaille d’or du meilleur panettone au chocolat du monde, au nez et à la barbe de ses concurrents italiens.

Le nouveau maillon de la Chaîne du Bonheur

Dès le 1er janvier, Miren Bengoa sera la première femme à diriger la célèbre organisation d’entraide suisse. Un défi que cette quadragénaire jamais à court d’idées a hâte de relever.

Texte: Catherine Hurschler Photos: Darrin Vanselow

Dans son bureau au 15e étage de la tour RTS, Miren Bengoa nous laisse jouer avec les chocolats sur la table. Elle n’y touchera pas. Directrice oui, mais pas en sucre. Miren Bengoa, 45 ans, de retour à Genève, sa ville natale, avec ses quatre enfants et ce dragon intérieur qui lui donne cette flamme pour agir sur le monde. Elle arrive de Paris, après une décennie à diriger la Fondation Chanel, passe très vite sur le fait qu’elle est la première femme nommée tout en haut de l’organigramme de la Chaîne du Bonheur et prononce le mot «équipe» dans une phrase sur quatre.

Directrice oui, mais pas en solo. Et surtout pas au début de la chaîne. «Là, c’est la place du donateur, qui agit quand il prend conscience des réalités des personnes en détresse qu’elles soient ici ou au bout du monde. Et la Chaîne du Bonheur a trouvé le moyen de passer de l’intention à l’action avec les promesses de dons téléphoniques. Avec les équipes,

«On doit rester conscient de ce qui nous rassemble plutôt que de ce qui nous divise»

nous sommes au milieu de ce mouvement.»

Passer la barrière du numérique Venons-en au chapitre des téléphonistes, avec leur poste fixe, concentrés derrière Jean-Marc Richard, lors des actions de grande envergure, la plus récente étant celle du 17 décembre 2021 qui a permis de collecter plus de 4 millions de francs pour l’enfance en souffrance en Suisse et dans le monde.

Devinant notre question sur cette mise en scène d’un autre âge, Miren Bengoa sait que c’est dans le numérique, notamment en développant le versement de dons via des applications sur smartphone, que l’institution touchera un public plus jeune. «Nos collectes téléphoniques ont une vraie valeur historique, mais oui, nous sommes au XXIe siècle et l’on va s’appuyer sur tous les moyens d’incitation au don qui existent. C’est peutêtre ambitieux de ma part, mais j’aimerais bien faire évoluer cela: être capable de mieux segmenter notre audience, car nous gérons des sujets très variés, tout en gardant un devoir de patrimoine. Nous restons attachés à la télévision publique, à cette défense des langues nationales. Je suis d’ailleurs en cursus d’allemand accéléré pour retrouver mon aisance d’antan.»

En France, Miren Bengoa travaillait dans le luxe, qu’elle voyait comme une possibilité d’empowerment pour les femmes. À Genève, sa mission s’annonce plus globale. «Les jeunes ont besoin qu’on leur explique le but ultime de ce que l’on fait. Et c’est sur les résultats que nous allons axer notre communication à l’avenir, montrer des preuves de nos actions, car on est dans l’ère de l’hyper-information et de la désinformation, malheureusement aussi.»

Une enfance multiculturelle Avant son passage chez Chanel, Miren Bengoa a travaillé pour la fondation Terre des Hommes en tant que responsable des formations d’apprentissage en Égypte, au Brésil et au Burkina Faso, puis au Fonds des Nations Unies pour la population. C’est que Miren Bengoa a toujours cherché des emplois qui lui permettent de donner du sens à ses engagements, peu importe où cela l’emmène dans le monde. Cela explique aussi pourquoi elle a lâché un début de carrière dans le journalisme pour filer chez Médecins sans frontières, à la faveur d’un stage aux Philippines. «Et là, j’ai été embarquée. La relation directe avec des personnes dans la plus grande détresse m’a donné l’envie d’agir en cohérence avec mes convictions.» Pourquoi? «J’ai une maman grecque d’Égypte, un père basque du Venezuela, je suis l’aînée d’une fratrie de six enfants, j’ai grandi en Suisse, j’ai vécu dans de nombreux pays, dont les États-Unis et en Afrique de l’Ouest. À 16 ans, je prenais l’avion pour passer Noël à Caracas chez mes grands-parents. L’exposition à ces cultures m’a rendue très curieuse, constamment à la recherche de nouveautés. Et même en étant toujours un peu l’étrangère, j’ai toujours trouvé le moyen de me sentir acceptée et suffisamment imprégnée de la culture locale pour la comprendre, d’où un effet caméléon parfois difficile à gérer. Ici on me dit que je suis trop parisienne, il va falloir que je me déshabille de tous ces codes imposés, tant ceux de l’entreprise que celui des institutions internationales.»

Miren Bengoa le sait, sa tâche s’annonce immense. «On n’est pas dans la désuétude, le monde nous interpelle tout le temps, il y a de la précarité en Suisse comme il y en a partout en Europe et nous devons rester très engagés pour réduire les inégalités, notamment en Afrique. On doit rester conscient de ce qui nous rassemble plutôt que de ce qui nous divise. Et c’est exactement le rôle de la Chaîne du Bonheur, en collectant de l’argent pour des causes lointaines et proches. Rappelez-vous en 2020, les 43,5 millions récoltés en Suisse quand le Covid a commencé à frapper. On est porteurs d’espoir.» Gabrielle Chanel, qui repose à Lausanne, avait pour devise «J’ai choisi ce que je voulais être et je le suis.» Miren Bengoa lui ressemble sur ce point. MM

Quelques questions à Miren Bengoa

Votre idée du bonheur: C’est apprécier ce que l’on a déjà.

Votre idée du malheur: C’est quand on est coupé de soi-même et des autres.

Qui auriez vous aimé être? Un médecin populaire. Je suis en train de lire L’Abyssin, de JeanChristophe Rufin, que j’ai eu la chance de rencontrer. Un de mes désirs de jeunesse était de faire médecine, mais pour ne pas suivre une voie paternelle toute tracée, j’ai pris le virage de la santé publique et de l’action sociale.

Que se passe-t-il quand on vous dit non? Je travaille sur l’apaisement, en acceptant qu’il ne faut pas aller vite pour réussir.

Votre son préféré? Le chant des oiseaux que j’ai retrouvé en Suisse et que je n’avais pas à Paris.

Votre mot préféré? Entraide.

Le don de la nature que vous aimeriez avoir? De sentir l’énergie, cette notion d’énergie vitale qui vient de la nature me demande un effort, car je suis trop dans la précipitation, mais j’aimerais la ressentir.

Vous cachez-vous pour pleurer? Non, je pleure très ouvertement.

La dernière chose que vous faites avant de dormir? Embrasser mes enfants. La tendresse, c’est très important.

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