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20 | MM43, 24.10.2016 | SOCIÉTÉ

Portrait

Chasseur de livres anciens

Bernard Huber, 64 ans, possède une fabuleuse collection de livres

anciens pour enfants. Et ne cesse de l’enrichir en arpentant marchés aux puces et librairies du monde entier. Texte: Véronique Kipfer

Photos: Jeremy Bierer

A

notre arrivée chez Bernard Huber, à Pallueyres (VD), une pile disparate de livres nous attend déjà sur la table du salon. «Asseyez-vous, nous n’avons pas beaucoup de temps et j’ai tant à vous raconter!», s’exclame d’un air ravi le docteur ès sciences économiques et sociales, maintenant à la retraite. Deux heures, c’est en effet bien peu au vu de la très riche collection de livres que ce passionné s’apprête à nous présenter. Unique en son genre, celle-ci se compose d’ouvrages pour enfants du XVIIe au XXe siècle et d’environ 500 titres de référence traitant de la même thématique. «Je ne sais pas si je dois parler d’atavisme familial, car mon père aimait déjà les livres anciens, remarque Bernard Huber. Mais c’est à 11 ans que j’ai eu une vraie révélation, en découvrant la bibliothèque de l’abbaye de SaintGall. La passion du beau livre m’a ensuite à nouveau saisi à 34 ans, lorsque j’ai commencé ma thèse de doctorat en histoire de la pédagogie.» Là, au milieu des archives et des «vieux papiers poussiéreux», le bibliophile enthousiaste passe alors les plus belles années de sa vie. «Seul, dans les bibliothèques, j’ai atteint l’extase...» Harponné cette fois-ci définitivement, il se transforme dès lors en chasseur d’ouvrages insatiable. Ses lieux de quête favoris? Les marchés aux puces et leurs cartons à bananes potentiellement remplis de trésors, mais aussi les librairies du monde entier. «Je collectionne principalement les livres de géographie et de voyage pour la jeunesse, mais je fais parfois

des exceptions lorsqu’il s’agit d’un livre rare et en très bon état, traitant d’un sujet extrêmement intéressant. Comme ce livre de lecture en gaélique d’Ecosse de 1912.» Mystérieux abécédaire

Il y a dix ans, un événement bouleverse sa vie de collectionneur: «Je me trouvais dans une librairie d’Innsbruck (A), lorsque je suis tombé sur un singulier abécédaire. Il était écrit dans une langue que je ne connaissais pas, le ladin des Dolomites.» Le libraire lui explique alors que cette version de l’ouvrage est en dialecte du val Gardena et qu’une autre version de la même œuvre existe dans un autre idiome de la région, celui du val Badia voisin. Quelques mois plus tard, Bernard Huber le tient aussi entre les mains. «Je l’ai reçu d’un inspecteur scolaire de cette vallée, qui était étonné, voire flatté, que je m’intéresse à sa culture et sa langue, explique-t-il. «Je n’aime pas internet. Je n’ai ni téléphone mobile ni voiture. Pour moi, tout passe par le contact humain et le bouche à oreille. Ce n’est pas par internet qu’on déniche un livre rare, c’est parce qu’on remue ciel et terre et qu’on tisse des relations. Ainsi, on prouve qu’on mérite ce livre.» Trésors à foison

Grâce à ces contacts privilégiés – «Je suis aussi un peu culotté, et quand j’ai une idée derrière la tête, je ne la lâche plus» –, le collectionneur s’est ainsi créé peu à peu un précieux réseau et ce fonds d’ouvrages hors du commun. Entre autres de nombreux abécédaires en langue romanche, sa der-


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