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Vente d’alcool
Pour Philipp Hadorn, président de la Croix-Bleue, il ne faut pas sous-estimer les effets de l’abus d’alcool sur la société. Selon lui, Migros est un bastion de la lutte contre l’alcoolisme et devrait le rester.
Texte: Benita Vogel, Kian Ramezani Photo: Nik Hunger Philipp Hadorn, buvez-vous vous-même de l’alcool? Non, jamais. Durant mon enfance, on ne buvait déjà pas d’alcool à la maison; mon père avait des réticences par rapport à cela. Si cela ne m’a pas vraiment convaincu, je n’ai jamais vraiment été attiré par l’alcool non plus. Quand j’étais adolescent, cela m’énervait de ressentir une pression pour boire avec les autres. Je ne voulais pas me laisser dicter ma conduite.
Pour des raisons religieuses aussi? Vous portez un pin’s poisson au revers de votre veste. La foi est pour moi une ressource, mais elle n’a rien à voir avec le débat sur l’alcool. Elle marque uniquement mon approche des personnes en détresse. En réalité, je ne vois pas la valeur ajoutée de l’alcool. Si l’eau était à nouveau transformée en vin, j’en prendrais peut-être une gorgée (rires). La majorité de la population consomme de l’alcool de manière responsable en tant que produit d’agrément. Pourquoi ne pourrait-elle pas en acheter à Migros? Nous avons de nombreux membres à la Croix-Bleue qui
Syndicaliste et homme politique
Philipp Hadorn, 55 ans, est depuis neuf ans président de la Croix-Bleue, organisme actif dans la prévention, le conseil et le suivi en matière d’alcoolisme, avec 270 spécialistes salariés et plus de 1000 bénévoles. Il a effectué un apprentissage d’employé de commerce dans l’industrie horlogère, a étudié le droit, a été conseiller national PS jusqu’en 2019 et est secrétaire central du Syndicat du personnel des transports SEV. Philipp Hadorn est marié, père de trois fils et vit à Gerlafingen (SO).
apprécient beaucoup cette particularité de Migros. Bien sûr, la majorité des personnes maîtrisent leur consommation, mais il n’en reste pas moins que la Suisse compte plus de 250000 personnes dépendantes de l’alcool et beaucoup d’autres susceptibles de le devenir. Celles-ci compte sur cet îlot sans alcool qu’est Migros. Dans quelle mesure? Je connais beaucoup de personnes qui ont suivi des thérapies à cause de leur dépendance. Ce sont des histoires longues et souvent tristes. Les personnes concernées ont payé un lourd tribut en perdant leur famille, leurs amis et leur emploi. La plupart d’entre elles doivent renoncer complètement à l’alcool, car elles risquent de rechuter. Ce sont des situations délicates. Or, la tentation d’acheter de l’alcool si l’occasion se présente est très forte et l’autodétermination limitée dans les moments de pulsion. Dans les situations de stress, elles se tournent vers l’alcool lorsque celui-ci se trouve en rayon, à la portée de tous. Et Migros ne compte pas seulement 630 supermarchés: ses 235 restaurants et take-away sont également une «zone protégée» importante pour les personnes dépendantes et à risque. La consommation d’alcool par habitant est en baisse depuis des années. Quelles seraient les conséquences si Migros vendait de l’alcool? Si Migros se mettait à vendre de l’alcool, l’offre serait plus visible et il y aurait plus de publicité. Je ne pense pas que la consommation augmenterait vraiment, mais la tendance à la baisse pourrait s’aplanir ou ralentir. Malgré ce recul, l’alcoolisme reste un problème important qui cause chaque année des dommages économiques à hauteur de 2,8 milliards de francs. Cette votation permettra peut-être de relancer le débat sur l’alcool et de prendre conscience de ce que cette dépendance représente pour la société.
Qu’en est-il des produits comme le chocolat, les chips ou les boissons sucrées? L’obésité entraîne des coûts économiques encore plus élevés. Il ne s’agit pas d’interventions réglementaires, nous ne vivons pas dans une culture de l’interdiction. Ici on parle d’une entreprise qui choisit de se passer de quelque chose et qui doit renoncer à cette valeur ajoutée. Nous ne voulons pas tout interdire ni être des rabat-joie.
C’est simplement la particularité de Migros de ne pas vendre d’alcool que nous voulons préserver. De plus, en tant que société, nous avons évolué en ce qui concerne les produits comme le sucre, nous sommes plus sensibles aux effets de leur surconsommation.
Cette sensibilisation a également eu lieu en ce qui concerne la consommation d’alcool. C’est vrai, j’ai trois fils adultes et il ne viendrait à l’idée d’aucun d’eux de prendre le volant après avoir bu de l’alcool. Il y a eu un changement de culture, la sensibilisation et la prévention ont fonctionné. Pourtant, un nombre remarquablement élevé de personnes n’ont toujours pas une approche saine de l’alcool. Parmi les personnes âgées de 15 à 74 ans, un décès sur douze est dû à la dépendance à l’alcool. Cette addiction est un fardeau énorme, non seulement pour les personnes directement concernées, mais aussi pour leur entourage privé et professionnel. Nous avons tous, parmi nos proches ou nos connaissances, des personnes qui ont un problème d’alcool. Pensez-vous vraiment que l’on puisse faire de la prévention par le biais du commerce de détail? Migros ne peut pas à elle seule éliminer l’alcoolisme, mais elle y contribue de manière significative. Il serait dommage de perdre cette contribution. Je le dis aussi en tant qu’«enfant Migros». La prévention peut viser le comportement de l’individu ou de la société. Les interdictions individuelles peuvent aggraver la situation, comme l’a montré la prohibition aux États-Unis. Mais moins de publicité, des prix plus élevés et une disponibilité qui a ses limites ramènent la consommation à des proportions raisonnables et évitent ainsi bien des souffrances. En parallèle, nous Votez vous aussi!
Vous souhaitez participer à la votation générale sur l’interdiction de l’alcool, mais vous n’êtes pas encore coopérateur Migros? Inscrivez-vous d’ici au 10 mai sur migros.ch/affiliation.
Toutes les infos sur le déroulement et tous les arguments pour et contre sont sur migros.ch/votation.
Contexte, interviews, actualités: www.migmag.ch/ alcool
pouvons renforcer la personnalité des gens. Il ne s’agit pas d’empêcher ou d’écarter tout danger par principe. Les jeunes, en particulier, doivent être encouragés à mener une vie autodéterminée, afin qu’ils sachent ce qu’ils veulent. De votre point de vue, à quoi Migros devrait-elle faire attention si elle vendait de l’alcool? Au positionnement. S’agit-il de proposer des produits spéciaux et régionaux ou simplement de faire du chiffre? L’emplacement dans le magasin jouerait également un rôle important. Mais nous n’en sommes pas encore là. Les membres de la coopérative peuvent en décider maintenant. Moi aussi, je voterai. MM
Rire est bon pour la santé Ce n’est pas une blague! Il est prouvé que l’humour a une influence positive sur notre bien-être et permet de rester jeune. Le psychologue Daniel Sigrist nous explique le pourquoi du comment.
Texte: Silvia Schütz
Combien de fois rions-nous par jour? Les études révèlent que les adultes rient en moyenne quinze à vingt fois par jour, contre quatre cents fois pour les enfants.
Pourquoi rionsnous si peu? Dans la vie de tous les jours, nous sommes soumis à de nombreuses responsabilités et avons constamment l’esprit occupé par quantité de choses à accomplir. Nous sommes sans cesse soumis à la pression de la performance et au stress, et nous oublions de rire.
Comment pouvons-nous rire davantage? L’idéal serait de faire plus de pauses dans notre quotidien et de voir le monde à travers les yeux des enfants. Peut-être devrions-nous passer plus de temps avec les enfants et nous laisser contaminer par leurs rires.
Pourquoi le rire est-il bon pour la santé? Le rire améliore la fonction pulmonaire, fournit plus d’oxygène au cerveau et offre un massage à nos organes. Nos défenses immunitaires se renforcent grâce à la réduction des hormones du stress comme l’adrénaline et le cortisol et, en même temps, à la libération des hormones du bonheur – endorphines et sérotonine. La musculature se détend et la tension artérielle baisse. Et enfin, les hormones du bonheur nous permettent de rester jeunes. Eliud Kipchoge, le détenteur actuel du record du monde de marathon, en est le meilleur exemple. Quand il participe à une compétition, on peut voir un sourire affiché en permanence sur son visage. Eliud Kipchoge raconte qu’il sourit délibérément, car cela le détend et apaise sa perception de la douleur. Des études le montrent: rire améliore l’économie de course de presque 2% car, dans cet état légèrement plus détendu, le corps a besoin de moins d’oxygène.
Le rire aide-t-il le corps à guérir? Comme le rire réduit le niveau de stress, il renforce nos défenses immunitaires et active le parasympathique dans le système nerveux végétatif. Dans cette phase de détente, notre corps peut se régénérer plus rapidement et activer ses forces d’autoguérison. La régénération permet d’améliorer les performances sportives.
Quel type de rire est positif? En principe, je considère comme
15 fois
Selon des études, les adultes rient en moyenne 15 à 20 fois par jour, contre 400 fois pour les enfants.
positives toutes les formes de rire qui ne nuisent à personne. L’autodérision peut également nous aider à gérer plus facilement une situation difficile et à ne pas nous prendre trop au sérieux. Même le sarcasme n’est selon moi pas «négatif» en soi. Il peut même faire rire lors d’une conversation entre amis. En revanche, lorsque le sarcasme est utilisé comme une moquerie, il sert à dévaloriser une autre personne et lui porte préjudice. Se moquer n’est évidemment pas non plus agréable, c’est pourquoi le principe est simple: le rire est positif s’il me fait du bien, mais aussi s’il fait du bien aux autres.
Qu’est-ce que l’humour?
L’humour, c’est de rire envers et malgré tout. L’humour est la capacité de réagir de manière sereine aux défis quotidiens. Dans le langage courant, nous qualifions d’humoristes les personnes qui nous font rire. L’humour s’apprend et peut donc être entraîné, comme le soulignent certaines études. En prenant conscience de l’influence positive de l’humour sur notre bienêtre, nous pouvons apprendre à être plus attentifs aux aspects comiques du quotidien.
Les personnes qui ont de l’humour ont-elles plus de succès que les autres?
Il y a de fortes chances que l’humour nous rende plus performants. Nous nous entourons volontiers de personnes qui ont de l’humour, elles nous sont sympathiques et nous nous sentons bien avec elles. L’humour détend l’atmosphère dans les situations difficiles et nous permet de mieux gérer le stress. Lorsque les supérieurs communiquent avec humour, cela augmente la motivation de toute l’équipe. L’humour au sein de l’équipe est important, car nous passons une grande partie de notre vie d’adulte au travail.
Selon vous, l’hypothèse de la rétroaction faciale fonctionne-t-elle?
Selon cette hypothèse, en relevant les coins de la bouche, on signale à son corps «je suis heureux». Je pense que cela fonctionne. Lorsque nous relevons les coins de la bouche, les mêmes zones sont actives dans le cerveau que lors d’un «vrai» rire. Nous signalons ainsi à notre cerveau que nous sommes heureux. Rit-on mieux en compagnie que seul? C’est de mon film préféré, Into the Wild, que vient la citation «Happiness is only real when shared» («La joie n’est réelle que lorsqu’elle est partagée»). Nous pouvons bien sûr rire et nous sentir heureux seuls. Cependant, le bonheur partagé est probablement multiplié et «plus réel». Nous, humains, sommes des êtres sociaux, c’est ce qui a été notre avantage décisif dans l’évolution. MM
Daniel Sigrist, psychologue FSP
Qu’est-ce qui nous rend heureux? En savoir plus sur
La discipline règne partout au Centre national du basketball suisse. Il s’est donné pour mission de former l’élite de demain dans ce sport souvent associé à des légendes, comme Michael Jordan. Depuis la Suisse, le succès sur les parquets de NBA de Clint Capela a valeur d’exemple, tout comme la carrière de Thabo Sefolosha, retraité depuis le printemps 2021. Mais avant d’en arriver là, place au travail et les jeunes sélectionnés pour cette première volée s’y consacrent à chaque instant, dès leur réveil à 6 heures du matin jusqu’au coucher à 22 heures. Depuis la rentrée de septembre 2021, ils vivent et étudient à l’École nouvelle de la Suisse romande, avec deux entraînements de basket par jour, les devoirs à rendre et, le week-end, ils jouent en Ligue nationale B face à des équipes plus expérimentées qu’eux. Ce rythme intense les éloigne pour la plupart
Pas de repos pour les braves: la semaine, les jeunes étudient et s’entraînent, et le week-end, ils jouent en Ligue nationale B.
«Je suis l’un des plus jeunes et je suis timide. Grâce au basket, je me suis ouvert aux gens»
Maxime Mambo, joueur au CNBS de leurs familles, de leurs amis, un sacrifice qu’ils savent essentiel pour arriver le plus haut possible dans leur parcours sportif.
En classe, ce n’est pas l’endroit pour se reposer, car là aussi l’exigence est présente: si leurs résultats ne sont pas suffisants, ils savent qu’ils peuvent perdre leur place au CNBS. Stressant? Disons que ces jeunes sportifs sont parfaitement au clair avec la règle du jeu et qu’ils se sont adaptés. Le classement de leur saison, face à plus forts qu’eux, affiche un 9e rang sur 11 équipes en lice. Il y a eu des défaites, quelques victoires, mais, plus important, ces jeunes joueurs ont pu découvrir les exigences de ce sport s’ils veulent aller plus haut. Ce Centre national du basketball suisse a été mis en place par Swissbasketball, la fédération suisse qui regroupe tous les clubs et licenciés du pays. Son président, Giancarlo Sergi, est convaincu qu’une telle structure est nécessaire pour la relève. Les moyens engagés sont considérables, puisque la fédération suisse, aidée par des sponsors, a placé plus d’un million de francs sur cette première volée, qui bénéficie d’un encadrement spécifique: deux coachs, une équipe médicale, sans oublier le soutien scolaire après les entraînements dans leur internat.
Le développement individuel dans un projet collectif Le CNBS vient également de prendre ses quartiers dans les halles de Beaulieu, après avoir été accueilli pour les entraînements de l’après-midi au Centre mondial du tir à l’arc, sur les hauts de Lausanne. Pour Giancarlo Sergi, cela signifie surtout que le CNBS a un avenir, et qu’en fonction des moyens de la fédération, il s’agira d’ouvrir de nouvelles volées pour les jeunes joueuses, sur un modèle identique à celui des garçons.
À l’entraînement, cette première volée montre en tout cas une sacrée persévérance, sans jamais se rebeller contre les décisions du coach et faisant front commun lors des pénalités acquises durant le jeu. Sur quel plan ont-ils progressé? Pour Tristan Frossard, c’est clair: «L’intelligence du jeu», nous confie ce joueur de 18 ans. «J’ai aussi appris que mon corps pouvait supporter une charge de travail et de fatigue importante.» Pour Andrin Njock, 16 ans, c’est la notion de patience qu’il retient: «Les progrès n’arrivent pas d’un coup, je dois me montrer patient
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«L’entraînement du soir est un moment fort de la journée»
Raphaël Stark, joueur au CNBS avec moi-même.» Et pour Nilan Rungasamy, 17 ans, le CNBS lui a permis de développer sa vitesse sur le terrain. Tous partagent l’ambition de faire une belle carrière sur les parquets, en Europe ou plus loin. Mais est-ce que le niveau du basket suisse leur ouvrira de tels horizons? Leur coach Damien Leyrolles répond d’emblée que dans notre pays les sports majeurs restent le football et le hockey sur glace et que bien sûr ces jeunes, à la sortie du CNBS, devront poursuivre leur apprentissage dans d’autres clubs. «Attention, il ne faut pas oublier que le CNBS est un projet individuel au travers d’un projet collectif. La force de ce groupe est d’avoir développé rapidement une cohésion commune, sa faiblesse, c’est peut-être un manque de volume physique. En match, cela leur vaut de jouer contre des équipes plus âgées et plus expérimentées, mais en contrepartie, je vois qu’ils ne lâchent rien et qu’ils ne se découragent jamais.» Sur le parquet ou à l’école, cette première volée reste concentrée, presque exemplaire. Est-ce toujours le cas? Le joueur Nikola Damjanovic, 18 ans, nous donne une réponse digne d’un lancer franc: «Oui, car j’aime travailler dur.» MM
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