Migros Magazin 11 2009 f GE

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aux fourneaux

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Des recettes à réaliser chez soi > CORINNE DESARZENS A

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A - Ces ingrédients formeront bientôt un magnifique aspic. B - Disposer les œufs et les asperges dans le moule. C - Ajouter la viande détaillée en dés. D - Chauffer la gelée et le vin blanc dans une casserole.

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ette histoire commence au Texas. Précisément chez un couple d’amis de la romancière Corinne Desarzens: «Elle linguiste, lui historien des religions. Ils occupent chacun un étage. Dedans, il y a des impacts de balles sur les murs parce qu’ils louent leur maison à des flics quand ils ne sont pas là.» Ce sont eux qui lui ont offert, pour Noël 2003, un recueil de nouvelles de 39 auteurs texans, toutes consacrées à la nourriture. Du steak à la bière à une potion de longue vie contre la grippe asiati-

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que, en passant par le poulet au khalva et la tourte de Linz.

son choix.» Daniel de Roulet en racontant comment il achète son vin en vrac «risque ainsi de passer pour un peu pingre». Gilbert Pingeon, lui, garde ses journaux pour emballer les saucissons de la prochaine «torrée». Que dire alors de Jean Buhler et sa recette du «python sur paperbark»? Le serpent, écrasé par une voiture, sera tronçonné et préparé sur place, en plein air: «Bien plus qu’une recette. Il y a l’amorce de la bête, c’est quelque chose de physique, de très concret.» Quant à Jérôme Estèbe, le critique gastrono-

Une galerie de portraits L’idée de faire de même avec des auteurs romands titille bientôt Corinne Desarzens. Voici donc Récits sur assiette. Où l’on retrouvera, entre autres, des gâte-sauces comme Julien Burri, Daniel Maggetti, Elisabeth Horem, Claude Darbellay, Germano Zullo ou Blaise Hofmann. «Moins un livre de recettes qu’une galerie de portraits. Parce que chacun se trahit un peu par

mique de la Tribune de Genève, il s’est fendu d’une «recette géniale au vin qui sent mauvais». Ou comment «en utilisant des éléments méprisés, on arrive à faire quelque chose de bien». Un peu comme cet «aspic de la peine lune» que Corinne Desarzens propose aujourd’hui. Un plat qui la ramène à ses années de jeunesse. Plutôt que de fêter Pâques et Noël, elle et ses amis célébraient les changements de saison, les solstices, la pleine lune: «On choisissait un endroit sur la carte, chacun devait se débrouiller pour s’y rendre, on déballait tout sur un ponton, il y avait toujours un aspic. L’aspic? L’art de mettre en valeur des produits qui séparément n’auraient pas eu beaucoup d’intérêt.»

La dégustation de fromages L’un des deux textes qu’elle signe elle-même pour cette anthologie raconte une dégustation de fromages qui eut lieu dans une librairie de Ferney-Voltaire, en France voisine. Chacun des convives était invité, selon ses compétences, à gloser sur l’odorant sujet. Un chimiste par exemple mit en évidence dans le fromage «des éléments qui rappellent la vie, la mort, la naissance, le dégoût, l’attirance». Avec des termes délicats comme putrescine, cadavérine, spermine. Ou histamine. Ah! L’histamine, «présente dans les fromages à pâte dure», «produite dans le corps humain pendant l’orgasme», et provoquant «le rougissement chez la femme, l’éjaculation précoce chez l’homme, mais aussi les idées de grandeur, la pousse profuse des cheveux et des poils, les dépressions et les obsessions aussi». Une liste d’adjectifs était mise à disposition, histoire de corser les commentaires. C’est ainsi qu’un fromage peut s’avérer tonitruant. L’an dernier, Corinne Desarzens a signé un livre étonnant au titre en forme de note de dégustation de LIRE LA SUITE EN PAGE 52


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