Migros Magazin 1 2009 f AA

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vie pratique

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MIEUX VIVRE

L

ouise a 78 ans. Son mari est décédé, ses enfants se sont éloignés, elle ne rencontre que rarement ses petitsenfants. Ce qui ne l’empêche pas de profiter de sa retraite, de jouer aux cartes et de préparer de bons petits plats. C’est plutôt sa santé qui l’inquiète. Son corps s’est soudain couvert de plaques rouges, provoquant des démangeaisons. Rendez-vous chez une dermatologue qui lui prescrit une pommade. Sans résultat. Après l’application d’un deuxième traitement, l’état de sa peau ne s’améliore toujours pas. A la troisième visite, la dermatologue lui donne des anxiolytiques, persuadée que sa situation familiale la démoralise, que ses maux sont psychosomatiques. Et le nombre de plaques rouges augmente encore.

Une batterie de tests plus tard… «Mon sentiment, c’est que cette dermatologue ne savait plus quoi faire de moi, raconte Louise dans C’est psychosomatique. Est-ce le bon

diagnostic? de Sophie Dominique Rougier. Lui dire non, je ne pouvais pas; d’abord, elle avait l’air sûre d’elle, d’autre part elle m’aurait répondu que je n’étais pas médecin.» N’en pouvant plus, la grandmère s’est rendue à l’hôpital. Une batterie de tests d’allergie plus tard, le diagnostic est clair: Louise n’a pas supporté sa nouvelle teinture à cheveux. D’où ses démangeaisons. «Je ne suis plus jamais retournée voir la dermatologue!» précise Louise.

Mise en garde contre certains abus Dans son livre, résultat de six mois de recherches et de récolte de témoignages, la journaliste française Sophie Dominique Rougier ne tient pas à faire le procès de la médecine moderne, mais juste à mettre en garde contre certains abus. «C’est difficile à croire, écrit-elle, mais dans les années 50, la psychologie et la psychanalyse étaient considérées comme du charlatanisme par les médecins, ou peu s’en faut. Pour carica-

Pour un partenariat efficace

Les patients qui souffrent mais qui ne sont pas écoutés éprouvent un sentiment de détresse et de solitude.

Avant de vous rendre à un rendez-vous chez le médecin, préparez une «check-list.» Plus vous donnerez d’informations, mieux le praticien pourra vous aider à trouver la cause des maux. Sophie Dominique Rougier propose une série de questions à se poser: • Depuis quand je souffre? • A quelle fréquence apparaissent les troubles? • Où se situent les douleurs? • Est-ce que je ressens d’autres symptômes en même temps? • Dans ma famille y a-t-il des personnes qui endurent des souffrances identiques? • Ai-je changé des éléments dans mon environnement quotidien (produits d’entretien ou de beauté, literie, peinture, revêtement de sol, animal, mode de déplacement, sport, loisirs, etc.)? • Ai-je l’impression que quelque chose provoque ces maux (lieu, aliment, position, contact, fatigue, etc.)? Il est important de bien connaître son propre parcours médical. Posséder un carnet de santé avec les dates, les symptômes, le diagnostic et les traitements administrés permet d’arriver devant de nouveaux médecins avec des arguments de poids.

turer, on pourrait dire que si pendant longtemps on ne voulait pas entendre parler des psys, aujourd’hui on n’entend plus qu’eux. On exagère l’influence du stress, du psychisme et de l’émotionnel dans le déclenchement des maladies ou de l’apparition de symptômes somatiques.» Didier a attendu vingt-cinq ans pour qu’un médecin fasse le bon diagnostic. Il souffre de maux d’estomac à 15 ans déjà. Aucun médicament ne lui convient. A 20 ans, on le pousse à entamer une psychothérapie. «Chaque fois que je parlais de mon ulcère, de mes symptômes, raconte-t-il, la psychologue me répondait: «On a déjà évoqué tout cela, il faut avancer dans votre thérapie.» De plus, cette femme était gentille, souriante, persuasive, et dans mon entourage, c’était la même chose, chacun était sûr que j’avais un ulcère parce que j’étais nerveux et tourmenté.» De fibroscopie en fibroscopie, les médecins se persuadent qu’il s’agit d’une maladie chronique. Didier absorbe des quantités astronomiques de remèdes, y compris des anxiolytiques. Jusqu’au jour où l’on découvre enfin le problème: une infection par helicobacter pylori, qui s’acquiert dans l’enfance et qui peut être soignée grâce à des antibiotiques et des antiacides. «Je n’étais plus le coincé, l’angoissé de service, mais un «vrai» malade, victime d’un problème infectieux, un malade noble, qu’on regardait autrement et qui allait guérir.» Lors de son enquête, Sophie Dominique Rougier a été bouleversée par la détresse des personnes qu’elle a interviewées. «Le patient vit doublement mal les choses: d’une part, il perçoit qu’il est mal soigné, et d’autre part, il a LIRE LA SUITE EN PAGE 54


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