Longueur d'ondes N°85

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Gaétan

et maghrébine fait partie du patrimoine français et mérite d’être mise en lumière. On dédie aussi une scène à la Cumbia électro de Colombie. »

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« Le but est de permettre aux gens de se réapproprier la fête hors des sentiers battus, dans un esprit foutraque. » DJ AZF tronique occidentale est quelque part en perte de vitesse, il fallait ouvrir ses chakras. Il faut aussi savoir que les musiques du Magreb ont bénéficié de 50 ans de production en France sans qu’il n’y ait de visibilité médiatique hormis pour les Cheb Mami et autre Khaled. Donc cette musique méditerranéenne

Photo : AZF

eux acteurs de ce monde souterrain, PierreMarie Ouillon, programmateur des Nuits Sonores à Lyon, directeur artistique du Sucre et la DJ qui ne cesse de monter, AZF, nous donnent quelques éléments de réponse sur une scène musicale qui a souvent pâti d’une image lugubre. Certainement car la nuit fait peur quand elle vous échappe... Et pourtant il n’y a pas de raisons. C’est un peu la démonstration que tentent d’opérer Les Nuits Sonores, chaque année durant les Saints de Glace, en offrant en une semaine un extrait de ce que peut proposer le champ de la musique électronique dans sa plus grande variété et richesse esthétique. Si en 16 ans la programmation a su évoluer vers une pluralité de genres musicaux, dans une perspective singulière d’ouverture sur le monde, la formule semble aujourd’hui atteindre une maturité, source de nombreuses innovations, dans la forme et le fond. Pour preuve, ces sets de techno démarrant à l’heure de l’apéro en pleine ville, pas mal de sets proposés gratuitement, des ateliers pédagogiques pour les enfants, des cartes blanches laissées à des artistes pionniers (Jennifer Cardini) ou à des villes (cette année Amsterdam). Les Nuits Sonores mettent donc les petits plats dans les grands afin que chacun puisse participer à cette grande fête dans un esprit d’ouverture qui tend à abattre des préjugés sévères sur l’univers de la musique noctambule.

Mais pas que, car cette manifestation polymorphe se veut aussi un écho des tendances actuelles, de l’afro-punk de Tshegue à la pop folk-psyché orientale des Hollandais d’Altin Gün. Une programmation qui se pense tel un miroir du monde et héritée d’un ADN certain, comme le précise le directeur artistique Pierre-Marie : « Le collectif à la base du festival, Arty Farty, va avoir 20 ans. C’est une histoire qui nous a fait voyager en Europe mais aussi au Maroc à Tanger, où une édition des Nuits Sonores s’y est créée. Dans une période où la musique élec-

Évasion, curiosité et passion sont donc des maîtres mots de ce festival qui permet à la France et ses scènes multiples de rayonner à l’international. Une présence dans le secteur des festivals qui touche donc à la bénédiction, surtout quand d’autres aux dents longues trustent les mêmes paysages sonores de manière hérétique. C’est le cas du Tomorrow Land et sa pléthore d’artistes EDM bons à faire tourner la tête de moutons aux toisons d’or vénérables. Devant prendre place à l’Alpe d’Huez en mars 2019, à hauteur d’un passe à 800 euros, il devrait s’ouvrir au plus grand nombre… La polémique n’aurait ainsi pas plus enflée si ce pragmatique président de la région Auvergne-Rhône-Alpes qu’est Laurent Wauquiez, n’y avait pas vu une niche à investir. À la clé, 400 000 € de subventions culturelles allouées sur les crédits d’un budget déjà bien dans le rouge. On marche sur la tête devant une telle logique face à un festival qui ne devrait pas manquer de partenaires privés bien juteux. Et ne parlons pas du son proposé, ou quand des têtes d’affiche de la techno tel que Juan Atkins (programmé lors d’une récente édition) font fuir les festivaliers en plein set, tout est dit. Peu de monde peut se targuer d’être un David Guetta du dance floor… Fermons cette parenthèse représentative des logiques industrielles en vigueur pour interroger la place de la musique techno (la vraie) dans le cœur de ceux qui continuent de nourrir ce style. La DJ française AZF a bien son avis sur la question. Elle qui malmène les vertèbres de nombreux clubbers depuis plusieurs années s’est vite émancipée des circuits traditionnels pour des raisons évidentes. Rappelons quelles sont les vertus de la musique techno en essence (ces dernières étant trop facilement divulguées derrière les dérives sanitaires

« Le club est un espace inclusif qui permet de débalkaniser des communautés comme celles liées au queer. » Pierre-Marie Ouillon 36 Longueur d'ondes N°85


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