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La figure de l’île
La forme de l’île, est inhérente à l’architecture car sa figure close fait écho à la « cellule primitive » de la cabane. En effet, « Le mythe de la cabane » comme première architecture trouve sa place dès l’Antiquité dans le traité De Architectura de Vitruve :
« Ce fut donc la découverte du feu qui amena les hommes à se réunir, à faire société entre eux, à vivre ensemble, à habiter dans un même lieu. Doués d'ailleurs de plusieurs avantages que la nature avait refusés aux autres animaux, ils purent marcher droits et la tête levée, contempler le magnifique spectacle de la terre et des cieux, et, à l'aide de leurs mains si bien articulées, faire toutes choses avec facilité : aussi commencèrent-ils les uns à construire des huttes de feuillage, les autres à creuser des cavernes au pied des montagnes ; quelques-uns, à l'imitation de l'hirondelle qu'ils voyaient se construire des nids, façonnèrent avec de l'argile et de petites branches d'arbres des retraites qui purent leur servir d'abri. Chacun examinait avec soin l'ouvrage de son voisin, et perfectionnait son propre travail par les idées qu'il y puisait, et les cabanes devenaient de jour en jour plus habitables.»
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Au seuil de la civilisation, elle marque le passage la transition physique du passage de l’état de Nature à celui de la civilisation : de l’habitat sauvage naturel à celui de l’habitat civilisé construit par l’humain. Le phénomène de groupe permet la protection : on a besoin des autres.
La figure de l’île terrestre au milieu de l’océan comme lieu immobile fermé créant une dialectique intérieur-extérieur, sera une figure constante de l’Histoire de la société occidentale : dans la cité romaine insulae désigne « un immeuble d’habitation» ou « une propriété foncière partagés en habitations collectives», mais on peut également parler d’un « îlot urbain » qui est un ensemble de bâtiments séparé du reste de la ville par des voies. On peut enfin penser la ville antique ou médiévale déterminée par ses remparts, comme une île dans un territoire.
La figure de l’île-refuge se retrouve également dans la cosmogonie judéo-chrétienne déjà évoquée : l’Ecoumène, terre d’asile close pour les rescapés du Déluge, est enfermée par l’Océan, menace divine d’un retour au chaos. La Bible annonce une origine et une fin catastrophique du monde actuel dont l’Océan humide, mouvant, imprévisible et infini, est le déclencheur. Inversement la Terre, sèche, immobile, stable et définie, évoque le jardin paradisiaque, favorable à l’établissement de l’humain, créé à l’image de Dieu. Par cette dialectique Terre-Mer, Dedans-dehors, Humanité-Nature, la religion chrétienne fait naître et prospérer une perception binaire du monde dans la culture occidentale.
36. Indian Village of Pomeiooc, Theodor deBry, (1590).