SORTIR
S
LE TEMPS I DÉCEMBRE 2016
SPECTACLE
THÉÂTRE
Octave Mirbeau, prince de la satire Au Théâtre de Carouge, François Marthouret joue Isidore Lechat, magnat aux prises avec une fille rebelle
(SIMONGOSSELIN)
Une histoire qui a le parfum d'une Belle Epoque moins euphorique qu'on veut bien le dire. Octave Mirbeau savait distraire son monde. L'auteur du Journal d'une femme de chambre bourdonnait en guêpe autour
López, le metteur en scène interroge aussi le besoin actuel et viscéral de porter le monde sur ses épaules. Ne devient-on pas esclave de l'information? Des questions abordées avec la fantaisie et la santé qui caractérisent cet agitateur du plateau. MPG
En manque
Théâtre de Vidy, av. E.-Jaques-
Dalcroze 5. Du 13 au 21 décembre. (Loc. 021 619 45 45, www.vidy.ch). Vincent Macaigne est un volcan
Il divise, mais il s’en moque. Vincent Macaigne est un romantique, tendance tête brûlée. Ses spectacles feulent, mordent, avalent tout sur leur passage. A l’automne 2014, il projetait L’Idiot de Dostoïevski – renommé Idiot! parce que nous aurions dû nous aimer – dans la grande salle du Théâtre de Vidy. La saga transperçait la nuit, électrisait le public, en laissait KO quelques-uns. Il revient avec En manque, texte de Sarah Kane monté notamment par Maya Bösch au début des années 2000 à Genève et par Thomas Ostermeier, le patron de la Schaubühne de Berlin. En scène, des acteurs
composent avec la solitude, en quête d’une étreinte, d’un baiser, d’un mot fou qui changerait la face du monde. La vague promet d’emporter. ADF
Rouge décanté
Théâtre de Vidy, av. E.-Jaques-
Dalcroze 5. Du 13 au 15 décembre. (Loc. 021 619 45 45, www.vidy.ch). Le poids des mots, le choc de la vidéo
Ce fut un des chocs de La Bâtie 2009. La haute stature de Dirk Roofthooft campée devant un immense écran qui projetait son visage sur un fond couleur sang. Pour raconter l'irracontable: la manière dont les soldats japonais ont traité les détenus d'un camp situé en Indonésie, en 1943. Plus exactement, Jeroen Brouwers, l'auteur de Rouge décanté, alors âgé de 3 ans, ainsi que sa sœur, sa mère et sa grand-mère. A l'écoute des exactions, physiques et psychologiques, on comprend comment les mauvais traitements ont durci de manière irréversible les rapports entre la mère et l'enfant. Le dialogue régulier entre le comédien et son image projetée montre le fossé à jamais creusé entre
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des gibus et des capelines. Sa pièce Les affaires sont les affaires lui ressemble: elle pique l'air de rien, mais laisse des traces. Son intrigue? Une histoire à la Emile Zola, dirait-on. Isidore Lechat reçoit en son château. Il a de l'entregent, des idées, des relations, ça peut aider, et beaucoup d'argent. Le monde est à ses pieds, à commencer par les ingénieurs électriciens Phinck et Gruggh, deux drôles de gaillards, escrocs sur les bords qui ont une chute d'eau à lui vendre. Isidore Lechat a surtout en tête le mariage de sa fille Germaine avec le fils du marquis de Porcellet. L'alliance flatte son amourpropre. Tout roulerait si la belle enfant n'était pas rebelle. Lechat boirat-il la tasse? La comédie avait tout pour plaire. Une méchanceté qui est chez Mirbeau une vitalité. Les affaires sont les affaires fit donc fureur au début des années 1900. Récemment, le Français Marc Paquien a remis la pièce au goût du jour. C'est au tour de Claudia Stavisky, directrice du Théâtre des Célestins à Lyon, d'astiquer la mécanique. Acteur aussi racé que captivant, François Marthouret incarne Lechat. La Genevoise Lola Riccaboni joue l'héritière frondeuse. Il se murmure que le dard de Mirbeau fait toujours des ravages. Alexandre Demidoff La Belle Epoque a ses vapeurs et ses coups de sang Carouge (GE). Théâtre de Carouge,
rue Ancienne 39. Du 6 au 18 décembre. (Loc. 022 343 43 43, www.tcag.ch).
ce que le narrateur est et ce qu'il aurait aimé être. Ce spectacle puissant, dirigé par le metteur en scène Guy Cassiers, revient pour trois soirs à Vidy. Il ne faut pas le rater. MPG
Meyrin (GE)
La Femme rompue Forum Meyrin, pl. des Cinq-Conti-
nents 1. Ma 10 janvier à 20h30. (Loc. 022 989 34 34, www.forum-meyrin.ch). Du Balasko pas rigolo
«Moi je suis lucide, je suis franche, j'arrache les masques: je ne suis pas raciste, mais je m'en branle des Bicots, des Juifs, des Nègres, juste comme je m'en branle des Chinetoques, des Russes, des Amerlos, des Français. Je m'en branle de l'humanité!» Première surprise, Murielle, personnage créé en 1967 par Simone de Beauvoir dans La Femme rompue, est tout sauf altruiste et élevée. Cette femme qui se plaint d'être abandonnée de tous, dont la fille s'est suicidée sous son toit et à qui on a retiré le fils, est un concentré de colère et de rancœurs mêlées. Deuxième sur-
prise, c'est Josiane Balasko, la bonne copine, la comédienne gouailleuse et généreuse, qui se coule dans le rôle de cette bourgeoise amère jusqu'à la nausée. Lors d'un entretien, la comédienne a expliqué sa passion pour ce personnage en colère que lui a confié la metteuse en scène Hélène Fillières et raconté comment elle fait tout, sur scène, pour lui restituer son humanité. Après une représentation au Locle, début novembre, et à Paris en décembre, Josiane Balasko revient l'interpréter cette Femme rompue à Genève, au Forum Meyrin. MPG
Renens (VD)
La Comédie des erreurs Théâtre Kléber-Méleau, ch. de l’Usine-à-Gaz 9. Du 1er au 22 décembre. (Loc. www.kleber-meleau.ch). L’art des farces et attrapes à la mode de Shakespeare Le bonheur du malentendu. William Shakespeare maîtrise son algèbre théâtrale. Il raffole des histoires de