Les Chantiers de l'intervention en sciences humaines | Vol. 3 (2012)

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Pierre Érasme Nyengo -”La bioéthique au carrefour des cultures”

Introduction Née dans un contexte «...d’expérimentations (greffes de cellules cancéreuses à des mourants, recherche portant sur le traitement de la syphilis chez deux groupes de Noirs américains ou pour les besoins de la recherche, un seul des deux groupes fut traité) qui rappelaient les expériences faites par les Nazis dans les camps de concentration de la Seconde Guerre mondiale»1, la bioéthique fait aujourd’hui face à de nombreux problèmes que posent les pratiques médicales modernes. Les questions posées par ces pratiques médicales contemporaines, telles que l’euthanasie, les pratiques de l’avortement et toutes sortes de clonages reproductifs ou thérapeutiques, la procréation in vitro, nous donnent une idée sur l’ampleur des interrogations auxquelles elle est confrontée. La bioéthique voudrait alors répondre à des questions existentielles couvrant de nombreux aspects de la vie humaine, ce qui la place au carrefour de toutes les cultures. Cet article veut montrer l’importance de la bioéthique et les raisons qui la situent au carrefour des cultures. Cette dernière reste l’univers mythique dans lequel nous vivons. Ce mythe englobe ou unifie l’être humain à un moment donné de l’espace et du temps où nos perceptions, nos croyances sont situées. Cela pose de problème aujourd’hui dans la mesure où la crise est manifeste dans nos sociétés. Tout comme dans le domaine de la spiritualité, l’évolution de nos sociétés favorisent les multiples troubles et aspirations qui s’explosent en de vastes pulsions religieuses. Quant à la sexualité, elle est une réalité existentielle intégrale de tout être humain. Il y a une co-relation entre culture-spiritualité et sexualité dans la mesure où ces différents concepts s’interpénètrent. Ainsi, la culture est toujours et à la fois un héritage et une créativité de la nature dont l’humain fait partie.

I. Définition des concepts a. La culture Le concept ‘’culture‘’ vient du mot latin colere (habiter), «cultiver », ou «honorer »2. La culture se réfère de façon générale à l’activité. Ce mot prend aussi des significations différentes, de fois contradictoire à cause de la transmission qui se fait non par héritage génétique de l’espèce ou l’individu appartient. Cicéron fut le premier à appliquer le mot cultura à l’être humain: « un champ si fertile soit-il ne peut être productif sans culture, et c’est la même chose pour l’humain sans enseignement » . Selon le sociologue québécois Guy Rocher, la culture est « un ensemble lié de manières de penser, de sentir et d’agir plus ou moins formalisées qui, étant apprises et partagées par une pluralité de personnes, servent d’une manière à

la fois objective et symbolique, à constituer ces personnes en une collectivité particulière et distincte »4. Dans une formule particulière ou synthétique Durkheim définit la culture comme des « manières de penser, de sentir et d’agir »5. Ceci nous montre combien la culture est importante dans la vie humaine ou dans nos sociétés. La culture intervient à toutes les activités humaines, qu’elles soient affectives, affectives ou conative, voire sensorimotrice. Au sens anthropologique et sociologique du terme, la culture n’est cependant pas individuelle de sa nature, on la reconnaît de prime à bord, et principalement à ce qu’elle n’est commune à une pluralité de personne6. La culture reste un ‘’héritage social’’ ou tout individu doit apprendre pour vivre dans une société particulière. Tout comme dans le domaine de la sexualité et de son rapport sur la pluralité des cultures nous invite à évoquer des traits de la morale qui prétend à l’unité et à l’universalité. À titre d’exemple, le décalogue et ses commandements: tu ne tueras, tu ne prendras pas la femme d’autrui, tu ne voleras pas, tu ne mentiras pas…la charte des NationsUnies sur les droits de l’homme, la notion thomiste du bien commun. Ces exemples nous confirment avec force que la sexualité et la diversité de cultures font bon ménage et les deux concepts : sexualité et culture sont présents dans la vie humaine, dans le mariage et la famille. Ils sont inséparables. Car la sexualité ne peut bien se faire comprendre que dans une culture donnée. Voire les appartenances qu’on a dans les différentes spiritualités où chacune d’elles répond et s’exprime qu’à travers des symboles de cette nature; et la même exigence s’impose de façon plus ou moins marquée pour la collectivité, qu’il s’agisse d’une nation, d’un parti politique, d’un syndicat et même d’une famille. S’abstenir par exemple à une réunion, de porter l’insigne, de signer une pétition manifeste de façon claire qu’on se détache du groupe, d’un syndicat ou d’une association. Par exemple, le message de la Révélation, inscrit dans l’histoire sainte se présente toujours revêtue d’une enveloppe culturelle dont il est indissociable. Elle fait partie intégrante de cette dernière. La Bible, Parole de Dieu exprimée dans le langage des hommes, constitue l’archétype de la rencontre féconde entre la parole de Dieu et la culture. Tout comme la vocation d’Abraham est significative: «Quitte ton pays, ta famille et la famille de ton père» (Genèse 12, 1), il s’est déraciné spirituellement et culturellement pour être dans la foi, planté par Dieu dans la terre promise. Cet exemple montre bien que l’histoire sainte se présente toujours revêtu d’une enveloppe culturelle dont il est indissociable. L’UNESCO définit la culture « comme l’ensemble des traits distinctifs, spirituels et matériel, intellectuels et affectifs, qui caractérisent une société ou un groupe social. Elle englobe, outre les arts et les lettres, les modes de vie, les

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