Cahier Hommage à André Labarrère - 16/19 Mai 1996

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ANDRÉ LABARRÈRE, UNE VIE POUR PAU LES DERNIERS JOURS • Le maire de Pau a mené de front son combat contre la maladie et son action publique

Aux commandes jusqu’au bout Le 13 mai au matin, André Labarrère présentait aux élus palois son projet pour la place Clemenceau, malgré la progression visible de la maladie. 1 1 - Mardi 4 avril : André Labarrère préside son dernier conseil municipal, à midi, avec seulement deux dossiers à l’ordre du jour. (Photos archives Nicolas Sabathier) 2 - Vendredi 5 mai : André Labarrère n’assiste pas à la pose de la première pierre de la base d’eaux vives, un de ses grands projets. De nombreux Palois y ont vu un signe de la progression de la maladie. La présence d’André Labarrère se mesurait aussi à ses absences.

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3 - Jeudi 11 mai : Un mois après avoir dévoilé publiquement qu’il avait un cancer, André Labarrère, entouré des vice-présidents de l’agglomération paloise, annonce qu’il renonce au projet de médiathèque de Zaha Hadid au Parc Beaumont. Ce sera son dernier grand geste politique en public.

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’histoire retiendra qu’André Labarrère a présidé son dernier conseil municipal le 4 avril dernier, un mardi à midi. Il n’y avait que deux dossiers à l’ordre du jour : le renouvellement de la concession du casino municipal et le nouveau club-house du Palais des Sports. Une semaine plus tard, le sénateur maire de Pau, également président de la communauté d’agglomération, dévoilait au grand public qu’il avait un cancer. Il a passé ses dernières nuits au centre hospitalier

Ce dernier mois, André Labarrère a mené de front tous ses combats, contre la maladie et pour faire avancer ses projets. Son emploi du temps était aménagé en fonction des soins (chimiothérapie, radiothérapie…) et de son état de fatigue. « Mais jusqu’au bout, il a tenu les rênes de la mairie. C’était son souhait le plus cher », note Cédric Michon, directeur de la communication et proche collaborateur. Concrètement, le maire de Pau savait être présent dans les moments importants, ou quand il s’agissait de faire passer des signes aux Palois. Il a toujours voulu en-

tretenir l’espoir d’une rémission. Peut-être est-ce pour cela qu’il a répété, jusqu’à la semaine précédant son décès, qu’il se représenterait aux municipales en 2008 ? Là était sa raison de vivre. Pourtant, son état de santé s’est progressivement dégradé. « Depuis une quinzaine de jours, il passait ses nuits au centre hospitalier », témoigne Cédric Michon. Quand il était retenu loin de son bureau, sa fidèle adjointe Laure Pareilh-Peyrou et Cédric Michon faisaient les allers-retours avec les parapheurs sous les bras : « Il n’y a jamais eu de vacance du pouvoir ». La présence d’André Labarrère se mesurait aussi à ses absences. Le fait qu’il ne participe pas à la pose de la première pierre de la base d’eaux vives des Portes des Gaves, le 5 mai, a marqué les Palois. André Labarrère était alors représenté par son adjoint à la mairie, Henri Lambert, qui expliquait : « Une chimiothérapie était programmée ce matin ». « Il a puisé dans ses dernières forces » Or, cette base d’eaux vives constitue l’un des projets phares de la communauté d’agglomération, et elle tenait particulièrement au

cœur de son président. Aussi certains ont-ils vu, déjà, un signe dans son absence. La dernière grande inauguration d’André Labarrère et une de ses fiertés - restera donc celle du complexe de pelote, au Cami Salié, le 30 mars. Avec cet équipement, le maire bâtisseur complétait son « boulevard des Sports ». Aux commandes jusqu’au bout « Ces derniers jours, André a puisé dans ses ultimes forces pour annoncer qu’il renonçait au projet de Zaha Hadid pour la médiathèque intercommunale, puis pour présenter aux élus palois son projet pour la place Clemenceau », souligne Cédric Michon. « Il a honoré ces deux rendez-vous avec la force de sa volonté ». Dans l’entourage du maire, on souligne qu’« André Labarrère avait du mal à se remettre des dernières séances de chimiothérapie ». Jeudi dernier, André Labarrère était donc entouré de ses vice-présidents de l’agglomération pour annoncer que le projet de médiathèque au Parc Beaumont était abandonné (car jugé irréalisable et trop coûteux) tout en soutenant qu’il y aurait bien une médiathèque à Pau, avec un autre architec-

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te et un autre emplacement. C’était en fin d’après-midi. André Labarrère est ensuite allé dîner chez Cédric Michon, à Idron. Là, il se retrouvait en famille, avec les enfants de son directeur de la communication qui lui apportaient leur fraîcheur et leur naïveté. André Labarrère a même rassuré un d’eux qui lui lançait : « Papa m’a dit que tu allais mourir ». Non, l’homme voulait encore croire à la vie - ou au moins donner, jusqu’à son dernier souffle, cet espoir à ses proches. Le 13 mai au matin, André Labarrère a expliqué l’avancée des travaux du parking souterrain et a dévoilé son projet pour la place Clemenceau aux élus du conseil municipal, réunis en séance plénière. « Là encore, il a vraiment tenu à être là : c’était un de ses grands projets, un de ses paris pour l’avenir de sa ville. Il était marqué, il souffrait, mais il a tenu », témoigne Cédric Michon. Le dernier repas entre amis Dans l’après-midi, son adjointe Jeanine Alliez-Chiros célébrait le mariage de Caroline Frisou, qui figurait sur la liste Labarrère en 2001. C’est alors qu’elle a vu

arriver le maire : « Il était très fatigué mais il nous a parlé de Venise, de l’amour. C’était extraordinaire ». Ce fut la dernière présence publique d’André Labarrère. Plus tard, sa voix, laissée sur une messagerie de portable, était devenue méconnaissable, à la limite de l’audible. Le mal avait progressé. La médecine et la volonté peuvent beaucoup, mais elles ne peuvent pas tout. Josy Poueyto avait invité André Labarrère samedi soir chez elle. Il y avait son mari Jean-Michel, son amie Juliette Castaings, et ellemême : « Il ne voulait pas nous quitter ». André Labarrère était alors très faible - il ne buvait même plus son cher Chivas. La soirée n’a été qu’émotion. « Quand Jean-Michel, en le raccompagnant, a mis « New York, New York » de Frank Sinatra sur l’autoradio, André s’est mis à taper dans ses mains. Je n’oublierai jamais cet enthousiasme, ce moment de vie, malgré la maladie ». Il était environ 23 heures quand André Labarrère est arrivé à l’hôpital de Pau, ce samedi soir. Il a alors retrouvé sa chambre, pour la dernière fois. Il s’y est éteint le mardi 16 mai vers 6h30. BRUNO ROBALY

16 - 19 mai 2006

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