Extraits du livre « L'abbaye d'Hautecombe »

Page 9

PATRIMOINES POUR DEMAIN HAUTECOMBE

Introduction

Le « Saint-Denis de la Savoie » et la plus italienne des abbayes françaises L’abbaye de Hautecombe – qui sera désignée tout au long de cet ouvrage, conformément à la tradition d’élision bien ancrée depuis le XIXe siècle, comme « abbaye d’Hautecombe »1 – est un monument majeur du patrimoine bâti savoyard et rhônalpin. Dans une région riche en monastères, abbayes et chartreuses, elle se signale par une histoire originale qui en fait sans doute la plus italienne des abbayes françaises.

GILLES SOUBIGOU

des biens temporels de l’abbaye, et la seconde à l’historien piémontais Luigi Cibrario, dont l’ouvrage présente une abondante iconographie. Il faut également mentionner, après la réunion de la Savoie à la France, en 1860, l’ouvrage de l’historien savoyard Claudius Blanchard qui, en 1874, publie pour la première fois nombre de pièces d’archives jusqu’alors inédites. Aux côtés de ces ouvrages savants voisinent une multitude de guides touristiques qui se citent régulièrement, depuis celui publié par l’évêque de Maurienne, monseigneur Vibert, en 1826, jusqu’à celui du pharmacien A. Coquerel en 1896.

CONSERVATEUR DES MONUMENTS HISTORIQUES (DRAC RHÔNE-ALPES)

Comme bien souvent, l’historiographie de l’abbaye d’Hautecombe remonte aux premières chroniques, vies des saints et autres recueils hagiographiques qui, au Moyen Âge puis à l’époque moderne, furent rédigés par les moines eux-mêmes pour éclairer les origines de leurs communautés. Les premiers travaux que l’on peut qualifier d’historiques sont ceux de l’humaniste Alphonse Delbène, abbé commendataire d’Hautecombe, qui publie une histoire de son abbaye en 1594, et de Samuel Guichenon, qui l’intègre en 1660 à son Histoire généalogique de la Royale Maison de Savoye. Quelques ouvrages destinés à servir de guides aux voyageurs de l’Ancien Régime détaillent aussi les merveilles de l’abbaye, tel le livre du médecin Jean-Baptiste de Cabias, Les Vertus merveilleuses des bains d’Aix (1623). L’historiographie se renouvelle grandement à partir de la première moitié du XIXe siècle. Deux importantes publications parues en 1843 célèbrent l’achèvement du chantier de restauration de ce que l’on appelle de plus en plus fréquemment le « Saint-Denis de la Savoie ». La première est due au baron Joseph Jacquemoud, sénateur chargé par le roi de Piémont, en 1828, de la conservation

Au début du XXe siècle, l’archiviste de la Savoie Gabriel Pérouse publie un ouvrage grand public illustré par Joanny Drevet (1926) et de nombreux petits guides sont édités à destination des touristes. Le renouveau des études sur Hautecombe doit beaucoup aux travaux menés par les moines bénédictins. Dom Jean Deshusses publie en 1957 une étude sur les peintures anciennes conservées dans l’église. Mais l’essentiel de l’effort historiographique est porté par dom Romain Clair (19282002), entré dans les ordres à Hautecombe en 1948 et qui devint dans les années 1960 l’archiviste de la communauté. En 2010, ses notes non publiées ont été retranscrites et publiées par la Société d’art et d’histoire d’Aix-les-Bains. Cette somme est à rapprocher d’études récentes qui, sous la plume de Pascale Defay (1982), Christian Corvisier (2003), Cécile Randon (2013-2014) et Maria Ludovica Vertova (2009), ont approfondi certains sujets. L’ouvrage que le lecteur a aujourd’hui sous les yeux s’est nourri des travaux et des réflexions de ces divers auteurs. Confié à des spécialistes du patrimoine historique, il a mis ces données parfois anciennes à l’épreuve de la recherche archivistique, de l’archéologie du bâti et des découvertes récentes permises par les chantiers de restauration. Il entend de la sorte proposer un regard neuf et, par endroits, de véritables découvertes qui enrichiront la visite de celles et ceux qui ont la chance de découvrir le patrimoine exceptionnel de l’abbaye d’Hautecombe. •

1. Selon dom Romain Clair, qui fut l’archiviste de la communauté bénédictine, « on dit, d’usage immémorial, abbaye d’Hautecombe, comme les abbayes d’Hautcrêt, près de Lausanne, d’Hauterive près de Fribourg, et la seigneurie d’Hauterives en Dauphiné, le vocable Hautecombe étant considéré comme un mot à initiale vocalique précédée d’un ‘h’ muet devant lequel se fait l’élision ».

8

9


Issuu converts static files into: digital portfolios, online yearbooks, online catalogs, digital photo albums and more. Sign up and create your flipbook.