Henry Gréville - Péril

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n’y croyez pas ? Alors... ce qu’on vous a dit. Ma fortune m’appartient, et je suis libre. Mon grand-père était un célèbre ténor italien ; il n’a jamais chanté à Paris, et vous autres Parisiens, vous ne connaissez de célébrités que celles que vous faites. Il a amassé une fortune, une vraie fortune. Il était très avare et n’avait qu’une fille, ma mère. La malheureuse femme est restée pauvre toute sa vie ; elle avait épousé un Français, le baron d’Agrelles, qu’elle a perdu au bout de bien peu de temps. Elle m’a élevée de son mieux, et puis, tout d’un coup, elle a appris qu’elle héritait de son père : une grosse fortune. Elle en est morte de saisissement, je crois. Et moi, je me suis trouvée orpheline et riche. En parlant, elle plongeait ses yeux dans ceux d’André, pour lui imposer sa pensée, et elle y réussissait. – J’avais donné des leçons, je me préparais à entrer au théâtre... C’est pour cela que je porte le nom de Solvi, celui de mon grand-père ; mais quand je me marierai, – elle appuya sur ces mots, – ce sera sous mon vrai nom d’Agrelles. Pourquoi me regardez-vous de cet air ? – Je ne sais pas de quel air je vous regarde, répondit André ; je vous écoute. Je ne sais pas non plus pourquoi vous me dites tout cela. Ce n’est pas votre fortune que j’aime, c’est vous. 11


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