Malot-Kalbris

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– Ne bouge donc pas, gamin, tu fais bien dans le paysage ; si tu veux reprendre ta position ; et si tu la gardes, je te donne dix sous. Je me rassis ; celui qui me parlait ainsi n’avait pas l’air de vouloir m’arrêter. C’était un grand jeune homme coiffé d’un chapeau de feutre mou et vêtu d’un costume de velours gris : assis sur un tas de cailloux, il avait un carton posé sur ses genoux. Je compris qu’il dessinait mon portrait ou plus exactement celui du site et du calvaire, puisqu’il avait dit que je faisais bien dans le paysage. – Tu n’as pas besoin de fermer les yeux, me dit-il, quand j’eus repris ma position, ni la bouche ; comment nommes-tu ce lieu-ci ? – Je ne sais pas. – Tu n’es donc pas du pays ? Tu n’es pas cependant rétameur de casseroles, n’est-ce pas ? Je ne pus m’empêcher de rire. – Veux-tu bien ne pas rire ! Si tu n’es pas rétameur, qu’est-ce que c’est que cette batterie de cuisine que tu portes sur ton dos ? Les questions commençaient déjà ; mais ce monsieur avait l’air d’être le meilleur homme du monde, je me sentais attiré vers lui, je n’eus pas peur de répondre. Je lui dis la vérité : j’allais au Havre ; cette 154


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