Loranger-contes1

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de toutes mes étourderies d’enfant. Pourquoi ne s’étaitelle pas expliquée avec ma mère ? Aux moindres de ses avertissements, je me fusse abstenu de l’importuner. Au fond, j’étais un enfant docile. Je n’avais pas adopté son voisinage pour lui déplaire. Il était trop tard. Je venais de comprendre que mademoiselle Charlotte avait été trop timide pour m’adresser des reproches ou d’en avertir ma mère. La tricoteuse n’était elle-même qu’un tricot à la main. Et maintenant elle me tenait à sa portée. Et comment m’avait-elle ? Par le cou, au moment de l’essayage des échancrures et des encolures ; par la taille, à celui de la mesure des aisselles ; par les mains, à celui des poignets et du tour des bras. Comme je fus secoué !... Toujours je reprocherai à la vieille Charlotte de m’avoir offert ce chandail afin de me tenir à la merci de ses récriminations. Ce que je les ai regrettées mes traces de pas boueux sur sa galerie ; ma cueillette, dans ses boites fleuries, sur les allèges de ses fenêtres ; les branches cassées de ses cerisiers et mes siestes dans ses plates-bandes. Comment pouvais-je me libérer de ses violences ? Le chandail commencé, il fallait en voir la fin, et plus le tricot grandissait en importance, plus les essayages 331


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