Hauff-caravane

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– Ô Saïd, mon enfant, mon pauvre enfant ! » gémit le malheureux père éclatant en sanglots. Mais Kaloum, criant plus haut que tout le monde, répétait avec des gestes d’un désespoir extravagant : « Oui, mille tomans, dix mille ! je les donnerais pour que Saïd fût là. – Parais donc, Saïd ! s’écria le calife, et viens confondre tes accusateurs. » À ce cri, à la vue du jeune homme, le marchand et le cadi demeurèrent pétrifiés comme s’ils se fussent trouvés en présence d’un fantôme ; roulant les yeux çà et là d’un air hagard, essayant de parler et ne faisant entendre que des sons inarticulés, ils tombèrent à genoux enfin et frappèrent le pavé de leur front. Mais le calife, poursuivant son interrogatoire avec une inflexible rigueur : « Kaloum ! Saïd est devant toi ; t’avait-il volé ? – Non ! non ! grâce ! hurla le misérable. – Cadi, tu invoquais la loi tout à l’heure : la loi ordonne d’entendre tout accusé, quel qu’il soit et qui que ce soit qui l’accuse ; elle ordonne surtout de ne condamner que des coupables. Quelle preuve avais-tu de la culpabilité de Saïd ? – Le témoignage de Kaloum-Bek seulement ; je m’en étais contenté parce que c’est un homme notable. 255


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