cazotte

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principes salutaires dont je m’étais écarté, je m’en ferai un rempart contre vous. Mais si les chagrins occasionnés par mes désordres m’ont privé de cet ange tutélaire... Ah ! je ne veux vivre que pour la venger sur moi-même. Je m’ensevelirai dans un cloître... Eh ! qui m’y délivrera des chimères engendrées dans mon cerveau ? Prenons l’état ecclésiastique. Sexe charmant, il faut que je renonce à vous : une larve infernale s’est revêtue de toutes les grâces dont j’étais idolâtre ; ce que je verrais en vous de plus touchant me rappellerait... Au milieu de ces réflexions, dans lesquelles mon attention est concentrée, la voiture est entrée dans la grande cour du château. J’entends une voix : « C’est Alvare ! c’est mon fils ! » J’élève la vue et reconnais ma mère sur le balcon de son appartement. Rien n’égale alors la douceur, la vivacité du sentiment que j’éprouve. Mon âme semble renaître : mes forces se raniment toutes à la fois. Je me précipite, je vole dans les bras qui m’attendent. Je me prosterne. Ah ! m’écriai-je les yeux baignés de pleurs, la voix entrecoupée de sanglots, ma mère ! ma mère ! je ne suis donc pas votre assassin ? Me reconnaîtrez-vous pour votre fils ? Ah ! ma mère, vous m’embrassez... La passion qui me transporte, la véhémence de mon action ont tellement altéré mes traits et le son de ma 114


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