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In vino veritas

par Satish Chibandaram

24 H DE LA VIE D’UN VIGNERON

« Cet été, nous avons pris cinq jours de vacances en deux fois, et au retour nous nous sommes arrêtés chez un client… Avec cinquante hectares, nous ne sommes ni un petit ni un grand domaine. Cette année, nous avons grêlé. À 50 %, mais j’ai une assurance. Je travaille avec mon épouse et un homme de confiance, Jean-Louis Bertaud, qui s’occupe du travail viticole. La commercialisation, c’est moi et ma femme. Le seul moment où j’ai un contact physique avec la récolte, c’est lors des vendanges. Le reste du temps, c’est la paperasse, les livraisons et l’accueil. Il ne se passe pas un jour sans que nous ayons des visites. La grille est close le dimanche. Du lundi au vendredi, le réveil sonne à 5 h 40. Petit déjeuner à 6 h 15 et lecture de la presse. Nous sommes abonnés à plusieurs titres que je dispose un peu partout dans la maison pour les avoir sous la main dès que j’ai une minute. J’arrive au bureau à 7 heures. Je regarde la messagerie et plusieurs sites de météo. C’est très important, sauf l’hiver, pendant la taille. Là, qu’il pleuve ou qu’il vente, cela ne change rien.

Je fais ensuite un peu de saisie informatique. Je ne suis pas un féru de technologie qui peut être chronophage, mais globalement cela nous facilite la vie. Arrivent les premiers clients. Si c’est un habitué, c’est vite fait, mais avec quelqu’un qui ne connaît pas la maison, c’est visite et dégustation. Cela peut durer une heure ou davantage, car nous ne sommes pas avares de notre passion, qu’il faut plutôt freiner comme un cheval qui s’emballe. Je fais les livraisons moimême si c’est possible, à Bordeaux ou ailleurs, chez nos cavistes ou chez des restaurateurs. Il est important que le domaine ait un visage humain. Nous avons un réseau de cavistes, et de bonnes maisons nous font confiance, comme CordeillanBages à Pauillac, l’Hostellerie de Plaisance à Saint-Émilion ou l’Auberge à Saint-Jean-deBlaignac. Dans la voiture, j’écoute la radio, et s’il y a un embouteillage j’en profite pour lire. Sauf exception, je rentre à 13 heures. Je ne vis pas au domaine, et le déjeuner à la maison avec mon épouse est un break symbolique important, aussi court soit-il.

© Laurent Wangermez

La vie de château ne se passe pas toujours dans la vigne, comme le raconte Stéphane Le May propriétaire du Château Turcaud, entre-deux-mers, avec une de ses journées types. Retour au bureau. Tous les jours, des camions passent pour les expéditions ; si je n’ai personne au chai, je peux charger les palettes moi‑même. Paperasse, communication, réunion du triumvirat, visites… À 20 heures, je jette l’éponge. Dîner, et, avant de dormir, lecture. Les gens pensent à l’aspect bucolique de notre métier. C’est beaucoup dire, mais ils n’ont pas tout à fait tort. Lorsque les conditions sont réunies, météo et humeur, nous vivons des moments formidables. J’ai des chevreuils sur le domaine, et des lièvres aussi, qui sont encore plus beaux. Les chevreuils mangent la vigne. Il faudrait clôturer, mais ça coute une blinde, alors de temps en temps on organise une battue. D’autre part, comme on désherbe de moins en moins avec des produits chimiques, on voit se réinstaller une population d’oiseaux. La méconnaissance de notre métier est bien normale… Moi-même je méconnais la plupart des conditions dans lesquelles sont pratiqués ceux des autres. » Château Turcaud, 1033, route de Bonneau, 33670 La Sauve-Majeure. Excellent rapport QP en blanc (entre‑deux-mers : sauvignon, sémillon et muscadelle), rouge (bordeaux et supérieur : merlot et cabernet-sauvignon), rosé et clairet (cabernet franc et sauvignon, merlot).

www.chateau-turcaud.com


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