JUNKPAGE#34 — MAI 2016

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BUILDING ARCHITECTURE DIALOGUE

© Bernard Rakotomanga - Archives Bordeaux Métropole

Conçu par l’architecte belge Paul Robbrecht, l’ensemble des archives de Bordeaux Métropole annonce le cap d’un nouveau cycle pour l’institution, entre mémoire de la ville et redécouverte par le public. Par Benoît Hermet

LE TRÉSOR DE LA VILLE Avec ses contreforts en pierre de taille, on dirait un monastère parmi les friches de la rive droite. Situées à l’extrémité du secteur Bastide-Niel – dont l’écosystème Darwin marque l’entrée côté Garonne –, les nouvelles archives de Bordeaux sont « le premier grand équipement culturel métropolitain de ce côté du fleuve », souligne leur directeur, Frédéric Laux. Ce quartier en devenir se transformera d’ici quelques années en un véritable pan de la ville avec logements, services, places… En attendant, les archives prennent leurs marques. La vénérable institution, fondée par Aliénor d’Aquitaine au xiie siècle, était logée précédemment dans l’hôtel de Ragueneau, bâtiment du centre-ville familier des Bordelais. Mais les treize kilomètres de documents conservés s’y trouvaient à l’étroit ! Au début des années 2000, la municipalité a choisi la rive droite et son plus ancien entrepôt ferroviaire : la Halle des Magasins généraux, robuste édifice bâti en 1852 pour stocker des marchandises au croisement du rail et du fleuve. Seuls vestiges rescapés d’un incendie en 2008, ses murs enveloppent désormais la rénovation contemporaine. Réutiliser l’existant était un des impératifs du concours, remporté en 2010 par l’architecte

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belge Paul Robbrecht. Connu pour d’autres réhabilitations d’anciens entrepôts en archives, notamment à Gand et Anvers, il voulait une monumentalité à échelle humaine, différente de l’image traditionnelle des institutions. Un écrin original, une ouverture sur la cité Les archives forment désormais un ensemble articulé autour d’un grand parvis, ouvert à tous (les Bordelais). L’ancienne halle, coiffée de zinc, a été augmentée d’un spectaculaire volume destiné aux magasins de conservation. Quatre étages de béton en porte-à-faux, évoquant des empilements de livres ou de boîtes, pour une capacité de 18 km linéaires de stockage. Accessibles aux agents par de longues coursives, les dépôts sont séparés les uns des autres pour limiter les risques de propagation d’un incendie. Sous la voûte culminant à 18 m, la belle salle de consultation déploie ses 400 m2 destinés au public. L’acoustique, très étudiée, offre une quiétude élégante, réhaussée de bois aux teintes pastel et d’un mobilier d’esprit Art déco. De grandes baies vitrées apportent de la lumière et permettent un dialogue visuel avec l’extérieur.

Contemporain par son style épuré, ses matériaux bruts, la construction est aussi certifiée HQE1. Un système de géothermie2 permet de chauffer les espaces et de climatiser les réserves selon les normes de conservation. L’ancienne halle est reliée par deux passerelles à une aile perpendiculaire entièrement nouvelle. Elle réunit à l’étage les bureaux et les ateliers des équipes (laboratoire d’étude, studio photo…). Au rezde-chaussée, l’entrée principale dessert la salle de consultation, un lieu d’exposition et des espaces pédagogiques, eux aussi vitrés sur l’extérieur et pouvant se combiner en salle de conférence. Comme le rappelle Frédéric Laux, « l’un des enjeux est d’ouvrir les archives sur la cité. Symboliquement, elles incarnent la mémoire de la ville, de ses habitants, et répondent aujourd’hui à des questions de citoyenneté. Nous assurons une continuité historique, avec un bâtiment parmi les plus originaux en France ». Sous l’Ancien Régime, les archives de Bordeaux étaient surnommées « le Trésor de la Ville ». Leur masse colossale de documents constitue les fondements de la collectivité. Les archives sont consultées par des notaires, des avocats, des particuliers, des érudits, des


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