La Mouche n°7

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Journal collectif, libre

07

Nov. 2016

La Mouche Monstre



La Mouche Née en 2014, La Mouche a sorti son premier numéro lors du Monstre festival à Genève. Elle fête donc fièrement ses 2 ans d’existence en revenant avec plaisir rendre hommage au Monstre.

Manifeste La Mouche est un journal collectif, participatif et artistique. La Mouche se télécharge, se photocopie, s’agrafe, se répand, se prête, se détourne, s’affiche, s’arrache. L’impression et la diffusion se font de manière autonome et par les moyens du bord. Par définition, La Mouche est libre. Chacun-e s’en empare comme elle-il le souhaite et peut participer en envoyant des textes, des images, des manifestes, des BD, des illustrations, des affiches, des photos, des collages et tout ce qui s’imprime à:

lamouche@darksite.ch Les numéros sortent tous les 3-4 mois et sont accessibles sur le site web :

www.darksite.ch/lamouche La Mouche est insignifiante et pourtant la Mouche est partout, elle est anonyme, elle se reproduit et devient innombrable, La Mouche est insaisissable et agaçante, La Mouche est pleine de vie, La Mouche est libre, et se multiplie. Rejoins La Mouche, nourris-la et diffuse-la !



Lecteur, ce ne sont pas des mots que tu lis à présent, c’est un cri. Un cri âpre, démesuré, trop important pour être contenu dans une seule gorge. Non tu n’assistes pas à une construction élaborée de pensées, d’arguments, de concaténations subtiles de chaînes lexicales. Une éructation démente, viscérale, primaire, une expectoration. D’aucuns appelleraient cela une thérapie, d’un point de vue strictement médical, pathologique, un acte palliatif ferait une désignation plus adéquate. Tu ne peux sentir la vibration du stylo sur le papier, ce tremblement fébrile de la bille tranchant les pages épaisses d’un vieux carnet, éludé par l’impression et la machine. Détrompes-toi cependant ! Si tu es encore en train de subir cette hululation lunatique, tu ressens toi aussi les sons étouffés qui ponctuent ce texte, c’est l’encre qui cogne contre le cadre de la page, comme autant d’hères suffoquées battant de leur tête les murs de leur prison de carrelage. Ecrire comme une bête en cage, un voyage ou une bête visite en dehors, au-delà. Ce cri ? C’est le cri de la Bête, le cri d’un Monstre qui n’ayant pu exprimer sa névrose dans le monde des humains, et stérile dans le monde figé des lettres et des mots, a trouvé sa place dans l’espace qui te relie à ce texte. A ton imaginaire. Après ces quelques lignes, le cri du monstre se sera tu. Perdant la force du verbe, le souffle s’estompe, n’ayant plus d’yeux pour être entendu. Tu réaliseras finalement que tu n’avais rien lu.












pas de titre juste des pitres LE MENSONGE MONDIALE … INSCRIT DANS L’ORGANISME NATUREL ! LA SAUVAGERIE EN SON NOM , C’EST LA TERREUR … D’OU L’ETERNEL RECALCITRANCE ! Mondialement Organiquement Naturellement Sauvagement Terriblement Récalcitrant Eternellement LE MONDE CE MONSTRE $%&£%&€% Mécaniquement Opiniâtrement NIHILISTE SICAIRES (T)ERROR RATATATATATATATATA EXPLOSION CE MONDE MONSTRUEUX AVEC DES PETITES FLEURS TOUTES JOLIES ! Mouche Ordure Nez Sexes Tromatismes Raclures EJECT IL N’EST PAS NECESSAIRE D’EN RAJOUTER CELA ME PARAIS SUFFISAMMENT EPICé !!! l’addition s’il vous plaît . PLK Flandrin 26sept2016 18h33





Didier Morisot : « Le coton est toujours gagnant » Orgueilleux depuis des années, j’ai sombré dans la modestie Le matin où j’ai dû laver un bonhomme soudain refroidi. Voilà déjà pour méditer sur le futile de l’existence ; Mon orgueil ainsi déprimé fut bientôt réduit au silence Par un détail insoupçonné ; savez-vous que tous nos sphincters Ont tendance à se relâcher quand la mort nous clôt les paupières ? Mais de pénibles conséquences ne tardent pas à découler ; L’intestin, enfin en vacances, libère ses hôtes sans plus tarder. Il est d’usage à l’hôpital de remplir avec du coton Ce stupide orifice anal qui fait des siennes sans sommations. On a beau être président, archevêque ou bien général, Le coton est toujours gagnant, envahisseur de nos entrailles. Voilà pourquoi, à chaque décès, ma vanité est en détresse ; Quand je vois du coton cardé, j’ai envie de serrer les fesses. Fin…



La planète Terre a été conçue pour vous, Terriens de pacotilles, A mes yeux vous n’êtes que des petites allumettes, que je craque dans mes doigts, juste histoire de consumer votre corps de bois. Je suis la puissance suprême, la force de vie poussée à l’extrême, Je peux décider de la vie, de la mort, du présent et de l’avenir. Avant que je crée votre planète, j’étais déjà dans l’univers, et après l’anéantissement de votre monde, je serai encore là. Je vous ai fait don du pouvoir et du savoir, le don de créer et d’aimer. Du pouvoir, vous en avez fait la guerre, du savoir, vous avez fait les bombes, Le don de créer, vous en avez fait le béton et la pollution Quant au don d’aimer vous en avez fait la haine, le racisme et la discrimination. Réveillez-vous, car il en est encore temps.



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Chute libre




Chroniques d’un enregistrement studio dans un village valaisan Journal de bord du studio : jour 9 (1/2)... Déjà 4 nuits sans sommeil… à se nourrir exclusivement de pain rassis et restes de pizzas froides… nos dents commencent sérieusement à se déchausser et des cernes à encombrer nos joues… Je remarque désormais chez mon guitariste des signes d’épuisement physiques se manifestant par de trop soudains tremblements, la perte de cheveux par mèches entières, ainsi que l’apparition d’un regard de plus en plus inquiétant à mesure que le frigo se vide (l’absence soudaine des chats de la maison n’est pas totalement étrangère à cet angoissant sentiment...). Dehors, toujours regroupés autour du chalet, les villageois alimentent les brasiers allumés depuis maintenant 2 jours, brandissant fourches et torches et se signant désormais lors de nos passages aux fenêtres conformément aux instructions des cultistes récemment dépêchés sur les lieux… Le son de leurs litanies déviantes ne couvre cependant pas les incessantes vociférations distordues de nos instruments malmenés fiévreusement et sans interruptions depuis maintenant plus de 72h... Épuisés et bien qu’aux portes d’une folie que seules les effets de quelques drogues semblent repousser pour le moment, nous poursuivons nos travaux... Journal du studio : jour 9 (2/2)… C’est vers 3h du matin que l’attaque eu lieu. Pris d’une soudaine aliénation collective, que seules expliquent les superstitions omniprésentes en ces contrées, ainsi que les tragiques conséquences de croisements consanguins séculaires, la 100aine de villageois rassemblée aux portes de notre chalet se décida à forcer notre entrée... Frappé en pleine transe par un soudain sentiment de danger salvateur, je titubais vers l’étage inférieur, totalement nu et armé du dernier bâton d’esquimau que j’avais pu cacher à l’insatiable appétit de mon acolyte… Le destin voulu que l’amas agraire constitué par nos assaillants fut ralentie à la vision des restes de ce que furent les chats de la maison qui, dissimulés par mon compagnon après ce que je crois avoir été un funeste repas, tombèrent de leur cachette sur le sol du couloir aux premiers coups de bélier de nos ennemis… Décidant de profiter de l’hébétude envahissant les esprits ruraux de ceux



qui autrefois furent nos voisins, j’entamais le rituel occulte d’intimidation transmis dans le plus grand secret de générations en générations d’enfants sudistes… et c’est à la vision de mon bâton d’esquimau et au son d’un pilou-pilou remarquablement belliqueux que les premières lignes ennemies prirent la fuite… Cette victoire fut néanmoins de courte durée. Les exorcistes, suivit d’autochtones forcenés brandissant d’indescriptibles instruments de musique traditionnaux, apparurent ! Désormais recouvert d’eau bénite froide (bâtard !!!) et incapable de supporter plus longtemps le son répugnant de ces instruments alpins déviants joués par des types en bretelles aux liens familiaux tous relatifs, j’abandonnais le niveau inférieur, tentant de bloquer les assaillants dans les escaliers en leurs jetant mon stock de chaussettes sales... C’est alors qu’apparu mon guitariste (lui aussi totalement nu et singulièrement recouvert de sirop d’érable), avec le regard halluciné d’un ingé son voulant faire profiter à qui aurait le malheur de croiser sa route l’Engeance musicale que nous avions mis au monde après plusieurs heures de mixage... Et c’est tout aussi soudainement que les sons traditionnaux des répugnants instruments de nos ennemis s’éteignirent sous la centaine de décibels générés par les enceintes exagérément puissantes de mon hôte, poussant par là même nos ennemis à fuir sur fond de prières latines et d’insultes issues d’un ignominieux patois local... Nous sommes désormais en sécurité, peut-être pour quelques heures et en mesure de poursuivre nos travaux… du moins tant que nos corps pourront supporter le manque de nourriture et l’absorption des drogues nécessaires à notre concentration. Néanmoins, plusieurs questions m’assaillent alors que je m’accorde quelques minutes de repos... Que faisions nous totalement drogué et complétement nu en pleine nuit avec mon guitariste ? Que vais-je faire désormais dépourvu de chaussettes ? Pourquoi ai-je la bande son de Brokeback Mountain dans la tête depuis 2 jours ? Pourquoi nos assaillants ont ils récupéré mon bâton d’esquimau ? Où mon Léo a t’il planqué ce putain de sirop s’érable ?... Journal de bord du studio : jour 10… Aussi brutale qu’une cirrhose du foie en tournée, une MST en vacances ou un contrôle fiscal au mois d’août, la réalité est venue nous frapper en pleine gueule, au moment même où la tension de la nuit passée avait laissé place à l’enfièvrement créatif (et un peu chimique) recherché depuis quelques heures… Ça a débuté par une question simple… anodine… dont la réponse



me donne encore froid dans le dos. S’en suivi un court moment d’incompréhension… Choc !... mâchoire ouverte, lèvres tombantes... moche ! On n’avait rien vu venir et pourtant on y était... « Putain, plus de clopes mec !! » T’y crois ? Sans dec’… les boules ! GRAVE ! D’autant qu’dehors, les locaux avaient opté pour un genre de siège et que l’tabac se trouvait bien évidemment derrière... Là, ça changeait tout, et on était pas d’humeur (même si à 2 contre 100, pas trop les moyens de faire les marioles une fois le nez dehors)… Puis tous ces cons, ba ils avaient sorti les tracteurs pour bloquer les accès menant au chalet et pas genre qu’un !!..., non mais sans rire, t’imagine la scène ?... et toujours pas moyen de mettre la main sur ce foutu sirop d’érable... Bref, on monte un plan en 2/2 (un batteur et un gratteux complètement défoncés…, autant dire qu’on a pas misé sur du complexe...). Il nous fallait une diversion… un morceau qui donne envie de casser des voitures…, un de ceux qui tape direct au plexus et cause plein fer aux cerveaux reptiliens de nos geôliers... le tout avant que le manque de nicotine ne monte et que le tabac ne ferme... alors exit les arrangements tordus, les transitions léchées et les prétentions artistiques ! Du brutal !! Qui va vite et fort, avec un mix qui casse la gueule et fait instantanément tomber enceinte toutes femmes n’ayant pas déjà quitté ce village dégénérescent perdu à 1200 mètres d’altitude en plein milieu des Alpes... 1h30 plus tard, me voilà dehors, en tongs (plus de chaussettes...), profitant du vacarme généré par la diffusion de « l’œuvre » à peine mixée par les gigantesques enceintes que mon gratteux avait déplacé sur son balcon… Check visuel : guetteurs abêtis ! Je passe un barrage… easy ! Un rapide regard en arrière… outchh! Imagine un mec de 2 mètres beaucoup, complètement nu (mis à part un chapeau de ranger australien) en train de faire de l’air guitare sur un son Power Métal 100% teinté 80’s, diffusé avec une sono dont le volume est poussée à... ba au moins 11 ! Rien qu’en y repensant, je m’sens un peu sale... mais bon… c’est eux qui ont commencé ! On se bat avec nos armes, et mon Léo, ba c’est du lourd ! Bref, tentative de discussion en Suisse Allemand avec le vendeur de clope : - échec - :( Droite dans la gueule : - succès - :) Me voilà dehors avec 1 cartouche… de quoi tenir environ 36 heures ! Et là… putain, c’est mesquin le local que j’me suis dit… coupure du son ! De l’électricité pour être précis… dans tout le village en plus... (après coup, j’ai su que c’était le montage sound system maison du Léo qu’avait tout fait péter... Du lourd j’vous dit le bonhomme !!).



Reste que j’suis dehors comme un con, avec une cartouche de clope et un vieux buraliste (j’avais pas mentionné son âge ?) complètement cuit à la poire qui hurle à mon attention dans une langue oubliée des choses incompréhensibles, mais qui font tourner une soixantaine de têtes de Steiners* vers moi… ! Trop nombreux… Game over - fin du run ! Foutu pour foutu, rien à perdre : j’étale le vieux, je m’assoie, j’allume une clope et je pense à cette belle femme que j’ai pas assez connu ! 35 ans, c’est pas bien vieux pour partir, mais j’fais parti de ceux qui ont quand même pas mal rigolé. Et puis finir 20 ans de batterie sur un morceau Heavy Métal…c’est naze… mais j’ai le sourire (surtout en pensant aux fans de prog) ! Bref, je savoure ma dernière clope avant... d’éclater de rire !!! Les cons ! j’y crois pas ! Le Karma mec ! Un truc pareil, que dans les films, et encore, y a que Carpenter qui aurait osé ! Quand j’ai raconté ça à Léo, il m’a parlé d’une histoire d’animal totem, de destinée, d’extraterrestres et d’Iron Maiden... rien compris... (et malgré tout ça, pas moyen de lui faire dire où se trouve sa cachette à sirop...) ! J’t’explique : c’est hyper naze ! Les tracteurs bloquaient les routes et issues de ce charmant village Suisse-Allemand. C’était tout hermétique, tout carré, tout Suisse-Alémanique quoi ! Sauf qu’en face du tabac, ba y avait une superbe étendue de gazon, avec un beau panneau marqué : «interdit de marcher sur la pelouse» (opportunément rédigé en français d’ailleurs…) et que les Steiners*, ba y ont même pas envisagés qu’on puisse oser… Pour te dire, j’avais à peine une tong dessus que le tiers de mes poursuivants tombaient inanimés et que les autres se signaient en convulsant à la vue de l’outrage ! Un genre de choc des cultures j’imagine... faut dire qu’entre l’agriculteur Suisse-Allemand et le rocker méditerranéen… y a comme un monde… Bref, je rentre en courant, on barricade le chalet en fumant des clopes et on laisse les autres se dire des trucs du genre qu’on est vraiment prêt à tout ! Reste à trouver comment continuer la session rec sans électricité…, mais à voir la tête de mon Léo, j’crois qu’il a déjà un plan… Histoire à suivre… Vincent Vega * Steiner : nom de famille véritablement partagé par 70% des habitants du village d’E…..t



Participe au prochain numéro ! Thématique : la métamorphose ...ou autre chose, si tu as une meilleure idée...

Envoyez vos images et textes avant fin janvier 2017 à

lamouche@darksite.ch La Mouche a besoin de vous !


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