Journal de l'assurance — Édition d'avril 2020

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DOSSIER AGENTS GÉNÉRAUX

Inquiétudes au Québec concernant APEXA APEXA a bon espoir de voir tous les assureurs et les agents généraux adhérer à sa plateforme au cours de 2020. La pression que crée ce virage vers plus de conformité entrainera un écrémage de la force de vente, croient des agents généraux québécois. TEXTE : ALAIN THÉRIAULT

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Cinq assureurs et quatre agents généraux sont à l’origine d’APEXA (lancée en aout 2017) : Canada Vie, Empire Vie, Industrielle Alliance, Manuvie et Financière Sun Life du côté des assureurs; et Financière HUB, Groupe Financier Horizons, IDC Worldsource et PPI du côté des agents généraux.

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’adoption d’APEXA a néanmoins des effets sur la stratégie des agents généraux québécois. C’est notamment le cas pour Yan Charbonneau, PDG d’AFL Groupe financier. AFL Groupe financier mise sur les acquisitions pour croitre. Or, M. Charbonneau estime qu’un conseiller expérimenté qui transfèrerait ses affaires à AFL a moins de potentiel de croissance interne. M. Charbonneau va même jusqu’à refuser des conseillers peu prometteurs en matière de croissance des ventes, qu’ils aient ou non un volume important et une longue expérience. Il dit d’ailleurs en avoir refusé plusieurs au cours des derniers mois. « Un conseiller qui vend trois polices par an avec nous ne nous intéresse pas. Il nous coutera trop cher. » APEXA n’est pas étrangère à cette décision, admet le PDG d’AFL. Car APEXA exige qu’on passe par sa plateforme pour tout nouveau conseiller, ce qui entraine des couts supplémentaires pour le mettre sous contrat. Selon le PDG d’AFL, APEXA poussera les agents généraux à segmenter leur groupe de conseillers. À AFL, ceux qui ont un important volume d’affaires en vigueur, mais ne désirent plus vendre de nouvelles affaires, seront invités à vendre leur volume, explique Yan Charbonneau. Garder des conseillers inactifs dans ses rangs peut aussi avoir des répercussions en conformité, signale M. Charbonneau. Veiller à la conformité coute de plus en plus cher aux agents généraux, dit-il. Un agent général doit aussi s’assurer que les politiques de conformité des conseillers sont à jour. « Pour certains qui travaillent à temps partiel, elles ne sont souvent pas à jour… quand il y en a. Pour éviter les problèmes, nous refuserons de nous associer à eux. » Les couts préoccupent : une facture dans les six chiffres Les agents généraux reconnaissent qu’un système comme APEXA s’impose dans un environnement où la conformité prend de plus en plus de place, mais pas à n’importe quel prix. Vice-président directeur général de Groupe Cloutier, Michel Kirouac croit qu’APEXA est la voie de l’avenir, parce que la plateforme permet d’uniformiser la mise sous contrat des conseillers. APEXA a toutefois ses forces et ses faiblesses, dit celui qui figure parmi les six agents généraux à siéger à son comité de gouvernance.

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Il souhaite des éclaircissements sur la tarification. « La tarification n’est pas idéale. À 2 000 conseillers, multiplié par des frais annuels de 75 $ plus taxes, il nous en coutera 150 000 $ par an. Si je compte tous les conseillers qui ont au moins un contrat d’assurance avec nous (3 000), ça fait une facture de 225 000 $. Nous n’avons pas l’intention d’absorber seuls cette facture », s’insurge M. Kirouac. APEXA est aussi un enjeu pour MICA Services financiers. « Le système est extrêmement onéreux et inefficace, à l’heure actuelle, lance Gino Savard, PDG de MICA. Ce ne sont pas tous les assureurs qui y ont adhéré, ce qui nous oblige à travailler en double dans ces cas-là. En plus, les ressources d’APEXA ne sont pas très bilingues. » MICA s’est sentie forcée d’y adhérer, affirme M. Savard. « C’est maintenant la seule façon de coder de nouveaux représentants. Ça ne veut pas dire que nous sommes d’accord. » Les choses évoluent rapidement Membre d’un sous-comité créé par APEXA pour traiter de ces questions, Martin Savard, associé et vice-président directeur de MICA, souligne que dix assureurs avec qui MICA traite actuellement passent par APEXA. Il se demande ce qu’il en sera lorsque les 19 fournisseurs de MICA le feront. « Pour l’instant, Manuvie, Canada Vie et iA Groupe financier exigent que toutes les nouvelles affaires et tous les nouveaux conseillers passent par APEXA. Je n’ai toutefois pas entendu qu’un nouveau représentant ait été refusé par un assureur parce qu’il n’était pas sur APEXA. Nous avons lu une lettre d’Empire Vie selon laquelle l’exigence serait en place le 1er avril », précise Martin Savard. Oui, APEXA coute cher, poursuit-il. Il s’agit d’un cout annuel récurrent de plus de 15 000 $ pour MICA, sans compter les tâches additionnelles entrainées le processus. Un questionnaire s’impose lorsqu’un agent général veut coder un nouveau représentant. « Il y a aussi le permis et la preuve de possession d’une assurance responsabilité erreur et omission », dit M. Savard. Tous ne fonctionnent pas de la même façon, ajoute l’associé et vice-président directeur de MICA. « Neuf assureurs demandent que nous entrions nous-mêmes l’information des conseillers. Dans l’autre cas, c’est le conseiller qui doit les entrer. J’aurais préféré que ce soit nous tout le temps. Le conseiller qui doit entrer lui-même ses données a de bonnes chances d’avoir besoin de notre aide. L’implantation coutera plus cher la première année, car il y aura surchauffe de notre service à la clientèle », dit M. Savard.


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