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Traitements

Vous devez donc être aussi un peu psychologue ? Sophie Claeys : « La psychologie ne fait pas partie de notre formation. Avec un peu d’empathie, je peux déjà faire beaucoup pour le patient mais si j’estime que mon apport n’est pas suffisant, je conseillerai au médecin un renvoi chez un psychologue. »

Prof Peeters : « Je pense que dans le cas des maladies chroniques, les patients devraient de toute manière pouvoir bénéficier d’un accompagnement psychologique. Certaines personnes ont beaucoup de mal à accepter l’idée de devoir prendre des médicaments à long terme et ce, même dans les périodes où elles se sentent bien. En cas de complications aussi, il serait utile que les patients puissent consulter un psychologue ici en interne. Ils sont confrontés à des problèmes tels que la dépression, les problèmes sexuels et sociaux, la fatigue souvent incomprise par les autres, même au sein du cercle familial, le fait de ne plus oser sortir... »

« L’équipe MICI de l’hôpital Sint-Lucas se réunit tous les mardis. Les dossiers sont examinés et l’équipe assure ainsi la bonne continuité du traitement. Chaque patient a un médecin attitré. Si l’un des médecins est absent, un autre prend simplement la relève. Grâce à cette concertation, les médecins sont au courant des problèmes qui se posent chez les patients d’un confrère. Aujourd’hui, pour ce qui concerne les MICI, le niveau de concertation a d’ailleurs beaucoup augmenté entre les différents centres par rapport à avant. C’est le cas aussi au sein du groupe BIRD [Belgian IBD Research & Development], où tous les spécialistes se rencontrent et échangent des informations. »

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Examens & diagnostic

Examens & diagnostic

Peut-être que le terme « endoscopie » vous paraîtra effrayant au début. Mais pour que les médecins parviennent à un diagnostic correct et puissent instaurer un traitement ciblé, vous devez subir un certain nombre d’examens. Bien entendu, ce n’est une partie de plaisir pour personne... Les médecins doivent en effet examiner l’un des endroits les plus intimes de votre corps. Un endoscope est inséré par la bouche ou par l’anus. Vous devrez recueillir un échantillon de vos selles... Donc pas vraiment des manipulations très agréables, mais elles sont souvent moins pénibles qu’elles n’y paraissent à première vue. Des médecins chevronnés et un personnel infirmier expérimenté s’engagent à vous guider aussi confortablement que possible tout au long des examens. Vous ne devez donc en aucun cas vous sentir gêné(e).

Les personnes atteintes de maladie de Crohn ou de rectocolite hémorragique souffrent généralement de problèmes depuis longtemps. Leurs troubles ne sont pas toujours clairement définis. C’est pourquoi en première instance, le médecin vous écoutera simplement. En vous posant des questions supplémentaires, il essaiera ensuite de se faire une idée du schéma de vos symptômes.

Le premier examen physique (examen clinique)

Votre médecin est surtout attentif à vos symptômes. Il effectue un examen approfondi de votre abdomen et surveille également vos caractéristiques physiques telles que la pâleur ou une perte de poids. Un examen de l’anus fait parfois aussi partie de l’examen clinique. La maladie de Crohn peut en effet causer des fissures, des fistules et des abcès dans la région anale.

Un simple prélèvement sanguin et parfois aussi le recueil d’un échantillon de selles sont des examens précieux pour le diagnostic et le suivi de votre maladie. Toutefois, ces tests ne sont pas spécifiques car les résultats peuvent être anormaux dans de nombreuses maladies. Ils sont particulièrement utiles pour l’orientation initiale (pour déterminer le besoin d’examens supplémentaires) et pour évaluer la maladie et l’effet du traitement. Si votre organisme développe une inflammation, quelle qu’en soit l’origine, cela peut faire augmenter votre taux sanguin de protéine C-réactive (CRP). En outre, de nombreux autres paramètres peuvent être suivis dans votre sang, par exemple la présence d’anémie, de carences en vitamines, de valeurs hépatiques anormales, la concentration d’un médicament, etc. Quant à la calprotectine fécale (CF), c’est une protéine sécrétée en cas d’inflammation par la muqueuse intestinale et que l’on retrouve dans les selles. Cela peut donc aider à établir une distinction entre de véritables inflammations (de toutes natures) et les autres troubles intestinaux (par exemple le syndrome du côlon irritable). Il est également utile de surveiller l’activité de la maladie et d’évaluer l’effet du traitement. Par ailleurs, une analyse des selles permettra aussi de détecter des pertes microscopiques (non visibles à l’œil nu) de sang, ainsi que la présence de bactéries ou de parasites.

Endoscopie

Lors d’une endoscopie, une caméra fixée sur un tube flexible est insérée par la bouche ou l’anus afin que l’intérieur du tractus gastro-intestinal puisse être visualisé sur un écran. L’endoscope peut aussi être équipé d’instruments permettant de réaliser des biopsies (prélèvements de fragments de tissus qui seront examinés au microscope) ou de procéder à des traitements (ablation de polypes, arrêt de saignements, dilatation de zones rétrécies [sténoses], etc.) Il existe différents types d’endoscopie :

• La gastroscopie par la bouche vers l’œsophage, l’estomac et le duodénum. • La colonoscopie par l’anus vers le gros intestin jusqu’à la transition avec l’intestin grêle. • La sigmoïdoscopie ou colonoscopie gauche qui ne vise à examiner que la dernière partie du côlon. • L’anuscopie consiste à insérer un petit tube de métal court et droit pour ne voir que la région de l’anus.

Les valeurs de CRP et de CF sont deux des paramètres les plus testés dans le cadre des examens. • L’abréviation CF désigne la

« calprotectine fécale », une protéine que l’on trouve dans les selles en cas d’inflammation. • L’abréviation CRP signifie

« C-Reactive Protein » ou

« Protéine C-réactive » en français, une protéine dans le sang dont la présence augmente en cas d’inflammation (pas seulement dans l’intestin mais aussi ailleurs dans le corps).

CONSE!L

Si vous subissez une endoscopie, il est préférable de vous faire accompagner par quelqu’un qui pourra vous ramener chez vous après l’examen. En effet, il arrive souvent que les médicaments que vous pourriez avoir reçus (analgésiques, somnifères ou sédatifs) fassent de l’effet un certain temps.

Retarder les examens n’est pas une solution ! Vous trouvez pénible de subir tous les examens qui vont de pair avec les MICI ? Sachez que vous êtes loin d’être le (la) seul(e) dans ce cas. Endoscopie, colonoscopie, gastroscopie, tomodensitométrie… : tout cela paraît assez désagréable au premier abord, même s’il s’agit en réalité de procédures de routine. Mais reporter tous ces examens n’est cependant pas une solution. Plus vous attendez pour faire les examens nécessaires, plus l’inflammation peut se propager. Il est donc dans votre intérêt de partager dès le début vos craintes et vos préoccupations avec votre médecin afin qu’il puisse vous donner des explications claires et vous tranquilliser. Le tractus gastro-intestinal peut également être examiné à l’aide de diverses techniques radiologiques. Comme l’endoscopie ne montre que la première et la dernière partie de l’intestin grêle et seulement l’intérieur du tractus gastro-intestinal, des examens radiographiques tels que l’échographie, le scanner (tomodensitométrie) et l’IRM sont souvent importants pour compléter le bilan.

Échographie (examen par ultrasons) L’échographie utilise des ondes ultra-soniques inoffensives et présente l’avantage de pouvoir être réalisée rapidement et de manière ciblée. Les inconvénients sont une vue d’ensemble limitée (les structures plus profondes sont moins bien visibles et les clichés sont difficiles à comparer pour les autres médecins).

Tomodensitométrie (CT-scan, rayons X) La tomodensitométrie, un examen par scanner appelé « CT-scan » en anglais, fait usage des rayons X – ce qui constitue aussi son principal inconvénient. Grâce aux progrès techniques, la charge de rayonnement n’est plus aussi élevée qu’auparavant, mais chez les enfants, les femmes enceintes et en cas d’examens répétés, la prudence est de mise. Les avantages sont la disponibilité rapide et une bonne vue d’ensemble, avec des clichés détaillés qui sont facilement comparables et peuvent être aisément transférés à d’autres médecins. Avant de passer une tomodensitométrie, vous devrez souvent boire un agent de contraste. Un agent de contraste peut aussi vous être injecté dans une veine.

Imagerie par résonance magnétique (IRM, champ magnétique et ondes radio) L’imagerie par résonance magnétique (IRM) utilise un champ magnétique et des ondes radio. Les avantages sont la sécurité de cette technique et les différentes possibilités d’étudier le corps en détail. L’IRM constitue la meilleure façon de visualiser notamment l’intestin grêle et les fistules péri-anales. Les inconvénients sont les longs délais d’attente et le prix élevé. De plus, l’examen ne convient pas aux patients souffrant de claustrophobie, ni à ceux qui portent certains implants ou prothèses métalliques. Les stimulateurs cardiaques et les défibrillateurs empêchent également l’utilisation de l’IRM.

« La partie la plus pénible de l’examen est la préparation. »

Les MICI nécessitent souvent la réalisation d’examens complémentaires. Comment cela se déroule-t-il dans la pratique ? Pour le savoir, nous avons interrogé deux spécialistes de l’hôpital général de Turnhout.

Pourquoi faut-il souvent si longtemps avant que l’on puisse poser un diagnostic de MICI ? Dr Christophe Claessens : « Les symptômes classiques des MICI sont faciles à reconnaître : diarrhée, perte de sang, maux de ventre ou perte de poids. Ces troubles ne s’observent tous que chez un quart des patients. Certaines personnes ne présentent que des maux de ventre ou des problèmes articulaires pendant une longue période. Chez les jeunes patients atteints de la maladie de Crohn, le retard de croissance est parfois le seul symptôme, et cela peut prendre des années avant qu’une MICI ne soit évoquée. D’autres personnes redoutent de voir un médecin ou sont trop embarrassées pour parler de leurs symptômes… Lorsque les symptômes ne sont pas vraiment marqués, la MICI est parfois confondue avec une maladie gastro-intestinale fonctionnelle (syndrome du côlon irritable), notamment parce que le stress est un facteur d’aggravation dans les deux maladies. Une telle confusion donne lieu initialement à un traitement inapproprié. Il existe aussi le cas où une MICI est mise en évidence au cours d’une opération, et cela se produit le plus souvent lors d’une intervention d’urgence parce qu’une appendicite est suspectée. »

Comment se déroule la première consultation chez le médecin spécialiste des MICI ? Dr Claessens : « Bien entendu, il y a d’abord une discussion approfondie sur les symptômes, depuis les maux de ventre et/ou la diarrhée jusqu’aux pertes de sang, aux inflammations de la cavité buccale ou aux anomalies autour de l’anus. Nous voulons aussi savoir s’il existe déjà des cas de MICI, de psoriasis ou d’autres maladies de ce genre dans la famille. Ce premier entretien est suivi d’un examen clinique approfondi. L’abdomen est-il douloureux ou sensible à certains endroits ? Nous vérifions aussi le poids, les yeux, les articulations, la peau ou d’autres anomalies. Si nous suspectons une MICI, nous procédons dès cette première consultation à une prise de sang, à une échographie de l’abdomen et à une analyse des selles. Cette dernière permet de déterminer la valeur de calprotectine fécale (CF). Des valeurs augmentées de cette protéine indiquent la présence d’une inflammation active dans les intestins et justifient alors des examens plus approfondis, comme une colonoscopie. »

Nous en venons ainsi d’emblée aux examens les plus désagréables pour les patients atteints de MICI... Dr Cléo Croonen : « Ces examens sont malheureusement indispensables. Afin de pouvoir diagnostiquer une rectocolite hémorragique ou une maladie de Crohn, une colonoscopie est exigée. Cet examen permet de prélever des biopsies (fragments de tissu) de l’intestin qui pourront être examinées au microscope. La colonoscopie est également utilisée au cours du traitement, pour vérifier si la muqueuse intestinale se rétablit complètement, pour exclure d’autres causes telles que l’infection en cas d’aggravation soudaine et pour le dépistage de polypes (lésions qui peuvent être des précurseurs d’un cancer intestinal). Pour la colonoscopie, l’intestin doit être vide et propre. Par conséquent, quelques jours avant l’examen, vous devrez suivre un régime excluant les fibres non digestibles, ce qui veut dire pas de légumes, pas de fruits ni de pain gris. La veille et le jour même de l’examen, vous devrez boire un liquide laxatif (solution saline). Vous pouvez faire cette préparation intestinale à la maison ou à l’hôpital. La plupart des patients trouvent que cette phase préparatoire est la partie la plus pénible de l’examen. Pour que la procédure soit confortable pour vous, vous serez placé(e) sous sédatif. Cela signifie que vous recevrez par perfusion un analgésique et un produit pour vous endormir brièvement. L’examen a lieu alors que vous êtes en position allongée sur votre côté gauche ou sur le dos. Vous devrez souvent être tourné(e) sur le dos pendant l’examen et parfois une infirmière vous poussera sur le ventre pour guider la caméra dans une courbure plus raide. Pour mieux évaluer la paroi intestinale, on insufflera du dioxyde de carbone (CO2 ) dans votre intestin pour qu’il se « déplie ». De cette façon, on peut évaluer le gros intestin entier ainsi que la dernière partie de l’intestin grêle. En moyenne, l’examen complet dure 30 minutes. À cause de l’anesthésie, vous n’êtes pas autorisé(e) à conduire une voiture vous-même juste après l’examen. »

Dans quels cas est-ce nécessaire de pratiquer d’autres examens, comme par exemple une gastroscopie ou un examen radiologique ? Dr Croonen : « Comme la rectocolite hémorragique est localisée dans le côlon et n’affecte que superficiellement la muqueuse intestinale, ces techniques sont peu utiles dans ce cas. En revanche, la maladie de Crohn peut également affecter l’estomac et souvent l’intestin grêle. De plus, l’inflammation affecte toute l’épaisseur de la paroi intestinale, souvent avec des complications dans les zones voisines (par ex. abcès ou fistules). La gastroscopie et des examens radiographiques tels que tomodensitométrie ou IRM peuvent donc constituer des compléments importants pour évaluer l’activité de la maladie de Crohn, son extension et ses complications éventuelles. »

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Traitements

CONSE!L

Tenez un journal. En ce qui concerne votre maladie, c’est vous l’expert numéro 1 ! Tenez un journal pour y noter comment vous vous sentez, comment vous réagissez aux traitements et tout ce dont vous aimeriez discuter avec vos prestataires de soins. Un tel journal de bord peut contenir une mine d’informations pour le médecin, et il vous permettra aussi de mieux comprendre votre maladie. Vous et votre médecin pourrez ainsi garder le contrôle sur l’évolution de la maladie et du traitement, et éventuellement en adapter certains aspects. À la fin de ce guide, vous trouverez l’espace nécessaire pour tenir votre propre journal de bord.

Traitements : vous avez votre mot à dire

Pour votre traitement, il est clair que vous dépendez de la science médicale et du travail des médecins spécialistes. Mais cela ne vous empêche nullement de prendre les rênes et de définir votre parcours en engageant le dialogue avec votre médecin. Le temps des décisions unilatérales et de la communication médecin-patient à sens unique est révolu. En cas de maladie chronique, il importe que votre médecin soit pour vous une personne de confiance de premier plan. Il a pour mission de vous conseiller en connaissance de cause sur les meilleurs traitements possibles et sur vos perspectives en termes d’évolution. Il est essentiel d’instaurer une relation réciproque de respect et de confiance pour mener le traitement à bon terme.

En tant que patient atteint d’une MICI, vous avez droit à un traitement adapté à votre style de vie, à vos projets et aux ambitions que vous souhaitez réaliser. Parlez-en à votre médecin, à l’équipe soignante et à votre entourage. Et n’hésitez surtout pas à poser des questions. Dans quelle mesure vos médicaments sont-ils sûrs ? Quelle est la probabilité que le traitement agisse ? Comment se déroule votre traitement dans la pratique ? S’agit-il par exemple d’une perfusion pour laquelle vous devrez vous rendre à l’hôpital périodiquement, ou d’un médicament que vous pouvez vous auto-injecter, ou encore de comprimés à avaler quotidiennement ?

Faites-vous entendre en tant que patient : votre maladie en sera positivement influencée

Votre participation active favorise la qualité du traitement, augmente son efficacité à long terme et peut limiter le risque de complications.

• Recherchez des informations détaillées sur les différents traitements possibles. • Engagez le dialogue avec votre médecin afin de décider pour quel traitement vous allez opter. • Veillez à ce que le traitement choisi soit le plus adapté possible à votre mode de vie et à vos attentes. • Fixez-vous des objectifs (recommencer à faire du sport, planifier un voyage...). • Essayez de rester aussi autonome que possible. • N’hésitez pas à demander de l’aide si nécessaire.

Pour les soins quotidiens et les problèmes pratiques, vous pouvez toujours contacter votre médecin ou l’équipe soignante.

Votre qualité de vie est prioritaire

Comment pouvons-nous vous offrir la meilleure qualité de vie possible ? Tel est le but principal de tout traitement d’une MICI. Les MICI connaissent de nombreuses manifestations et un même traitement spécifique peut souvent entraîner des réactions différentes en fonction des patients. Pour que vous puissiez, en accord avec votre médecin, élaborer un trajet de soins, vous devez surtout tenir compte de votre vécu de la maladie au quotidien. L’objectif du médecin est d’obtenir une période sans plaintes, la rémission comme on l’appelle, et d’éviter que la maladie ne s’aggrave à nouveau.

CONSE!L

Avez-vous déjà un pharmacien de référence ? Depuis le 1er octobre 2017, les personnes atteintes d’une maladie chronique (y compris une MICI) peuvent choisir un « pharmacien de référence » pour les soutenir dans leur traitement. Ce pharmacien attitré surveille de près votre consommation de médicaments, tient votre « dossier pharmaceutique » à jour et informe les autres prestataires des médicaments que vous prenez. L’INAMI rembourse ce service pour chaque patient ambulatoire ayant acheté au moins 5 médicaments remboursés au cours de l’année écoulée, dont au moins 1 pour une maladie chronique. Vérifiez auprès de votre pharmacien si vous pouvez faire usage de ce service.

Peut-on guérir complètement des MICI ?

Le but ultime d’un traitement ciblant une MICI est d’obtenir une cicatrisation complète de la muqueuse intestinale, une stratégie relativement nouvelle. Pour assurer le suivi de la cicatrisation, il faut régulièrement pratiquer une colonoscopie, qui constitue une procédure assez lourde, longue et coûteuse. La cicatrisation complète de la muqueuse intestinale est certes un bel objectif mais pas toujours facile à déterminer. Dans la pratique, les médecins visent donc souvent une « rémission soutenue », une longue période sans symptômes pendant laquelle les valeurs de laboratoire et la composition des selles sont parfaitement normales. Ils disposent d’une large gamme de médicaments pour traiter des maladies inflammatoires telles que les MICI. Ce processus se déroule généralement en deux phases :

• un traitement d’induction avec des médicaments puissants pour apaiser l’inflammation. • et un traitement d’entretien, afin de maintenir par la suite cette absence d’inflammation.

Le schéma de traitement

L’activité de la maladie (de légère à sévère) est déterminante pour le choix du traitement à instaurer. Tout traitement de la maladie de Crohn et de la rectocolite hémorragique vise à inhiber l’inflammation présente dans la paroi intestinale. Cette inflammation résulte d’un dérèglement dans les réactions de votre système immunitaire.

Selon la localisation de l’inflammation, la gravité de vos symptômes et les complications éventuelles comme les abcès et les rétrécissements (sténoses), le meilleur médicament possible sera sélectionné.

Auparavant, la démarche thérapeutique classique consistait en une approche par paliers progressifs (« step-up ») suivant laquelle on commençait habituellement par le traitement le plus « doux ». Par la suite, selon les besoins, des traitements plus puissants étaient instaurés.

Aujourd’hui, cependant, les médecins optent souvent pour des médicaments puissants dès la phase précoce du traitement, afin d’obtenir une évolution plus favorable de la maladie dès le début et sur le long terme.

Chirurgie

Traitements ciblés (agents

biologiques et petites molécules)

Immunomodulateurs

Corticostéroïdes

Dérivés de l’acide 5-aminosalicylique (5-ASA)

Les classes de médicaments

Les composés 5-ASA Ces médicaments à base d’acide 5-aminosalicylique (5-ASA), sont utilisés depuis des décennies dans le traitement de la maladie de Crohn et de la rectocolite hémorragique.

Ces médicaments inhibent localement l’inflammation de la muqueuse intestinale. En fonction du site de l’inflammation, ils sont administrés par voie orale (par la bouche) ou par voie rectale (par suppositoire ou lavement). Cependant, les composés 5-ASA n’ont pas la même efficacité chez tout le monde, et des études récentes semblent indiquer qu’ils conviennent moins bien – voire pas du tout – pour le traitement de la maladie de Crohn, par rapport à la rectocolite hémorragique où ils paraissent très efficaces. Comme tout médicament, ils peuvent avoir des effets secondaires, surtout l’ancienne génération de ces produits. Votre médecin évaluera toujours avec vous les avantages et les inconvénients. Il vous conseillera parfois de continuer à utiliser le composé 5-ASA, même si vos symptômes inflammatoires ont disparu : vous le prendrez alors en tant que traitement d’entretien pour prévenir la réapparition de la maladie.

Antibiotiques Les antibiotiques sont instaurés en cas d’infection et lorsque vous souffrez de fistules péri-anales (autour de l’anus) douloureuses qui produisent des suintements. Ces troubles sont particulièrement fréquents dans la maladie de Crohn. Les antibiotiques stoppent l’infection et la production de pus, bien qu’ils ne fassent pas disparaître la fistule proprement dite. Leur durée d’utilisation doit rester brève pour empêcher les bactéries de devenir résistantes au traitement. Les antibiotiques sont également le traitement de prédilection en cas de « pochite » (inflammation d’une poche constituée après chirurgie, voir plus loin).

Corticostéroïdes Les corticostéroïdes sont analogues au cortisol, une hormone produite par notre propre organisme dans les glandes surrénales. Il s’agit d’une hormone de stress qui peut aussi inhiber le système immunitaire. Le terme « corticostéroïdes » est une dénomination commune pour les très nombreuses variantes chimiques de cette classe de médicaments. Ce sont de puissants antiinflammatoires qui agissent rapidement et efficacement.

Certains des médicaments de cette classe ont un effet systémique, c’est-à-dire qu’ils agissent sur l’ensemble du corps, alors que d’autres n’exercent qu’une action locale dans l’intestin. L’inconvénient des corticostéroïdes réside dans leurs effets secondaires, qui sont relativement lourds. Ils surviennent surtout à des doses élevées et lors d’une utilisation à long terme. Les corticostéroïdes « systémiques » classiques génèrent plus souvent des effets secondaires que leurs analogues modernes à action « locale », qui sont rapidement dégradés dans le foie.

Il est important de bien mettre en balance les avantages et les inconvénients des corticostéroïdes. Ils ne doivent pas être proposés comme traitement d’entretien. A court terme (quelques semaines à quelques mois), ils peuvent constituer un moyen très efficace de supprimer les poussées de la maladie, surtout si elles sont graves.

Effets secondaires des corticostéroïdes Court terme Long terme

Peau Acné, visage gonflé : le fameux « faciès lunaire » Vergetures, peau fragile, bleus

Yeux Épaississement du cristallin (vision trouble) Cataracte Os Décalcification Ostéoporose (os fragiles)

Humeur Insomnie, stress, euphorie, dépression, excitation

Système immunitaire

Général Augmentation de l’appétit, maux de tête Faiblesse musculaire, cicatrisation moins efficace

Hormonal Hypertension artérielle Infections plus fréquentes

Modification dans la répartition des graisses

Jaqueline

« Ma rectocolite ulcérohémorragique (RCUH) a été diagnostiquée en 2002. À partir de ce moment, mon état n’a pas cessé de se dégrader au fil des mois. Je suis restée en crise durant plusieurs années. Je prenais le maximum de corticostéroïdes possible (…) mais la rémission n’était jamais là ; les crises s’atténuaient juste légèrement. Dès qu’on diminuait un peu les corticostéroïdes, la crise revenait de plus belle ; je suis devenue corticodépendante. Après quatre longues années, le remboursement d’un nouveau traitement venait d’être accepté par l’INAMI pour la RCUH. Me trouvant dans les conditions d’octroi, j’ai pu l’avoir assez rapidement. À partir de ce moment, les crises se sont estompées pour s’arrêter complètement deux ou trois mois plus tard. Malgré tout, j’avais pris tellement de corticoïdes que j’ai eu quelques effets secondaires ; j’ai dû être opérée de la cataracte aux deux yeux cette même année. Durant six belles années, j’ai pu profiter d’une rémission. J’ai parfois eu de petites crises, mais rien à voir avec ce que j’avais connu auparavant. Par contre, six ans plus tard, les crises sont revenues petit à petit. Le médicament faisait de moins en moins d’effet sur mon organisme. Depuis 2014, je suis traitée par un médicament biologique. Bien qu’il ait fallu trois à quatre mois

pour que cela fasse de l’effet, je suis en rémission totale depuis cette période. Durant toutes mes « mauvaises années », j’ai toujours essayé de faire passer ma maladie au second plan. Même si c’était souvent très dur, j’ai accepté mes problèmes et j’ai toujours essayé d’avoir une vie « correcte » en parallèle. Mon entourage me dit souvent que j’ai un moral d’acier, mais je pense qu’il faut surtout le vouloir. Quand vous touchez vraiment le fond, vous ne pouvez plus faire que remonter. Il ne faut pas oublier que la médecine évolue très rapidement et c’est une très bonne chose pour nous tous. Si aucun traitement ne fonctionne actuellement chez vous, gardez espoir; le prochain fonctionnera peut-être. »

CONSE!L

L’utilisation de thiopurines rend la peau plus sensible au soleil. Évitez les fortes expositions, portez des vêtements couvrants et utilisez un écran solaire avec facteur de protection élevé. Immunomodulateurs Le nom de ce groupe de médicaments désigne bien leur action : des modulateurs du système immunitaire ou des médicaments qui agissent sur le système immunitaire. Les MICI sont en effet causées par une réaction exagérée de votre système immunitaire, qui se trompe en quelque sorte d’ennemi. Les immunomodulateurs agissent en diminuant la production et la multiplication des cellules immunitaires. Par conséquent, ces médicaments atténuent l’inflammation excessive. Les immunomodulateurs agissent lentement (après 6 à 12 semaines) et sont le plus souvent utilisés comme traitement d’entretien. Au début du traitement, vous devrez probablement encore prendre des corticostéroïdes en même temps. Suite à l’arrivée des traitements biologiques (voir plus loin), les immunomodulateurs sont aujourd’hui moins utilisés qu’auparavant. Parfois, ils sont utilisés en association avec certains médicaments biologiques.

Les immunomodulateurs les plus utilisés de cette classe sont les « thiopurines » (azathioprine, mercaptopurine ,...). Celles-ci ont été initialement utilisées à fortes doses contre le cancer. Actuellement elles sont utilisées pour traiter des maladies immunitaires incluant les MICI, à doses nettement plus faibles et avec beaucoup moins d’effets secondaires. Au début, on observe parfois des nausées, bien que celles-ci disparaissent généralement spontanément.

En raison des risques éventuels pour la sécurité, qui augmentent souvent avec l’âge, il sera probablement nécessaire de subir régulièrement des analyses de sang. Vous devrez peut-être aussi prendre d’autres médicaments protecteurs, comme de l’acide folique. Si vous envisagez de concevoir un enfant, ne manquez pas d’en discuter avec votre médecin en raison de l’impact potentiel sur la qualité du sperme et sur le fœtus.

Médicaments ciblés Les médicaments ciblés constituent un large groupe d’agents thérapeutiques qui agissent très spécifiquement sur une seule étape déterminée du processus inflammatoire. Ce groupe comprend les petites molécules et les médicaments (ou agents) biologiques.

Les médicaments biologiques sont en expansion depuis le début des années 80. Leur point commun est qu’ils sont fabriqués par des organismes vivants : bactéries,

champignons, cellules animales ou humaines. Ces organismes vivants sont en effet capables de produire des substances beaucoup plus complexes que les substances actives contenues dans les médicaments « chimiques » classiques. Les substances actives des médicaments biologiques correspondent souvent à des protéines humaines comme les anticorps, les hormones et les cytokines (substances dites « messagères »). Les médicaments biologiques sont beaucoup plus difficiles à mettre au point que les médicaments chimiques. Les cellules sont cultivées et multipliées en laboratoire, après quoi les protéines sont « récoltées », purifiées et traitées. Les lots produits ne sont jamais parfaitement identiques : des contrôles stricts doivent garantir qu’ils ne diffèrent pas significativement les uns des autres.

Éléments constitutifs (atomes) d’un médicament chimique.

Un médicament biologique comprend des milliers d’atomes.

Les médicaments biologiques sont administrés par perfusion à l’hôpital ou par injection sous-cutanée (juste sous la peau). Depuis un certain nombre d’années, de petites molécules chimiques ciblées sont également utilisées. Elles peuvent ensuite être administrées par voie orale (par la bouche). Le point commun entre les médicaments biologiques et les petites molécules ciblées est qu’ils inhibent l’inflammation au niveau des intestins en bloquant des processus très spécifiques de la maladie. Dans le cas d’une maladie auto-immune telle qu’une MICI, votre organisme héberge des protéines qui favorisent l’inflammation en activant les cellules immunitaires. En inhibant ou en bloquant complètement la production de ces protéines, l’inflammation est réduite ou parfois même complètement arrêtée. En général, le résultat est visible au bout de quelques semaines. Avant de pouvoir commencer à prendre l’un de ces médicaments, il est nécessaire de subir de nombreux examens préliminaires. Par exemple, le médecin doit être certain que vous n’avez pas de tuberculose non détectée. Les autres examens peuvent varier en fonction

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