Le monde dans mon assiette (Le Soir-Iles de Paix)

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en collaboration avec

Journée Mondiale de l’Alimentation

Le monde dans mon assiette © Belga

O Le bio, la solution à tout ? P.4-5 O Du producteur à l’assiette,

la vie de nos aliments P.12-13 O Olivier De Schutter : “ Réhabilitons la cuisine ” P. 20-21

15/10/2016 Supplément gratuit du journal Le Soir


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Édito Christophe Berti, rédacteur en chef du Soir Laurence Albert, directrice générale d’Iles de Paix

Nous devons donc tous remettre en question notre consommation de nourriture. Il y va de notre santé… mais pas seulement. Si la planète se déglingue plus vite que jamais dans l’histoire, c’est aussi une question d’alimentation. Nous nous sommes habitués à pouvoir acheter tous les produits toute l’année, peu importe que les fraises de novembre traversent deux océans avant de plonger dans la crème fraîche, ou que les thons rouges disparaissent à force d’être pêchés sans limite. Crise oblige, nous faisons tous la chasse aux prix cassés, peu importe les conséquences sur l’économie et l’emploi qu’elles supposent, ou le gaspillage alimentaire qu’elles induisent. Nous achetons encore trop souvent sans réfléchir à l’impact de notre Caddie sur l’économie, l’emploi, l’environnement de nos régions. Et nous sommes encore plus aveugles au sort de celles et ceux qui sont loin de nos regards, les paysans, du Nord comme du Sud, exploités, financièrement, socialement et humainement.

Nous ne sommes pas seuls à nous mobiliser. Au Sud aussi, les consciences s’éveillent. Le passage à une agriculture plus respectueuse de l’environnement est amorcé. Est-ce un choix pour tous ces petits producteurs ? Non, car ils observent d’année en année que les sols se dégradent, que l’accès à l’eau devient de plus en plus difficile. Dans ces écosystèmes plus fragiles que le nôtre, les effets de nos actions se font plus rapidement sentir. C’est donc tout un mode de production qui est à réinventer, là-bas aussi. Mais cela nécessite souvent des formations et un suivi personnalisé. Dans un monde désormais globalisé où la pollution et les changements climatiques ne s’arrêtent plus aux frontières, la solidarité est devenue une nécessité. Une solidarité bénéfique à tous. Que faire donc ? Agir ! C’est tout le sens de ce supplément, fruit d’une collaboration entre Le Soir et Iles de Paix. Nous rappeler que chacun de nos choix pèse. Que chacun d’entre nous peut consommer de manière plus durable, plus responsable. En privilégiant les produits locaux, les filières bio, les circuits courts, en limitant les quantités, en contrôlant les provenances. Cela ne prend pas nécessairement plus de temps, cela ne coûte pas forcément plus cher, mais cela procure beaucoup de plaisir, celui de rencontrer les producteurs, de découvrir de nouvelles saveurs, de tester de nouvelles recettes. Un geste citoyen majeur pour la planète et ses habitants. Que les politiques devraient prolonger, encourager, développer. CHRISTOPHE BERTI ET LAURENCE ALBERT

795

millions Une personne sur neuf souffre de la faim dans le monde. Soit 795 millions de personnes.

© Reporters

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ous voulez être un citoyen responsable ? Cela passe, aussi, par… votre assiette. Nous sommes de plus en plus nombreux, dans nos sociétés, à mesurer l’importance d’une alimentation saine et équilibrée. Les méfaits de la junk food ne sont plus à démontrer… Sans même verser dans l’excès de graisses et de sucres, nous sommes encore très majoritairement à côté de la plaque en matière de régime alimentaire. Nous mangeons beaucoup trop de viande, de friandises sucrées ou de snacks salés, pour ne citer que quelques (mauvais) exemples. Pire : la dernière étude publiée par l’Institut de santé publique n’indique guère d’évolution sur les dix dernières années.


Le monde dans mon assiette À l’occasion de la Journée mondiale de l’alimentation ce 16 octobre, il convient de rappeler que, malgré tous les efforts réalisés au cours de ces dernières années, 795 millions de personnes continuent à souffrir de sous-alimentation chronique dans le monde . En même temps, suivant l’Organisme mondial de la santé (OMS), plus de 1,9 milliard d’adultes sont aujourd’hui en surpoids et, parmi eux, 600 millions sont obèses (soit deux fois plus qu’en 1980). INTRODUCTION

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ussi, bien que les multinationales de l’agroalimentaire clament haut et fort qu’elles font tout pour garantir l’alimentation des 9,7 milliards d’humains qui vivront sur terre en 2050, force est de constater que le modèle qu’elles nous proposent n’a pas résolu le problème de la faim et qu’il génère des déséquilibres alimentaires majeurs au sein de la population. Qui plus est, ce modèle compromet sérieusement notre avenir du fait de sa contribution directe au réchauffement climatique, à la dégradation des écosystèmes, à l’épuisement des sols ainsi qu’à la perte de la biodiversité. Le changement climatique, qui se traduit par des événements météorologiques plus fréquents et extrêmes, comme les sécheresses et les inondations, et par une moindre prévisibilité des précipitations, entrave déjà sérieusement la capacité de certaines régions et communautés à subvenir à leurs besoins alimentaires. L’évolution des températures moyennes menace l’aptitude de régions entières, en particulier celles qui vivent de cultures pluviales, à maintenir les niveaux actuels de production agricole.

de ces constats, l’Evaluation internationale des connaissances, des sciences et des technologies agricoles pour le développement, commanditée par la Banque mondiale et la FAO en 2008, a tiré des conclusions sans appel. Pour les 400 experts mondiaux qui ont participé à cette évaluation, le statu quo n’est plus une option : nous devons impérativement changer notre modèle de production et de consommation alimentaire.

Le seul exemple de la filière de la viande nous en dit long sur le caractère non durable du système alimentaire actuel. L’élevage industriel nécessite en effet de très grandes quantités de nourriture et donc de grandes étendues de terres cultivables. Au total, ce sont plus de 70 % des terres agricoles qui sont actuellement utilisés directement ou indirectement pour l’élevage. Les impacts environnementaux de cette filière au rang desquels figurent les émissions de gaz à effet de serre, la déforestation et la pollution de l’eau sont évidemment insoutenables. Or, s’appuyant sur les standards de consommation des pays riches et la démographie mondiale, la FAO (Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture) estime que la production annuelle de viande devrait continuer à croître de façon très rapide, passant de 268 millions de tonnes en 2010 à 464 millions de tonnes en 2050 ! Partant

C’est pourquoi, s’appuyant sur de nombreuses études scientifiques, Olivier De Schutter, rapporteur spécial des Nations unies sur l’alimentation entre 2008 et 2014, n’a eu de cesse de préconiser l’adoption du modèle de l’agroécologie, le soutien à la petite agriculture familiale ainsi que la revalorisation des marchés locaux via les circuits courts. De plus en plus d’études montrent en effet que ces options sont non seulement viables sur le plan économique mais surtout qu’elles présentent de nombreux avantages comparatifs sur le plan social (création d’emplois ruraux, rémunération équitable des producteurs, reconstruction des liens producteurs/consommateurs) et, bien sûr, sur le plan environnemental (protection des sols, de l’eau et de la biodiversité, résilience face au changement climatique). Ce sont également les seules options qui nous permettront de faire face au défi de l’alimentation de la population mondiale dans

© Îles de Paix

le contexte de raréfaction des énergies fossiles bon marché dont le modèle agro-industriel actuel est totalement dépendant. Au Nord comme au Sud, de plus en plus de producteurs et de consommateurs sont à la base d’initiatives qui démontrent que le changement est possible et qu’il est à notre portée. Qui plus est, ces initiatives sont porteuses de sens sur le plan humain. Dans notre société obnubilée par la croissance, le rendement et la compétitivité, c’est sans aucun doute ce qui a suscité l’enthousiasme du million de personnes qui a visionné cette année le film Demain de Cyril Dion et Mélanie Laurent. C’est donc cette voie prometteuse de l’agroécologie que les ONG belges membres de la Coalition contre la faim ont décidé de soutenir et défendre par leur action tant au Nord qu’au Sud. C’est également dans cette perspective que l’association Iles de Paix fondée par Dominique Pire (prix Nobel de la paix en 1958) a décidé de s’associer au journal Le Soir pour vous offrir ce dossier spécial intitulé “ Le monde dans mon assiette ”. Nous vous en souhaitons bonne lecture. OLIVIER GENARD, Responsable de l’appui stratégique et du suivi des résultats des programmes Iles de Paix


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“ L’alimentation bio est accessible à tous ” Faut-il acheter des produits bio qui viennent de loin ? Est-ce que le bio coûte forcément cher ? Focus sur un secteur en pleine expansion. REPORTAGE

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e bio a le vent en poupe. En Wallonie, au 31 décembre 2014, on comptait 1 287 agriculteurs bio. Soit un agriculteur sur dix ! En un an, ce nombre a augmenté de 7,7 %. En Flandre, entre 2008 et 2012, les surfaces cultivées en bio ont augmenté de 41 %. Enfin, en Europe, en 2013, le bio représentait 5,7 % des surfaces agricoles utiles. Soit environ 11 millions d’hectares. Les grandes surfaces ont bien compris l’attrait des consommateurs pour le bio et ont rapidement emboîté le pas aux petites épiceries spécialisées. Du bio, on en trouve partout, mais il soulève quelques questions. Ainsi, est-il bien raisonnable d’acheter des produits bio qui ont parcouru des milliers de kilomètres en avion ? Certains diront que ce qui compte avant tout, c’est leur santé. D’autres s’interrogeront sur l’impact environnemental d’une filière qui a justement pour principe de respecter la planète. “ Le client associe souvent le bio au local ”, observe Ho Chul Chantraine, administrateur délégué d’Agricovert, une coopérative qui propose des paniers de fruits et légumes. Chez Agricovert, on défend une agriculture paysanne bio. “ Cela va beaucoup plus loin que le label bio. Ainsi, nous ne proposons que des produits de saison. Il faut savoir que les légumes de saison ont leurs raisons. Les choux présents en hiver sont très bons pour l’immunité, par exemple ”, note-t-il. C’est aussi ce que défend Serge Peereboom ( voir par ailleurs ). Chez Agricovert, on observe l’intérêt croissant pour le bio. Il y a cinq ans, la coo-

pérative comptait 19 producteurs. Aujourd’hui, ils sont au nombre de 30. “ Les producteurs qui rejoignent la coopérative ont deux ans pour se convertir au bio. Nous souhaitons soutenir ceux qui veulent se lancer ”, poursuit-il. Le nombre de clients a également augmenté. Aujourd’hui, Agricovert vend 500 équivalents paniers par semaine. Plus de dix tonnes de fruits et légumes tournent dans la coopérative chaque semaine. Et à ceux qui arguent que le bio est cher, Ho Chul Chantraine rétorque que, pour 9 euros, on peut avoir un panier de fruits et légumes pour une semaine. “ L’alimentation est accessible à tous. Mais il y a une réappropriation à se faire. Actuellement, on dit que le loyer est la priorité numéro un dans le budget, suivi par la santé, les loisirs et enfin l’alimentation. Pour nous, l’alimentation – qui est liée à la santé – doit venir en deuxième place. Le problème, c’est que les gens ne savent plus cuisiner. Si on mettait des cours d’alimentation obligatoires à l’école, les gens auraient de meilleurs réflexes. Les restaurateurs ont aussi un rôle à jouer en proposant des plats qu’on peut cuisiner avec les produits de saison ”, pense Ho Chul Chantraine. Enfin, par rapport au rendement de l’agriculture bio, les études montrent que le bio, parce qu’il oppose à la monoculture de l’agriculture conventionnelle des cultures variées, aura de meilleurs résultats en cas de contraintes environnementales.

32,5

millions C’était le nombre d’hectares de culture bio dans le monde en 2013

VIOLAINE JADOUL © René Breny


“ Tomate chérie ”, la conversion d’un frère et d’une sœur au maraîchage bio Charlotte et Quentin cultivent un champ en bordure de Wavre. Ils veulent faire redécouvrir aux gens le vrai goût des légumes grâce à leurs paniers. Et notamment à leurs tomates. REPORTAGE

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l est inattendu, ce champ rempli de choux, de salades ou encore de carottes. Un coin de verdure en bordure du Zoning Nord de Wavre. À deux pas d’une énorme firme pharmaceutique, ici on cultive fruits et légumes sans recourir aux produits chimiques. Du 100 % naturel. Pour parvenir au champ, il faut passer derrière une entreprise qui vend des chaussures et franchir un parking. Là, on découvre deux serres qui accueillent les dernières tomates de la saison, des poivrons et des aubergines. Un peu plus loin, deux conteneurs servent à stocker la récolte et à constituer les paniers de fruits et légumes vendus chaque semaine. L’assortiment annonce l’hiver, avec de belles nuances de verts et, ça et là, quelques taches mauves des salades.

Un métier qui a du sens C’est au milieu de ces légumes qu’on trouve Quentin et Charlotte Lefebvre. Un frère et une sœur qui ont décidé de se reconvertir dans le maraîchage. C’est Quentin qui a sauté le pas en premier en suivant une formation au maraîchage bio au Crabe à Jodoigne. “ Je souhaitais un métier qui ait plus de sens. Je voulais être plus proche de la nature et faire un boulot manuel ”, expliquet-il. A l’issue de sa formation, il a trouvé ce champ en location et a emmené sa sœur dans l’aventure. C’est ainsi qu’est né le projet “ Tomate chérie ”. Depuis janvier 2015, ils louent un hectare mais n’en cultivent que 35 à 40 ares, déjà une belle surface à gérer à deux. Et elle leur permet de composer de 80 à 100 paniers de fruits et légumes chaque semaine. Quentin met en pratique les enseignements reçus lors de sa formation. Pour le reste, tous deux apprennent par essais et erreurs. Et ça leur réussit ! “ C’est la deuxième saison et on ne s’est pas trop mal débrouillés ”, sourit Quentin. “ Il y a quelques plantations qui n’ont pas fonctionné mais nous sommes fort dépendants de la météo. Il faut prendre du recul et se dire qu’on ne peut pas tout maîtriser ”, estime-t-il. Charlotte et Quentin ont bénéficié d’une couveuse d’entreprises pour se lancer. Cela leur a permis de limiter les risques. Lui travaille

© René Breny

à temps plein, elle à mi-temps. “ Si on n’est pas trop gourmands en salaire, c’est un boulot qui peut rapidement nourrir. On gagne moins qu’avant mais on est plus épanouis. Le soir, on est fatigué, une bonne fatigue ”, note Quentin. “ Tomate chérie ” est en voie d’être certifiée bio. Il faut en effet trois ans pour obtenir le label. “ C’était une évidence de travailler en respectant les règles du bio mais pas forcément de se certifier. Le label sert surtout à rassurer les gens et à vendre aux magasins. Mais il y a d’autres systèmes qui se mettent en place ( comme le SGP, voir par ailleurs ) dans lesquels je me retrouve encore davantage. Et puis, une fois que les gens nous connaissent, ils voient comment on travaille. On n’a alors pas besoin d’un label ”, estime Quentin.

Un rôle d’éducation La rencontre avec les consommateurs est primordiale pour Quentin et Charlotte. “ Une relation de confiance se crée. On essaie de voir ce qui plaît, annonce Charlotte. Il faut trouver le bon équilibre entre le fait de proposer des choses nouvelles et le fait que cela reste gérable pour les gens. Mais nous avons un rôle d’éducation aussi. ” Ainsi, cette année, “ Tomate chérie ” propose pas moins de huit courges différentes. “ Mais nous mettons des photos sur Facebook pour expliquer de quoi il s’agit et nous postons

quelques recettes. Il faut faciliter le changement d’habitudes ”, poursuit Charlotte. La visite se termine par une dégustation de deux types de tomates : une noire de Crimée au goût fumé et une cornue des Andes à la saveur plus sucrée. Le grand-père de Quentin et de Charlotte cultivait des tomates il y a cinquante ans. Le nom du projet est-il un clin d’œil à l’aïeul ? “ C’est au niveau de ces fruits que la différence est la plus flagrante en matière de goût. Entre une tomate cueillie bien mûre et une tomate achetée en magasin qui a été récoltée verte et qui a mûri en magasin ”, souligne Quentin. Ils ont donc voulu faire connaître le vrai goût des tomates et montrer qu’il était possible d’en cultiver en Belgique. “ Elles poussent bien, c’est juste que la saison est moins longue ”, précise-t-il. Les tomates sont cultivées en serres mais cellesci ne sont pas chauffées. Chez “ Tomate chérie ”, on est persuadé qu’on pourrait faire vivre la population avec de petites exploitations comme celleci. “ Rien qu’à deux on fait vivre 200 à 250 personnes ”, déclare Quentin. “ Il faudrait encore davantage d’éleveurs bio, d’abattoirs dédiés au bio… Il y a encore des progrès à faire mais la Belgique a du potentiel pour être autonome. On l’était avant, alors pourquoi pas dans le futur ? ” VIOLAINE JADOUL


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165,6

L’indice de la FAO des prix alimentaires s’affichait à 165 points en août 2016. Il était à 155 en août 2015 et à 240 en avril 2011.


Éloigner les spéculateurs des marchés alimentaires Pour éviter de nouvelles « émeutes de la faim », la spéculation alimentaire doit être bannie, plaident de nombreuses ONG. Les réglementations tardent à entrer en vigueur. Depuis 2011, les prix sont retombés. Mais une étincelle pourrait provoquer une nouvelle flambée. ANALYSE

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’Histoire se souviendra que c’est en 20072008 qu’éclatèrent les premières émeutes de la faim du XXIe siècle. Dans plusieurs pays d’Afrique, du sousJean-Jacques continent indien, Grodent, Directeur d’Amérique centrale et de l’information du Sud-Est asiatique, chez SOS Faim. les populations descendent dans les rues des grandes villes pour protester contre la flambée des prix des denrées alimentaires. Relativement stables pendant les années 1990, ceux-ci s’emballent à partir de la deuxième moitié des années 2000 : entre juin 2007 et juin 2008, l’indice des prix des produits alimentaires de l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture ( FAO ), qui compile les cours mondiaux de la viande, des produits laitiers, des céréales, des huiles et du sucre, grimpe de 43 %. Pour les seules céréales, la hausse est de 75 %. De quoi provoquer la colère des citoyens des pays les plus pauvres. Une colère qui resurgira à peine trois ans plus tard, en 2010-2011, lorsqu’une nouvelle et brusque envolée des cours provoque encore une fois des émeutes.

Les hedge funds se déportent sur les matières premières Les causes de ces explosions des prix sont multiples : accroissement de la population, mauvaises récoltes dues à des événements climatiques, faible niveau des stocks, flambée concomitante des prix des produits pétroliers… Rapidement pourtant, c’est une autre responsable qui est pointée du doigt : la spéculation ! Chassés de leur dernier terrain de jeu ( l’immobilier ) par la crise des “ subprimes ”, banques, “ hedge funds ” et autre fonds d’investissement se seraient massivement déportés vers les matières premières ( “ commodities ” ), y compris agricoles, augmentant d’autant la volatilité des prix. Pour ce faire, ils

disposent d’instruments toujours plus sophistiqués comme les produits dérivés ( OTC ) ou les fonds indiciels ( ETF ), sortes de “ paniers ” de matières premières diverses. Des fonds qui ont gonflé ( jusqu’à dépasser les 300 milliards de dollars en 2008 ) parallèlement à la hausse des cours. De là à voir les premiers influencer les seconds, il n’y a qu’un pas. Selon la FAO, les spéculateurs seraient à l’origine de 60 % des fluctuations des prix sur ces marchés. Notons que d’autres études concluent pourtant à l’absence d’impact des “ financiers ” sur les cours des produits agricoles.

Une autre arme, le “ name and shame ” Peu nombreux toutefois sont ceux qui nient le caractère moralement très discutable de ces investissements sur des marchés affectant la survie de centaines de millions, voire de milliards d’êtres humains ( producteurs et consommateurs ). “ L’agriculteur a toujours spéculé, rappelle Jean-Jacques Grodent, responsable de l’information chez SOS Faim. En fonction des perspectives de marché qu’il anticipe, il choisit quel produit il va cultiver. En langage agricole, on parle d’ailleurs de “ spéculation ” pour désigner ce choix. Mais si la spéculation est purement financière, c’est-à-dire qu’elle n’a aucun lien avec les produits et les quantités échangées, elle n’apporte rien de bon à l’équilibre du marché. Il y a constitution d’une bulle détachée de la valeur objective des biens à disposition. ” C’est contre cette forme de spéculationlà que, dès 2008, Etats et organisations internationales ( Etats-Unis, G20, Union européenne ) ont annoncé vouloir lutter. Des annonces suivies, jusqu’à aujourd’hui, de peu d’effets. En Europe, la directive Mifid II qui doit apporter une plus grande régulation des marchés d’instruments financiers n’entrera en vigueur que le 3 janvier 2018. Et parmi les ONG, des voix s’élèvent déjà pour dénoncer

une réglementation qui ne sera pas suffisamment restrictive. “ On n’a pas avancé du point de vue réglementaire, déplore Arnaud Zacharie, secrétaire général du CNCD-11.11.11. Alors on a utilisé une autre arme, celle du “ name & shame ” ( “ nommer et couvrir de honte ” ). ” En 2013, plusieurs ONG ont publié un rapport dénonçant les banques belges qui proposaient des produits d’investissement dans les marchés agricoles à leurs clients. “ On a dévoilé leurs pratiques, et la plupart d’entre elles ont fait marche arrière en retirant ces produits de leur gamme, pour des raisons d’image et de marketing, explique Arnaud Zacharie. Mais certaines banques continuent de spéculer pour leur compte propre. ”

Le spectre d’une nouvelle crise Pour l’heure, ralentissement économique oblige, les prix des matières premières ont plutôt reflué. Mais ça ne veut pas dire qu’une nouvelle crise alimentaire n’est pas possible. “ Il y a pas de gros déséquilibre entre l’offre et la demande à l’heure actuelle, constate Jean-Jacques Grodent. Les spéculateurs ne sont donc pas aussi actifs qu’en 2008 et 2011. Mais ils n’attendent qu’un événement déclencheur, comme une sécheresse, pour revenir. ” C’est pourquoi, au-delà de l’aspect réglementaire, les ONG plaident pour une “ exception ” alimentaire à la libéralisation des marchés, pour permettre aux pays les plus fragiles de retrouver une véritable souveraineté alimentaire, via des mécanismes de régulation et d’intervention des Etats sur les marchés ( ce qui est interdit par l’Organisation mondiale du commerce – OMC ), ainsi que des mesures de soutien aux producteurs et d’investissement dans une production agricole diversifiée. BERNARD PADOAN


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32

mille

Une soupe tomatesboulettes en boîte parcourt 32.000 kilomètres de la production au consommateur

“ Il ne faut pas attendre que le système soit parfait pour agir” Peut-on consommer équitable, responsable et durable ? Pas si simple, mais possible, selon le professeur Eric Lambin, géographe à l’UCL et à Stanford, qui vient de publier “ Le Consommateur planétaire ” ( éditions Le Pommier ). ENTRETIEN

Eric Lambin, professeur à l’UCL et auteur de “ Le consommateur planétaire ”

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ans un monde où l’industrie agroalimentaire est dominée par des multinationales planétaires, le citoyen consommateur peut-il vraiment consommer de manière responsable et durable ? Ou est-il nécessairement destiné à tomber dans les chausse-trappes de produits qui ont fait deux fois le tour de la terre avant d’arriver dans son assiette, comme ces crevettes grises d’Ostende décortiquées au Maroc grâce au vil prix du transport de fret aérien ? Eric Lambin, géographe à l’UCL, répond à ces questions dans un livre éclairant, Le Consommateur planétaire. Nous l’avons rencontré. Vous décrivez un monde devenu “ complètement plat ” grâce au faible coût du transport, qui permet d’externaliser la pollution et la charge de la production à des milliers de kilomètres. Là où nous ne voyons plus les conséquences de nos choix… Quand nos ancêtres, pour se nourrir ou se loger, dégradaient leur environnement, polluaient leur sol ou leur eau, ils en payaient directement le prix, ils savaient pourquoi la terre avait brûlé ou l’eau était devenue

toxique. Une des conséquences de la mondialisation est l’augmentation de la distance géographique et sociale entre la consommation et la production de biens. Les filières d’approvisionnement en marchandises qui relient producteurs et consommateurs deviennent plus complexes, impliquent un nombre plus élevé d’acteurs et traversent plusieurs pays. Les acteurs qui extraient les matières premières n’ont plus de liens sociaux et culturels avec les consommateurs de leurs produits. Les coûts sociaux et environnementaux de la consommation sont dès lors éloignés et ne sont plus directement perçus par les consommateurs, ils sont externalisés. Dès lors, la réponse des consommateurs aux impacts négatifs de leur consommation s’atténue. L’éloignement limite la connaissance des impacts et affaiblit la motivation pour ajuster sa consommation en conséquence. Les effets pervers de la consommation sont rejetés dans l’ombre et ils n’inhibent pas le consommateur dans ses envies d’avoir toujours davantage de biens à moindre prix. Si vous en êtes en bateau et que vous avez un réservoir de 300 litres d’eau pour une semaine, vous allez adapter votre consommation, la fréquence des douches, l’usage de l’eau potable. Mais si vous avez un robinet qui coule sans fin et si l’eau semble ne rien vous coûter ( ce qui est toujours une illusion ), pourquoi le fermeriezvous ?


Comment alors sortir ces mécanismes de l’ombre ? Par l’information et la conscientisation, grâce à des filières d’approvisonnement plus transparentes. Je suis convaincu qu’il est possible de développer un mode de consommation gratifiant pour l’individu, à la fois socialement responsable, durable sur le plan environnemental et ouvert sur le monde, une consommation qui apporte de la plénitude sans repli sur soi et permet de partager les bénéfices de la prospérité à l’échelle planétaire. Une solidarité à l’échelle mondiale doit être possible, et elle doit pouvoir s’exprimer non seulement par un élan moral mais aussi par des mécanismes économiques et sociaux. Il y a une voie du milieu possible entre l’idéologie néolibérale sans régulation et l’idéologie altermondialiste “ bobo bio ”. Un marché libre, mais sous contrôle strict du consommateur informé et responsable. Sera-ce suffisant pour promouvoir un développement durable à l’échelle de la planète ? Je ne pousse pas l’optimisme jusqu’à la naïveté. Mais il faut saisir toutes les opportunités de rendre la mondialisation plus vertueuse. Pratiquement, que faire ? Acheter uniquement des produits belges ? Bio ? Certifiés équitables ? Les trois ? Ce serait hélas trop simple. L’exemple de la crevette grise décortiquée au Maroc avant de revenir dans les supermarchés de la côte belge montre bien qu’acheter belge ne suffit évidemment pas pour être rassuré. Les matières premières qui composent la plupart des biens de consommation de base proviennent des quatre coins du monde. Ce qu’il faut, c’est donc comprendre comment les produits que nous consommons sont élaborés. C’est évidemment complexe. Un simple objet comme un téléphone portable contient plus de 200 éléments. Comment savoir d’où proviennent ces composants et s’ils ont été forgés de manière équitable ? De même, difficile de savoir si l’un des ingrédients d’un plat préparé et cuisiné “ in Belgium ” n’a pas été élaboré de manière totalement inéquitable.

d’autres pratiquent l’écoblanchiment à bon compte, notamment quand les firmes déclarent unilatéralement qu’elles vérifient leur chaîne d’approvisionnement… ou qu’elles mettent sur pied un label ad hoc qui leur convient évidemment. Tout cela induit une certaine confusion auprès des consommateurs. Heureusement, il y a aussi des sources fiables d’information sur ces labels, comme infolabel.be ou mescoursespourlaplanete.com. Ou le site web d’Oxfam “ La face cachée des marques ” ( http://www.behindthebrands.org/fr-be ). Il ne faut pas attendre que le système soit parfait pour agir. Il faut exiger toujours plus de transparence et de clarté sur l’origine de nos biens de consommation. Mais le consommateur n’a pas des centaines d’heures pour vérifier si ses céréales ont été produites équitablement ou si son téléphone n’a pas été construit avec du minerai extrait par des enfants. C’est vrai. C’est pourquoi je recommande à chacun de choisir une cause qui leur est chère et de s’y consacrer : de lire des documents à ce sujet, de savoir faire la part des choses comme citoyen-consommateur. Cela peut être le travail des enfants ou les ressources en eau ou la biodiversité, par exemple. Et d’agir lors de ses achats en tenant compte de ce qu’il a appris. Si chaque citoyen agit comme cela, nous influencerons les acteurs du marché dans le bon sens, il y a aura un mouvement dont les entreprises productrices et les distributeurs devront tenir compte. Un boycott d’un produit inéquitable ou, à l’inverse, le référencement positif d’une filière innovante ont de véritables impacts sur la planète. Mais il faut aussi avoir le courage de faire ce que l’on dit. Plus de 90 % des gens affirment, dans les sondages, qu’ils sont prêts à modifier leur comportement d’achat pour des filières équitables et responsables. Mais la demande actuelle n’atteint pas les 10 %. Il y a donc une grosse différence entre ce que l’on dit et ce que l’on fait. FRÉDÉRIC SOUMOIS

Ne peut-on pas se tourner vers les certifications, censées faire ce travail d’enquête pour nous permettre de dormir sur nos deux oreilles ? C’est en effet la voie la plus directe pour augmenter ses chances d’acheter juste. Mais il faut aussi mettre ces labels sous le feu du questionnement. Il en existe aujourd’hui plus de 400, certains ne sont pas parfaits,

Le consommateur planétaire, Eric Lambin. Edition Essai Le Pommier

“ Choisir les produits du terroir ? Une idée trop simple ! ” Une des voies n’est-elle pas d’acheter des produits du terroir planétaire, comme le quinoa ou l’açaï, un fruit tropical aux multiples vertus de santé ? C’est l’une des réponses, mais attention une fois encore aux idées trop simples : l’intégration dans l’économie mondiale de petits producteurs de régions reculées et marginales peut, en théorie, contribuer à les sortir de la pauvreté et à préserver leur environnement naturel. Mais si un ensemble de conditions ne sont pas réunies, ils ne tirent que très peu de bénéfices sur les plans économique et social, et leur environnement naturel peut être rapidement dégradé. Cela a été le cas pour certains producteurs d’huile d’argan, dans le sud-ouest marocain. Par contre, des études ont montré que les producteurs de baie d’açaï au Brésil, de safran en Iran et de champignons chenille au Tibet ont profité financièrement du commerce international, jusqu’à 70 à 90 % de leur revenu global. Pour que cela ait des chances de fonctionner, il faut que les producteurs locaux soient propriétaires de leur terre, que la filière ne comporte pas trop d’intermédiaires, ni de situation de monopole et qu’on instaure une distribution équitable des bénéfices. Des politiques peuvent également contribuer à stabiliser les prix et à augmenter les profits pour les producteurs, afin d’éviter que l’essentiel de la marge bénéficiaire soit accaparée par les intermédiaires ou fluctue trop au gré des aléas climatiques. En plus des producteurs, les détaillants jouent un rôle important, car ils développent l’image du “ produit de niche ” auprès des consommateurs finaux, ce qui en fait précisément sa valeur. Identifier un nouveau produit, en voir le potentiel commercial et amorcer la demande pour ce produit nécessitent un esprit d’entreprise. Toutefois, sans régulation ni certification “ commerce équitable ”, le risque est très important que les intermédiaires captent une part disproportionnée des marges bénéficiaires aux dépends des producteurs. FR. SO


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Bons pour la santé, le goût et la planète ? Et si on effaçait, d’un coup de baguette magique, la malbouffe, qui engraisse les grands groupes agroalimentaires plus soucieux de payer un dividende à leurs actionnaires qu’à faire progresser la santé humaine ? Et si on trouvait des “ super-aliments ” qui combinent des qualités pour la santé avec une fabrication équitable et durable ? Si on rêvait ? INNOVATION

L

e professeur Yvan Larondelle de la faculté des bioingénieurs de l’UCL, lui, ne rêve plus. Il tente justement de combiner le développement de nouveaux aliments-santé avec la valorisation et, dès lors, la préservation des écosystèmes riches de biodiversité. “ Les vrais super-aliments doivent à la fois offrir une qualité nutritionnelle élevée et des impacts positifs sur la santé, mais aussi se caractériser par une empreinte environnementale faible, voire dans certains cas positive. ” Mais les super-aliments d’Yvan Larondelle et de son équipe de recherche ne sont pas nécessairement exotiques. Un bel exemple concerne le lait de vache. Avec ses collègues Michel Focant ( UCL ) et Eric Froidmont ( Centre wallon de recherches agronomiques – CRA-W ), le professeur a élaboré une démarche alimentaire naturelle pour produire un lait “ mieux gras ” et dont l’empreinte environnementale est fortement réduite. En intégrant la graine de lin, source d’acides gras insaturés, dans l’alimentation des vaches, et en sélectionnant mieux

En 2015, 90% de la production OGM de la planète se déroulait dans des pays en voie de développement

la ration alimentaire de base, les chercheurs sont parvenus à créer un lait « santé ». Le produit est riche en acide ruménique, un acide linoléique conjugué (CLA) vraisemblablement anti-cancer, antidiabétique, antiathérogène (ndlr., qui réduit les conséquences d’un excès de choléstérol) et immunostimulant (jusqu’à 7 fois plus concentré que dans le lait classique), il contient des acides gras oméga 3 (4 fois plus) et est nettement moins chargé en acides gras saturés athérogènes (moins 50 %). Cerise sur le gâteau, cette stratégie alimentaire diminue de 20 % les rejets de méthane et réduit de manière substantielle l’utilisation des matières azotées comme les protéines. Bon pour la santé, bon pour le climat et bon pour le portefeuille du fermier européen tellement malmené ces dernières années. Mais c’est surtout autour de la planète, et en particulier au Brésil, que le professeur Yvan Larondelle, son équipe de recherche et ses étudiants de la faculté des bioingénieurs “ AGRO Louvain ” pistent des plantes aux vertus étonnantes : au Brésil, la forêt amazonienne mais aussi l’écosystème du Cerrado recèlent des trésors de biodiversité, menacés par la surexploitation et l’agrobusiness. Parmi ces trésors, des centaines de plantes dont les propriétés sont inconnues, ou qui

© Photonews

Yvan Larondelle, professeur à l’UCL

90

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ont été peu à peu oubliées, balayées par la mondialisation de l’alimentation. C’est ainsi que l’açaï, le fruit d’un palmier amazonien, dont le jus est gras et fibreux, n’était utilisé que localement, dans la région du Pará dans les années 1990. Les recherches ont rapidement montré que ce jus contenait des quantités exceptionnelles de composés phénoliques aux vertus antioxydantes. “ Un grand verre de jus contient environ 1 gramme de composés phénoliques, c’est-àdire l’équivalent de la dose ingérée avec cinq portions de fruits et de légumes, explique le professeur Larondelle. Nous avons mis en évidence chez des volontaires que la prise de 350 ml de jus de ce fruit, pendant 28 jours, diminuait de moitié le niveau d’oxydation des LDLs circulants ( le “ mauvais cholestérol ” ) chez les individus sensibles. Or on sait que les LDLs oxydés sont à la base de la formation des plaques d’athérosclérose. ” Avec les collègues de l’université fédérale du Pará, à Belém, les chercheurs de l’UCL ont travaillé sur la conservation du jus d’açaï, ont optimisé sa récolte, ont élaboré des produits dérivés. Tout cela a largement contribué à donner des lettres de noblesse internationales à l’açaï, classé aujourd’hui comme “ super-fruit ”, vendu dans tout le Brésil et largement exporté. On le retrouve dans des produits distribués dans le monde entier. “ La plante ne pousse que sur place dans un écosystème particulier et il est peu envisageable d’en faire des plantations massives, qui mettraient potentiellement en péril la biodiversité de la forêt… et les revenus des petits fructiculteurs locaux. Mais c’est une menace qu’il faut surveiller. En tout cas, pour le moment, les paysans locaux ont augmenté de quatre fois leur prix de vente et peuvent entrevoir un meilleur avenir ( scolarité, accès à la santé... ). Ils ont aussi le sentiment de compter à l’international puisqu’ils sont les seuls au monde à produire ce jus santé. ” Les super-aliments ont le vent en poupe, l’intérêt des consommateurs est grandissant et les initiatives agroalimentaires vont dès lors un peu dans toutes les directions. “ Il convient de garder un regard critique sur les nouveaux produits qui colonisent notre marché. Après avoir tenté de laver plus vert, certains n’hésitent pas à surfer sur la nouvelle vague de l’aliment-santé sans se préoccuper de l’équilibre alimentaire ou des impacts environnementaux et sociétaux ”, commente Yvan Larondelle. FRÉDÉRIC SOUMOIS

Trois exemples de « super-aliments » d’aujourd’hui ou de demain Simple comme un œuf Améliorer son cholestérol en mangeant des… œufs, pourtant réputés chargés en cholestérol ? C’est en tout cas ce que prétend la firme Columbus, qui a “ inventé ” cet œuf depuis presque vingt ans. Cet œuf aurait la particularité de garantir un parfait équilibre entre les acides gras insaturés oméga-6 et oméga-3. Le rapport est de 1/1, alors qu’il est de 20 pour 1 dans les œufs classiques. L’alimentation est notamment enrichie en graines de lin. Et les poules Columbus ne mangent pas de maïs, source de ces oméga-6 dont notre alimentation est déjà trop riche. Cet équilibre retrouvé régulerait le cholestérol. Selon ses concepteurs, “ cela diminue le mauvais cholestérol ( LDL ) pour augmenter le bon ( HDL ). Les études prouvent aussi qu’on diminue de 15 à 30 % les matières grasses ( “ triglycérides ” ) dans le sang ”… Et le professeur Larondelle de renchérir : “ Aujourd’hui, plusieurs entreprises fournissent des œufs riches en acides gras oméga-3 et c’est une bonne chose. Par contre, je peux vous dire que les innovations au niveau des œufs ne sont pas terminées. La poule est en effet une magnifique usine métabolique. Si on lui donne les bons substrats, elle fera le nécessaire pour mettre dans son œuf le maximum de nutriments bons pour le poussin… et dès lors vraisemblablement très intéressants pour le consommateur humain. ”

Des super-fruits dans nos vergers ? Il n’y a pas que les fruits exotiques pour nous faire rêver à une alimentation plus saine. Les vergers de nos grands-parents présentaient une belle diversité de variétés de pommes, poires, prunes et autres cerises. Et leurs cousins sauvages qui avaient colonisés nos forêts européennes depuis belle lurette augmentaient la panoplie des fruits comestibles de chez nous. Ce patrimoine précieux, préservé dans plusieurs vergers conservatoires et en particulier au Centre wallon de recherches agronomiques ( CRA-W ), ne demande qu’à nous révéler ses secrets. “ Nous criblons actuellement des variétés anciennes de pommes et de poires, de même que leurs cousins sauvages, pour identifier les individus dont la pelure est riche en triterpènes car

il s’agit là de composés bioactifs antiinflammatoires. Encore un travail collaboratif où nos étudiants bioingénieurs de Louvainla-Neuve s’associent avec des chercheurs du CRA-W et du Centre de Michamps, mais aussi avec des collègues de la faculté de pharmacie de l’UCL et du Luxembourg Institute of Science and Technology ( LIST ) pour percer les mystères de ces fruits anciens, dans la perspective de leur donner un nouvel avenir, hors des musées mais dans nos vergers… et nos corbeilles de fruits ”, s’enthousiasme Yvan Larondelle. “ Gageons que ces nouvelles pistes de valorisation de notre patrimoine agricole ou naturel pourront offrir de nouvelles voies de diversification à nos fructiculteurs, mais aussi aux entreprises de transformation prêtes à nous préparer de nouveaux jus, de nouvelles compotes ou de nouvelles gelées avec une note santé plutôt parfumée. ”

Une barre nutritionnelle pour concentrer les bienfaits de la nature Deux étudiants bioingénieurs néolouvanistes ont élaboré un nouvel alimentsanté qui se veut équilibré et concentré en nutriments : une barre hypocalorique, satiétogène, savoureuse et surtout riche en nutriments. Ce prototype intéresse déjà des industriels wallons dont les ambitions internationales sont franchement avouées. “ L’idée est ici de constituer une matrice de base équilibrée, riche en protéines végétales de haute valeur nutritive, en acides gras oméga-3 et en fibres alimentaires solubles et de la décliner en différentes versions via l’incorporation d’extraits de super-fruits ”, explique Yvan Larondelle. “ Nous avons voulu mettre en avant des ingrédients de qualité déjà commercialisés par des entreprises wallonnes réunies dans le pôle de compétitivité Wagralim. L’originalité est de les associer de manière optimale pour la santé du consommateur. Et puis nous nous faisons plaisir en ajoutant à cela de l’extrait d’açaï et bientôt d’autres extraits de fruitssanté qui sont dans notre ligne de mire ”, commente encore Yvan Larondelle. Et le chercheur de rêver à une large gamme de “ Waliments ” qui, “ comme sa région natale, serait diversifiée et ouverte sur le monde ”.


LE MONDE DANS MON ASSIETTE 12

De la vache à l’assiette

Le veau est engraiss à l’aide de soja impo ce qui peut provoqu et de la pollution lié

Déguster une bavette de bœuf a un coût. Et celui-ci n'est pas uniquement financier, mais aussi environnemental. La viande bovine poursuit un long circuit, entre le moment où la vache paît dans son champ et où le steak arrive dans notre assiette.

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15

Selon la FAO, l’élevage représente près de 15% des émissions de gaz à effet de serre dues à l’action humaine

Modes de transports Quantité de CO2 émise pour le transport d’une tonne d’aliment sur une distance d’un kilomètre

Le client, lui, va se rendre au supermarché pour acheter sa viande et ensuite la ramener chez lui.

Bateau 15 à 30 g/tonne/km

Train 30 g/tonne/km

Le produit vers les su D’abord d puis dans accessible

Voiture 168 à 186 g/tonne/km

Camion 210 à 1.430 g/tonne/km

Avion 570 à 1.580 g/tonne/km


sé. Cela se fait souvent orté de l’étranger, uer de la déforestation ée au transport.

t fini est envoyé upermarchés. dans un grand dépôt s des supermarchés es au grand public.

La vache est acheminée depuis l’exploitation vers l’abattoir.

Une fois tuée, elle sera envoyée vers une usine de transformation où la viande sera découpée en morceaux, éventuellement utilisée dans des préparations puis emballée.

Les emballages, eux, ont dû être acheminés depuis un site de production vers l’usine de transformation de la viande.

Un commerce de viande globalisé De et vers l’Europe Le transport de denrées à l’intérieur de l’Europe se fait généralement par camions

Depuis l’Asie, l’Amérique du Sud et l’Afrique vers l’Europe Le transport de denrées se fait par avion ou par bateau selon la rapidité avec laquelle les denrées doivent arriver à destination. Les produits frais ou exotiques le seront par avion. Tandis que les kiwis, bananes, le riz, les conserves… le sont par bateau.


LE MONDE DANS MON ASSIETTE 14

Pérou : un grain équitable dans le café Cela fait des années que SOS Faim est présente au Pérou. Fin des années 1990, l’ONG belge a commencé à soutenir des coopératives de petits producteurs de café et de cacao. Quelques années plus tard, elle fait de même avec des producteurs de céréales locales. ONG BELGE

C

om m e d’autres pays du Sud, le Pérou est très dépendant de l’agriculture familiale pour nourrir sa population. Une personne sur quatre travaille dans le secteur agricole. Parmi les paysans, 83 % sont des agriculteurs “ familiaux ” qui cultivent des parcelles de moins de 5 hectares ; 80 % de leur production sont consommés sur le marché local.

Dans la Selva Central, région forestière semi-tropicale coincée entre la forêt amazonienne et les Andes, des producteurs de café se regroupent. La Florida, première coopérative soutenue par SOS Faim depuis plusieurs années, cherchait à l’époque à panser les plaies de la guerre ayant opposé le Sentier lumineux et les forces armées péruviennes. “ D’abord il s’agissait d’un soutien financier, le préfinancement de la récolte des membres de la coopérative, explique Claire Stoeckel, responsable des partenariats au Pérou et en Bolivie. Ensuite, l’aide s’est étendue à d’autres coopératives ”. Aujourd’hui, elles sont 14 qui regroupent 12 000 ménages, soit 5 % des producteurs de café et de cacao du Pérou. Les coopératives se regroupent ellesmêmes en une “ Centrale Café Cacao Pérou ” qui apporte un appui technique à ses membres, les assiste dans la recherche de financements publics, délivre des formations. Les occasions de conseils ne manquent pas : “ Les agriculteurs travaillent sur des petites surfaces, la productivité est faible. On peut l’améliorer. Par ailleurs, le Pérou est très affecté par les impacts du changement climatique, l’érosion des sols accentuée par la déforestation, les perturbations du régime des

précipitations. ” La démarche est la même, plus loin, dans la région andine de Cuzco où SOS Faim soutient plusieurs coopératives qui réunit des petits producteurs de céréales locales, dont le fameux quinoa. Il faut trouver les semences les plus adaptées, les meilleures techniques pour faire face à des conditions de culture compliquées, faciliter la transition vers le bio par des parcelles de démonstration, des tests pour convaincre les paysans. De quoi améliorer le revenu des agriculteurs qui ont désormais accès à de nouveaux marchés. Dans le pays, les choses changent. L’Etat soutient davantage les produits agricoles locaux. Même s’il a moins pignon sur rue que les cafés brésilien et colombien, le grain péruvien s’exporte de mieux en mieux et surtout se consomme de plus en plus dans le pays, même si le visiteur se voit encore souvent accueillir avec un café instantané soluble… “ On sent une volonté croissante de revaloriser les produits traditionnels péruviens comme le café ou le quinoa. La nouvelle gastronomie nationale valorise ces produits et contribue à en augmenter la consommation interne. Et ici aussi, les classes moyennes et supérieures cherchent des alternatives aux produits de l’agriculture conventionnelle et aux produits importés. ” Café, cacao, quinoa, la démarche est similaire : tendance au bio, agroforesterie, commerce équitable, production locale, autonomie alimentaire. MICHEL DE MUELENAERE

10

%

Au Sénégal, 10% de la population est sous-alimentée


Sénégal : l’agriculture familiale comme Référence Dans la région de Thiès, au Sénégal, une trentaine de femmes d’horizons divers (administration, ONG, indépendantes) ont mis en commun leur savoir et leur expérience depuis 2011 au sein de l’association Référence. Le but ? Entre autres, chercher à améliorer la sécurité alimentaire des communautés locales. RENFORCEMENT

N

ous travaillons avec un peu plus d’une centaine de familles, soit un millier de personnes ”, explique Mossane N’Dour. La présidente de l’association, représentante du forum social sénégalais soutenu par le CNCD-11.11.11, était de passage à Bruxelles, fin septembre. Objectif de l’association : renforcer la capacité de production des petits agriculteurs familiaux, développer leurs connaissances, faire renaître d’anciennes pratiques agricoles, développer des circuits de commercialisation en favorisant l’adaptation aux impacts négatifs du changement climatique. Il y a là des petits éleveurs, des paysans qui produisent des légumes pendant l’hivernage… “ Tout le monde travaille en bio, bien que nous n’ayons pas la certification. Les démarches sont bien trop coûteuses et nous ne nous adressons qu’au marché local.” L’agriculture familiale en Afrique est un pilier de la sécurité alimentaire. Les exploitations industrielles sont pour la plupart tournées vers l’exportation et ce sont les petites parcelles qui nourrissent les habitants. Le Sénégal, qui importait plus de 50 % de son alimentation, notamment du riz, tente de prendre le chemin d’une plus grande autonomie. Une nouvelle loi facilitant l’accès des petits paysans à la terre et garantissant le maintien sur celle-ci est en passe d’être adoptée. Il est temps. “ Les terres s’appauvrissent de plus en plus, explique Ndour. C’est le résultat d’années de monoculture de l’arachide, de l’utilisation intensive d’engrais chimiques, de l’érosion des sols due à la diminution de la couverture forestière

© SOS Faim

et à l’avancée du désert venant de Mauritanie. La montée du niveau de la mer entraîne également une salinisation de plus en plus importante des sols, les rendant impropres à la culture.” Avec ses faibles moyens, Référence assure la formation des paysans et un “ suivi technique de proximité ”. “ On les aide dans le choix des semences, on leur fait découvrir des bonnes pratiques ancestrales comme les champs collectifs, une parcelle que se partagent plusieurs familles, voire plusieurs villages. Cela renforce la cohésion sociale, le chef de ménage retrouve son autorité et cela met la femme au centre du jeu, puisque c’est elle qui organise et distribue la récolte.” L’agroécologie, qui enrichit le sol, est au centre des pratiques : fertilisation organique, association des cultures, assolement (rotation des cultures)… On retrouve les semences traditionnelles. On plante des dizaines de milliers d’arbres, notamment des anacardiers (pommiers-cajous) à la triple vertu : protection contre le vent et l’avancée du désert, récolte de la noix de cajou et source de bois. Le résultat : tomates, aubergines, manioc, piment, niébé (un haricot local), fruits, volailles prennent chaque jour le chemin du petit marché bio du samedi dans la ville de Thiès. “ On nous traitait de rêveurs au début. Mais la demande de produits bio est plus forte que l’offre, c’est une filière délaissée par l’Etat qui promeut toujours l’agriculture conventionnelle, conclut Mossane Ndour. Et nos prix sont identiques à ceux des produits conventionnels.” MICHEL DE MUELENAERE


LE MONDE DANS MON ASSIETTE 16

Un label de qualité qui rapproche les producteurs et les consommateurs Le Mouvement d’action paysanne soutient le développement de petites fermes qui travaillent au plus proche des consommateurs INITIATIVE

J

e suis paysan ! ” C’est le slogan mis en avant par le Mouvement d’action paysanne ( MAP ) qui vient d’être désigné ambassadeur du développement durable. L’idée étant que nous devrions tous soutenir l’agriculture paysanne ou, mieux encore, être partie prenante de celleci. Devenir des “ consomm’acteurs ”. “ L’alimentation est devenue sujette à spéculation comme n’importe quel bien, or elle doit être accessible à tous. Et pas n’importe quelle alimentation ”, scande Serge Peereboom, co-président du MAP. L’objectif du MAP est de “ tendre vers la souveraineté alimentaire en passant par la repaysanisation, explique Catherine Tellier, secrétaire générale du MAP. Nous le faisons en intégrant de nouvelles générations de paysans via notre école. Celle-ci soutient les paysans de la formation jusqu’à l’installation. Deuxièmement, nous voulons aider ceux qui sont dans l’agriculture conventionnelle à redevenir des paysans. C’est – à – dire des gens qui nourrissent les autres. ” Ce que le MAP défend, ce sont de petites fermes travaillant au niveau local et les plus proches possible des consommateurs. Cela permet de sensibiliser ces derniers au travail de la terre, aux fondements de l’agroécologie. “ L’agroécologie va au-delà de la production. On est dans une dimension humaine, sociétale et environnementale. On produit de la nourriture pour les humains mais il faut le faire en respectant la nature. L’agriculture conventionnelle appauvrit les sols et contribue à la destruction des espèces ”, déclare Catherine Tellier. Aux certifications bio, le MAP préfère le système participatif de garantie ( SPG ). “ Dans

le bio, on ne prend en compte que l’absence de produits chimiques. C’est pas mal mais on oublie l’énergie ou les conditions sociales. C’est comme ça qu’on importe des produits bio sur de longues distances par avion ”, regrette Serge Peereboom. Le principe ? “ Il s’agit d’une relation de confiance entre les producteurs et les consommateurs. Le SPG contient trois niveaux : le producteur entouré par des producteurs du même secteur, les consommateurs et le milieu associatif qui joue le rôle de troisième œil ”, explique le co-président du MAP. En Bolivie, où le système est fort développé, ce sont les municipalités qui jouent le rôle du troisième œil. “ Mais nous n’en sommes pas encore là en Belgique ”, poursuit Serge Peereboom. La garantie est donc octroyée suite à une concertation entre les trois acteurs. “ On trouve important que les consommateurs soient sensibilisés à ce que nous produisons. Cela permet de s’améliorer. Par exemple, en Flandre, un producteur arrosait ses cultures avec l’eau de distribution. Cela ne plaisait pas aux consommateurs car celle-ci est traitée. Ils ont donc mis en place un système pour capter l’eau de pluie et ont financé eux-mêmes les travaux ”, raconte Serge Peereboom. Pour autant, le MAP ne souhaite pas mettre en place des systèmes de sanctions pour ceux qui ne respecteraient pas les règles. “ C’est peu productif. De nombreux producteurs arrêtent ou ne se lancent pas à cause de cela. Nous souhaitons les accompagner les producteurs. On a tous à y gagner ”. VIOLAINE JADOUL

© Michel Tonneau


15

kg

On estime que chaque Bruxellois gaspille 15 kilos d’aliment par an

L’auberge Jacques Brel : cantine jeune, cantine durable Les évolutions alimentaires se marquent aussi dans les cuisines de collectivités. Un nombre croissant d’écoles, de cantines de sociétés privées, se mettent à « l’alimentation durable ». ALIMENTATION DURABLE

E

n réalité, explique Noémie De Coninck, de l’ASBL Biowallonie, de nombreuses initiatives existent depuis un moment. La différence, c’est qu’aujourd’hui on en parle beaucoup plus. ” Un concept multiforme : produits bio, achats en circuits courts, produits de saison, menus allégés en viande, lutte contre le gaspillage alimentaire, menus équitables, utilisation de céréales locales… les possibilités sont nombreuses. La Région bruxelloise, où l’administration et le politique se sont fortement investis dans le soutien à la “ Good Food ”, a lancé un appel à projets pour octroyer un label à des cantines exemplaires. En Wallonie, une plateforme d’échange d’expériences et de “ coaching interactif ” des cantines scolaires par des experts vient d’être créée. “ L’engouement grandit incontestablement, explique Anne Thibaut, experte en alimentation durable chez Inter-Environnement Wallonie. Mais il ne faut pas négliger les freins ” Les habitudes ancrées, la disponibilité des produits, la pression productive, la rédaction d’un nouveau cahier des charges pour les fournisseurs. Et puis, il y a les réactions des “ clients ”. “ Dans certains endroits, des gens se sont révoltés parce qu’en hiver il n’y avait plus de rondelles de tomates dans les sandwichs. Dans d’autres, c’est la diminution de la portion de viande qui a été très mal prise. ” Le grammage moyen de viande en collectivité se situe entre 150 et 200 grammes de viande. La recommandation de santé tourne autour de 90 grammes…

L’auberge de jeunesse JacquesBrel, à Bruxelles, a entamé ce chemin en 2009, en participant à un programme de formation pour “ cantines durables ”. Améliorer les menus, passer en revue les fournisseurs… “ Cela a commencé en faisant passer le petit déjeuner au bio, explique Fabienne Matton, la directrice. Puis on a progressé : notre auberge reçoit un public jeune et, pour des réunions, de nombreuses associations. Il nous paraissait essentiel de proposer quelque chose qui sorte de l’image vieillotte de cuisine de collectivité, vite faite. Et qui soit cohérent avec notre projet. On n’est plus dans la mise en œuvre de produits, il faut une aspiration, dans un autre projet. Il faut se former, chercher, écouter le client. ” Aujourd’hui, l’auberge de 170 lits, certifiée “ Clef Verte ” et en voie d’être labellisée “ Good Food ”, sert plus de 10 000 repas par an. “ Une bonne part de l’approvisionnement est d’origine biologique, même si nous ne voulons pas être des ayatollahs. Nous avons fait un gros travail de recherche pour trouver des fournisseurs locaux, de viande en particulier. Toutes les préparations sont “ de saison ”, et faites maison ”. Si le prix du repas n’a pas augmenté, il a fallu intégrer des nouvelles contraintes : “ Cela demande plus de travail et de préparation de ne travailler qu’avec des produits frais. C’est plus technique et, lors des coups de feu, il faut parfois renforcer l’équipe de trois personnes. Par ailleurs, il y a davantage de manutention et d’espace de stockage nécessaire. ” MICHEL DE MUELENAERE


LE MONDE DANS MON ASSIETTE 18

Briser le ce en préserv Fort de cinquante ans d’expérience dans la coopération au développement, Iles de Paix privilégie une agriculture familiale durable et une alimentation responsable. Son modus operandi ? Approche participative - Formation de proximité Solutions simples et reproductibles. ANALYSE

D

ix heures du matin. Depuis plusieurs heures déjà, Barnabé et un groupe de huit paysans frappent en cadence la terre rouge. Pliés en deux sous un soleil de plomb, les hommes fendent la terre, armés de houes : la végétation indésirable disparaît et le labour prend forme. Le champ sera bientôt prêt à recevoir les semences, après avoir été enrichi grâce au compost préparé au village. Pas de temps à perdre : les nuages gorgés d’eau arrivent, alors que la pluie se fait attendre depuis des semaines. A Boukoumbé, dans le nord du Bénin, quelques semaines de pluie sont censées satisfaire l’ensemble des cultures annuelles… Une fois le sol correctement amendé, le maïs et le soja semés en alternance sur la même terre, Barnabé pourra mieux respirer : son champ sera dans les meilleures conditions pour produire un maïs vigoureux, qui s’épanouira jusqu’à la récolte. A ce moment, la fierté et le soulagement d’avoir de quoi nourrir sa famille l’année durant se liront sur son visage.

Des rendements triplés, sans engrais chimiques Il y a peu, des centaines de cultivateurs comme Barnabé étaient confrontés à la famine chaque année. Des conditions de vie très dures et une pauvreté extrême affectaient déjà la région. Mais les récents dérèglements climatiques ont encore accentué la précarité de ces communautés. Au manque d’eau s’est aussi ajouté un appauvrissement général des sols, dû aux apports répétés en engrais chimiques. Les récoltes mises à mal, les revenus ont rapidement fait défaut dans de nombreuses familles. S’ensuivent malnutrition, endettement, déscolarisation et impossibilité de payer les soins de santé. Pour enrayer cette spirale, il était nécessaire d’agir. Iles de Paix a dès lors lancé un programme de formation en matière d’agriculture familiale durable sur un mode participatif. Comment

[ Ce contenu est fourni par Iles de Paix ] © Iles de paix


rcle vicieux de la pauvreté ant l’environnement arriver à produire plus de céréales avec moins d’engrais chimiques ? Comment faire pousser des légumes avec moins d’eau ? Pour y réfléchir, les paysans se sont rassemblés sous l’arbre du village. En débattant de pratiques observées ailleurs, quelques pistes d’expérimentation ont été choisies, comme la fumure organique et la réalisation de compost à base de bouses de vaches glanées par les femmes. En même temps, le calendrier de culture a été étudié sous un nouvel angle. Formateurs et paysans ont ensuite créé une parcelle de démonstration. Son objectif ? Apprendre aux producteurs les différents types de labours, la distance idéale entre les semis ou, encore, la pratique de cultures associées. Des voyages d’échanges entre cultivateurs ont également été mis en place pour favoriser le partage des meilleures techniques. Mis bout à bout, ces apprentissages ont permis à Barnabé et aux autres paysans de multiplier leur production de façon spectaculaire. Une fois le projet lancé, les rendements de maïs ont triplé. Résultats : de la nourriture en suffisance pour les familles et davantage de revenus grâce aux surplus. Parallèlement au maïs, une culture maraîchère a été développée pour réduire les déséquilibres nutritionnels en diversifiant

l’alimentation. Oignons, piments et autres légumes enrichissent aujourd’hui la pâte de maïs traditionnelle. Différents produits, transformés par les femmes du village, ont également été améliorés : fromage à base de soja, riz étuvé ou couscous de fonio de qualité sont désormais vendus avec succès au marché. Une activité à la fois source de fierté et de revenus pour ces femmes, capables à présent de financer les soins de santé et la scolarité de leurs enfants.

Ni argent ni cadeau La formation est une des pierres angulaires de l’approche d’Iles de Paix : diffuser des techniques simples, peu coûteuses et facilement reproductibles. Même si ces techniques sont fondamentales, elles ne représentent cependant qu’un maillon du changement. L’essentiel est en effet d’instaurer une dynamique communautaire. C’est pour cette raison qu’Iles de Paix met en place une démarche participative avec ses partenaires locaux : des solutions basées sur un savoir-faire local et expérimentées soi-même ont bien plus de chances d’être adoptées de façon durable. “ Quand j’ai vu les Blancs arriver, j’ai cru qu’ils venaient “ faire leur théâtre” puis qu’ils

partiraient, comme les précédents. Ceux-ci sont restés, mais ils nous ont prévenus : ni argent, ni cadeau, seulement une promesse : de la sueur et du travail ! C’est vrai, je n’ai pas ménagé mes efforts, j’ai dû apprendre et changer mes pratiques. Mais grâce à Iles de Paix, j’ai maintenant la main froide (ndlr : je ne dois plus tendre la main pour demander). Jamais je n’aurais pensé qu’un jour ma famille mangerait toute l’année à sa faim ! ”

“ Les grands embrasements naissent de petites étincelles ” Le coordinateur du programme d’Iles de Paix au Bénin aime à dire que “ le développement du Bénin appartient avant tout aux Béninois ”. Si l’objectif d’Iles de Paix est d’améliorer à long terme les conditions de vie des populations fragilisées, il vise aussi à les rendre autonomes, pleinement maîtresses de leur destin. Les cultivateurs béninois ont plus de talent et de courage qu’il n’en faut pour transformer leurs rêves d’une vie meilleure en réalité. Une impulsion a pourtant été nécessaire pour l’enclencher. C’est cette étincelle que la belle solidarité belgo-béninoise a provoquée.

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LE MONDE DANS MON ASSIETTE 20

“ Contre les plats préparés, réhabilitons la cuisine ” Second constat ?

Olivier De Schutter, Coprésident du Groupe International d’experts sur l’alimentation durable.

O

livier De Schutter est coprésident du groupe international d’experts sur l’alimentation durable. Entre 2008 et 2014, il a été le rapporteur spécial de l’ONU pour le droit à l’alimentation. Il pointe les pesanteurs de nos systèmes alimentaires et agricoles. Mais aussi leur dynamique. Votre constat ? Je fais deux constats, concernant les pays développés du Nord. Le premier est que nous avons vécu, depuis une quarantaine d’années, une “ transition nutritionnelle ”. Celle-ci fait que nous dépendons de plus en plus de produits alimentaires transformés, notamment de plats préparés. C’est une tendance forte dans tous les pays développés et de manière croissante au sein de la classe moyenne des pays émergents. Cela a considérablement alourdi notre empreinte environnementale : on consomme plus d’énergie pour la transformation des aliments, pour leur transport sur de longues distances, pour leur conservation, etc. Cette évolution est liée à nos modes de vie, beaucoup plus pressés que par le passé. Il est paradoxal de constater que notre capacité de nous déplacer plus loin et plus rapidement a progressé, mais que nous avons l’impression de disposer de moins en moins de temps. Notamment du temps pour cuisiner.

C’est que les modes alimentaires sont très différents selon les niveaux de revenus. Dans nos sociétés avancées, les revenus les moins élevés sont les plus affectés par la malbouffe, avec des taux d’obésité et de surpoids importants et leurs conséquences en termes de maladies cardio-vasculaires, de diabète, etc. Cette injustice découle du fait que l’information disponible, les normes sociales dans certains milieux, ne facilitent pas un mode de vie adéquat et plus sain. Ces évolutions sont-elles liées ? Elles sont liées à la politique agricole productiviste des années 1950-1960 qui a consisté à accroître la production en augmentant fortement les rendements agricoles. L’industrie agroalimentaire a pu avoir accès à une matière première agricole bon marché et écouler ses produits transformés à des prix abordables. Dans le même temps, s’est développée une offre alimentaire low cost, sous prétexte de maintenir des prix abordables pour les consommateurs les plus pauvres. C’est ce qui a accéléré l’épidémie de surpoids et d’obésité que nous connaissons.

3,1

La malnutrition provoque la mort de 3,1 millions d’enfants de moins de 5 ans chaque année

Y a-t-il un espoir pour que cela change ? Le poids des routines est extrêmement important dans les comportements alimentaires. Les changements sont donc très lents. Pour changer de manière significative, il faudrait réfléchir aux horaires de travail, à la distance entre le domicile et le travail, à la durée des navettes, à la répartition des rôles au sein de la famille : la cuisine reste considérée comme une activité féminine, donc © Photonews


dévalorisée et peu importante. Certes, dans certaines catégories de population, la demande croît pour des produits alimentaires de qualité et à prix abordable. On s’intéresse de plus en plus à la manière dont les denrées sont produites, au respect environnemental et à celui des droits des travailleurs agricoles. Cela complexifie la demande des consommateurs : d’un côté, des prix bas, de l’autre, des exigences qui augmentent. La grande distribution et l’industrie de la transformation tentent de s’adapter à cette nouvelle donne. Cela dit, les consommateurs disposent en général de trop peu d’informations qui leur permettraient de faire des choix éclairés. Même s’ils veulent changer, la qualité de l’information ne le permet pas.

engrais azotés, les pesticides, les semences commerciales produites par des semenciers spécialisés ) que d’opérer une transition vers une agriculture écologique. Cela suppose qu’on investisse dans la formation des agriculteurs et des agricultrices, qu’on dispose de débouchés pour la production issue de cette agriculture. Aujourd’hui, les acheteurs cherchent des grands volumes uniformes répondant à des cahiers des charges déterminés. L’agroécologie, c’est le contraire. C’est la diversité, le mélange. Il lui est donc très difficile de percer sur les structures actuelles de marché. Que dire au consommateur lambda ?

Comment améliorer la transparence ? Il faut par exemple plus de clarté dans l’utilisation des labels, avoir la possibilité de vérifier si ce que disent les distributeurs et les producteurs de produits alimentaires correspond à la réalité. Le consommateur est perdu face à la multiplication des allégations et a du mal à faire le tri entre ce qui est crédible et ce qui l’est moins. Il faut garantir la fiabilité et la transparence en certifiant les codes de conduite, en contrôlant mieux les labels. Certains labels sont certifiés, d’autres ne le sont pas. Et même ceux le sont, ne sont pas toujours d’une fiabilité parfaite. Le moment est venu d’aller vers plus d’harmonisation et de contrôle de la fiabilité. Si le consommateur se rend compte qu’on abuse de sa crédulité, même les bons labels vont en pâtir. Qu’est-il possible de faire pour changer cette situation ? La première chose, c’est la relocalisation des systèmes agroalimentaires. C’est à cela qu’appellent les tenants de la souveraineté alimentaire. Ce qu’on peut produire chez soi pour sa consommation, il faut le faire. Ainsi, on augmente la capacité pour chaque région de satisfaire ses propres besoins. Il ne s’agit pas de tendre vers l’autarcie, mais de considérer que le commerce international doit garder une fonction subsidiaire. Cette reconstitution de systèmes agroalimentaires locaux accroîtra par ailleurs la résilience aux chocs climatiques et économiques qui s’annoncent. Pour le reste – ce que l’on ne peut pas produire chez soi, donc que l’on importe –, il faut généraliser le commerce équitable. C’est une manière de s’assurer que le commerce international bénéficie effectivement aux communautés paysannes. Le problème est qu’aujourd’hui le commerce équitable a atteint une sorte de plafond. Il a bien progressé pour certains produits,

mais par manque d’incitants fiscaux ( par exemple, des tarifs d’importation réduits ), par manque d’une information suffisante du public, il pourrait ne plus progresser beaucoup. La troisième priorité est de permettre aux petits agriculteurs de pouvoir bénéficier de ces opportunités des chaînes mondiales d’approvisionnement. Aujourd’hui, l’agroalimentaire d’exportation se trouve entre les mains de gros producteurs qui maîtrisent les normes, le rapportage, les contraintes sanitaires. Ce n’est pas le cas des petits agriculteurs. Ces derniers doivent pouvoir se regrouper en coopératives pour renforcer leur pouvoir de négociation, pour disposer de moyens de stockage et de transformation sur place. Il faut enfin que les standards qui sont de plus en plus imposés par les grandes firmes agroalimentaires et les grands producteurs, surtout axés sur la sûreté de la chaîne alimentaire, soient négociés avec des représentants des associations paysannes et intègrent le respect des droit des travailleurs, le respect de l’environnement, etc. L’agroécologie, c’est la solution ? S’impose-t-elle ? Si l’on prend en compte le nombre de références à l’agroécologie dans les déclarations internationales, on constate que la prise de conscience progresse, que la préoccupation pour la “ soutenabilité ” est de plus en plus partagée. Dans beaucoup de régions, les sols sont fortement érodés et dégradés par les monocultures et les abus de l’agriculture conventionnelle. L’agroécologie est la solution. Mais, sur le terrain, les choses progressent très lentement. Parce qu’il est beaucoup plus facile de reproduire les solutions classiques de la révolution verte ( les

Il faut lui dire de réduire sa consommation de protéines animales. Pour des raisons de santé et d’économie des ressources naturelles, il est important de réduire la consommation de viande. L’impact de l’élevage industriel sur l’environnement est très important. Cela étant, il existe une viande produite à partir de l’élevage en pâturage, locale, très bonne, source excellente de protéines, de vitamines et de fer, tout à fait combinable avec le respect des principes agroécologiques. Il y a une bonne et une mauvaise viande : le problème est que les consommateurs n’ont pas la capacité de choisir, faute d’informations pertinentes et de choix. Seconde recommandation : quand on peut acheter des produits locaux, c’est mieux. Plus un produit a circulé sur une longue distance, moins sa qualité nutritionnelle sera élevée. Enfin, quand il s’agit d’acheter des produits tropicaux, il faut se tourner vers le commerce équitable. Ces trois règles, on peut les suivre facilement. Ensuite, il y a un changement plus radical : réduire la consommation de produits alimentaires transformés, d’aliments recomposés, de snacks, de plats préparés qui contiennent très souvent des additifs visant à préserver ou à améliorer le goût, la couleur, l’attractivité et à créer une addiction par ajout de sel ou de sucre. Ces aliments fortement transformés sont peu à peu à éviter. Il faut cuisiner chez soi à partir de produits frais dont on connaît la provenance. Il faut réhabiliter la cuisine et le repas pris en commun, on cuisine d’autant plus volontiers qu’on est ensemble et qu’on mange en grande convivialité. Malheureusement, la cuisine est souvent décrite comme une corvée. MICHEL DE MUELENAERE


LE MONDE DANS MON ASSIETTE 22

Pour aller plus loin, des li L’Agroécologie, une éthique de vie Éditions Actes Sud

À lire La faim dans le monde expliquée à mon fils Éditions Seuil Rapporteur spécial pour le droit à l’alimentation du Conseil des droits de l’homme de l’ONU de 2000 à 2008, Jean Ziegler a sorti un 1999 un livre où il répond aux questions que lui pose son fils, qui sont aussi celles que se posent tous les enfants du monde, sur la faim dans le monde. Un ouvrage didactique où le Suisse ne cache pas son indignation.

Le business est dans le pré Éditions Fayard Aurélie Trouvé, co-présidente d’Attac France entre 2006 et 2012, retrace de façon pédagogique l’essor de l’agro-business et sa mainmise sur l’alimentation. Comment les multinationales et les fonds financiers en ont fait un instrument de profit, détruisant au passage l’emploi et la nature tout en utilisant des slogans pseudo-écologistes, voire éthiques. Le livre veut plus témoigner des luttes et alternatives qui transforment déjà nos façons de produire, de consommer et d’échanger.

Nourrir l’humanité, c’est un métier Éditions Antoine Degive Il y eut d’abord un spectacle. Puis un livre, tout aussi fort et pourtant totalement différent. Le point commun : la situation des agriculteurs aujourd’hui. Comme dans le spectacle d’Art & tça, le photographe Daniel Fouss montre des choses simples : des visages, des paysages, des pratiques, des gestes qui semblent porteurs de pratiques immuables et qui sont pourtant en voie de disparition. Dates du spectacle sur www.artetca.com/agenda.

Pierre Rabhi, paysan, écrivain, penseur, est un des pionniers de l’agroalimentaire en France. Des milliers de personnes se massent pour venir l’entendre. Des personnalités comme Nicolas Hulot ou Marion Cotillard se revendiquent ouvertement de son héritage et de sa pensée. Dans son livre “ L’agroécologie, une éthique de vie ”, le paysan-philosophe précise le sens qu’il donne à ce terme depuis plus de trente ans.

À voir Demain Réalisé par Cyril Dion et Mélanie Laurent Le documentaire français sorti en 2015 est devenu un vrai phénomène de société. Réalisé par Cyril Dion et Mélanie Laurent, il a conquis le grand public et les spécialistes du cinéma en remportant de nombreux prix, dont le César du meilleur documentaire en 2016. Pour ceux qui ne l’auraient pas vu, le documentaire citoyen montre des initiatives positives dans des domaines très variés. L’agroécologie, les incroyables comestibles, la transition énergétique, l’économie circulaire…

Food Inc. Réalisé par Robert Kenner Nominé pour un Oscar, le documentaire provocant Food inc. lève le voile sur l’industrie alimentaire américaine et ses effets sur la santé humaine et sur l’environnement. Des immenses champs de maïs aux rayons colorés des supermarchés, en passant par des abattoirs insalubres, un journaliste mène l’enquête pour savoir comment est fabriqué ce que nous mettons dans nos assiettes. Derrière les étiquettes de “ produits fermiers ”, il découvre la réalité des lobbys agro-alimentaires.


vres, des films, des sites... Exposition Café In Mucem à Marseille (France) Le Mucem de Marseille propose Café In, une exposition qui montre près trois de cents œuvres d’art, photographies, objets, gravures, dessins,… Avec notamment un zoom sur la logique du marché du café et la mise en lumière de certains aspects moins connus : le poids des multinationales, les conséquences des crises de surproduction, l’émergence de modes nouveaux de production et de consommation plus équitables. Du 26 octobre 2016 au 23 janvier 2017 au Musée des civilisations de l’Europe et de la Méditerranée.

Et maintenant nos terres Réalisé par Benjamin Polle et Julien Le Net Ce documentaire raconte l’histoire de trois résistants à l’accaparement des terres en Afrique, trois figures emblématiques de la paysannerie qui défendent leurs terres et leur mode de vie face à des investisseurs étrangers. Un film qui montre que les alternatives à l’agriculture industrielle se multiplient et font leurs preuves en Afrique.

Alimentation : restons groupés www.groupesalimentaires.be Envie de créer un groupement d’achats alimentaire locaux ? À la recherche d’un groupement près de chez vous ? À la recherche d’un producteur pour compléter l’offre d’un groupe existant ? À l’inverse, vous êtes un producteur et cherchez un débouché ? Le site www.groupesalimentaires.be est l’annuaire qu’il vous faut. Les ressources sont nombreuses et mises à jour. On y trouvera également des explications sur les démarches à suivre. À visiter aussi : www.gasap.be et www.natpro.be.

À table, du champ à l’assiette www.expo-atable.be/ fr/catalogue En 2012, l’exposition “ A Table : du champ à l’assiette ” se dressait à Tour et taxis. Elle montrait les étapes qui conduisent les aliments du champ à l’assiette. L’exposition nous en apprenait beaucoup sur nos manières de manger, de gaspiller etc. Des solutions étaient proposées et posaient plusieurs réflexions : l’agriculture durable, produire autrement… Si l’exposition n’est plus visible, ses catalogues sont toujours disponibles avec les mêmes questions qui se posent.

À consulter Des légumes, ça se fristouille www.fristouille.org Du mal à trouver une recette avec les choux Kale, ou les radis noirs que vous découvrez dans le “ panier de légumes ” locaux de la semaine ? C’est parfois un obstacle pour ceux qui veulent manger local et de saison. Le site bien nommé www. fristouille.org donne non seulement des recettes, y compris végétariennes ou végétaliennes mais s’adapte également aux ingrédients qui se trouvent dans le frigo. C’est parfois simple, parfois pas.

Nourrir le corps et la tête www.alimentationdequalite.be Encore besoin de recettes ? D’un calendrier de saison, voire d’un guide de course ? Direction le site du réseau wallon pour une alimentation durable, initiative de 19 associations wallonnes. Mais il n’y a pas que des recettes ( même celles de Carlo de Pascale ) dans la boîte à outils. Il y a également de quoi nourrir… les réflexions. Et d’éveiller la conscience qu’une meilleure alimentation est possible, mais qu’elle ne se dessinera pas toute seule.


J’apprends à cultiver sans engrais chimiques!

© Olivier Detournaij

Si je reçois un poisson, je mangerai un jour. Si j’apprends à pêcher, je mangerai toute ma vie.

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