Livre benchicou algerie

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LE PROPHETE

Algériens. Bouteflika revendique d’être seul détenteur des droits d’expression à la radio et à la télévision. Khalida Messaoudi, ministre de la Communication, retient la leçon. « Le contrôle de l’ENTV n’est pas des prérogatives juridiques du ministère » (1), avoue-t-elle à l’Assemblée nationale. Tout est alors dit. Bouteflika regarde fixement son Premier ministre et lui dit d’une voix assurée : « Je suis contre l’indépendance de la justice. La justice doit être au service du pouvoir. La commission de réforme a fait son rapport, c’est bien, mais ce rapport va rester dans mon tiroir. » Le Premier ministre en question, Ali Benflis, en reste pantois. Mais est-ce bien étonnant ? Un prophète-président soucieux de « contrôler sa machine » pouvait-il réformer, c’est-à-dire concéder la liberté aux juges de diriger la justice en toute indépendance, aux journalistes celle d’animer la télévision dans le respect du service public, aux institutions de l’Etat de fonctionner et de se développer selon les autonomies qui garantissent l’Etat pérenne ? Le prophète Bouteflika est incapable d’accorder des autonomies : ce serait contraire aux principes même de sa survie en tant que prophète. Aucune des grandes réformes promises n’a vu le jour parce qu’il en a lui-même bloqué l’application sur le terrain, y voyant immédiatement le risque de transfert de prérogatives divines dont il a la jouissance à des catégories roturières qui n’en feraient qu’un piètre usage. « Lors du dernier tête-à-tête que j’ai eu avec lui le 6 mai 2003, je lui ai rappelé que c’est lui qui a bloqué les 1. Liberté, 7 novembre 2003.

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