Intervention(s) #01 | élodie & coquiette

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Élodie & Coquillet te Inter vention # 01

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PrĂŠa m b ule

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Au premier abord, elle paraît plutôt timide et réservée. Dès qu'elle est en confiance ou que l’on a le dos tourné, elle en profite pour faire des conneries. En réalité, Coquillette est de nature espiègle. Elle est amusante. Puis l'avantage avec elle, c'est qu'elle reste muette. Je profite ainsi de sa discrétion et de sa complicité.

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Quand Élodie part en vacances, il arrive qu’elle parte seule. Elle me confit alors ses clefs et la garde de son chat. Le félin répondant au nom de Coquillette réclame une attention quotidienne. Chaque jour, je lui rends visite et passe un petit moment seul avec elle dans l’appartement d’Elodie.

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Le premier jour, j’en profite pour apporter un petit pot de gros sel de Guérande. Il s’agit d’une attention égoïste. Chaque fois que nous mangeons chez Élo, une pincée de gros sel me fait défaut. Ou pour être plus exact, une pincée de gros sel de bonne qualité me fait défaut. Élo à un pot de gros sel qui ressemble à du sel régénérant pour lave vaisselle. Gustativement inintéressant, je me demande ce que je pourrais en faire.

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Au pied d’un meuble, une boite d’oeuf kinder pend au bout d’une ficelle. C’est l’un des jouet confectionné par Élodie pour divertir Coquillette. J’introduis quelques cristaux de gros sel à l’intérieur. Lorsque la boite est en mouvement, le bruit produit est différent que lorsqu’elle est vide. Quand Coquillette jouera avec son jouet, le bruit sera donc inhabituel. Élodie le remarquera-t-elle?

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Deux boîtes de tic-tac aux parfums différents sur une étagère. Je glisse trois tic-tacs «fresh melons» dans la boite de «fresh minth». J’égalise ensuite les comptes en faisant l’inverse. Chaque boîte conserve une quantité de tic-tac équivalente à celle présente avant mon intervention.

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Dans une petite boîte en plastique transparent se trouve quelques bouchons d’oreilles colorés. J’intervertis la position des bouchons d’oreilles rose avec les bouchons d’oreilles verts. Je replace ensuite la boîte à la place où elle était rangée.

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Une sérigraphie est exposée sur le linteau de la cheminée. Elle est encadrée et disposée entre deux vitres de verre afin de laisser visible son recto aussi bien que son verso. Je la retourne pour rendre apparent le verso plutôt que le recto. L’intervention me semble tellement évidente que je desside finalement de la remettre dans le sens où je l’ai trouvée.

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La carte postale représentant un Rothko reste strictement à la même place. Je change juste le sens de manière à ce que l’aplatxxxxxxx rouge se retrouve en haut. Le Rothko est donc à l’envers.

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Je place quelques clous de girofles dans un verre. Je mets une petite quantité du shampoing d’Élodie dans le fond du verre et laisse mariner les deux éléments pendant une semaine. A la fin de la semaine je reverse le contenu du verre dans la bouteille de shampoing. Le shampoing initialement aux «extraits de citron et vitamines végétales» devient «macération de clous de girofles, extraits de citron et vitamines végétales»

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Interversion de deux places de concerts placées à des endroits différents. La place pour RadioHead se retrouve sur le refrigérateur, celle d’Emilie Simon prend sa place.

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L’appartement d’Élodie est de taille modeste. Pourtant en se serrant bien, six ou sept personnes peuvent y partager un repas. Pour des étudiants à Aix-En-Provence, c’est presque un record. Si bien qu’il n’est pas rare que nos soirées se terminent chez Élo. Mes petites interventions me permettent de préparer notre prochaine soirée. Le moment venu, je pourrais réintroduire quelques-uns de ces changements subtiles dans le contexte de la soirée ou m’en servir pour alimenter la conversation. Par exemple : Comme à mon habitude, je demanderai du gros sel à Élodie. Si elle n’a pas encore remarqué la substitution, elle me proposera sans doute son gros sel habituel. Elle sait que je ne l’aime pas et pensera que je vais le refuser. S’agissant du gros sel que j’ai apporté, je pourrais cuisiner avec et lui proposer de goûter une saveur différente de celle qu’elle connait. Pour le gros sel dans la boîte de Kinder, je compte sur la complicité de Coquillette pour déclencher l’élément perturbateur. Après tout, il s’agit de son jouet, il est normal qu’elle en soit responsable. Je n’aurais qu’à être attentif au son que la boîte produira pour l’introduire dans la conversation.

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Pour d’autres éléments, je conviens avec Déborah d’un certain nombre de conversations à aborder. Il est plus facile de diriger une conversation vers un sujet souhaité si l’on est deux à l’amener. L’un peut la déclencher puis l’autre y répondre pour en affirmer l’intérêt. Déborah me permettra ainsi de dissoudre les soupçons. J’évoquerai l’exposition d’une des peintures d’Élodie à la galerie Montgrand (Avril 2010, Retour de Skopje Galerie Montgrand, Marseille). L’anecdote qu’elle ne manquera sans doute pas de me rappeler c’est que lors de l’exposition, sa peinture est tombée au sol. Lorsque le conservateur de la galerie l’a raccrochée au mur, il l’a mise à l’envers. Une fois l’anecdote évoquée, Déborah aura le chanp libre pour parler de peinture abstraite et par extension de Mark Rothko. Déborah est également mieux placée que moi pour questionner Élo sur son shampoing. J’engage donc des allusions aux fragrances de clou de girofle tandis qu’elle enchérie par des questionnements plus directs au sujet du shampoing d’Élodie.

J’ai imaginé de nombreuses autres interventions possibles. Scanner et rétrécir le nom écrit en lettres manuscrites qui est scotché sur la porte d’entrée, retourner le matelas pour le passer de la position hiver à la position été, affûter minutieusement tous son jeu de couteaux de cuisine... Le temps me fait défaut. Élodie est déjà de retour et elle prévoit de déménager dans les semaines à venir. Toutefois, mes petites interventions sont déjà une bonne base de départ. Le moment venu, tout se passe comme je l’avais imaginé. La soirée chez Élodie commence par une remarque sur le pot de gros sel. Voici

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donc un premier élément qu’elle a remarqué. Si Coquillette ne semble pas vouloir se préter au jeu, Élodie suit les conversations que nous proposons. Nous parlons de concerts auxquels nous avons assisté, de clous de girofles dont Elodie déteste le goût et l’odeur, de peintures abstraites... Quand Élodie parle de sa peinture à l’envers, Déborah introduit la peinture abstraite avec beaucoup de délicatesse. Puis voyant que les éléments que nous apportons ne déclenchent pas de réactions, nous abordons le Rothko accroché au mur de manière beaucoup plus directe. Déborah va jusqu’à questionner Élo sur ses cartes postales en étant postée devant.

Plus tard, Élodie nous avouera qu’elle n’avait remarqué que la boîte de gros sel. A la lecture de ce document elle m’a d’ailleurs précisé qu’elle n’utilisait ce gros sel que pour mettre dans l’eau des pâtes. Voilà qui est dit.

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Guillaume Loiseau www.guillaumeloiseau.com


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