Émile & Ferdinand - Numéro 19 (2016-5)

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Emile& Ferdinand Gazette

2016/5 | N°19 Bimestriel gratuit

Bureau de dépôt : 3000 Leuven Masspost | P-916169

Gagnez 3 x 2 entrées gratuites pour l’exposition

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Rencontre Les activités socioculturelles au sein de l’Établissement pénitentiaire d’Andenne Nathalie Scheiff

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Médiation Les missions du Médiateur fédéral Catherine De Bruecker

Droit et culture Tine Van Poucke et Vanessa Paumen

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Exposition L’art du droit. Trois siècles de justice en image

Dialogue Justice-en-ligne et Questions Justice, deux sites pour créer un dialogue entre le grand public et les professionnels de la justice Pierre Vandernoot

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Marketing juridique Les petits cabinets d’avocats en tête du marketing numérique Ben Houdmont


ÉDITO

bonne lecture !

Chers lecteurs, Chers auteurs, Dans le cadre de ses expositions temporaires, le Groeningemuseum offre régulièrement aux visiteurs l’occasion de découvrir ou de redécouvrir des œuvres d’art sous l’angle de nouvelles perspectives. La grande exposition d’automne L’art du droit. Trois siècles de justice en image replace en effet des œuvres d’art connues, dont « Le Jugement de Cambyse» de Gérard David, et des œuvres moins connues datant du milieu du 15ème siècle au milieu du 18ème siècle dans un nouveau contexte historico-culturel. Peintures, gravures, manuscrits et autres œuvres sont replacés dans le contexte de leurs fonctions originelles, à savoir celles de soutenir et d’illustrer le droit et la jurisprudence. Profitez de notre concours pour tenter de gagner 3 x 2 entrées gratuites pour l’exposition.

colophon Rédacteur en chef Élisabeth Courtens Secrétaire de rédaction Anne-Laure Bastin

Nathalie Scheiff, Responsable des formations et des activités socioculturelles au sein de l’Établissement pénitentiaire d’Andenne, a lancé récemment un appel aux dons externes. Le Groupe Larcier, particulièrement sensible à cette problématique, a répondu positivement à cet appel. Agréablement surprise par le succès de son initiative, Madame Scheiff a accepté d’évoquer la politique pédagogique et socioculturelle qui est pratiquée de manière active à la prison d’Andenne.

Catherine De Bruecker occupe la fonction de médiatrice fédérale depuis 2005. En 11 ans, elle a pu observer l’évolution des rapports entre les citoyens et l’administration publique, ainsi que celle du rôle de l’institution. Rencontre. La justice, qui ne laisse personne indifférent, n’est ni simple ni parfaite. Deux sites internet ont été créés pour nouer un dialogue entre les personnes qui « font » la Justice ou qui y collaborent : Justice-en-ligne et Questions Justice. Pour mieux cerner ces projets, Pierre Vandernoot, Président de chambre au Conseil d’État et directeur des deux sites, répond à nos questions. Tous les cabinets d’avocats doivent-ils investir davantage dans le marketing numérique ? La question se pose de plus en plus au sein des associations d’avocats. Émile & Ferdinand a demandé l’avis de Ben Houdmont, Managing Consultant au sein de KnowToGrow Legal. Selon lui, tout dépend de la spécificité du cabinet et de ses ambitions. Mais le marketing numérique est un monde en constante évolution et ne pas embarquer aujourd’hui pourrait faire définitivement rater le train demain.

Bonnes lectures automnales… L’équipe rédactionnelle

Équipe rédactionnelle Anne-Laure Bastin, Élisabeth Courtens, Charlotte Claes et Muriel Devillers Lay-out Julie-Cerise Moers (Cerise.be) © Groupe Larcier s.a. Éditeur responsable Marc-Olivier Lifrange, CEO Groupe Larcier s.a. rue Haute 139 - Loft 6 1000 Bruxelles Les envois destinés à la rédaction sont à adresser par voie électronique à emileetferdinand@larciergroup.com

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d’Émile & Ferdinand

Cette gazette est la vôtre ! N’hésitez pas à proposer des articles, à formuler des suggestions, à réagir aux articles publiés et, ainsi, à faire évoluer et faire grandir Émile & Ferdinand. Adressez-nous vos messages à l’adresse suivante : emileetferdinand@larciergroup.com


DROIT ET CULTURE XXXX

Gagnez 3 x 2 entrées gratuites pour l’exposition

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Exposition

L’art du droit

Les 3 premières personnes à envoyer un e-mail recevront 2 cartes d’entrée gratuite pour cette exposition

© Sarah Bauwens

Trois siècles de justice en image

Tine Van Poucke, Conservateur et responsable du service éducatif de l’exposition Vanessa Paumen, Conservateur et coordinatrice de l’exposition

Dans le cadre de ses expositions temporaires, le Groeningemuseum offre régulièrement aux visiteurs l’occasion de découvrir ou de redécouvrir des œuvres d’art sous l’angle de nouvelles perspectives. La grande exposition d’automne « L’art du droit. Trois siècles de justice en image » replace en effet des œuvres d’art connues, dont « Le Jugement de Cambyse » de Gérard David, et des œuvres moins connues datant du milieu du 15ème siècle au milieu du 18ème siècle dans un nouveau contexte historico-culturel. Peintures, gravures, manuscrits et autres œuvres sont replacés dans le contexte de leurs fonctions originelles, à savoir celles de soutenir et d’illustrer le droit et la jurisprudence.

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DROIT ET CULTURE

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Gérard David, Le Jugement de Cambyse, 1498, huile sur panneau

LE JUGEMENT DE CAMBYSE Généralement, les visiteurs du Groeningemuseum de Bruges sont d’emblée confrontés, dans la première salle, à l’une des pièces les plus saisissantes de la collection : “Le Jugement de Cambyse”, un impressionnant diptyque peint par Gérard David à la fin du 15ème siècle. Le panneau droit surtout, sur lequel on peut voir un homme se faire écorcher vif avec une précision chirurgicale, suscite non seulement l’étonnement et l’effroi dans le chef des spectateurs, mais ne va pas non plus sans soulever quelques interrogations. La peinture est présentée de manière permanente dans le contexte des commandes communales brugeoises, avec des thèmes plus courants comme le Jugement Dernier. Mais qu’ont encore en commun ces œuvres ? Pourquoi ces peintures avec l’histoire de Cambyse et avec la représentation du Jugement Dernier ont-elles été com-

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mandées par l’administration communale au cours des 15ème et 16ème siècles ? Nous pouvons difficilement nous imaginer que de tels tableaux soient commandés de nos jours à des artistes contemporains pour orner les hôtels de ville. L’EXPOSITION L’ambition initiale des conservateurs Vanessa Paumen et Tine Van Poucke était de mettre à l’honneur le patrimoine historico-juridique au travers de cette exposition, tout en mettant en lumière les fonctions et leur signification. Avec les collections propres – le Groeningemuseum, le Gruuthusemuseum, le Brugse Vrije et la Bibliothèque Publique - comme points de départ, complétées de quelques prêts, elles ambitionnaient dans un premier temps une exposition qui allait incontestablement plaire au public en raison de la perspective inattendue et de la

profondeur du contenu. En peu de temps, ce projet a toutefois pris une ampleur considérable. Durant la préparation de l’exposition, il s’est avéré que cette thématique suscitait un vif intérêt, y compris au niveau international, et la décision fut prise d’aborder le projet à une échelle significativement plus importante. Les œuvres d’art exposées dévoilent la richesse de la thématique et les nombreux médias utilisés dans l’art entre 1450 et 1750. La justice et la jurisprudence apparaissent ainsi non seulement dans les peintures, mais aussi sur les vitraux, dans les gravures et les dessins, les enluminures des manuscrits, dans les illustrations d’imprimés anciens et dans les objets en argent et en bois. Le parcours de l’exposition guide le visiteur à travers quatre grandes salles et


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cinq plus petits cabinets avec tout le long des thèmes de l’histoire du droit. Dans la salle 1, l’accent est mis sur le Jugement Dernier dans le contexte de la salle du tribunal. De là, le visiteur découvre dans la salle 2 des récits fascinants et bien souvent oubliés de la Bible, l’histoire et les légendes qui ont servi de source d’inspiration pour les échevins qui disaient le droit. Ces exempla iustitiae ou tableaux de justice prennent la forme de peintures, vitraux, gravures et dessins. Le Jugement de Cambyse constituait un thème récurrent. Il devait inciter les juges à exercer leur mandat de manière correcte, sans se laisser soudoyer. Gérard David a illustré ce thème de manière saisissante. En outre, son diptyque est l’une des représentations les plus anciennes de cette thématique. Au 16ème siècle, ce thème était très populaire dans la peinture et l’illustration. La salle 3 offre ses cimaises aux différentes manières de représenter le récit de Cambyse, Sisamnès et Otanès. Dans les cabinets, on s’arrête à la pratique de la justice au Bas Moyen Âge et au début des Temps Modernes. L’accent y est mis sur la jurisprudence à Bruges et sur le juriste brugeois Joos de Damhouder, une autorité faisant référence en droit pénal et droit de procédure pénale. Par ailleurs, l’attention est portée aux aspects fascinants du droit pénal sous l’ancien régime : les tortures et exécutions florissantes et les «pièces d’amendes». L’exposition se termine dans une grande salle autour de l’allégorie de la justice et de Dame Justice. DES PIÈCES EXCEPTIONNELLES «L’art du droit» réunit des objets particuliers au Groeningemuseum, dont plusieurs chefs-d’œuvre rarement voire jamais exposés à ce jour. Le Jugement Dernier, peint vers 1499 pour la ville néerlandaise de Maastricht, a ainsi quitté pour la première fois depuis des décennies son emplacement habituel dans l’hôtel de ville de Maastricht pour

“L’art du droit” met également en lumière les progrès enregistrés dans notre système juridique ainsi que la fragilité au final de ce système.

Claes Jacobsz, Le Jugement de Cambyse, 1620, huile sur panneau rejoindre un musée. Une peinture fascinante de l’hôtel de ville de Grammont, qui n’est pas sans évoquer le style de Jérôme Bosch, ornera aussi les cimaises du musée, aux côtés d’autres panneaux commandés aux 15ème et 16ème siècles par les administrations communales. La ville de Wesel (Allemagne) fait exceptionnellement venir à Bruges un fleuron de sa collection. La ville hanséatique Gdańsk (Pologne) prête l’une des sept œuvres peintes par Hans Vredeman de Vries pour l’hôtel de ville - encore et toujours conservées à leur emplacement d’origine. Un collectionneur privé allemand de vitraux partage cinq pièces captivantes avec le public de l’exposition. Colijn de Coter, un primitif flamand de l’époque de Rogier van der Weyden, est de retour aux Pays-Bas méridionaux après avoir quitté une collection semi-privée américaine. Par ailleurs, des collections belges

et néerlandaises contribuent à l’exposition au moyen de nombreuses peintures, dessins et autres œuvres d’art. Le Rijksmuseum d’Amsterdam et la Bibliothèque Royale de Belgique ont prêté différentes œuvres inestimables. Le succès retentissant des demandes de prêt est le signe d’un intérêt certain pour l’approche des œuvres dans une nouvelle perspective. Au travers de cette exposition et du catalogue correspondant (Lannoo), le Groeningemuseum entend faire écho à cet intérêt. La thématique du droit et de la justice est particulièrement riche, mais comme les œuvres ont souvent été réalisées pour le compte d’administrations publiques, celles-ci font encore partie intégrante de leur emplacement ori-

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DROIT ET CULTURE

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Petrus Pieters, Tomyris avec la tête de Cyrus, 1610

ginel. Songez à la cheminée du Brugse Vrije avec l’histoire sculptée dans l’albâtre de Suzanne et des Vieillards. Ou aux peintures intégrées sous la forme de panneaux dans les murs des salles du conseil et les statues de Dame Justice sur les façades des hôtels de ville ou comme sur le Greffe Civil de Bruges. De même, de nombreuses œuvres créées pour les salles du conseil sont trop volumineuses que pour être exposées dans le Groeningemuseum, comme la version de Victor Bouquet du Jugement de Cambyse, peinte en 1671 pour l’hôtel de ville de Nieuwpoort. Lorsque cela s’avère pertinent, ces œuvres sont indiquées dans le catalogue. « L’art du droit » démontre également - et cela nous semble plus d’actualité que jamais - les progrès enregistrés dans notre système juridique ainsi que la fragilité au final de ce système avec ses principes. L’exposition met en lumière comment les principes de la

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jurisprudence ont été menacés dans des situations exceptionnelles, mais comment elle a toujours su trouver d’ardents défenseurs. En ce sens, «L’art du droit» apporte peut-être une lueur d’espoir en ces temps difficiles. Le droit est toujours un art. Ainsi, «L’art du droit» montre comment l’art représente le droit et en même temps comment le droit en soi est également un art. COLLOQUE SCIENTIFIQUE L’exposition va de pair avec un colloque scientifique en janvier 2017, lors duquel une trentaine de chercheurs de différents pays apporteront leur contribution à un projet de recherche scientifique en cours autour de la thématique du droit dans l’art. Les concepteurs de l’exposition espèrent que celle-ci, le catalogue et le colloque stimuleront de plus belle la recherche dans le champ de l’iconographie et de l’iconologie du droit.

L’EXPOSITION EN PRATIQUE

LIEU : Groeningemuseum,

Dijver 12, 8000 Bruges

DATES : du 28 octobre 2016 au 5 février 2017

TICKETS : € 8,00 (y compris la

collection permanente + Brugse Vrije ) € 6,00 (> 65 ans et 12-25 ans) GRATUIT : 12 ans & élèves de l’enseignement primaire et secondaire accompagnés par un enseignant) GRATUIT avec le Museumpas, la Carte de membre des Amis des Musées de Bruges PLUS D’INFOS SUR WWW.MUSEABRUGGE.BE


RENCONTRE

Les activités socioculturelles au sein de l’Établissement pénitentiaire d’Andenne

Nathalie Scheiff, Responsable des formations et des activités socioculturelles au sein de l’Établissement pénitentiaire d’Andenne, a lancé récemment un appel aux dons externes. Le Groupe Larcier, particulièrement sensible à cette problématique, a répondu positivement à cet appel. Agréablement surprise par le succès de son initiative, Madame Scheiff a accepté d’évoquer pour nos lecteurs la politique pédagogique et socioculturelle qui est pratiquée de manière active à la prison d’Andenne. Émile & Ferdinand : Madame Scheiff, vous êtes Responsable des formations et des activités socioculturelles au sein de l’Établissement pénitentiaire d’Andenne. Pouvez-vous nous expliquer en quoi consiste votre fonction ?

Nathalie Scheiff : Un directeur a, entre autres, cette

matière en charge. Dans ce cadre, je suis un soutien administratif et logistique pour lui ainsi qu’un lien particulier entre les intervenants extérieurs et lui. Mes missions et tâches ont clairement été définies par le directeur ainsi que mon degré d’autonomie. Très régulièrement, je lui fais un feed-back des contacts et initiatives pris ainsi que des questions/problèmes pour lesquels il doit intervenir. La fonction est composée de tâches complètement diversifiées permettant d’avoir des contacts tant avec des intervenants extérieurs que les détenus.

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RENCONTRE

... Concernant les formations, il y a, dans un premier temps, la gestion des formations existantes : • Contact avec les professeurs pour planifier leurs horaires et le lieu du cours, entendre leurs besoins en matière de matériel et fournitures, régler les problèmes logistiques, fonctionnels et structurels. • Régulièrement, vérification des salles de cours (mobilier, propreté, …). • Entretien avec les détenus pour des explications quant aux formations/activités, résoudre les problèmes liés aux cours. Dans un second temps, il y a la volonté de mettre en place d’autres formations (par exemple: cariste, permis de conduire, …). Pour ce faire, il nous faut : rechercher une école ou un centre pouvant travailler avec nous (ce n’est pas facile puisque nous n’avons pas de budget propre pour rémunérer les professeurs éventuels), élaborer un budget transmis aux autorités compétentes pour octroi ou non, mettre en place un groupe « apprenants » et planifier des horaires, acheter divers matériels et fournitures selon la formation et le budget octroyé.

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La participation moyenne est de 8/10 détenus par formation. Actuellement, nous proposons les formations suivantes : • Alpha CIEP : cours d’alphabétisation niveau 1, attestation de suivi finale (1 journée par semaine). • Alpha Bonus : cours d’alphabétisation niveau 2, attestation de suivi finale (2 demi-journées par semaine). • Français Langue Etrangère : alphabétisation pour personnes ne parlant pas le français, attestation de suivi finale (2 demijournées par semaine). • Remise à niveau : cours généraux pour permettre aux détenus d’accéder au cours de préparation au CEB, attestation de suivi finale (3 journées par semaine). • Soudure : apprentissage des techniques de base de soudage et de coupage oxyacétylénique, soudure à l’arc avec électrode niveau 1, soudure semi-automatique, base de travail de profil et initiation à la chaudronnerie et charpente. Diplôme à la fin de l’année après passage devant jury externe (4 journées par semaine). Nous avons en projet (pratiquement finalisé) les formations suivantes : • Cariste avec brevet de secourisme industriel, qualifiante (4 journées par semaine). • Permis de conduire B, ponctuel, mais organisée une fois par trimestre. Uniquement la théorie. Enfin, nous recherchons des collaborations pour les cours suivants : • Gestion, certificat en fin de cycle. • Commis de cuisine, certificat en fin de cycle. • Horticulture, certificat en fin de cycle. Pour les activités, ce sont les mêmes démarches. Quels sont les types d’activités qui sont proposées aux détenus ?

Actuellement, nous avons les activités suivantes : • Théâtre : c’est une activité qui existe depuis une dizaine d’années. Sa période est de septembre à avril, à raison d’une fois semaine. Elle est clôturée par une représentation devant un public externe. L’année dernière, la compagnie théâtrale a collaboré avec des étudiants en criminologie de l’UCL. Le projet, ayant été concluant, est renouvelé cette année. La participation est de +/12 détenus par séance.


RENCONTRE

U n détenu non travailleur

• Musique : au niveau de la création, cette activité fonctionne de la même manière que le théâtre. La période est un peu plus longue : jusque juin, une fois par semaine. La participation est également de +/- 12 détenus. Cette année, nous espérons pouvoir mettre en place soit un concert, soit une collaboration avec le groupe théâtre. • Arts plastiques : activité mise en place par l’ADEPPI (Ateliers d’Education Permanente pour Personnes Incarcérées). Une dizaine de détenus participent hebdomadairement aux ateliers. • Mini-foot : organisé depuis 2/3 ans, sur une période de trois mois (septembre à novembre). +/- 10 détenus, encadrés par un moniteur sportif. • Communication non violente : ateliers animés par l’ADEPPI, groupe de paroles, une fois par semaine pendant deux mois. Cette activité est organisée une à deux fois par an. • Café-concert d’idées : groupe de paroles animé par les conseillers moraux. Discussion autour d’un sujet déterminé par les membres du groupe (+/- 12 détenus) tel que « la confiance », « l’anarchie », « l’erreur est humaine ». Un régime communautaire est organisé dans certaines ailes. Il s’agit d’une ouverture de toutes les portes de cellule qui permet aux détenus d’une même aile de se côtoyer « sans but précis », hormis la socialisation. Enfin, une catégorie de détenus (ailes fermées) n’a pas cette opportunité, donc nous réfléchissons à la mise en place d’activités encadrées pour ces derniers (comme par exemple: activité « jeux de société », « wii », …). Quelles sont les possibilités offertes aux détenus pour suivre une formation ou un cursus scolaire ou universitaire en prison ? Concrètement, comment cela se passe-t-il ?

Un détenu non travailleur peut suivre toutes les formations et activités qu’il souhaite. Il lui suffit d’en faire la demande et que le groupe ne soit pas complet. Pour certaines formations, un test d’admission est requis. Le détenu doit donc le réussir pour y accéder. À lui de s’organiser en fonction des horaires. Pour le détenu travailleur, nous essayons de favoriser au mieux la combinaison des deux. La procédure est la même que pour les non travailleurs. Par rapport au cursus universitaire, c’est quelque chose d’un peu nouveau pour nous. J’ai pris contact avec l’ULg et doit ren-

peut suivre toutes les formations et activités qu’il souhaite. Il lui suffit d’en faire la demande et que le groupe ne soit pas complet.

contrer une responsable début novembre pour la mise en place d’une procédure. Par ailleurs, j’attends aussi la confirmation d’un rendez-vous pour l’Université de Namur. Cela concerne seulement deux détenus actuellement. Nous avons également des détenus qui suivent l’enseignement à distance. Ils sont peu demandeurs et il est difficile d’en connaître le nombre exact. Enfin, j’espère pouvoir mettre sur pied mon projet de « salle d’études » d’ici la fin de l’année pour tous ces étudiants ayant besoin de calme et de soutien. Quel genre de travail les détenus peuvent-ils effectuer dans votre centre pénitentiaire ?

Il existe deux types de travail au sein des établissements pénitentiaires : ateliers régie et domestiques. Les ateliers régie, ce sont des travaux manuels (empaquetages, câblage, menuiserie, scannage de documents, …) réalisés pour des entreprises externes. La rémunération se fait majoritairement à la pièce. Actuellement, une centaine de détenus sont occupés dans les ateliers d’Andenne. Les travaux domestiques concernent l’entretien global de l’établissement (jardin, technique, nettoyage, …). La rémunération dépend du travail effectué, déterminée selon des critères objectifs (spécialisation requise, lieu de travail extérieur à l’établissement, autonomie, …). Recevez-vous facilement des dons d’entreprises privées ou autres ? S’agit-il toujours de biens culturels ?

Nous recevons très rarement des dons. Je pense que c’est la première fois qu’une initiative telle que j’ai entreprise se réalisait. Je suis d’ailleurs agréablement surprise du succès tant par rapport aux dons externes qu’internes. J’ai en effet également sollicité mes collègues, mais de manière plus large, c’est-à-dire que j’ai aussi demandé des jeux de société, de PS2 et Wii, DVD et CD. En plus de la bibliothèque, je souhaiterais mettre sur pied une ludothèque et le prêt de DVD et CD. Nous avons reçu jusqu’à présent essentiellement des biens culturels.

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MÉDIATION

Les missions

du Médiateur fédéral

Le Médiateur fédéral est une institution indépendante, collatérale du parlement, chargée de recevoir les plaintes des citoyens à l’encontre des autorités administratives fédérales. Elle est composée de deux médiateurs, Catherine De Bruecker et Guido Herman. Catherine De Bruecker occupe la fonction de médiatrice fédérale depuis 2005. En 11 ans, elle a pu observer l’évolution des rapports entre les citoyens et l’administration publique, ainsi que celle du rôle de l’institution. Émile & Ferdinand : Le Médiateur fédéral tente de résoudre les plaintes des citoyens à l’égard des administrations fédérales. Concrètement, quelle est sa mission ?

“ Catherine De Bruecker

© Frederik Beyens

Catherine De Bruecker : L’objectif du législateur, lorsqu’il a créé l’institution, était non seulement de renforcer la confiance du citoyen dans l’autorité publique, mais aussi sa compréhension à l’égard de son fonctionnement.

Médiatrice fédérale

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Notre rôle consiste donc en premier lieu à examiner les signaux que les citoyens nous adressent. Nous vérifions si l’administration s’est bien acquittée de sa mission, relevons les dysfonctionnements éventuels et recherchons, dans ce cas, une solution équitable en dialoguant avec l’administration. Par contre, si la plainte n’est pas justifiée, nous l’expliquons au citoyen. Comme

Le médiateur joue un rôle croissant dans la protection des droits fondamentaux. La mobilité croissante des citoyens pose de nouveaux défis aux administrations. Il faut pouvoir être à l’écoute des citoyens et se donner les moyens de corriger les erreurs.


MÉDIATION

“ cette explication émane d’une institution externe et impartiale, elle est mieux acceptée. On parle aussi d’« ombudsman » pour désigner un médiateur institutionnel, que revêt cette notion ?

La mission d’un ombudsman dépasse celle du médiateur au sens classique du terme. Il n’assiste pas seulement les parties dans la recherche d’une solution à leur conflit. L’ombudsman se penche également sur la cause du litige et la manière d’éviter sa répétition. Ainsi, l’analyse des plaintes peut indiquer que le problème dénoncé est non seulement réel, mais qu’il est récurrent. C’està-dire qu’il est appelé à se reproduire pour d’autres citoyens dans la même situation. La plainte individuelle sert alors de levier pour lancer une enquête plus approfondie, afin d’identifier l’origine du dysfonctionnement et de proposer une réponse appropriée ou de recommander une réforme de la réglementation. Dans quels domaines recevez-vous le plus de plaintes ?

Il s’agit par définition des domaines qui touchent directement les citoyens dans leur vie quotidienne

L a mission d’un ombudsman dépasse celle du médiateur au sens classique du terme : il se penche également sur la cause du litige et la manière d’éviter sa répétition.

ou dans l’exercice de leurs droits fondamentaux. Au niveau fédéral, il s’agit principalement de la fiscalité, de la sécurité sociale et du secteur de l’asile et de la migration, mais également l’immatriculation des véhicules, la situation des personnes détenues ou l’accès aux documents administratifs, par exemple. Comment obtenez-vous des résultats ? Avec quels moyens ?

Nous bénéficions de moyens d’investigation qui nous permettent de mener une analyse approfondie des plaintes dont nous sommes saisis. Nous pouvons faire des constatations sur place, obtenir tous les documents et renseignements nécessaires, entendre toutes les personnes concernées, voire lever le secret professionnel si nécessaire. Par ailleurs, nous investissons beaucoup dans le dialogue avec les administrations. L’administration dans son ensemble dispose d’une très grande expertise et d’une expérience qui est essentielle pour la compréhension de la situation. C’est elle qui est confrontée en premier lieu aux difficultés d’application de la réglemen-

tation et qui doit remédier sur le terrain aux incongruités des textes ou pallier les situations qui n’ont pas été prévues. Nous avons surtout un important pouvoir de recommandation. Dans les dossiers individuels, nous pouvons proposer des solutions équitables lorsqu’une décision, bien que conforme aux règles de droit, lèse manifestement les droits de la personne. À côté de cela, nous émettons des recommandations structurelles qui participent à l’amélioration des procédures administratives et de la législation. Pourtant, vous ne possédez pas de force contraignante, contrairement à la décision du tribunal qui doit être suivie…

C’est justement cette absence de force contraignante qui garantit à l’ombudsman une véritable liberté d’action. Notre principale force réside dans la qualité de nos analyses, notre faculté à rester neutre et à l’écoute de toutes les parties, ainsi que dans la publication de nos constats et recommandations qui nourrissent le débat public.

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MÉDIATION

... Comment caractériseriez-vous votre mission, par opposition au recours juridictionnel classique ?

Notre mission est complémentaire à celle des juridictions. Elle offre non seulement aux citoyens un recours moins formel, moins onéreux et plus rapide que les voies judiciaires classiques mais elle répond également à des besoins différents qui ne relèvent pas de la mission du juge. Le médiateur peut ainsi restaurer le dialogue entre un contribuable et son bureau de taxation, désamorcer la tension entre un détenu et la direction de l’établissement pénitentiaire, contribuer à renforcer les moyens d’un service confronté à un arriéré significatif ou encourager la coordination entre les services. Quelles évolutions significatives constatez-vous dans la nature des plaintes ?

La mobilité des citoyens par-delà les frontières s’accentue au fil des années. Certains s’expatrient pour leur travail, des couples mixtes se forment et se déplacent, acquièrent des biens immobiliers à l’étranger, etc. D’autres ont dû quitter leur pays et viennent chercher refuge en Europe. Nombreuses sont les familles dispersées aux quatre coins du globe. De plus en plus d’enfants ont un de leurs parents qui vit à l’étranger. Loin d’être exceptionnelles, ces situations font apparaître de nouvelles

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COORDONNÉES 0800 99 961 www.mediateurfederal.be | contact@mediateurfederal.be Rue de Louvain 48, bte 6 | 1000 Bruxelles RÉSEAU DES MÉDIATEURS ET OMBUDSMANS Le site internet qui guide le citoyen vers le médiateur compétent pour son problème : www.ombudsman.be formes de déplacement, de vie familiale, de consommation, etc. Ce qui exige souvent une adaptation des règles ou des pratiques administratives, voire une réforme plus profonde des systèmes en vigueur. Qu’on pense à la fiscalité de la famille ou à la sécurité sociale des travailleurs transfrontaliers par exemple, mais aussi à la gestion des flux migratoires. Vous siégez au conseil de l’Institut international de l’Ombudsman. Ces évolutions se traduisent-elles également dans la mission des ombudsmans ?

Oui, fortement. Conçu au départ essentiellement comme un outil de renforcement de la bonne administration, le médiateur institutionnel joue aujourd’hui un rôle croissant dans la protection des droits fondamentaux des citoyens à l’égard de l’autorité publique. Ce phénomène s’observe dans tous les pays où l’institution a été créée. L’instauration d’un ombudsman indépendant est devenue un standard de l’État de droit pour les organismes internationaux comme les Nations Unies et le Conseil de l’Europe, et il constitue un critère important dans les procédures d’adhésion à l’Union européenne.


MÉDIATION

J'ai fait appel au Médiateur fédéral

« Ma carte d’identité n’était pas détruite » Quelqu’un essaie d’utiliser l’ancienne carte d’identité électronique de Rudy. Il l’avait pourtant remplacée un an auparavant. L’administration communale affirme que l’ancienne carte a été détruite selon la procédure. Rudy saisit le Médiateur fédéral. Après enquête, le service public fédéral Intérieur constate que l’administration communale n’a pas correctement suivi la procédure de destruction. Sur ce, le service public fédéral Intérieur décide de mener une enquête auprès de plusieurs communes, ce qui débouche sur une amélioration de la procédure.

Rudy

Enquêtes systémiques Autorisations de séjour pour raisons médicales

Mesures de sécurité en prison

Depuis 2013, le Médiateur fédéral avait constaté une augmentation des plaintes portant sur le traitement des demandes d’autorisation de séjour pour raisons médicales. Ces plaintes mettaient en évidence des difficultés récurrentes qui ont justifié le lancement d’une enquête systémique.

En 2015, le Médiateur fédéral a reçu des plaintes de détenus concernant des atteintes à leur dignité humaine. Certaines commissions de surveillance ont également communiqué au Médiateur fédéral leurs inquiétudes à ce sujet.

L’objet de l’enquête visait à vérifier si les mesures de gestion mises en place par l’Office des étrangers permettent un traitement correct et dans un délai déraisonnable des demandes d’autorisation de séjour pour raisons médicales. Les résultats de cette enquête paraissent ce mois-ci.

Les faits les plus préoccupants auraient lieu à l’occasion des mesures de sécurité, telles que la fouille. Le Médiateur fédéral a entamé une enquête systémique afin d’évaluer les risques d’atteinte à la dignité des détenus lors de l’application des mesures de sécurité par le personnel pénitentiaire. L’enquête débouchera sur un rapport à l’automne 2017.

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DIALOGUE

Justice-en-ligne et Questions Justice

deux sites pour créer un dialogue entre le grand public et les professionnels de la justice La justice, qui ne laisse personne indifférent, n’est ni simple ni parfaite. Deux sites internet ont été créés pour nouer un dialogue entre les personnes qui « font » la Justice ou qui y collaborent : Justice-en-ligne et Questions Justice.

Pierre Vandernoot Président de chambre au Conseil d’État et directeur des sites www.justice-en-ligne.be et www.questions-justice.be

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L’objectif du premier est de permettre de mieux comprendre le fonctionnement de la Justice et de débattre autour de ses enjeux ; celui du second consiste à l’expliquer encore davantage à un public plus jeune, toujours dans une perspective interactive de défense des droits fondamentaux et des valeurs de la démocratie. Pour mieux cerner ces projets, Pierre Vandernoot, Président de chambre au Conseil d’État et directeur des deux sites, répond à nos questions.


DIALOGUE

“ Émile & Ferdinand : Quels sont les objectifs des sites www.justice-en-ligne.be et www.questions-justice.be ?

Pierre Vandernoot : L’objec-

tif principal du projet www.justice-en-ligne.be consiste à organiser un dialogue entre le grand public et les professionnels de la justice dans toutes ses composantes (magistrats, avocats, collaborateurs, etc.). Ce projet se situe très clairement dans la perspective du développement d’une citoyenneté responsable sur les questions de la justice et du droit. Deux grands pôles de dialogue sont mis en place au sein du projet. Dans une première partie du site (les dossiers d’actualité), l’initiative revient au monde de la justice, qui essaye d’expliquer sa propre actualité ou le phénomène juridictionnel du moment. Sans être interpellés sur un sujet particulier, nous essayons d’identifier dans l’actualité une source d’information et de réflexion en rapport avec le fonctionnement de la Justice et de ses manifestations. Nous invitons alors un auteur à s’exprimer à ce propos dans une langue aussi accessible que possible. L’article mis ainsi en ligne suscite alors le dialogue puisque les citoyens sont invités à y réagir. En fonction du sens des opinions émises,

N ous en sommes à une moyenne de plus de 2.500 visites quotidiennes, sans compter l’usage de nos articles en version papier, au sein des écoles notamment.

d’autres interventions de professionnels du droit sont proposées. De véritables dossiers se constituent ainsi sur plusieurs sujets Dans la seconde partie du site (le courrier des internautes) l’initiative revient au citoyen, invité à suggérer le traitement d’un sujet particulier. Et, quand il est question de « Justice » chez nous, nous l’abordons de manière très large en évoquant bien sûr le fonctionnement des juridictions classiques (et pas seulement pénales…) mais aussi la Cour européenne des droits de l’homme, la Cour pénale internationale, les dossiers de droit civil ayant un retentissement « sociétal » (l’évolution du droit de la filiation sous l’influence de la Cour constitutionnelle par exemple), etc. La situation des prisons, des détenus, des internés, etc., n’est évidemment pas oubliée. Et puis, nous relayons aussi les activités culturelles en lien avec la Justice, au cinéma, au théâtre, etc. Il y a, grosso modo, deux articles par semaine qui sont publiés. Le meilleur

moyen d’en prendre connaissance est de s’inscrire sur chaque site à notre newsletter. Précisément, combien de visites comptez-vous ?

Nous en sommes à une moyenne de plus de 2.500 visites quotidiennes, sans compter l’usage de nos articles en version papier, au sein des écoles notamment. Au total, depuis sa création, au printemps 2009, près de 2.500.000 visiteurs sont venus nous voir. Et la moyenne augmente constamment. Nous avons certes quelques demandes de consultation sur des dossiers concrets, auxquels nous répondons par un petit courriel poli pour rappeler que tel n’est pas l’objet du site, mais nos articles et nos vidéos suscitent des débats de fond. Mais parlez-nous aussi de Questions Justice.

“ tieux !

Le site internet www.questionsjustice.be est encore plus ambi-

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DIALOGUE

thématiques (« Les rouages de la justice ») et qui a une vocation plus stable. À travers ce projet, nous souhaitons contribuer à la mise en place d’outils de compréhension à la disposition des jeunes, mais également des enseignants en leur offrant une source d’information fiable sur des sujets susceptibles d’être abordés en classe. Comment réagissez-vous aux propos poujadistes qui se rencontrent parfois sur la toile ?

...

Rendez-vous sur www.justice-en-ligne.be

Notre volonté est d’expliquer le monde judiciaire sans corporatisme : il n’y a aucune raison d’écarter du débat les inquiétudes légitimes qui peuvent surgir sur certains aspects du fonctionnement de la Justice.

Notre objectif consiste à expliquer l’actualité juridictionnelle à nos jeunes concitoyens, principalement à ceux âgés entre seize et dix-huit ans !

« petit frère » de www.justice-en-ligne.be et comprend des clés de compréhension du monde judiciaire spécifiquement étudiées pour les « 16-18 ans ».

Pour ce faire, nous avons eu la chance d’élargir notre équipe.

Je pense ici à la mise en place d’un schéma des juridictions, qui exploite au maximum les techniques de l’internet, mais également aux nombreuses vidéos mises en ligne visant à expliquer et, dans une certaine mesure, à démystifier le monde judiciaire. Ainsi, nos internautes peuvent voir et entendre un juge d’instruction, un procureur du roi, un juge de paix, un juge au tribunal de commerce ou à la Cour constitutionnelle, un conseiller d’État, etc., parler de leurs métiers, de leurs rôles et de leurs utilités dans un système parfois difficilement accessible.

Malgré nos efforts, nous nous sommes en effet rendus à l’évidence et avons constaté nos difficultés, nous, juristes, à expliquer l’actualité juridictionnelle de manière simple et compréhensible. Pour notre projet www.questions-justice.be, nous travaillons notamment avec une journaliste, Thérèse Jeunejean, qui soit nous suggère des sujets propres et rédige des textes accessibles aux adolescents, soit procède à une réelle « traduction », à l’attention des plus jeunes, des articles publiés sur www.justice-enligne.be. Mais tout le monde y trouvera son profit… Le site internet www.questions-justice. be ne pourrait être réduit au rôle de

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Ici aussi, deux parties ?

Oui, le site comprend deux parties principales : un décryptage de l’actualité que nous appelons « L’actualité commentée », mais également une seconde partie qui comprend des dossiers

Ceci étant, il n’y a pas de place chez nous pour le racisme, l’injure, etc. Si des propos un peu vifs sont parfois laissés par certains visiteurs, nous tentons d’y répondre en faisant valoir la part de vérité que parfois ils contiennent, mais surtout en quoi certaines des incompréhensions que peut susciter la Justice appellent la nécessité de défendre certains principes, comme les droits de la défense, le respect dû à la vérité judiciaire, le formalisme bien compris des procédures, etc., dont les mêmes personnes réclament d’ailleurs le bénéfice quand elles sont confrontées au système. Le ton, de notre côté, n’est pas à la polémique, mais à l’explication et à la sérénité du débat, quelle que soit la gravité des questions abordées. Le grand défi est sans doute celui du vocabulaire. Comment y faites-vous face ?

Afin de permettre à nos visiteurs d’avoir une approche plus aisée des termes juridiques, un lexique a été


DIALOGUE

créé sur www.justice-en-ligne.be et sur www.questions-justice.be (sous notre rubrique « Pour mieux comprendre »). Ces outils doivent évoluer au fil du temps, mais devraient permettre rapidement aux internautes de comprendre les notions le plus utilisées et décrypter plus facilement l’actualité judiciaire. En plus, sur www.questions-justice.be, des liens électroniques sont établis au sein même des articles entre les expressions techniques et, d’une part, les fiches explicatives du lexique et, d’autre part, des « bulles » résumant leur sens en peu de mots. Ces « bulles » sont réunies sous un véritable dictionnaire thématique dans la rubrique « Pour mieux comprendre ». Et nous avons aussi bien entendu un moteur de recherche très facile à utiliser. Qui est à la base du projet ?

Les projets www.justice-en-ligne. be et www.questions-justice.be sont des initiatives de l’Institut d’études sur la Justice ; ils sont soutenus financièrement par la Fondation Bernheim (www.fondationbernheim.be). Www.justice-en-ligne.be vient d’une idée originale portée par Christine Matray, alors conseiller à la Cour de cassation, et Jean-Louis Joris, avocat au barreau de Bruxelles. Augustin Daoût, avocat au même barreau, m’assiste depuis le début pour la conception et la réalisation du projet. Quant à www.questions-justice.be, c’est Bénédicte Inghels, conseiller à la Cour d’appel de Mons, qui, interpellée dans son entourage, y compris familial, sur son métier de juge et sur le fonctionnement de la justice, a suscité ce projet pour tenter de combler le déficit de compréhension des « 16-18 ans » en matière judiciaire. Il est porté maintenant par

Rendez-vous sur www.questions-justice.be

une magnifique équipe autour de moi composée de Thérèse Jeunejean, journaliste, Bénédicte Inghels, Jean-François Funck, juge au tribunal de première instance de Bruxelles, Alain Desmarets, ancien directeur d’école, Augustin Daoût, avocat, Jean-Sébastien Lenaerts, avocat et assistant à l’U.L.B., Mélanie Penelle, maître-assistante en droit à la Haute Ecole de Bruxelles et conseillère juridique, Martine Castin, magistrat honoraire, et Isabelle Wéry, juriste. Des acteurs issus d’autres milieux (social, associatif, presse, enseignement..) ont-ils vocation à rédiger des articles ?

Bien évidemment, tant www.justice-en-ligne.be que www.questions–justice.be ont vocation à éclairer les internautes et, pour ce faire, différents points vues sont utiles. À terme d’ailleurs, en ce qui concerne plus spécifiquement www.questions-justice.be, nous souhaitons mettre en place des partenariats avec les enseignants d’une part pour être informés des sujets qui interpellent nos adolescents et, d’autre part, pour les aider dans la col-

lecte d’informations fiables pour donner leurs cours. La méfiance du citoyen dans le système judiciaire est-elle légitime ?

Une méfiance de principe à l’égard de notre système judiciaire ne peut pas être légitime en soi. Par contre, la complexité du système judiciaire et – pourquoi se le cacher ? – certains de ses modes de fonctionnement (songeons simplement à l’arriéré judiciaire) peuvent pousser le citoyen dans l’incompréhension. Il peut aussi ne pas comprendre, dans l’émotion qui caractérise souvent le regard du public, la raison d’être de certaines décisions. Face à cela, les membres de la famille judiciaire doivent remettre le travail sur le métier et essayer d’expliquer leurs actions. Le développement de ces deux sites a pour objectif de créer un lieu de réponses et de débats en essayant de prendre soin avec une attention toute particulière de ce que nos sociétés démocratiques ont de plus précieux, à savoir notre jeunesse, les citoyens de demain. Interview réalisée avec le concours d'Augustin Daoût.

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MARKETING JURIDIQUE

Les petits cabinets d’avocats en tête du marketing numérique Tous les cabinets d’avocats doivent-ils investir davantage dans le marketing numérique ? La question se pose de plus en plus au sein des associations d’avocats. Émile & Ferdinand a demandé l’avis de Ben Houdmont, Managing Consultant au sein de KnowToGrow Legal. Selon lui, tout dépend de la spécificité du cabinet et de ses ambitions. Mais le marketing numérique est un monde en constante évolution et ne pas embarquer aujourd’hui pourrait faire définitivement rater le train demain.

Ben Houdmont Managing Consultant KnowToGrow Legal www.knowtogrow.be

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Quand les avocats me demandent s’ils doivent investir davantage dans le marketing numérique, je leur réponds invariablement : « probablement, mais je n’en suis pas sûr. » Un cabinet d’avocats n’est pas l’autre. Chacun a ses propres points forts et ses points faibles. Toute opération de marketing doit se fonder sur ces spécificités et se développer sur cette base. Cela se traduit aussi par d’énormes divergences en termes d’investissements dans le marketing numérique. Au fil de mes contacts avec le barreau, je constate, contre toute attente, que ce ne sont pas les cabinets d’avocats de grande ou de moyenne envergure qui prennent l’initiative en matière de marketing numérique, mais souvent de petits cabinets qui s’adressent aux particuliers. A TALE OF TWO CITIES Sur ce plan, la Belgique et les États-Unis se rejoignent. GOOD2BSOCIAL, une agence de consultance marketing américaine spécialisée dans les professions juridiques, décrit le même phénomène dans l’article « A tale of Two Cities » récemment publié sur son blog. Certains cabinets orientés vers le segment des particuliers (droit de la circulation, responsabilité médicale, divorces, médiation familiale…) ont saisi l’importance du marketing numérique pour générer de nouveaux leads, prendre une longueur d’avance sur ce marché compétitif et dépasser les limites régionales.


MARKETING JURIDIQUE

LE CONTENT MARKETING NUMÉRIQUE, BIEN PLUS QUE LA GÉNÉRATION DE LEADS Les cabinets d’affaires sont, en revanche, souvent circonspects face au marketing numérique. Pour bâtir leur réputation, ils s’en tiennent aux méthodes traditionnelles et ne semblent pas réaliser que les médias sociaux pourraient largement les propulser au rang de leaders d’opinion dans leur domaine. Les deux types de cabinets s’en tiennent à des stratégies numériques résolument différentes. Certains cabinets orientés vers le marché particulier consacrent un budget bien plus important que les grands cabinets d’affaires au SEO (Search Engine Optimization, soit le classement Google), à Google AdWords (mots-clés payants sur Google) ou aux annonces sur les réseaux sociaux. Ils ne s’arrêtent pas non plus à la génération de leads et appliquent parfois des méthodes très simples, mais efficaces, en vue d’identifier des leads et de les convertir en clients. LES CONTACTS GÉNÉRÉS EN LIGNE POUR LES AVOCATS D’AFFAIRES SONT SOUVENT DE FAIBLE QUALITÉ En revanche, les cabinets d’affaires pensent, souvent à juste titre, qu’ils n’ont pas besoin de contacts générés en ligne… des leads généralement de faible qualité. Mais peu de cabinets semblent prendre conscience de l’importance d’être présents là où se trouvent leurs clients (de plus en plus souvent en ligne) pour bâtir et entretenir leur marque. Cette constatation vaut tant pour les « personal brands » des différents avocats que pour la marque du cabinet. Les cabinets d’affaires belges qui adoptent une stratégie de marketing (numérique) réfléchie et bien ficelée font figure d’exception. Si les petits cabinets atteignent parfois un degré très élevé de sophistication numérique sous l’impulsion d’un des associés, ces derniers sont peu nombreux à voir un quelconque intérêt au marketing numérique dans les cabinets d’affaires. Je cite GOOD2BSOCIAL : « Ces avocats ne comprennent pas ou ne sont simplement pas au courant du fait que leurs clients ont développé des programmes sophistiqués de marketing numérique et qu’ils attendent que leur cabinet d’avocats fasse de même. Une des raisons de cette situation est que de nombreux cabinets d’affaires ne raisonnent toujours pas comme des hommes d’affaires. (…) Ils continuent de penser que leurs clients leur

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resteront fidèles tant qu’ils excelleront dans leur métier. Mais dans le milieu de la prestation de service juridique, la concurrence est plus rude que jamais. Et elle ne provient plus seulement des autres cabinets d’avocats, mais aussi de prestataires de services qui pensent de la même manière que les hommes d’affaires. » Au sein des cabinets plus importants dans lesquels des équipes internes de marketeers chevronnés véhiculent une vision marketing (numérique), cela génère souvent de la frustration et… des départs. NOTRE CABINET D’AVOCATS DOIT-IL INVESTIR PLUS DANS LE MARKETING NUMÉRIQUE ? SANS DOUTE De nombreux cabinets d’avocats belges prospères et aux budgets marketing à six chiffres ne font rien sur le plan du marketing numérique, à l’exception de la maintenance d’un site web simple. À nouveau, chaque cabinet est différent et le marketing numérique n’est pas (encore) la solution la plus indiquée pour certains cabinets. Si d’autres canaux leur permettent de toucher constamment leurs clients actuels et futurs, qu’ils continuent à bien y consacrer leur budget. À la question « Devons-nous investir davantage dans le marketing numérique ? », ma réponse reste donc : « probablement, mais je n’en suis pas sûr. » Tout dépend de la spécificité de votre cabinet et de vos ambitions. Mais j’insiste de plus en plus souvent sur le « probablement ». Le marketing numérique est un monde en constante évolution. Ne pas embarquer aujourd’hui pourrait vous faire définitivement rater le train demain.

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Une rencontre organisée par Avocats.be avec le soutien de l'UIA et du Barreau de Bruxelles Le numérique en action

AU PROGRAMME : Introduction

(8h45) par Jean-Pierre Buyle, Président de l'OBFG et Stanislas van Wassenhove, avocat L'état des lieux du numérique Les innovations technologiques

(9h15 – 11h) L’intelligence artificielle et le blockchain : Gaël Mainguy, directeur du développement du CRI L’accès à la connaissance : Nicolas Bustamente, fondateur de Doctrine.fr La prospective : Thomas Baduel, fondateur de Prédictice Les enjeux pour les avocats

(11h15-12h45) La plateforme de consultation en ligne de 5 barreaux belges : Olivier Haenecour, avocat L'état des lieux numérique du CNB : Didier Adjedj, ancien bâtonnier de Carpentras Le financement des investissements : Patrick De Wolf, avocat Comment changer son modèle ? : Alain Vas, Vice-Recteur UCL La justice du futur

(12h45 - 13h) par Koen Geens, Ministre de la Justice

(14h – 15h30) : 3 ateliers > Les sources externes et la sécurisation des flux (Dimitri de Sart, avocat) La gestion des banques de données Les outils de standardisation Le stockage et l’archivage La sécurisation des données L’Extranet > L’organisation numérique du cabinet (Etienne Wery, avocat) L'évolution des logiciels pour avocat Le tsunami des emails La gestion de la connaissance Les outils de pilotage > La communication et le marketing (Daniel Fesler, avocat) Les réseaux sociaux YouTube Les vidéos conférence Les sites web Les outils collaboratifs La justice numérique

(16h – 17h) La contribution des barreaux à l'informatisation de la Justice : Jean-Louis Joris Les procédures dématérialisées : ... Les enjeux pour les magistrats : Jean-Marc Meilleur, Procureur du Roi de Bruxelles Conclusions

(17h15) par Pierre Sculier, Bâtonnier du barreau de Bruxelles

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QUOI ? Une journée d'information et de réflexion sur la révolution numérique et la transformation de l'avocat avec témoignages et ateliers. QUAND ? Le 15 décembre 2016 de 8h30 à 17h30 OÙ ? Dans les locaux de la FEB - rue de Ravenstein, 4 à 1000 Bruxelles POUR QUI ? Tous les avocats membres de l'OBFG mais aussi les autres acteurs de la Justice TARIF ? 60,00 € pour les avocats, 30,00 € pour les avocats stagiaires et les magistrats, 80,00 € pour les autres (TTC) POINTS DE FORMATION ? 6 points de formation pour les avocats INSCRIPTIONS ? Sur le site http://numerique.avocats.be

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