Revue Migrations Forcées 34

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RMF 34 hommes avec lesquels elles n’ont aucun lien de parenté mais qui partagent la même habitation surpeuplée. Alors que certains petits projets soutenus par des ONG encouragent la production artisanale à domicile, ces projets présentent peu de possibilités de formation et de développement de compétences, ne sont pas axés sur le marché et n’offrent ainsi que des possibilités limitées d’obtenir un salaire viable. La qualité des produits et l’accès au marché sont les obstacles majeurs au développement de ces projets. Pour l’instant, la plupart des clients proviennent de la communauté bénévole des ONG et des expatriés.

Women’s Refugee Commission/Lauren Heller

DÉPLACEMENT EN MILIEU URBAIN

Au Caire, travailler présente des risques Le Caire abrite une population de réfugiés très diverse, qui lutte pour survivre dans un environnement urbain hostile où l’assistance est limitée. Le taux de chômage national élevé et le grand nombre de jeunes sans emploi dérèglent le marché du travail local et entravent l’accès des réfugiés. L’étude de terrain menée par WRC au Caire a révélé de nombreux risques et défis identiques à ceux que rencontrent les femmes réfugiées de Kuala Lumpur. Alors que l’Égypte autorise les réfugiés à demander un permis de travail, celui-ci ne peut être obtenu qu’après un processus long, coûteux et compliqué qui nécessite le soutien d’un employeur et l’absence de toute compétition de la part de candidats égyptiens dotés des mêmes qualifications. En conséquence, les réfugiés sont forcés de se tourner vers des secteurs non réglementés et des emplois peu protégés. La majorité des femmes réfugiées qui travaillent occupent un emploi de domestique dans un foyer égyptien. Comme ce secteur n’est pas réglementé par le code du travail égyptien, il ne nécessite pas de permis de travail et il existe un marché permanent pour ce type d’emploi. Toutefois, l’absence de réglementation crée un environnement risqué. A l’intérieur de ces maisons particulières, les femmes réfugiées peuvent être exposées au harcèlement, aux mauvais traitements, à l’exploitation sexuelle et au non-versement de leur salaire. Enfin, parmi les femmes réfugiées qui ne peuvent trouver d’emploi comme domestique, certaines se tourneraient vers l’industrie du sexe.5 Malgré de fréquents signalements de violences sexuées et sexistes, WRC a trouvé peu de services de soutien établis pour les victimes au Caire.

Femmes réfugiées travaillant dans l’usine textile Malika, au Caire.

Éléments protecteurs Les études de terrain menées par WRC ont toutefois trouvé divers exemples illustrant comment renforcer la protection des femmes réfugiées, même dans les zones urbaines où elles n’ont juridiquement aucun droit au travail. Des éléments protecteurs peuvent être intégrés aux programmes économiques, tant dans la communauté des réfugiés que dans la communauté d’accueil : accompagnement, exigence d’un code de conduite de la part des employeurs, campagnes de sensibilisation, établissement de liens avec les groupes locaux politiques et féminins, et participation des hommes. Une organisation du Caire, par exemple, forme les femmes réfugiées aux travaux domestiques et les place dans des familles, puis les accompagne le premier jour de leur travail. Cette ONG enregistre le nom et les coordonnées de l’employeur, ainsi que le salaire qui a été décidé, ce qui montre à l’employeur que la femme qui travaille pour lui bénéficie d’un système de soutien et que l’ONG sait où et quand le retrouver en cas de problème. Parmi d’autres succès, l’on peut citer une initiative du secteur privée, la Manufacture de Vêtements Malaika, qui emploie tout autant des femmes égyptiennes que des réfugiées spécialisées dans la broderie. Cette manufacture offre une formation de 40 jours qui inclut les coûts de transport

et des repas des participantes. C’est l’un des rares exemples de société du secteur privé qui recrutent activement des réfugiées pour les intégrer à d’autres employées égyptiennes. Cependant, la construction de tels éléments protecteurs demandent de planifier avec attention, de comprendre les risques potentiels, d’évaluer les moyens de réduire les risques et d’intégrer aux interventions relatives aux modes de subsistance des éléments permettant de réduire la vulnérabilité. Demander et obtenir un statut juridique pour les réfugiés dans ces environnements, de même que leur droit au travail, permettrait de leur offrir la meilleure protection. Dale Buscher (DaleB@wrcommission.org) est directeur de la protection et Lauren Heller (LaurenH@wrcommission.org) est administratrice de programme pour la Women’s Refugee Commission (http:// www.womensrefugeecommission.org). 1. Entretien avec l’UNHCR, 26 mai 2008. 2. Mémorandum commun des ONG relatif aux mesures de répression contre les migrants sans papiers, 29 janvier 2005. 3. Voir l’article de Alice Nah p29. 4. « Desperate Lives: Burmese Women Struggle to Make a Living in Malaysia » (« Vies désespérées : les femmes birmanes peinent à survivre en Malaisie »), Women’s Refugee Commission, mai 2008 : http://www. womensrefugeecommission.org/docs/mys_rep.pdf 5. Entretien avec le personnel médical de Refugee Egypt, 24 juillet 2008.

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