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Ces clichés par milliers avec lesquels nous vivons M
from Le guide du gang des introverti(e)s : s’accepter et trouver sa place dans une société extravertie
on premier réflexe, lorsque j’ai tenté de définir l’introversion, a été tout naturellement d’ouvrir quelques dictionnaires pour avoir des définitions claires et poser les bases. Mais hélas, j’ai été stupéfaite de trouver un florilège de définitions incomplètes ou réductrices. Il était donc impossible pour moi de démarrer ce chapitre sans tenter de définir l’introversion tout en dénonçant ces nombreux clichés qui nous mènent la vie dure !
Sur Linternaute.fr, je lis qu’une personne introvertie est « renfermée », « repliée », « réservée », « timide » et qu’elle « parle peu en présence de personnes qu’elle ne connaît pas ». Le Larousse en ligne décrit l’introversion comme une « tendance à se replier sur soi-même ». Une personne introvertie serait donc secrète, timide et silencieuse.
Le Trésor de la langue française informatisé fait mention d’un être « porté à l’introversion, à vivre centré sur soi-même, ce qui, avec un repliement sur soi plus ou moins important, entraîne à se détourner du monde extérieur ». Reverso décrit une personne qui « polarise sa vie mentale sur sa vie intérieure au détriment des contacts avec le monde extérieur », comme si un entre-deux était inenvisageable. Selon ces sites, une personne introvertie serait donc déconnectée du monde extérieur.
Quant au dictionnaire en ligne Cordial, il définit l’introversion comme l’« attitude d’être attentif seulement à soi-même, de ne pas extérioriser ses sentiments ».
Pour les synonymes, les termes péjoratifs s’enchaînent aussi : « replié », « taciturne » ou « silencieux » pour L’Internaute,
« antisocial », « égocentrique », « oublieux » ou encore « égoïste » pour Reverso. On passe d’un enfermement sur soi à une attitude de rejet de la société et à une tendance à l’égoïsme . C’est ce qu’on appelle une escalade soudaine !
Les expressions de tous les jours associent par ailleurs l’introversion à une forme d’invisibilité. Ce sont des expressions que nous avons intégrées sans le savoir dans le langage courant : une personne plutôt dans l’observation devient une « plante verte », un « fantôme », un « élément du décor », elle « rase les murs » et n’a « pas de langue »…
Au-delà de leur dimension négative, ces termes peuvent résonner en nous avec violence quand l’introversion nous concerne. Difficile de ne pas le prendre personnellement, et difficile de ne pas avoir peur lorsque nous nous sentons seul·es, sans représentations positives. Ces définitions contiennent une forme de jugement qui nuit à l’estime de soi.
Pour aller plus loin, j’ai fait ce que j’adore faire quand il s’agit de décrypter un concept : taper un mot-clé sur Google et analyser le plus de contenus possible. Mes trouvailles sont assez riches pour confirmer
Focus
D’où viennent ces stéréotypes ? C’est notre société occidentale, portée par la culture américaine, qui a durablement donné au modèle extraverti ses lettres de noblesse. En Occident, la valeur d’un « individu modèle » s’évalue en fonction de sa capacité à exprimer sa singularité, verbalement et physiquement. Ainsi, parler fort, s’imposer, faire son show et prendre de la place seraient des signes évidents de confiance, de puissance et de domination. En occupant l’espace physique, on prendrait donc d’une certaine manière l’ascendant sur l’autre, on ferait preuve de supériorité. Or l’idéal du modèle extraverti est bien enraciné dans notre société. Prendre son temps pour s’exprimer est donc interprété comme un manque d’aisance ou de confiance en soi, de la froideur, voire de l’incompétence. En entreprise, en famille, dans le cadre amical ou affectif, nous, personnes introverties, devons tant bien que mal rentrer dans le moule et nous conformer aux conventions sociales. Les contenus de développement personnel nous invitent à sortir de notre coquille, à quitter notre zone de confort, à nous débarrasser de notre réserve et à nous adapter. Alors nous nous adaptons, nous nous suradaptons même, parce que c’est souvent la seule solution envisageable.
Je trouve surtout mon énergie à l’intérieur de moi. Mes pensées et mes réflexions me nourrissent, j’aime aller et venir dans mon petit jardin secret pour me régénérer. (I)
À choisir, je préfère les rassemblements, les événements qui impliquent du monde, les mondanités, les rencontres, les activités avec des échanges multiples : je rentre chez moi plein·e d’énergie. (E)
Quand on pense à moi, on visualise une idée de sagesse, d’écoute. On dit que je suis une personne calme et posée, une « force tranquille ». Je semble plutôt être quelqu’un de réservé au premier abord. (I)
Pour transmettre mes idées, je ressens le besoin de les communiquer au fur et à mesure, d’échanger avec d’autres personnes pour les développer. J’exprime tout haut le fil de ma pensée. (E)
J’ai besoin de prendre le temps pour moi afin de réfléchir au développement d’une idée. J’ai besoin d’anticiper avant d’agir. (I)
Si je reste trop longtemps entouré·e de monde, je souffre du trop-plein de stimuli et d’interactions, j’ai le sentiment de ne plus être « présent·e », ça me fatigue. (I)
Je peux rester seul·e, mais cela peut vite devenir difficile à supporter pour moi au bout de quelques heures. J’ai besoin de voir des gens. (E)
J’aime établir des connexions intenses… Mais j’adore aussi les autres relations. J’ai des ami·es, des potes, des connaissances, tout le monde est intéressant pour moi ! J’adore rencontrer du monde. (E)
Je me recentre dans la solitude, ça me permet de me régénérer. Je peux passer un temps important en solo, sans que ça me dérange. (I)