Dans les allées de Versailles - A la table du Roi-Soleil

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Isabelle Fabula

À la table du Roi-Soleil


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Illustration de la couverture : Léa Fabre

Direction : Guillaume Pô Direction éditoriale : Sarah Malherbe Édition : Claire Renaud Conception graphique : Hélène Léonard Direction de la fabrication : Thierry Dubus Fabrication : Sonia Romeo Composition : Text’oh (Dole)

07/12/2021 18:58

© Fleurus, Paris, 2022, pour l’ensemble de l’ouvrage. www.fleuruseditions.com ISBN : 978-2-2151-7775-3 MDS : FS77753 Tous droits réservés pour tous les pays. « Loi n° 49-956 du 16 juillet 1949 sur les publications destinées à la jeunesse, modifiée par la loi n° 2011-525 du 17 mai 2011. »

Achevé d’imprimer en janvier 2022 en Italie par Rotolito. N° d’édition : J22111 Dépôt légal : Mars 2022


Isabelle Fabula

À la table du Roi-Soleil



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Un goûter avec le Roi-Soleil

En cette magnifique après-midi d’été, Coline, Aglaé, Pascaline, Acanthe et Clémence jouaient au croquet dans les jardins de Versailles. Les milliers de fenêtres du château brillaient sous le soleil radieux. Le ciel était bleu, on entendait des petits oiseaux chanter dans les bosquets, les fontaines gazouillaient. Des courtisans flânaient en agitant des éventails, d’autres se promenaient en barque sur le Grand Canal. Une grosse voix appela soudain les cinq demoiselles. – Mesdemoiselles ! Mesdemoiselles ! Où êtesvous ?

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– Madame Dragon, s’écria Pascaline de Saint-­ Hubert en sursautant. Ses couettes brunes et ses lunettes sursautèrent avec elle. Madame Dragon s’appelait en réalité madame d’Argon. Gouvernante des cinq fillettes, elle n’avait pas beaucoup de patience et criait souvent. C’est dans ces moments de colère que Pascaline et ses amies la surnommait madame Dragon, mais jamais devant elle. – Que faites-vous donc là alors que je vous cherche dans tout le château ? s’écria-t-elle en rejoignant les fillettes. – Vous le voyez, madame, nous jouons au croquet, expliqua Coline de Tambour-Battant. Je suis d’ailleurs sur le point de gagner. Ses cheveux châtains étaient ébouriffés mais Coline adorait le sport et se souciait peu de sa tenue. – Vous nous dites toujours de profiter du dehors quand il fait beau, fit remarquer Aglaé de Minois. – Vous nous dites même que ça vous fait du bien de ne pas nous avoir dans les jambes, dit Acanthe du Mont, l’artiste du groupe aux cheveux roux et aux yeux verts.

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Un goûter avec le Roi-Soleil

– À gesticuler comme des petites souris, ajouta Clémence de la Bergeronnette de sa voix timide en baissant ses beaux yeux aussi noirs que ses cheveux. Mais madame d’Argon n’avait pas le temps de papoter. – Vous allez vite me ranger ces boules, ces arceaux, ces maillets, tout ce qui encombre la pelouse, et vous irez vous laver les mains ensuite, ordonna-t-elle. Madame d’Astragale, votre marraine, a reçu une invitation pour vous et il reste à peine un quart d’heure pour vous préparer. – Une invitation ? répéta Coline avec surprise. Une invitation de qui ? – De notre roi Louis XIV, répondit madame d’Argon. Et je me demande bien pourquoi Sa Majesté vous réclame. Les demoiselles se dépêchèrent d’aller ranger leurs affaires puis se précipitèrent chez leur marraine. La baronne d’Astragale était une dame âgée aux cheveux blancs coiffés en chignon. Elle n’avait pas d’enfant et avait accepté avec joie de recevoir ses filleules à Versailles

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afin de leur enseigner les bonnes manières de la cour du roi. – Est-ce vrai que Sa Majesté veut nous voir ? s’écria Coline en surgissant dans le salon à la manière d’un boulet de canon. – Combien de fois faudra-t-il vous répéter que l’on ne coure pas à l’intérieur du château ? dit madame d’Astragale avec sévérité. Coline fit une petite révérence pour s’excuser. – Voilà qui est mieux, approuva madame d’Astragale. Oui, Sa Majesté vous a invitées toutes les cinq. Alors, voyons, vos mains sont-elles propres ? Les fillettes tendirent les mains. – Puis-je aller me changer, marraine ? demanda Aglaé pendant l’inspection. Je voudrais mettre ma nouvelle robe de bal. Aglaé était une demoiselle blonde aux yeux bleus qui adorait s’habiller comme une princesse. – Je crains que vous n’en ayez pas le temps, répondit madame d’Astragale en secouant la tête d’un air désolé. De toute façon, c’est à un goûter que le roi vous invite, pas à un bal.

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Un goûter avec le Roi-Soleil

– Un goûter ? s’écria Acanthe. Le roi goûte ? – Louis XIV est très gourmand, tu ignorais cela ? s’étonna Coline. Madame d’Astragale parut scandalisée. – Est-ce ainsi que l’on parle du Roi-Soleil, mademoiselle ? Le Roi-Soleil n’a aucun défaut, sachez-le. Ainsi, ne dites jamais que Louis XIV est gourmand mais plutôt qu’il aime faire honneur aux bons plats de son royaume. La cuisine française est l’une des meilleures du monde et il en est très fier. – Et très friand, chuchota tout bas Coline en se retenant de rire. Madame d’Astragale vérifia que les visages et les robes étaient aussi propres que les mains et arrangea les cheveux de Coline, avant de conduire ses filleules auprès du roi. Louis XIV avait choisi de prendre son goûter dehors. Des tables recouvertes de nappes blanches avaient été dressées dans le bosquet des rocailles. Encadrant le bosquet, des cascades d’eau rafraîchissaient l’atmosphère de cette chaude après-midi. Les tables croulaient

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sous les gâteaux, les fruits et les boissons fraîches. Sur une estrade, des musiciens jouaient des airs charmants. En arrivant, les demoiselles constatèrent qu’elles n’étaient pas les seules invitées, loin de là ! Le roi avait convié une centaine de personnes à son goûter. – Nous aurons du mal à approcher Sa Majesté avec tous ces courtisans qui l’entourent, se lamenta Aglaé avec regret. Elle avait raison. De là où elles étaient, les fillettes ne voyaient que la plume blanche du chapeau royal au-dessus de la foule. – C’est l’ennui avec Louis XIV, il ne peut jamais dire bonjour à tous ses invités, il en a trop, soupira Coline. – Ne soyez pas déçues, leur dit madame d’Astragale. Être invitées est déjà un honneur et Sa Majesté a de grandes responsabilités et beaucoup de personnes à voir. Des personnes bien plus importantes que cinq petites filles. Allons, pourquoi n’allez-vous pas vous régaler de toutes ces bonnes choses au lieu de vous plaindre ?

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Un goûter avec le Roi-Soleil

En apprenant qu’elles pouvaient manger sans la permission du roi, les cinq amies sentirent leur moral remonter en flèche. Madame d’Astragale aperçut l’une de ses connaissances et laissa ses filleules se débrouiller devant les desserts. Aglaé prit des gâteaux secs en expliquant : – Je ne veux pas risquer de me salir avec de la crème. – Moi, je meurs de soif et je prendrai d’abord une citronnade, dit Clémence. – Oh, des mille-feuilles ! s’exclama Pascaline. J’adore ça. – Tu ne veux rien, Coline ? demanda Acanthe. Je partage ma tarte aux pommes avec toi, si tu veux. Il est vrai que Coline ne touchait à rien. Debout devant toutes ces merveilles, elle ne savait pas quoi choisir. – Si je mange cette tarte aux pommes, aurai-je assez de place pour un chou à la Chantilly ? Et si je mange ce chou, pourrai-je avaler une meringue ? Et après la meringue, me restera-t-il de l’appétit pour un far breton ? Oh, là, là, que le choix est difficile !

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– Tu ferais mieux de te décider si tu veux qu’il te reste quelque chose, la prévint Pascaline. D’après les desserts présentés et le nombre d’invités, je prévois que tout sera englouti dans une demi-heure. Pascaline avait un esprit scientifique et pouvait calculer ce genre de choses en un clin d’œil. Inquiète, Coline se décida enfin. – Une tartelette aux fraises, voilà ce que je voudrais. Et cela tombe bien, personne n’a l’air d’en vouloir. Au moment où elle tendait la main vers les succulentes tartelettes présentées sur un plateau en or, un mousquetaire l’arrêta. Il avait un air menaçant et Coline se figea. – Halte-là ! ordonna le mousquetaire. Ces tartelettes sont réservées. – Quel dommage ! se désola Coline. Ne pourrais-je en avoir une ? La plus petite… C’est mon gâteau préféré ! – C’est aussi le gâteau préféré de mon maître et il est interdit d’y toucher, expliqua le mousquetaire. Coline compta les tartelettes et se mit à rire.

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– Oh, oh, oh ! Mais il y en a douze, votre maître ne va pas manger douze tartelettes quand même ! – Il les mangera si c’est son bon plaisir, répliqua le mousquetaire. De toute façon c’est comme ça, personne n’a le droit d’en prendre à part mon maître. – Et pourrais-je connaître le nom d’un maître si gourmand ? demanda Coline. Car s’il arrive à manger ces douze tartelettes c’est qu’il est encore plus gourmand que moi, ce qui n’est pas peu dire ! À cet instant précis, un murmure s’éleva autour de Coline. – Le roi va goûter, le roi va goûter, chuchotaient les courtisans. Tout le monde s’écarta et Coline sentit une ombre se dresser derrière elle. Elle se retourna lentement pour se retrouver face à… – Vo… Votre Majesté, balbutia-t-elle. C’était bien Louis XIV, superbe dans un costume vert et or agrémenté de dentelles. Toute tremblante, Coline faillit tomber en exécutant sa révérence.

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– Oui, c’est moi le gourmand qui se réserve toutes ces tartelettes aux fraises, mademoiselle de Tambour-­ Battant, dit le roi d’un air un peu vexé. Les musiciens s’interrompirent et un lourd silence s’abattit sur l’assemblée. Aglaé, Pascaline, Clémence et Acanthe n’osaient plus bouger et Coline se crut perdue quand Louis XIV ajouta : – Devrais-je ordonner à ce mousquetaire de vous arrêter pour pouvoir accéder à mes gâteaux préférés ? Mais il souriait, alors tout le monde comprit qu’il plaisantait. Il y eut un grand éclat de rire et les musiciens entamèrent un menuet. Coline s’écarta en bafouillant : – Ah… euh… pardon, Votre Majesté… permettezmoi de me retirer… vos tartelettes vous attendent, toutes les douze, vous pouvez vérifier. Voilà, voilà…. Je vous souhaite bon appétit, Votre Majesté. Elle tremblait encore en rejoignant ses amies. Plus loin, madame d’Astragale la regardait d’un air mécontent. Pendant le reste de l’après-midi, Coline surveilla discrètement le roi. Peut-être n’allait-il pas manger toutes les tartelettes aux fraises ? Peut-être n’était-il pas

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si gourmand ? Hélas, il l’était et quand il eut fini de goûter, il ne restait pas la plus petite miette sur le plateau doré.


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la suite d’une allergie aux fraises, Louis XIV ne peut plus manger sa tarte préférée et prive toute la cour de dessert. Catastrophées, les demoiselles de Versailles demandent alors au roi d’organiser un grand concours de pâtisserie afin de choisir un nouveau dessert préféré. Parmi les pâtissiers venus de tout le royaume, les demoiselles font la connaissance d’Honoré Craquelin, un timide garçon de douze ans qui possède un don pâtissier exceptionnel. Les demoiselles décident alors de l’aider et s’improvisent commis de cuisine. Mais deux pâtissiers jaloux et tricheurs, Ladouille et Moulamanquet, vont tout mettre en œuvre pour éliminer Honoré du concours...

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