Francophonies du monde N°3

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À l’origine de la Francophonie, il y a un élan international de solidarité fondé sur le partage de cet héritage commun de la colonisation qu’est la langue française. Ces derniers temps, l’Organisation s’était un peu éloignée de cet esprit des fondateurs. Elle voulait agir dans trop de domaines, avec parfois une valeur ajoutée limitée par rapport à d’autres organisations. Je souhaite que l’on opère un retour aux sources. J’aimerais m’inscrire dans l’histoire de la Francophonie comme celle qui a permis un resserrement de l’action de l’Organisation autour de ses priorités fondatrices. La première de ces priorités est de remettre au cœur de nos missions la langue française. Nous devons nous mobiliser davantage pour en promouvoir la transmission par une éducation de qualité, et pour la repositionner dans les domaines d’avenir, en particulier dans l’univers numérique. La seconde priorité est de renforcer la communauté politique francophone afin de faire entendre sur la scène internationale une voix politique forte, en particulier sur les enjeux globaux auxquels sont confrontées nos sociétés. À 50 ans, on doit certes prendre le temps de réfléchir au passé, mais on doit surtout s’inscrire dans le présent et anticiper l’avenir. Je pense à l’environnement, au numérique ou encore à l’avancement de la femme francophone comme priorité absolue. Enfin, je compte développer les solidarités à l’intérieur de notre espace francophone, en premier lieu face aux crises et aux conflits qui peuvent survenir dans notre espace par une mobilisation au service de la paix et de la démocratie. Comment allez-vous célébrer ces « noces d’or » de la Francophonie dans la capitale nigérienne ? Quels sont les autres grands évènements et temps forts prévus dans le cadre de ce cinquantenaire, dont la célébration ira « du 20 mars au 31 décembre 2020 » ? Le lancement officiel de ce cinquantenaire aura bien lieu le 20 mars prochain, au bord du fleuve Niger, à Niamey, berceau de la Francophonie institutionnelle en présence de plusieurs chefs d’État et de gouvernement, notamment ceux des 21 pays fondateurs. Nous entendrons ces voix institutionnelles et nous donnerons aussi la parole aux jeunes : nous voulons savoir ce que signifie pour eux « l’héritage de Niamey ». En parallèle, se déroulera une grande fête à Paris pour le 20 mars et l’OIF ouvrira ses portes au grand public et surtout à la jeunesse, avec des spectacles et des animations. Le 26 mars, l’OIF, en partenariat avec l’IFRI, organise un grand forum de réflexion à Paris, au Centre national des arts et métiers (CNAM) autour du thème : « 50 ans après : la Francophonie, un enjeu géopolitique ». Nous envisageons également un grand concert autour des cultures urbaines au début de l’été à Kinshasa, en République démocratique du Congo, la plus grande ville francophone du monde, une capitale dont la jeunesse déborde de talents et de créativité. Du 25 au 27 septembre, aura lieu à Tunis le Congrès mondial des écrivains de langue française, qui réunira les plus grands auteurs francophones. Les célébrations du cinquantenaire seront officiellement closes lors du XVIIIe Sommet de la Francophonie à Tunis en décembre. En plus de ces manifestations organisées ou co-organisées par l’OIF, des centaines d’évènements dans l’espace francophone vont être

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© LOJIQ

DOSSIER | ENTRETIEN

mis aux couleurs de la Francophonie. Je pense en particulier au Congrès mondial de la Fédération internationale des professeurs de français (FIPF) qui aura lieu à Tunis en juillet. Le dernier Rapport de l’Observatoire de la langue française, paru en 2019, évoquait 300 millions de locuteurs de français sur la planète. Les prévisions les plus optimistes tablent sur plus de 700 millions de locuteurs à l’horizon 2050. Ce n’est pas qu’une question de démographie, mais d’enseignement. Quelle attention portez-vous à l’apprentissage du français et à ses enseignants ? La langue française se porte bien grâce, en particulier, à la vitalité démographique des pays d’Afrique. Mais ne nous y trompons pas : toutes les projections chiffrées sur le nombre de locuteurs seront erronées si nous n’agissons pas vite et de manière concertée dans tout l’espace francophone en faveur d’une éducation de qualité en français dans nos pays membres où il est langue de scolarité. Il nous faut agir aussi sur le français comme langue étrangère, y compris hors de la Francophonie institutionnelle car la langue française ne connaît pas de frontières. Dans ce domaine crucial de l’éducation, l’OIF déploie déjà plusieurs programmes mis en œuvre par l’Institut de la Francophonie pour l’Éducation et la Formation (IFEF) que je souhaite consolider et passer à l’échelle supérieure. Nous allons également travailler de manière plus complémentaire avec les acteurs de la Charte de la Francophonie compétents dans le domaine que sont l’Agence universitaire de la Francophonie (AUF), la Conférence des ministres de l’éducation nationale (CONFEMEN) ou TV5Monde. J’ai l’ambition de mettre en route une grande alliance francophone pour l’éducation qui impliquera également les coopérations éducatives des États membres, sans oublier la société civile. À cet égard, je compte beaucoup sur la Fédération internationale des professeurs de français (FIPF) pour relayer nos projets, notamment, en particulier un grand projet pour la mobilité des enseignants que je vais lancer dès cette année 2020 pour pallier le manque d’enseignants formés dans certains pays de l’espace francophone. Francophonies du monde | n° 3 | mars-avril 2020


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