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Patek Philippe Nautilus Un coup de foudre durable page 8

EUROPA STAR PREMIERE LE JOURNAL DE L’ÉCOSYSTÈME HORLOGER SUISSE

NO 2/17 (Vol.19) MARS 2017 | 7.00 CHF € | EUROPASTAR.COM

ISSN 297-4008

ÉDITORIAL

par

Pierre Maillard

DR

Ivre de sa propre montée en gamme et des résultats longtemps enivrants de ses produits les plus luxueux, l’horlogerie suisse est retombée de haut. Aurions-nous systématiquement exagéré, se demande-t-elle? Et tous les regards de se tourner plus «bas», vers ce moyen de gamme regardé jusqu’alors avec quelque condescendance. Toute seule, la pointe de la pyramide ne tient plus debout. Pour culminer à ses hauteurs stratosphériques, elle a besoin d’une solide assise. Et pour que l’assise de la pyramide soit solide, elle doit être la plus large possible. En d’autres termes, il faut du volume pour qu’il y ait de l’exclusivité.

Toute seule, la pointe de la pyramide ne tient plus debout. Pour culminer à ses hauteurs stratosphériques, elle a besoin d’une solide assise. Ce rôle du volume – un volume de qualité qui garantisse la solidité et la permanence de tout l’édifice – est dévolu à ce que l’on nomme, faute de mieux, le «moyen de gamme». Personne n’aime ce vocable et certains le remplacent par «luxe accessible», une expression qui est en-soi un oxymore car si c’est accessible, ce n’est plus vraiment du luxe. Ceci dit, il y a non pas un «moyen de gamme» mais des «moyens de gamme» car l’accessibilité d’un pro-

duit est toute relative, selon que vous viviez ici ou là, dans une société avancée ou dans une économie émergente. De même, il n’y a pas une classe moyenne mais bel et bien des classes moyennes aux destins bien différents. Si les classes moyennes chinoises sont en pleine expansion et représentent déjà le tiers des classes moyennes mondiales, les classes moyennes occidentales sont en plein marasme. Récemment, un article de Bloomberg titrait: «L’angoisse de la classe moyenne déprime les ventes de l’horlogerie suisse» («MiddleClass Angst Is Depressing Swiss Watch Sales»). Mais, en s’y penchant de plus près, on découvrait que les exemples cités pointaient tous du côté des montres de haut de gamme, vendues à plus de 5'000.-CHF, et non pas vers le «moyen de gamme» que l’on peut définir comme s’étageant de 500.-CHF à 3'000.-CHF. La pression fiscale subie par les classes moyennes, le fait que les salaires stagnent, que l’angoisse du futur monte, que les boulots sont remplacés par des robots, qu’en Europe il y a le Brexit, aux USA l’imprévisible Trump, en Chine les campagnes anti-corruption et anti-extravagance, ont changé la donne et les aspirations de la «classe moyenne» qui, comme le dit toujours Bloomberg, «a décidé, après avoir constaté qu’elle n’avait plus reçu d’augmentation depuis bien des années, qu’elle avait mieux à faire que de dépenser son argent pour de la bijouterie suisse de poignet.» («has decided that, after not getting a pay rise from many years, there are better things to spend money on than Swiss wrist jewelry.») C’est précisément là que le «moyen de gamme» a une très sérieuse carte à jouer en répondant aux véritables aspirations des classes moyennes qui, désillusionnées, n’aspirent plus tant à conquérir un statut plus élevé (ce que leur montre dispendieuse se chargeait de démontrer publiquement) mais désirent néanmoins du beau, du solide, du fiable, du pérenne. L’heure est au retour en grâce du «moyen de gamme». Nous y consacrons un important Dossier dans ce numéro, sous le titre évocateur de Ne laissons pas tomber la classe moyenne.

Qilou Old Street in Haikou ©Drawing Architecture Studio | www.d-a-s.cn

Renforcer la base de la pyramide

Ne laissons pas tomber la classe moyenne par

Pierre et Serge Maillard

avec la collaboration de

Fabrice Eschmann

Tout occupée ces dernières décennies à gravir les plus hauts sommets en termes de prix, de sophistication mécanique et de raffinement artistique, l’horlogerie suisse a semblé négliger, voire a peu à peu délaissé (à la notable exception du Swatch Group et des quelques forts indépendants) une part essentielle de sa clientèle que sont les classes moyennes. Dans notre Dossier précédent – The Price Issue, Europa Star Time. Business 1/17 – nous avions mis en lumière l’augmentation considé-

rable de la part des montres de plus de 3'000.- CHF (prix à l’export), passée de 15,5% en 2000 à un pic de 60,2% en 2015, avant de légèrement retomber à 60% en 2016. Objectivement, donc, la part du moyen de gamme suisse a considérablement baissé en 15 ans, et ce d’autant plus que le nombre total de pièces exportées a quasiment stagné, passant de 29 millions d’unités en 2000 à 28 millions en 2015. Ce reflux avéré des montres de moyen de gamme a certainement profité aux concurrents de la Suisse. En 2015, par exemple, alors que le nombre de pièces exportées par la Suisse baissait de -1,6% et s’établissait

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Our story, our brand, our passion. Carole & Pierre Dubois

à 28,1 millions de pièces, l’Allemagne augmentait ses exportations de 4,4% et atteignait 21,9 millions de pièces, tandis que la France augmentait de 6,1% à 7,3 millions de pièces. Dans le même temps, le Japon exportait près de 60 millions de montres pour un total de près de 160 milliards de yens (soit 1,3 milliard d’euros). Une large part des exportations allemandes, françaises ou japonaises pouvant être classée dans le moyen de gamme – soit entre 500.- CHF et 3'000.- CHF prix public –, le relatif «vide» laissé par la Suisse a été comblé par ses concurrents. (Lire notre dossier en page 2 à 6)


DOSSIER CLASSE MOYENNE

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(suite)

Le vent tournerait-il? La crise qui, ces deux dernières années, a commencé à rogner l’horlogerie suisse par le haut – une fois n’est pas coutume – est en train de changer la donne. Tout à coup, tous les regards jusqu’alors légèrement condescendants se tournent vers cette gamme dite moyenne, qui non seulement fait du volume mais qui semble parfois mieux taillée pour absorber les cahots des routes mondialisées. On l’aura constaté au cours du dernier SIHH, les marques qui, auparavant ne s’abaissaient guère à parler de prix, se sont toutes mises à le mettre en avant, en l’enrobant pudiquement du terme de «valeur». Et une marque, inattendue dans ce très chic contexte, a attiré bien des projecteurs: Baume & Mercier, soudain louée par tous pour la modération de son offre (lire plus loin). Le «moyen de gamme» est de retour. Soudain, tout le monde s’y intéresse, des marques qui y entrevoient un possible relais de croissance, aux détaillants qui y voient l’occasion d’augmenter leur trafic et de faire rouler leur stock. Soit dit en passant, il est piquant

de relever que le même phénomène se produit dans le monde politique occidental. Tout à coup, les classes moyennes – en risque de décrochage – se mettent à intéresser tout le monde. Mais ce n’est pas un hasard si l’on peut faire ce parallèle car l’horlogerie, nous le savons depuis longtemps, n’est que le reflet des temps qu’elle traverse.

Le moyen de gamme est aussi un laboratoire Les transformations les plus profondes du secteur horloger n’arriveront pas par le haut mais sont déjà à l’œuvre dans le champ de bataille du moyen de gamme. Comme on peut d'ores et déjà l'observer sur le marché américain, le très important segment du moyen de gamme est le champ d'expérimentation de tous les bouleversements en cours. Quoiqu’en pensent les horlogers suisses, l’arrivée de la montre connectée y secoue les fondations du moyen de gamme, et tandis que le e-commerce bouleverse les habitudes de consommation, un florissant marché gris renverse les hiérarchies. Et l’on sait que ce qui se passe aux USA finit

La classe moyenne existe-t-elle? Et accessoirement la montre moyen de gamme? Les horlogers eux-mêmes n’aiment guère le mot «moyen de gamme» qu’ils trouvent réducteur. Et de fait, il n’y a pas une seule gamme moyenne mais toutes sortes de gammes. De même que la classe moyenne occidentale n’est pas la même que la classe moyenne d’un pays à l’économie émergente, le vocable moyen de gamme recouvre une large palette de produits bien distincts les uns des autres. Et la perception du moyen de gamme varie grandement en fonction de votre portefeuille.

«Je n'aime pas du tout ce terme de moyen de gamme. Si j'étais un client, je ne voudrais pas être considéré comme de moyen de gamme. Je préfère parler de luxe accessible.»

«Ces dernières années les prix n’ont cessé d’augmenter et le moyen de gamme a été négligé.»

par arriver ailleurs avec quelques années de retard. De gré ou de force, le moyen de gamme est aussi devenu un laboratoire où se dessine le visage et se joue une grande part de l’avenir de l’horlogerie. Reste que cette catégorie dite «moyenne» est difficile voire impossible à cerner dans tous ses contours. Non seulement la notion même de moyen de gamme est-elle toute relative (une montre ici jugée banale sera ailleurs considérée comme luxueuse) mais la variété des produits qu’elle présente couvre un spectre très étendu. Sans parler des goûts contradictoires qu’il faut être capable de contenter. Par ailleurs, le consommateur de «classe moyenne» n’est plus prêt à gober tout et n’importe quoi. Si le prix reste pour lui au cœur de sa décision, les notions de grande fiabilité, de qualité de finition, de durabilité voire de pérennité – notions qui ont percolé sur lui depuis les vitrines et la communication des marques de prestige – sont devenues, web aidant, de première importance à ses yeux. Normal donc que toutes les marques insistent sur la relation entre prix et substance. En d’autres termes, pour contenter un client de moyen de gamme, il faut vraiment lui en donner pour son argent! Quel que soit le prix.

• Qu’est-ce qu’une montre dite de «moyen de gamme»? De même qu’il y a non pas une classe moyenne mais des classes moyennes, il y a des montres de moyen de gamme. • L’horlogerie suisse a-t-elle négligé le moyen de gamme? Au cours des dix derniers ans, l’horlogerie suisse a pris l’ascenseur et le haut de gamme a occupé tout l’espace médiatique. • La quantité permet-elle l’exclusivité? Le paradoxe du moyen de gamme: il doit être produit en quantité mais donner une image d’exclusivité. • La crise actuelle offre-t-elle de nouvelles opportunités? Les montres entre 500.- CHF et 3'000.- CHF (prix public) sont celles qui ont le mieux résisté. • Qu’attend le consommateur du moyen de gamme? Au-delà du prix: fiabilité, qualité de finition, durabilité voire pérennité. • L’époque est-elle à la sagesse stylistique? Une horlogerie plus apaisée et moins exhibitionniste semble favorable au milieu de gamme. • La montre connectée impacte-t-elle le moyen de gamme? Plus qu’on ne le croit. Et il faut compter aussi avec un e-commerce grandissant. • Le moyen de gamme intéresse-t-il encore les détaillants? Ils y voient notamment l’occasion d’augmenter un morne trafic. • La crise actuelle est-elle l’occasion de rebattre les cartes dans la distribution? Le moyen de gamme est aussi le laboratoire des transformations du commerce horloger.

«La classe moyenne chinoise, c’est six fois la population de la France.» «L’exclusivité est relative: si l’on vend quelques centaines de milliers de montres en Chine, c’est presque de l’exclusivité!»

Julie Laulusa, Mazars

«Je préfère parler de classe active que de classe moyenne. Ce qui fait marcher la société, c’est la classe active. Il ne faut pas les oublier; s’il n’y a que des riches et des pauvres, une société ne fonctionne pas.» François Thiébaud, Tissot

«Les caractéristiques de la classe moyenne sont une dépendance à l'égard de la classe dominante, une aspiration à l'ascension sociale et une forte reconnaissance de l'ordre établi.»

Franz Linder, Mido

Pierre Bourdieu, sociologue

Jean-Sebastien Bolzli, Aerowatch

«Pilier de l’économie, socle de la démocratie: la classe moyenne n’existe plus. Elle ne peut désormais se comprendre que si on la coupe en deux: la supérieure, qui a toutes les chances, et l’autre, inférieure, qui cumule les difficultés.» François Pilet, L’Hebdo

«Je n’aime pas tellement le terme «moyen». Il est purement théorique. 2000.CHF pour une montre, c’est beaucoup d’argent! Définir cela comme du moyen de gamme c’est de l’arrogance.» Rolf Studer, Oris

«Le moyen de gamme recèle un grand potentiel! Je suis toujours resté dans ce segment porteur. L’industrie horlogère doit impérativement ressembler à une pyramide. Sinon, on revient à la situation des années 1980.» Alain Spinedi, Louis Erard

«Pour s’installer dans le créneau des 800.- CHF à 3'000.- CHF, il faut une puissance industrielle inouïe que seul Swatch Group possède aujourd’hui.» François-Paul Journe, Bilan

Xi Zhi Men ©Drawing Architecture Studio | www.d-a-s.cn

Alain Zimmermann, Baume & Mercier


DOSSIER CLASSE MOYENNE

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Le Swatch Group, champion du moyen de gamme

San Li Tun ©Drawing Architecture Studio | www.d-a-s.cn

Parmi les trois groupes qui dominent l’horlogerie suisse, seul le Swatch Group est d’origine essentiellement industrielle. Si Richemont et LVMH ont graduellement rattrapé une partie de leur retard en s’industrialisant à marche forcée, leur tropisme est et demeure le luxe (à l’exception de TAG Heuer chez LVMH, qui lance de solides incursions dans le milieu de gamme, et de Baume & Mercier chez Richemont – lire ci-après). Historiquement et géographiquement, le Swatch Group a pour cœur la ville de Bienne dont le développement horloger s’est fait relativement tardivement, vers le milieu du XIXème siècle. Alors que Genève et la Vallée de Joux se sont depuis des siècles spécialisés dans la montre «artisanale» de haut de gamme, l’horlogerie biennoise a dès ses origines été fortement industrialisée et donc orientée vers une production de masse. Ou, en d’autres termes, vers la montre de moyen de gamme. Cet héritage historique industriel se retrouve au cœur du Swatch Group dont les différentes marques «sont très disciplinées», comme l’explique Matthias Breschan, responsable de Rado. Chacune des marques du groupe couvre un territoire bien défini: «Dans la logique du Swatch Group, il y a l’entrée de gamme, le milieu de gamme, le haut de gamme et la gamme prestige. Les positionnements des marques du groupe restent ainsi clairs. Ceci dit, les différents segments se définissent par le prix: l’entrée de gamme est à moins de 1'000.-CHF; le moyen et le haut de gamme se situent entre 1'000.- CHF et 5'00.- CHF; la gamme prestige est au-dessus.» Dans l’éventail de l'offre du groupe on trouve donc un très solide portefeuille de marques précisément étagées de façon à couvrir tout le large spectre du moyen de gamme: Certina, Tissot, Mido, Longines, Rado et, tout en haut, Omega, un pied dans le moyen de gamme supérieur, l’autre pied dans le haut de gamme.

Tissot, navire-amiral du moyen de gamme Tissot est sans doute la marque de moyen de gamme la plus emblématique du Swatch Group. François Thiébaud, son président, a récemment répondu aux questions d’Europa Star. VERBATIM

En faisant de la quantité, on peut créer un outil industriel au service des gens! «Avec quatre millions de montres par an, Tissot est une marque industrielle, mais notre objectif est toujours la montre qualitative à prix abordable. Nous évoluons sur une fourchette de prix située entre 400.- et 1'200.- CHF, pour une production annuelle d’environ 2 millions de montres quartz et 2 millions de montres mécaniques. Nous possédons 350 boutiques et sommes représentés dans environ 13'500 points de vente à travers le monde.» La montre en or à prix argent «Nous faisons du luxe accessible. Comme le veut le slogan, c’est la montre en or à prix argent! Un exemple de cette philosophie: en 1998, peu après être arrivé chez Tissot, je souhaitais introduire la glace saphir sur les montres, mais chaque glace coûtait 22.- CHF. Pour garder un prix de modèle à 295.- CHF, il me fallait une glace à 17.- CHF. Nicolas Hayek Sr. a tranché en notre faveur! Aujourd’hui une glace saphir coûte 5.- CHF. En faisant de la quantité, on peut créer un outil industriel au service des gens. Et ce n’est pas de la qualité moindre. Avec l’automatisation, les soudures d’une Fiat sont de meilleure finition que celles d’une Ferrari!» La classe active «Je préfère parler de classe active que de classe moyenne. Ce qui fait marcher la société, c’est la classe active, tous les gens qui font réellement tourner notre monde au quotidien. Il ne faut pas les oublier; s’il n’y a que des riches et des pauvres, une société ne fonctionne pas. Il faut revenir à cette classe active, qui va créer des entreprises, innover.»

Le retour au minimalisme est une bonne nouvelle pour Rado Rado, pionnière et grande spécialiste de la montre en céramique, marque historiquement forte en Chine, est un peu un cas à part dans le moyen de gamme: peu de marques y misent avant tout sur le design et les matériaux. Propos recueillis auprès de Matthias Breschan, président de Rado.

Mido, une croissance «énorme» Moins connue en Europe que Tissot, Mido jouit notamment d’un grand renom et d’une position historiquement très forte en Amérique latine. Une position que la marque, dont les prix s’étagent de 700.- CHF à 3'000.- CHF, cherche à étendre à d’autres régions du monde, notamment en Asie. Franz Linder, président de Mido, a répondu à nos demandes.

VERBATIM

L’important est la relation entre prix et substance «La question pertinente, pour moi, c’est de savoir ce que l’on offre, c’est la relation entre le prix et la substance. Ces 15 dernières années, nous avons assisté à beaucoup de repositionnements. Mais il s’agissait souvent uniquement de repositionner les prix, sans que la substance ne suive. C’est dangereux, car c’est une sorte de tromperie, de tricherie! Les marques qui se sont prêtées à ce genre de manœuvre sont les premières à avoir souffert.» Le prix de vente moyen a baissé «Rado se situe entre Tissot en bas et Omega en haut. Nos prix vont de 1'000.à 3'000.- CHF, avec quelques modèles à 4'000.- CHF. Ceci a été vrai pour les dix années passées et le sera encore pour les dix ans à venir. Notre fourchette n’a pas changé. Par contre, ce qui a changé ces deux ou trois dernières années, c’est que les ventes ont été meilleures dans le bas de la fourchette que dans le haut. Le marché est plus sensible au prix, et le prix de vente moyen a baissé.» Miser sur l’habillage «La tendance est plus à un style épuré et minimaliste qu’à des montres de caractère. Et c’est plutôt une bonne chose pour Rado. D’autres se différencient par le mouvement, les complications. Ce n’est pas notre cas: nous misons sur l’habillage, les matériaux et le design. Mais notre chance est de voir aujourd’hui la céramique utilisée par beaucoup de marques, même dans le haut de gamme! Ces dernières années, la céramique est devenue un matériau noble et cela nous a beaucoup aidés.»

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La classe moyenne suisse n’est pas la classe moyenne indonésienne «Mido s’adresse aux classes moyennes. Mais il faut noter toutefois que, par exemple, un professeur en Suisse et en Indonésie sont certes deux personnes de la classe moyenne mais avec un pouvoir d’achat d’une différence énorme. Un professeur en Suisse peut s’acheter sans problème une montre suisse, en Indonésie il lui faut faire bien plus de sacrifices car cela représente plus d’un mois de salaire.» Le client en veut de plus en plus pour son argent «Ces derniers temps, le client regarde de plus en plus près ce qu’il reçoit pour son argent. Ce souci de juste ratio entre prix et qualité est tout à notre avantage. Et ces derniers temps, nous avons senti un retournement en notre faveur. A une certaine époque, lorsque l’on cherchait des détaillants, bon nombre d’entre eux ne voulaient vendre que des montres très chères. Mais ces dernières années, cela a bien changé. Il y a aujourd’hui nombre de revendeurs haut de gamme qui cherchent à compléter leur offre avec des montres accessibles, car cela amène aussi du trafic dans le magasin. La situation de la distribution nous est devenue favorable.» Encore du monde à conquérir «Si l’on regarde les 25 millions de montres exportées de Suisse par rapport à la population mondiale, il y a encore beaucoup de place pour de la croissance, des volumes, hors de la montre connectée. Si je regarde nos ventes, Mido continue à gagner des parts de marché. Nous avons eu une croissance énorme ces dernières années car nous sommes restés fidèles à nos principes. Nos montres automatiques ont un rapport qualité-prix extraordinaire. Et le client cherche d’abord une montre de qualité avec un bon service après-vente.»

Certina, le pôle sportif Dans la palette qui se veut complète des marques moyen de gamme du Swatch Group, Certina remplit la case sportive. Une grande majorité de chronos, aptes à toutes les disciplines, des prix très mesurés et, comme le veut l’époque, une ligne vintage placée sous le signe d’Heritage. Propos d’Adrian Bosshard, président de Certina. VERBATIM

Générer des volumes est crucial «Dans le Swatch Group, jamais les produits d’entrée ou de moyen de gamme ne sont délaissés car nous sommes conscients qu’une grande majorité de la population autour du globe achète des montres qui se trouvent dans un segment de prix inférieur à 1'000.CHF. Une marque comme Certina prouve qu’il est possible d’offrir également dans ce segment de grandes innovations ainsi que les compétences horlogères suisses. Ces compétences permettent de générer des volumes qui sont cruciaux tant du point de vue de la production industrielle que de la fréquence aux points de vente.» Nous ne changeons pas de stratégie à chaque sursaut de l’économie «La finition du produit, le contrôle qualité, la communication, la distribution et le service à la clientèle se doivent d’être impeccables et les marques qui maintiennent toutes ces compétences à un niveau qui touche à l’excellence arrivent à gagner le cœur du client. Et notre stratégie ne change pas à chaque sursaut de l’économie: autant le groupe que notre marque travaillons toujours sur le long terme.» L’horlogerie est une branche cyclique «Depuis que j’ai commencé il y a 20 ans les exportations horlogères ont plus que doublé. C’est pourquoi, à mon sens, il est démesuré de parler de crise. La distribution est le pendant de la production: il faut garder les pieds sur terre quand l’économie s’enflamme et quand ça devient plus difficile, il faut rester courageux en sachant que l’économie va rebondir tantôt. C’est la raison pour laquelle Certina peut faire de bonnes performances aussi bien lorsque l’économie est à la hausse que lorsque les indicateurs sont à la baisse.»


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L’ exemple Baume & Mercier Alors que les années précédentes nombreux étaient ceux qui regardaient un peu de haut Baume & Mercier, comme si, avec ses prix «raisonnables», c’était un peu le «vilain petit canard» venu batifoler dans les eaux du luxe, cette année, au SIHH, la marque «moyen de gamme» de Richemont aura attiré tous les regards. En présentant une offre parfaitement équilibrée, offerte à des prix «justes» et bien pensée pour affronter les eaux troubles de 2017, Baume & Mercier aura montré l’exemple. Alain Zimmermann, CEO de Baume & Mercier VERBATIM

sonne vient dépenser 1’000.- CHF ou 2'000.- CHF, cela peut représenter une grosse somme pour elle. Ce n’est pas un acte moyen.»

Qu’est-ce que le moyen de gamme?

Adapter les prix?

«Je n'aime pas du tout ce terme de moyen de gamme. Si j'étais un client, je ne voudrais pas être considéré comme de moyen de gamme. Je préfère parler de luxe accessible. C’est plus noble à expliquer: il y a cette notion d’offre accessible; il y a aussi l’évocation d’une initiation, qui est un point de départ. Lorsqu’une per-

«Cette définition du luxe accessible vaut pour tous les marchés. Mais selon les monnaies, il y a des seuils psychologiques à respecter. Aujourd’hui, le franc, le dollar et l’euro sont très proches. Dépasser 1000.- CHF par exemple, c’est dépasser un palier au-delà duquel le taux d’engagement n’est plus le même. Surtout s’il s’agit

Louis Erard, les combats d’un indépendant «Plus qu'une marque, nous sommes le Made in Switzerland à prix doux», aime à dire Alain Spinedi qui, avec un petit groupe d’investisseurs, a relancé dès 2003 la marque Louis Erard, fondée en 1929. Depuis lors, il se bat en indépendant, souvent à armes inégales, pour imposer dans ce difficile secteur son offre de belles montres classiques, sobres, très bien dessinées. Alain Spinedi, CEO de Louis Erard VERBATIM

La classe moyenne a moins d’argent qu’à l’époque «Louis Erard se situe entre 500.- et 3’000.- CHF – tout en notant qu’à 3’000.- CHF , on est déjà dans le moyen de gamme supérieur. Lorsque j’ai relancé la marque en 2003, je l’avais d’abord positionnée entre CHF 600 et 2’000.CHF , ce qui correspond au vrai milieu de gamme. Mais évidemment que sui-

vant le marché, cette définition varie. Je n’ai cependant ni la structure, ni le personnel pour effectuer des analyses sociologiques dans les différents pays où nous vendons des montres. Je me concentre plutôt sur les taux de change: l’euro a ainsi pratiquement perdu 50% de sa valeur; le rouble vaut trois fois moins qu’avant... En Russie, où nous étions bien placés, les ventes se sont tassées. Le mix produit – avec les montres à quartz – s’est également modifié. La classe moyenne a moins d’argent qu’à l’époque. En Asie en revanche, beaucoup de jeunes, issus de la classe

Oris, la voie démocratique Historiquement, Oris a toujours misé sur une offre qualifiée de «démocratique». Fondée il y a 113 ans avec la volonté de produire des montres mécaniques de qualité destinées à une distribution de masse, Oris a produit jusqu’à 1,2 million de montres par an avant que la crise du quartz ne vienne bouleverser l’échiquier. Reprise en 1982 par deux de ses anciens directeurs, Oris s’est aussitôt distinguée en ne misant que sur la mécanique alors que le monde était au quartz. Son slogan, qui lui a réussi, dit bien son ambition: «Real Watches for Real People». Rolf Studer, co-CEO de Oris VERBATIM

Des produits qui font sens à des prix qui font sens «Je n’aime pas tellement le terme «moyen». Il est purement théorique. 2’000.- CHF pour une montre, c’est beaucoup d’argent! Définir cela

comme du moyen de gamme, cela devient arrogant. Il ne faut pas perdre de vue que c’est une classification purement suisse: dans d’autres pays, 2’000.CHF, c’est... waouw! La dernière fois que je suis allé aux Etats-Unis, j’ai parlé un peu avec le douanier de l’immigration. Lorsque je lui ai montré ma montre à 3’000.- CHF, il m’a dit: «Jamais je ne pourrai m’en payer une comme ça. Ou peut-être dans 20 ans.

d’un cadeau. Nous avons toujours eu à cœur de maintenir des prix raisonnables. C’est la raison pour laquelle nous n’avons pas augmenté nos prix depuis sept ans et que nous n’avons aucune aspiration à les élever. Cette stratégie nous a permis d’attirer une clientèle plus jeune, qui souhaite accéder à la belle horlogerie. Je n’ai donc pas besoin d’en changer! Je me retrouve naturellement au milieu du débat et cela nous ouvre de vraies opportunités.» «Ceci dit, on ne peut évidemment pas ignorer le contexte. Mais les questions que nous nous posons tournent toujours autour des critères de qualité: nous ne faisons pas de compromis opportunistes à courts termes. Mais il y a d’autres solutions: le quartz par exemple. La nouvelle My Classima est une parfaite alternative aux budgets plus serrés, sans faire aucune concession. Elle a été pré-lancée aux Etats-Unis et les résultats sont très encourageants!»

Moyen de gamme = classe moyenne?

moyenne, sont prêts à mettre de l’argent dans une montre moyen de gamme. La définition que je fais de ce segment vaut pour la Suisse. En Italie déjà, où le SMIC est proche des 1'000.- euros dans le Sud, les choses sont différentes.»

Stratégies locales

Un segment indispensable «Le moyen de gamme recèle un grand potentiel! Je suis toujours resté dans ce segment porteur. L’industrie horlogère doit impérativement ressembler à une pyramide. Sinon, on revient à la situation des années 1980.» «Nous produisons moins de 100’000 montres par an et nous nous reconnaissons parfaitement dans la notion de luxe accessible. Le luxe équivaut à une certaine rareté. Or, certaines marques haut de gamme, en inondant des marchés comme l’Asie, n’incarnent plus le luxe du tout auprès de la clientèle. A 1’200.- CHF, nos produits peuvent très bien être considérés comme du luxe. On joue sur les finesses.»

«Je ne pense pas. Cela a été le cas. Mais aujourd’hui, beaucoup de personnes ont une capacité d’achat importante, sans pour autant forcément acheter des montres chères. On est là non plus dans une démarche ostentatoire, mais à l’aise avec une horlogerie juste et raisonnée. Le lien entre les deux notions me semble donc un peu facile. Pour autant, en Chine, quand l’économie permet à une certaine population d’acheter plus que les produits de base, on parle de classe moyenne. Et ce segment sera, je pense, en forte croissance ces prochaines années.» Adaptations stylistiques? «Chez nous, nous parlons de codes, lesquels sont la signature de la marque. Adapter le style est très important pour traverser le temps. Mais il y a aussi la notion de reconnais-

«Nous privilégions de plus en plus une stratégie locale plutôt qu’une stratégie internationale. Nous jouons sur les prix et les modèles. Mais évidemment, cela demande un plus grand travail avec nos partenaires. Ainsi en Italie, où nous sommes désormais distribués par Eberhard & Co, nous vendons plus de montres féminines que masculines.» «Avant de me lancer dans l’horlogerie, je travaillais pour les caméras Bolex. Il y avait dans ce domaine des études de marchés très précises. Or, rien de tout cela n’existait dans l’industrie horlogère, à part les statistiques des exportations. Dans cette branche, on se dirige grâce à la sensibilité que l’on a de tel ou tel marché. Cela induit naturellement des discussions avec les partenaires, pour comprendre les réalités.» Monotonie? «Nous avons toujours évolué dans un

Pour nous, c’est du haut de gamme!» C’est donc subjectif, il faut prendre le point de vue du consommateur.» «Ceci dit, si vous me demandez la définition du moyen de gamme, je dirais qu’il se situe entre 1000.- et 5000.CHF. La formule «luxe accessible» n’est pas plus adaptée: s’il est accessible, ce n’est pas du luxe. Je préfère dire que nous avons des produits qui font sens avec des prix qui font sens.»

les baisser aujourd’hui. En un mot: nous sommes crédibles.» «Nous avons gagné des parts de marché ces dernières années, d’une part grâce à nos produits, d’autre part parce que les consommateurs ne veulent plus dépenser n’importe comment. La baisse des prix chez certains de nos concurrents a rendu des clients furieux, parce qu’ils ont payé leur montre au prix fort.»

Le client ne veut plus dépenser n’importe comment

Des fonctions qui ont du sens

«Le plus important, c’est d’avoir un bon rapport qualité-prix. C’est valable pour Patek Philippe comme pour nous. Nous sommes très heureux d’occuper ce segment, très heureux de n’avoir pas été extravagants avec les prix lorsque nous aurions pu l’être, et très heureux de ne pas devoir

«Nos clients demandent des fonctions qui ont du sens, des complications mécaniques utiles. D’autres marques se concentrent davantage sur l’habillage et la décoration. Nous, nous n’avons pas changé: au contraire, il faut continuer à faire ce que l’on estime être juste pour la marque, et ne pas agir selon une situation particulière.»

sance. Baume & Mercier est plutôt une marque classique. Mais quand je regarde en arrière, les anciens modèles, les choses ont fondamentalement changé! Seuls les codes restent.» De nouvelles opportunités dans la distribution? «Nous avons une approche différente d’un continent à l’autre: aux Etats-Unis et en Europe, nous sommes très bien implantés. En Asie et en Chine, nous sommes en phase de conquête avec des forces spécifiques. Le e-commerce, quant à lui, offre des opportunités. Mais cela reste complémentaire. Nous avons mis sur pied quelques projets avec des détaillants partenaires. Cela met surtout en évidence les changements d’habitudes des consommateurs. Pas seulement dans le e-commerce, mais aussi dans le e-retail. Il faut accompagner ce mouvement, qui ouvre un débat de fond sur le thème «comment aller à la rencontre du client».

style classique, nous sommes restés cohérents. Dernièrement cependant, j’ai sorti un chronographe un peu plus sportif que les autres, pour tenter de séduire un public plus jeune. Mais cela ne veut pas dire que nous allons faire des choses complètement folles. Je remarque néanmoins que nous sommes peut-être devenus trop semblables à nos concurrents, un peu monotones. Maintenant, savoir si j’élargis pour rompre cette monotonie ou pour pallier la baisse des ventes? Je crois simplement qu’il manquait quelque chose à nos collections.» Le quartz? «Nous faisons à peu près 75% de mécanique et 25% de quartz. Le quartz nous a permis d’élargir notre clientèle au Moyen Orient, où nous réalisons 30% de nos ventes. En Suisse par contre, nous n’en vendons pas une! En Malaisie non plus. Question d’image.»

Le web est la plus grande de nos boutiques

«Nous n’avons pas fait de changements au niveau des détaillants mais nous avons revu l’allocation des moyens de ventes entre nos boutiques en propre, les points de vente traditionnels et les ventes online. Depuis plusieurs années, nous supportons les détaillants qui sont également présents sur le web, comme par exemple Tourneau aux Etats-Unis ou Goldsmiths en Angleterre. Il faut admettre que le web est la plus grande de nos boutiques. Mais nous voulons garder les choses sous contrôle: nous pouvons parler directement avec le client online, tout en le dirigeant en boutique pour le SAV. Tous les détaillants ne sont pas encore online, mais on peut déjà clairement voir la différence. Et puis nous réfléchissons également à d’autres sites, qui ne sont pas des sites de détaillants.»


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DOSSIER CLASSE MOYENNE

6 | EUROPA STAR PREMIÈRE

La classe moyenne chinoise, c’est six fois la population de la France managing partner mainland china, shanghai

La classe moyenne chinoise compte environ 350 à 400 millions de personnes, soit plus de 6 fois la population française. Les personnes ayant un revenu égal ou supérieur à 120'000 RMB sont considérées comme la population de la classe moyenne. Par ailleurs, la loi fiscale chinoise exige que tout revenu supérieur ou égal à 120'000 RMB doit faire l’objet d’une déclaration de ses revenus annuels. On peut ensuite distinguer trois tranches de classes moyennes: de 120'000 à 200’000 RMB; de 200'000.à 400.000.- RMB; et de 400'000.- à 1 million de RMB la classe moyenne supérieure. Au-dessus, on entre dans la classe des riches.. Une autre distinction importante est la répartition de ces différentes tranches, essentiellement urbaines. Les villes de 1er rang, soit Shanghai, Beijing, Shenzhen et Canton dont les revenus se concentrent l’essentiel des 2ème et 3ème tranches. Les classes moyennes des villes de 2ème rang se situent dans la 1ère et la 2ème tranche.

Concentration urbaine et hausse immobilière Cette concentration des classes moyennes dans les villes de 1er rang est le résultat d’une véritable flambée des salaires en augmentation constante, de 8%, 15% voire 20% dans certains secteurs depuis 7 à 8 ans et qui touche essentiellement tout le secteur tertiaire. D’une certaine façon, c’est devenu dramatique pour la Chine car le coût de la vie dans des villes comme Pékin et Shanghai est à présent plus élevé que dans les villes occidentales, comme l’a révélé une récente comparaison établie par le Financial Times. Le marché immobilier a connu une hausse considérable. Par exemple à Shanghai, le prix du m2 est passé de 4'000.- à 5'000.- RMB dans les années 2000 – 2001 à 80'000.- à 100'000.RMB aujourd’hui. (A noter qu’il faut inclure dans ces prix environ 30% obligatoires consacrés aux espaces communs). Cette flambée témoigne de l’enrichissement extraordinaire de cette importante part de la population chinoise. Aujourd’hui, dépenser de 2 à 3 millions de RMB pour de-

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Conception, développement de mouvements à grandes complications manufacturés à Genève

venir propriétaire d'un logement est devenu chose courante. Ceci dit, la Chine, comme l’Occident, voit les différences sociales s’accentuer. L’essentiel de cette richesse est concentré dans les villes de 1er rang – où le terrain vient à manquer, désormais – car elles attirent comme des aimants: c’est là qu’on peut y trouver des opportunités, là qu’on

Nan Luo Gu Xiang ©Drawing Architecture Studio | www.d-a-s.cn

Propos recueillis auprès de Julie Laulusa, mazars

peut s’enrichir, là qu’est l’argent. Par contre, les villes de 3ème et 4ème rangs connaissent de graves difficultés. Il y a eu beaucoup de spéculation et on y trouve nombre d’immeubles neufs qui sont vides de tout habitant. Au niveau de l’immobilier commercial, il souffre sensiblement car les habitudes ont changé rapidement et on assiste à une véritable explosion de l’e-commerce. Si quelques shopping-malls concentrent l’essentiel des ventes, beaucoup d’entre eux souffrent sévèrement voire ne fonctionnent plus du tout. Il faut dire qu’à certains endroits on trouve un shopping-mall tous les 100 mètres. Les Department Stores connaissent eux aussi une véritable désaffection. Quant aux boutiques monomarques, bien d’entre elles voient leurs affaires ralentir ou ferment.

Priorité absolue à la montre mécanique

Manufacture Hautes Complications SA Chemin Franck-Thomas 80 CH-1207 Genève Tél. +41 22 700 61 21 www.mhcsa.com

Trois études récemment menées sur la consommation horlogère en Chine apportent d’intéressants éclairages et se recoupent largement. Elles ont été menées en 2014 et 2015 sur des échantillons très larges d’une tranche de population entre 18 et 55 ans. Selon leurs résultats, les Chinois apprécient beaucoup les montres et presque 50% des sondés disent en avoir plus de trois, jusqu’à 5 pour 21 à 25% d’entre eux. Quant aux raisons qui président à leur choix, pour un tiers d’entre eux c’est avant tout la marque qui compte, pour un autre tiers c’est le style, la matière et le mouvement, impérativement mécanique pour 85% des

sondés. Seuls 25% mettent en avant le prix, et les 5% restants évoquent le service après-vente. Selon une toute récente étude menée par Bain & Company au 4e trimestre 2016, les achats de montres en Chine ont baissé de 8% en valeur, mais on constate une hausse des achats des produits de luxes à titre privé et au niveau local. Il faut rappeler que depuis le 1er avril 2016, tout produit de luxe (soit + de 10'000.- RMB) acheté à l’étranger doit obligatoirement être déclaré en douane et est taxé à 60%. Les achats locaux sont eux aussi taxés, à peu près à la même hauteur (20% de droits de douane, 20% de taxe sur les produits de luxe et 17% de TVA). En ce qui concerne les achats via internet sur des sites étrangers, vous êtes exonérés de taxes douanières et de TVA jusqu’à 20'000.- RMB. Audessus, vous devez vous en acquitter. Un autre phénomène intéressant à noter est le développement de boutiques duty-free à l’intérieur même de la Chine, qui vendent des marques de montres de moyen de gamme. Un Chinois qui revient de l’étranger peut y acheter de la marchandise détaxée jusqu’à un maximum de 5'000.- RMB. L’idée est d’encourager à consommer en Chine même. Ceci dit, je pense que pour les montres au-dessous de 10'000.- RMB, les taxes d’importation vont être abaissées. Mais pas pour les montres de luxe à partir de 100'000.- RMB. Mais cette catégorie représente moins de 15% des achats de montres, dont 60% concernent les montres de moins de 10'000.- RMB, 20% en-dessous de 50'000.- RMB et 6% entre 50'000.- et 100'000.- RMB. Environ 80% des consommateurs chinois disent préférer acheter des montres suisses. Mais il est à noter que pour eux c’est l’origine suisse de la marque qui compte, et non pas le Swiss Made qui n’a rien de décisif à leurs yeux.

Le SAV, un enjeu majeur Les campagnes anti-corruption et anti-extravagance ont bouleversé les habitudes. Désormais, les Chinois achètent pour eux-mêmes et on voit que les achats dans la tranche 50'000.- à 100'000.- RMB ont baissé. Les goûts aussi en ont été affectés. Le consommateur est moins friand des marques considérées «pour les riches», il recherche plus volontiers la simplicité et le raffinement. Avec la montée en gamme de la classe moyenne, la notion de qualité est importante, certes, mais le mot «intemporel» n’évoque pas grand chose au consommateur chinois du moyen de gamme. Il faut que ce soit «à la mode» mais que pour autant ça ne risque pas de se démoder trop vite.

Par ailleurs, les marques doivent être conscientes que la qualité du service après-vente fait de plus en plus partie des motivations d’achat. Nombre de consommateurs ne font pas confiance aux horlogers chinois pour le SAV. Ils craignent de se faire avoir, qu’on remplace à leur insu des pièces en or par du faux. Et s’ils ont acheté une montre suisse, souvent ils ne savent pas à qui la confier, à qui faire confiance pour le SAV. C’est un point important. S’ils privilégient la montre mécanique, c’est parce que c’est onéreux et que ça leur «ouvre les portes» de la classe moyenne supérieure ou le club des élites, C’est un gage de réussite. Le statut social est la première chose qui compte pour les hommes. Les femmes s’attachent plus au design et à la mode mais, toutefois, le mouvement mécanique reste important aussi pour elles. La montée du pouvoir d’achat des femmes est importante et on trouve de plus en plus de femmes qui collectionnent à leur mesure. Sur 100 montres achetées en Chine, 40% le sont par des femmes. Il y a 3 ans seulement, ce n’était que 27% ou 28%. Enfin, il ne faut pas négliger le fait que le consommateur chinois apprend vite, très vite. Grâce à internet, à travers les réseaux sociaux, au cours de ses voyages, il s’informe, fait des comparaisons, se met à la recherche de styles plus personnels, voire désormais de marques de niche. Aujourd'hui, l’amateur chinois peut être considéré comme pleinement mature. (100 RMB = environ 15.- CHF)

RANKING En ce qui concerne les marques les plus recherchées dans les classes moyennes supérieures, les études se recoupent largement: Omega est clairement le numéro 1; en deuxième et troisième positions on trouve Longines et Rolex ou Rolex et Longines; le numéro 4 est Tissot; au 5ème rang sont Citizen et IWC; Rado est en 6ème position. Et si Cartier est au premier rang pour les bijoux, la marque est 8ème pour les montres. MONTRES CONNECTEES Les Chinois aiment l’innovation, mais en ce qui concerne les montres, ce n’est clairement pas ce qu’ils recherchent avant tout. A 86% ils privilégient la montre mécanique et craignent que la montre connectée, bien que trendy, se démode vite. A 55%, ils déclarent qu’ils sont certains de ne jamais acheter une montre connectée. 32% sont dans l’expectative, disent qu’ils vont observer l’évolution de ces montres mais n’ont pas l’intention d’en acheter tout de suite.


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PATEK PHILIPPE

8 | EUROPA STAR PREMIÈRE

Nautilus, un coup de foudre durable Les années 1970 ont été une période de grands changements, marquée par les chocs pétroliers, le punk rock, une inflation galopante et une défaite humiliante pour les États-Unis au Viêt Nam. Mais cette décennie de bouleversements a également été émaillée de quelques réussites remarquables. Prenez 1976: c’est l’année où le supersonique Concorde commence ses vols de ligne, où la tour CN de Toronto devient le plus haut édifice du monde – et où Patek Philippe lance sa montre de sport en acier, la Nautilus, étanche à 120 m. L’humanité voyage plus vite que jamais, construit plus haut que jamais – et pour la première fois depuis la fondation de la manufacture en 1839, les clients de Patek Philippe peuvent emporter leur montre en plongée. Le Concorde est exploité jusqu’en 2003, après quoi on revient aux avions subsoniques pour traverser l’Atlantique. La tour CN conserve son titre jusqu’en 2010. Mais la Patek Philippe Nautilus est toujours en service à de nombreux poignets.

par

Nicholas Foulkes

Aujourd’hui, la Nautilus constitue une vraie famille de montres, avec de nombreux membres, dont une proche parente, née en 1997 baptisée Aquanaut. Dans les années 1970, il n’y avait que la Réf. 3700/1a, affectueusement surnommée «Jumbo», et cela suffisait. Cette montre en acier plus chère que d’autres en or rompait sur presque tous les plans avec les précédentes Patek Philippe. Sa capacité à plonger en eaux profondes, le fabuleux design intégré de son boîtier et de son bracelet conçus comme un tout, sa forme très originale rappelant un hublot, son grand diamètre et même son emballage très tendance dans un coffret en liège – tout s’écartait de la norme Patek Philippe. Dessinée par Gérald Genta, cette montre s’est imposée comme l’un des designs horlogers les plus remarquables et les plus «durables» de la seconde moitié du XXe siècle. Il est donc intéressant d’entendre Philippe Stern dire à son propos: «Au début, je n’étais pas entièrement convaincu.» À l’époque, son père lui déléguait toujours plus de responsabilités dans l’entreprise – d’où sa pru-

Ref. 3700/1

1976

UNE ÉVOLUTION À PETITS PAS Les quatre décennies d’histoire de la Nautilus suivent une logique très cohérente, illustrée, en annexe, par un aperçu des modèles de 1976 à 2016 classés en fonction de l’année de lancement. La Nautilus d’origine référence 3700/1A en acier (1976) resta en production jusqu’en 1990. La collection fut par ailleurs sans cesse complétée par de nouveaux modèles dans divers métaux, tailles et designs de cadrans – parmi lesquels se détachent les Nautilus Dame référence 4700/51J de 1980 et les modèles «midsize» références 3800/1 et 3900/1 de 1981. En 1996 apparurent les premiers cadrans avec chiffres romains (référence 3800/1JA) ainsi que le premier modèle sur bracelet cuir (référence 5060/SJ), qui prépara le lancement de l’Aquanaut (1997). En 1998 fut créée la première Nautilus compliquée (référence 3710/1A), avec indication de zone de remontage (IZR), suivie en 2005 par un premier modèle avec phases de lune et réserve de marche (référence 3712/1A). Pour le 30e anniversaire de 2006, le design de la collection Nautilus pour hommes fut subtilement retravaillé, la construction du boîtier passa de deux à trois pièces et Patek Philippe introduisit un chronographe à remontage automatique (référence 5980/1A). Quatre ans plus tard virent le jour un Quantième Annuel sur bracelet cuir référence 5726A (la version sur bracelet métallique référence 5726/1A suivit en 2012) et le premier chronographe sur bracelet cuir (référence 5980R). En 2009, la collection dames fut, elle aussi, finement retravaillée avec le concours de Gérald Genta. En 2013, elle accueillit de nouvelles versions sur bracelets cuir ou métalliques, avec des cadrans plus féminins, et en 2015 fut lancée la première Nautilus Dame automatique en acier sans diamants (référence 7118/1A). Les deux éditions limitées créées pour le 40e anniversaire de la Nautilus présentent des allusions raffinées à l’histoire de la première collection «sport élégant» Patek Philippe. La référence 5711/1P avec boîtier en platine de 40 mm rend hommage à la Nautilus d’origine référence 3700/1A «Jumbo» de 1976, tandis que le chronographe flyback Nautilus de 44 mm référence 5976/1G rappelle la ligne de modèles subtilement retravaillés lancée en 2006 pour le 30e anniversaire. Les deux montres arborent un cadran bleu avec index diamants, relief frappé typique de la Nautilus et inscription anniversaire discrète en creux.

dence. «Il a fallu un certain temps entre le moment où Gérald Genta nous a suggéré de faire quelque chose comme cela pour Patek Philippe et celui où nous avons dit oui, expliquet-il. Nous avons choisi de commencer par réaliser un prototype. Nous l’avons fait. Puis nous nous sommes décidés à lancer la ligne Nautilus.» S’il hésitait, c’est que cette montre lui semblait aller à contre-courant de la demande du marché. «Nous vivions une période difficile. Nous devions lutter contre les montres à quartz, très minces – et très à la mode.» La Nautilus osait être différente: mécanique et de grande taille. «Les montres précieuses étaient généralement petites et plates. La Nautilus ne représentait pas une nouvelle philosophie pour Patek Philippe, mais plutôt une nouvelle stratégie. C’était une toute nouvelle collection, pour de nouveaux clients, plus jeunes, qui voyageaient et faisaient du sport…» En un mot, des hommes comme Philippe Stern lui-même. Approchant la quarantaine, Philippe Stern était un grand sportif. Skieur accompli, il aurait pu concourir au plus haut niveau s’il n’avait pas opté pour l’horlogerie. C’était aussi un passionné de voile remportant fréquemment les régates sur le lac Léman – ce que Genta savait parfaitement, comme l’explique sa veuve Évelyne Genta: «La famille Stern

était toujours sur l’eau. Gérald a pensé donc aux bateaux, et en pensant aux bateaux, il pensa à la forme des hublots.» Quelques années plus tôt, il avait dessiné pour Audemars Piguet la Royal Oak, une montre partageant certaines caractéristiques avec la Nautilus. Mais cette dernière illustre parfaitement l’évolution du style Genta. Comme pour les grands artistes dont le travail mûrit tout au long de la carrière, en regardant les croquis préliminaires et les maquettes, on peut suivre la pensée du designer horloger dans sa quête d’«élégance fonctionnelle» ou de «fonctionnalité élégante». Pour Gérald Genta, la Nautilus marquait une progression par rapport à la Royal Oak, comme l’explique Évelyne. «Il voulait qu’elle soit plus «anatomique». La Royal Oak lui semblait uniquement sportive – même si de nos jours, certains la portent avec un habit de soirée, sourit-elle. Il voyait aussi la Nautilus comme une montre sportive, mais pouvant être portée toute la journée.» Les premières publicités soulignaient cet aspect, en mettant en avant l’élégance polyvalente de la Nautilus tout autant que sa robustesse et son étanchéité. «Elle se marie aussi bien avec une combinaison de plongée qu’avec un smoking», disait l’une des annonces.

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PATEK PHILIPPE Mais ce nouveau type de Patek Philippe avait son revers. La montre était très difficile à fabriquer. Elle fut lancée à une époque où les entreprises horlogères renforçaient la production à l’interne, y compris pour le boîtier et le bracelet. Satinage, chutage, polissage, anglage, avivage, sablage, émerisage, feutrage, lavage, lapidage: il y a quelques années, en visitant les ateliers de polissage Patek Philippe, j’ai pu admirer toutes les étapes de finition sur les nombreuses surfaces de la Nautilus – certaines lisses et arrondies, d’autres aux angles bien marqués, certaines brillant du plus bel éclat, d’autres à la texture mate. Façonner la Nautilus et son bracelet reste une tâche complexe et exigeante, même 40 ans après son lancement. Au début des années 1970, c’était un défi redoutable, comme s’en souvient le constructeur de boîtiers et designer Jean-Pierre Frattini, ancien de chez Patek Philippe, qui collabora avec Gérald Genta sur la Nautilus. «L’arrivée des montres étanches a entraîné de nouvelles difficultés. Nous fabriquions des montres capables de résister sous un robinet, mais elles ne pouvaient pas être portées en nageant, se souvient Jean-Pierre Frattini. Au début, il y a eu des problèmes de production en lien avec le joint, visible depuis le côté. Nous avons beaucoup discuté à ce sujet. Le système d’étanchéité se trouvait plus à l’intérieur et non pas au niveau de ce joint, qui formait comme une saillie. Du coup, si de l’eau pénétrait dans la montre, elle ne pouvait pas en ressortir et risquait de stagner.» En travaillant avec des spécialistes, Patek Philippe finit par surmonter progressivement ces difficultés. Mais il est amusant de constater qu’une montre de conception aussi avant-gardiste a d’abord dû être fabriquée de manière traditionnelle avec des pièces non interchangeables et des composants de boîtiers qu’il fallait numéroter pour s’assurer qu’ils allaient ensemble, ainsi qu’avec des cadrans et un verre devant parfois être retaillés. En 1975, le prototype fonctionnel subit ses premiers tests, quoique de manière informelle, au poignet de Gérald Buchs, alors responsable de la création Patek Philippe.

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«Je me rappelle qu’à Zermatt, cette année-là, je portais le premier prototype. Je le plongeais dans toutes les fontaines et les ruisseaux – pour tester son étanchéité. Je le mettais au soleil pour voir si de la condensation se formait sous le verre lorsqu’il séchait. La montre a biensûr passé le test!» La Nautilus fut lan-

cée l’année suivante. Elle fut accueillie avec beaucoup… d’incompréhension, comme s’en souvient Philippe Stern. «Peut-être au début, le public n’étaitil pas prêt à la comprendre ou à l’accepter», explique-t-il, en ajoutant avec son sens typique de la litote: «Mais peu à peu, elle s’est imposée.»

Il y eut néanmoins des gens pour qui la Nautilus fut un véritable coup de foudre au premier regard, dont son designer. «C’était sa montre favorite. Il aimait sa Nautilus», se souvient Évelyne Genta. Parmi tous les modèles qu’il possédait, c’était «le prototype qu’il préférait. Quelques an-

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nées avant sa mort, il a travaillé sur un nouveau cadran.» Loin d’être ennuyé de devoir revisiter un design qu’il avait créé une génération plus tôt, «il l’aimait, il l’adorait. Il pensait que cette montre n’avait pas pris une ride. Pour lui, la Nautilus était un vrai chef-d’oeuvre, et elle l’était restée». 2008

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PATEK PHILIPPE

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«L’horlogerie a exagéré» Interview de Thierry Stern, président de Patek Philippe Patek Philippe fait figure de référence, d’étalon quasi inamovible de l’horlogerie suisse. Comment cette maison familiale – une des dernières – a-telle traversé l’annus horribilis 2016? Quels sont les secrets – si secret il y a – de sa forte résilience?

L’Aquanaut référence 5168G, un modèle masculin dans une nouvelle taille Jumbo de 42,2 mm de diamètre.

L’Aquanaut, issue de la Nautilus, fête ses 20 ans par

Pierre Maillard

En 1996, soit 20 ans après son lancement, le succès jusqu’alors jamais démenti de la Nautilus connaît une légère baisse de régime. Patek Philippe décide alors de lancer dans cette collection une nouvelle version de la Nautilus destinée à séduire une clientèle plus jeune. La référence 5060/S devient ainsi la première Nautilus à être montée sur un bracelet cuir. Elle arbore sur son cadran des index romains et son boîtier en or d’un diamètre de 35.6 mm est sensiblement revu: les deux «charnières» à gauche et à droite du boîtier, parfois surnommées «les oreilles», sont ainsi rabotées, donnant à la montre une allure qui se distingue des Nautilus précédentes. Cette nouvelle référence est très bien reçue par le public, à tel point qu’elle va donner naissance à une nouvelle famille, cousine de la Nautilus, qui sera dénommée Aquanaut. Elle sera lancée l’année suivante, en 1997. Le boîtier octogonal en acier de cette nouvelle Aquanaut la rapproche de la Nautilus mais son design est plus arrondi, plus assagi. Elle arbore un cadran «carrés de chocolat» très distinctif dont les motifs sont repris sur son bracelet en caoutchouc composite. Ses chiffres arabes appliques en relief et ses aiguilles épaisses lui donnent une lisibilité parfaite. Le premier modèle est équipé du même mouvement 330 SC que la Nautilus qui l’a inspirée. L’Aquanaut propose ainsi à une nouvelle génération une montre à la fois sportive (elle est étanche à 120 m)

et chic, portable en toutes circonstances. Et elle va fortement aider Patek Philippe à conquérir de nouveaux amateurs, souvent plus jeunes. Tout comme la Nautilus, la collection Aquanaut va connaître de nombreuses itérations au cours de ses plus de 20 ans d’existence. Elle va se décliner en or, avec bracelet or, elle va graduellement augmenter de taille, passant à un diamètre de 38,8 mm pour Homme, ou se féminiser avec un modèle Femme de 29.5 mm. Mais c’est en 2004 qu’elle va véritablement partir à la conquête du marché féminin avec le lancement très remarqué de la collection Dame Aquanaut Luce, de 35.6 mm, qui introduit une palette de couleurs inédites – Pure White, Mysterious Black, Midnight Blue, Adventurious Khaki, Ocean Blue, Luscious Plum – qu’illumine une lunette sertie de diamants. A l’occasion de ses 10 ans, en 2007, son design va être légèrement revu pour lui donner un aspect un peu plus massif et puissant. Puis, en 2011, pour la première fois une complication est proposée avec l’Aquanaut travel Time. Pour fêter ses 20 ans, Patek Philippe propose cette année l’Aquanaut référence 5168G, un modèle masculin dans une nouvelle taille Jumbo de 42,2 mm de diamètre. Avec son cadran au décor frappé présentant un subtil dégradé de noir bleu nuit, sa lunette avec finitions satinées, et son large boîtier en or gris étanche à 120 m qui abrite le Calibre 324 SC à remontage automatique, elle arbore un visage résolument viril qui incarne le sport chic contemporain.

Propos recueillis par Pierre Maillard

Europa Star: Comment jugez-vous la situation actuelle de l'horlogerie, pour le moins perturbée, en proie à une sérieuse baisse de régime? Thierry Stern: La situation générale n'est pas catastrophique, loin de là. Mais une des causes principales du ralentissement actuel est à chercher du côté de la surproduction. Nombreuses sont les marques qui ont voulu produire à tout prix. Les marchés ont été engorgés. Il y a eu indigestion. Mais en ce qui nous concerne, anticiper nous a été bien utile et nous avons été très vigilants sur ce point, depuis quelques années déjà. Nous avions déjà démarré l'année 2015 avec prudence, pesant précisément le nombre de pièces que nous voulions livrer, étant attentifs à ne pas forcer la main de nos partenaires détaillants, ne cherchant jamais à exagérer. Nous n'avons pas eu à vraiment diminuer nos livraisons car nous n'avons jamais cherché à augmenter celles-ci à tout prix, mais nous avons pesé sur le frein. Et nous avons pris le risque de conserver du stock ici, en nos murs (en fait, on se bat pour ça depuis toujours et, ceci dit, ce stock a quasiment fondu en une année). Sur les marchés, cette retenue nous a permis de travailler plus en profondeur, avec moins de pièces, dans un esprit de rareté, avec une vue permanente sur le long terme. Dans le même temps, la clientèle s'est montrée plus volatile, nomade, infidèle… Nous avons toujours et partout privilégié la clientèle locale. C'est es-

sentiel, à nos yeux. On a les clients qu'on mérite, d'une certaine façon: la fidélité et la pérennité avant la volatilité des clients de passage. Nous avons une grande confiance dans nos quelque 400 détaillants. Outre qu'ils sont souvent des partenaires historiques, ils nous permettent d’avoir une compréhension intime des marchés, de leurs différences, de leurs évolutions. Il y a longtemps déjà que, à rebours de bien des marques, nous avons fait le choix stratégique

Comment ne pas être confiant dans le futur quand vous investissez de votre poche près de 500 millions de CHF dans un bâtiment, comme nous sommes en train de le faire. Pour à peine 60'000 montres par an. C'est du costaud! de privilégier absolument nos détaillants et nous n'avons que trois boutiques en nom propre, à Genève, Paris et Londres. Et, soit-dit en passant, je trouve assez incorrect envers les détaillants le fait d’ouvrir une boutique en nom propre à deux pas de chez eux. Aujourd'hui, cette stratégie de confiance envers les détaillants se révèle décisive. Elle implique aussi de ne pas penser qu'à nous-mêmes mais à tenir compte des besoins et des attentes du distributeur, du détaillant… et du client final. Ne jamais se montrer trop gourmand, ni trop insistant. Parier sur la confiance.

Vous annoncez pourtant nombre de nouveautés, cette année… C'est terrible, mais nous sommes des horlogers et nous adorons créer. C'est notre métier et notre passion. Et on a toujours tendance à en faire trop. En 2017 j'avais 50 nouveautés prêtes à être mises en production; on a volontairement limité leur nombre à 20, 25, y compris les animations de collections. Mais nous proposons un ensemble de nouveautés cohérent, dans toutes les gammes et toutes les séries. Et ceci dit, ralentir un peu permet aussi de se concentrer sur les process, le futur et, ce qui est central à mes yeux, la fiabilité. Nous sommes bons dans ce domaine mais jamais on ne parviendra à zéro retour. Pourtant, nous devons encore et encore améliorer notre service après-vente, sa qualité, son efficacité, sa rapidité. Aujourd'hui, c'est ce que demande avant tout le client: la fiabilité du produit! Au point de vue technique, nous présentons régulièrement deux nouveautés par an. Mais avant d'être autorisées à être présentées, elles doivent être d'une fiabilité maximale, testées, éprouvées et validées de A à Z. Et livrables rapidement. C'est ainsi qu'on peut remporter la guerre. Le ralentissement actuel ne va-t-il pas aussi de pair avec un "recentrage" stylistique, esthétique?

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L'équation est de conserver sa visibilité sans pour autant augmenter les stocks. Et je ne veux pas augmenter la production. Alors comme depuis toujours, nous avançons à petits pas, mais constants. Et s'il fallait se reposer un moment, eh bien il faudrait le faire. C'est une question de régulation interne. C'est parfois plus difficile mais au final notre modèle se révèle efficace – et agréable pour tout le monde. Le fait d'être une maison familiale, sans pression de l'actionnaire, est aussi une chance. Nous sommes à l'abri des jeux de pouvoir, des brusques virages stratégiques, des rachats, de la course aux chiffres, des gros discounts… C'est tout ça qui a aussi mené à la situation actuelle. 2016 n'aura pas été une année record mais nous avons le privilège de ne pas devoir sans cesse courir après les records. Nous avons le temps.

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L'horlogerie est allée trop loin dans le «gadget» et la démonstration, c'est certain. Et aujourd'hui, le client, qui a un peu peur de l'avenir, réclame une approche stylistique plus posée. Le design est au centre: comment faire une jolie montre, toute simple, une trois aiguilles qui séduise, enchante…? C'est la chose la plus difficile. Designers, à vos crayons! Mais


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Patek Philippe est perçue comme une marque d'esprit traditionnel. Pourtant, vous investissez beaucoup dans la recherche… S'il y a une tradition Patek Philippe, c'est bien aussi la tradition de l'innovation. Mais une innovation, au point de vue technique ou en termes d'habillage, qui soit toujours au service d'une horlogerie utile, fiable, précise. Nos laboratoires de recherche et développement, sont ici, au cœur de la manufacture, et ils sont équipés de la façon la plus performante qui soit, disposent de tous les outils nécessaires et des ingénieurs les plus performants. Les tests sont au centre de nos préoccupations et ils nous prennent un temps considérable. Parfois nous sommes sur de très bonnes pistes, parfois elles nous déçoivent. Mais notre effort est continu. Nous collaborons avec des instituts comme l'Ecole Polytechnique de Lausanne ou le CSEM de Neuchâtel, parfois en consortium avec certaines maisons choisies. Nous avons été pionniers dans le silicium et aujourd'hui près de 85% de nos montres intègrent des composants silicium. Historiquement, Patek Philippe a depuis toujours fait évoluer l'horlogerie mais nous voulons éviter les démonstrations pour elles-mêmes. Quand nous développons une nouvelle technologie, il faut que ça marche, et que nous puissions la faire entrer en production. En fait, évoluer, innover constamment est un devoir à nos yeux. Mais nous innovons tout en restant "traditionnels" à notre façon. C'est aussi valable pour l'habillement. Et il ne faut pas oublier une règle cardinale: tout ce qu'on innove doit être réparable dans 50 ans ou dans 100 ans. Une Patek Philippe est et restera un investissement. Vous semblez donc confiants quant à votre avenir… Comment ne pas être confiant dans le futur quand vous investissez de votre poche près de 500 millions de CHF dans un bâtiment, comme nous sommes en train de le faire. Pour à peine 60'000 montres par an. C'est du costaud! Ce pôle, adjacent à la manufacture actuelle, est notre pari sur le futur. Une de ses missions sera de renforcer encore notre SAV et d'y former les horlogers de demain. Mais nous y rapatrierons aussi notre diviPUBLICITÉ

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sion habillage, qui se trouve non loin, y installerons la fabrication des composants, la recherche… Et j'aurais aimé conserver des espaces vides en prévision de nouvelles missions futures, mais les 50'000 m2 planifiés se remplissent déjà trop vite. Mais ne craignez-vous pas que l’on soit au bout d’un cycle et qu’une forme de «désamour» envers l’horlogerie puisse changer la donne? Comme je vous l’ai dit, l’horlogerie a exagéré, il y eu trop de tout, parfois du n’importe quoi et au final il y a eu saturation puis indigestion, comme quand on mange trop de bonbons. Mais on sent que ça revient, que l’envie et le désir sont à nouveau là. Vous savez, notre histoire nous permet un certain recul et nous aide à relativiser les bas comme les hauts. Par exemple, nos pendules Dôme décorées en émail sont passées par une période de désintérêt marqué. Non seulement nous les avons stockées mais nous avons aussi continué à en produire, pour conserver un savoir-faire. Bien nous en a pris car, sans qu’on en comprenne toujours les raisons, un beau jour c’est reparti, et tous nos stocks ont à nouveau fondu. Qu’en est-il de la répartition de vos marchés, dans cette période compliquée? Nous sommes et restons très forts en Europe qui représente de 40% à 43% de nos ventes. C’est le fruit d’un travail historique, en profondeur, auprès de la clientèle locale. Il y a dix ans, les USA étaient aussi très forts et représentaient environ 30%. Aujourd’hui, ils sont à 15% mais il y là un énorme potentiel pour nous. C’est aux USA que j’ai vu les plus belles collections Patek Philippe, des pièces incroyables auprès de collectionneurs restés discrets. L’Asie, tout le monde le sait, s’est sérieusement calmée, Hong Kong en tête, mais elle représente toutefois toujours 30%. Singapour, par exemple, va très bien. Le Japon un peu moins. Mais le marché qui a le plus souffert est sans conteste la Russie. Là-bas, c’est tout ou rien. Patek Philippe fait régulièrement la une avec les résultats exceptionnels obtenus en vente aux enchères. Estce le fruit d’une politique délibérée? Absolument pas, c’est le fruit de notre politique centrée sur la qualité, la fiabilité et le long terme. Je vous rappelle que nous avons pris l’engagement de pouvoir tout réparer ou restaurer sans limite de temps. Nous somme organisés en ce sens et nous poursuivons tous les jours nos efforts [Lire à ce propos The manufacture within the manufacture, Europa Star March 2016, www.europastar. com]. Mais ces résultats extraordinaires nous réjouissent énormément. Nous les accueillons avec enthousiasme mais nous ne les utilisons pas. Ils nous confirment dans la justesse de nos choix et témoignent de l’exceptionnelle confiance que nous accordent nos clients et nos collectionneurs.

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stylistiquement parlant, j'avoue être fier de nos collections, que je trouve très fortes à ce niveau.

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La petite histoire des grands salons horlogers

par

Dominique Fléchon,

expert auprès de la fondation de la haute horlogerie, genève

Selon son étymologie latine, la Foire renvoie dès son origine à des pratiques religieuses ou à des pèlerinages. Une fois réunis, les participants venus de contrées diverses se livraient à des activités de commerce, soit pour acquérir des denrées qui leur étaient inconnues, soit simplement pour subsister durant leur séjour. Seules resteront les transactions commerciales. Si les marchés sont traditionnellement destinés à vendre des productions artisanales et vivrières locales, les premières foires, attestées dès l’Antiquité, proposent des marchandises en gros à des marchands venus s’approvisionner en vue de les revendre. Avec les Croisades, les déplacements par voies terrestres, fluviales et maritimes se multiplient. Le commerce médiéval bénéficie d’avancées tels le ferrage, l’harnachement et l’attelage des chevaux, le cerclage de fer des roues des chars et charrettes et l’amélioration des routes. Les confréries à caractère religieux fleurissent dès l’époque carolingienne. Progressivement, les artisans merciers, orfèvres ou drapiers notamment se regroupent en corporations chargées de défendre les intérêts de leurs membres. Les marchands, de leur côté, s’associent en guildes afin de se protéger contre le banditisme et les péages outranciers. A la fin du Moyen Age, un droit du travail structuré apparaît en Italie, en Flandre et en Champagne. Dans les Foires, les commerçants se transforment en hommes d’affaires traitant d’importants volumes

de transactions grâce aux lettres de change, moyen de paiement qui permet d’honorer une dette à distance en passant par l’intermédiaire de deux banquiers qui correspondent entre eux. Une forme de capitalisme apparaît alors.

L’horlogerie suisse investit les foires et expositions européennes Dès la fin du 13ème siècle, des pièces d’orfèvrerie sont présentées à la Foire de Genève. Les premières montres fabriquées au 16ème siècle dans la Cité sont, dans leur grande majorité, exportées par manque de débouchés locaux. Contraints de s’expatrier par nécessité économique, des marchands de la ville fréquentent les pays d’origine de leurs ancêtres, participent aux grandes foires européennes de Reims, Troyes, Cologne, Leipzig, mais séjournent aussi dans les capitales orientales comme Constantinople dès les années 1592. Aux 16ème et 17ème siècles, les agglomérations horlogères suisses dépendent de Genève avant de se libérer de sa tutelle. Dès le 18ème siècle, elles exportent leurs productions de manière autonome en passant par les foires de Leipzig, la plus importante, Francfort ou Augsbourg, ville ouvrant le marché d’Europe centrale. Les expositions ne sont pas le prolongement des foires traditionnelles mais plutôt celui des manifestations organisées dans la France et l’Angleterre du 18ème siècle par les Académies et les Sociétés des Beauxarts afin de présenter au public la production artistique du moment.

L’importance des manifestations nationales et régionales En 1804, la première Exposition des Beaux-arts et de l’Industrie ouvre ses portes à Berne. Cette appellation singulière s’explique par l’ensemble des savoir-faire alors nécessaires pour transformer les matériaux. Cette première exposition moderne sera prolongée par celles de 1810, 1818, 1824 et 1830, toujours à Berne. Outre son objectif commercial, elle permet au pays de se présenter en mettant en avant son dynamisme, mais aussi de diffuser les valeurs de progrès technique, travail, concurrence et l’élaboration d’une identité collective. En 1843, l’Exposition artisanale et industrielle nationale de Saint Gall associe deux approches de productions différentes, alors que celles de Berne de 1848 et 1857 se placent sous la bannière des expositions industrielles suisses. Les manifestations régionales du 19ème siècle bénéficient pour leur part du rôle des Sociétés d’émulation industrielle. Ainsi, celles de Genève (durablement) et de Neuchâtel (1881) se spécialisent dans l’horlogerie-bijouterie et celle d’Appenzell (1881) dans la broderie. L’Exposition neuchâteloise d’horlogerie (1863) coïncide avec les Fêtes du Tir fédéral. Elle est étoffée en 1879 par une section de mécanique. Dès lors, la spécialisation s’accentue avec l’Exposition nationale d’horlogerie et internationale de machines et outils employés en horlogerie à La Chaux-de-Fonds, et avec l’Exposition internationale d’horlogerie, bijouterie et branches similaires à Genève en 1888.

Vitrines globales et industrielles A partir de 1850 apparaissent les expositions dites universelles car elles concernent l’ensemble des branches d’activités. Nées au cours de la Révolution industrielle, elles répondent à des enjeux culturels (dans le sens pédagogique), politiques et

économiques. La première s’ouvre à Londres en 1851 suivie de celles de Paris (1855), Vienne, Philadelphie et Chicago. Elles contribuent entre autres à affirmer et à renforcer la notoriété acquise depuis le 18ème siècle sur le marché international de l’horlogerie helvétique.

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Si leur forme diffère grandement, les marchés du Moyen-Age et les grands salons horlogers actuels partagent une même ambition commerciale. Ces rendez-vous sont néanmoins devenus de plus en plus professionnels au fil du temps, délaissant quelque peu leur vocation pédagogique et universelle. Retour sur huit siècles de fièvre acheteuse.

Forte de 831 entreprises issues de toutes les branches de l’économie suisse et d’un secteur dédié à l’horlogeriebijouterie, la Foire suisse d’échantillons de Bâle voit le jour le 15 avril 1917. Aux expositions de Melbourne (1880) et de Chicago (1893), les horlogers genevois refusent la présentation collective de l’horlogerie suisse pour suivre des critères prouvant leurs spécificités. A Chicago, leur propre catalogue fait l’apologie de la supériorité des montres de Genève, de l’excellence de son Ecole d’horlogerie et de son observatoire. Suivant le concept d’universalité de l’Exposition de Paris de 1900, l’activité horlogère suisse s’y trouve présentée en cinq sections: Exposition collective de l’horlogerie genevoise, des fabricants de Fleurier, de ceux du Locle, des mécaniciens de Couvet et enfin des fabricants d’horlogerie de la Chaux-de-Fonds.

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Toutefois, à partir de 1900, l’engouement pour le progrès et l’industrie commençant à s’émousser, l’esprit des Expositions universelles doit évoluer. Forte de 831 entreprises issues de toutes les branches de l’économie suisse et d’un secteur dédié à l’horlogerie-bijouterie, la Foire suisse d’échantillons de Bâle voit le jour le 15 avril 1917. Elle poursuit son développement, lorsqu’en 1942 ont lieu les festivités du deuxième millénaire de Genève. A cette occasion, fabricants, journalistes et historiens de l’horlogerie s’associent pour organiser une exposition autour des activités de la Fabrique genevoise. Prévue pour une seule édition, Montres & Bijoux de Genève obtient un succès tel que sa pérennité est assurée quarante années durant. De 1942 à 1982, mariant histoire et actualité, elle est présentée dans les musées et les grands hôtels de la ville. En 1961 le musée Rath la gratifie de «manifestation la plus importante de l’horlogerie, de la bijouterie et de la joaillerie», au point que le Goldsmith’s Hall de Londres et le Bayerischer Hof de Munich l’accueillent respectivement en 1975 et 1977.

De la foire au salon Depuis 1921, l’horlogerie est, conjointement à d’autres disciplines, présente à la Foire suisse d’échantillons de Bâle. En 1931, première Foire suisse de l’horlogerie, elle occupe un pavillon indépendant. Elle devient Foire européenne de l’horlogerie et de la bijouterie en 1973 et est rebaptisée Basel dix ans plus tard. En 2003, elle rayonne sous le nom de Baselworld, Salon mondial d’horlogerie et de bijouterie. En 1991 naît à Palexpo-Genève le Salon international de la Haute horlogerie, manifestation privée qui rassemble, selon des critères spécifiques à l’industrie du luxe, les marques horlogères d’un grand groupe international. Manifestations de professionnels s’adressant à des professionnels, ces deux salons suivent les mêmes buts et renouent ainsi avec la définition des premières foires. Mais l’éducation du grand public et la transmission de valeurs, si présentes au 19ème siècle, n’y ont plus leur place.


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Génération «explosée» par

Serge Maillard

Enquête intéressante que celle menée récemment par Manpower auprès de 19’000 jeunes nés entre 1982 et 1996, dans 25 pays. Elle dresse le portrait des aspirations d’une génération drastiquement différente de la précédente, qui était marquée paradoxalement par la révolution des mœurs de 1968 et ses idéaux et par la révolution des «années fric» qui ont suivi. Libéralisation des carcans de la société, mais aussi de toutes les autres frontières, financières, économiques, physiques. Allez, balançons ici pour le plaisir seulement le cliché de l’ex-révolutionnaire qui roule aujourd’hui en voiture de sport, avec un fond de culpabilité, qu’il oubliera dans l’achat compulsif de montres statutaires... La génération Y, elle, semble aborder l’argent et la carrière avec un rapport plus décomplexé. Paradoxalement, son absence de mauvaise conscience l’amène à tenter de concrétiser inconsciemment les idéaux abandonnés des aînés: privilégier l’harmonie professionnelle à la quête obsessionnelle financière et professionnelle, traiter ses pairs avec équanimité quel que soit leur «rang» social, concilier vie privée et profession-

nelle, retour aussi à des valeurs plus conservatrices, recherche de sens et de créativité, envie de frontières, de limites, d’un cadre plus clair et convivial, alors que tout a été explosé, tout a été bouleversé... Elle se façonne et évolue dans le paradoxe d’un individualisme et d’une résistance à l’autorité qui n’a jamais été aussi forte, fruit de l’«explosion sociale», et les tentatives de reconstruction de liens et de racines à l’heure de «l’explosion digitale». On observe les résultats tangibles de ces tentatives de conciliation dans l’étude Manpower: ainsi, acquérir des compétences individuelles (73%) est plus important aux yeux des personnes sondées que de gagner en compétences managériales (27%). Les fonctions d’encadrement n’ont d’intérêt que pour 16% d’entre eux alors que travailler avec des personnes «sensationnelles» a nettement plus d’importance pour 33%. Les trois quarts sont prêts à changer d’employeur si on leur offre plus d’opportunité de formation même si leur salaire reste identique (75%). Parallèlement, l’intérêt à gérer une équipe et à monter en grade est beaucoup moins prégnant que de trouver une forme de satisfaction personnelle. Parvenir au som-

Naviguant entre l’authenticité de la boutique et la facilité de la digitalisation, les "Millenials" sont pétris de paradoxes, qui les torturent tout autant que ceux qui tentent de les séduire. met d’une entreprise ne tente guère que 5% d’entre eux, qui préfèrent, au fond, être «leur propre patron, sans que rien ne leur soit imposé»... Manpower recommande d’ailleurs aux employeurs d’être ouverts à des «modes de travail alternatifs». Quelles conséquences dans ces attitudes pour l’industrie horlogère? Evaluons-en deux (il y en aurait bien plus encore, mais cet éditorial a des limites physiques – le sacrifice à la généralisation en est une autre, que l’on me pardonne mon offense). En tant que professionnels, les membres de la génération Y, à disposition desquels est mise une palette d’outils digitaux et d’idées

émulatrices, sont avides de tenter l’aventure entrepreneuriale ou de créer leur propre autonomie au sein d’une entreprise – tout en ne s’isolant pas. Pas un hasard si un leader «sensationnel» (dynamique et riche mais pas arrogant) comme Jean-Claude Biver, ou une aventure entrepreneuriale comme MB&F et son charismatique fondateur Max Büsser, qui ne promet pas monts et merveilles à ses employés mais la garantie de «travailler avec des gens sympas dans un cadre créatif», sont sans doute les deux figures les plus en vue de notre industrie, chacune dans son registre touchant des cordes sensibles de la génération Y. En tant qu’acheteurs ensuite, les membres de la génération Y partent pour ainsi dire «dans tous les sens», ce qui explique, parmi les conséquences de la vaste «explosion» de tous les cadres connus et maîtrisés jusqu’ici, que l’industrie horlogère semble déboussolée (et ce n’est pas

fini). Naviguant entre l’authenticité de la boutique de proximité et la facilité de la digitalisation, ils sont pétris de paradoxes, qui les torturent tout autant que ceux qui tentent de les séduire. Peu de repères donc, dans une grande jungle où parfois celui qui crie le plus fort semble l’emporter, avant qu’il ne se trouve dépassé par celui qui prône modération et sensibilité. On passe allègrement du flashy au vintage. On revient des diamètres ultra-larges au minimalisme des Mad Men. C’est le lot d’une période de mutation technologique, sociale et économique d’une rapidité sans doute jamais vue dans l’histoire de l’humanité, au sein duquel les membres de la génération Y jouent à la fois le rôle de bourreaux et de victimes. Coincés entre leur aînés qui ont entamé le processus d’«explosion» et les futurs digital natives qui en seront les récipiendaires... La vie est devenue un long fleuve, mais définitivement pas tranquille.

Feu la «montre du prolétaire» Europa Star n°3/1967 par

Pierre Maillard

Il y a 50 ans, en 1967, Europa Star (numéro 3/1967), publiait un article en collaboration avec la «Roskopf Association», qui entendait célébrer le 100ème anniversaire de l’invention de Georg Friedrich Roskopf. Né en 1813 dans la très horlogère Forêt Noire d’Allemagne, G. F. Roskopf, devenu lui-même horloger, s’était installé à La Chaux-de-Fonds puis à Genève. C’est dans cette ville que lui vint l’idée de créer «une montre pour les classes ouvrières, une montre que tout un chacun pourrait s’offrir.» Cette noble idée lui prit plus de dix ans et en 1867 il lança enfin ce qu’il appela lui-même, «la montre du prolétaire», vendue alors au prix de 20.- CHF. Pour y parvenir, il chercha à simplifier à l’extrême le mouvement en réduisant le nombre de composants à 57 au lieu des 160 nécessaires au minimum. Il créa un échappement à ancre à goupilles, supprima la roue de centre et, dans un premier temps, le mécanisme de mise à l’heure (qui pouvait s’effectuer au doigt), opta pour un remontage sans clé, utilisa des métaux non précieux et conçut sa montre de façon à ce qu’elle puisse facilement être réalisée en usine.

Le succès est immédiat mais ses concurrents horlogers helvétiques le prennent mal. Tous refusent de collaborer avec celui qu’ils dépeignent comme un «destructeur» de leur travail artisanal. Roskopf est obligé de faire appel à des ouvriers du Jura français et du canton de Berne. Présentée à l’Exposition Universelle de Paris, la «Prolétaire» est remarquée par Louis Breguet qui en fait l’éloge. Les marchés internationaux s’ouvrent. Si la Suisse la rejette massivement, la France, la Belgique, les Indes, le Brésil, l’Egypte entre autres l’adoptent rapidement. Dès 1868, Roskopf doit s’agrandir, investir pour répondre à la demande. Comme il n’a pas déposé de brevets, il sera aussi rapidement copié, plus ou moins bien. De «fausses» Roskopf, mal exécutées, entâchent sa réputation. Il va finir par déposer un brevet aux Etats-Unis et remettra son entreprise à son ami Charles Léon Schmidt et aux frères Will. Ses successeurs se lancent dans une industrialisation à grande échelle et édifient deux fabriques «Roskopf Patent» à La Chaux-de-Fonds. Au XXème siècle, la Roskopf prend un essor considérable, inonde l’Empire britannique puis les USA, de-

vient la montre la plus exportée de Suisse avec jusqu’à 35 millions de pièces par an au début des années 70… avant que l’arrivée du quartz lui porte un coup fatal.

Tuée par le quartz En 1967, l’heure du quartz n’est pas encore arrivée. La «Roskop Association» compte 67 marques et maisons horlogères, dont plus aucune ne subsiste, et 7 manufactures d’ébauches, dont seule subsiste aujourd’hui Ronda, entretemps passée au quartz et revenue à la montre mécanique seulement l’année dernière. En 1967, la Roskopf Association déclare encore dans les colonnes d’Europa Star: «Parmi les gens qui bénéficient de l’industrie de la montre Roskopf, on compte des jeunes gens qui ne peuvent pas encore se permettre d’acheter une montre de classe supérieure, les habitants des pays en voie de développement qui sont en train d’apprendre qu’il est nécessaire de connaître l’heure exacte, et les classes les plus pauvres de nos sociétés occidentales.» Quelques petites années plus tard, ce rêve sera définitivement balayé. Jusqu’à ce que la Swatch devienne la nouvelle «Prolétaire».


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Sous l’Antarctique par

Serge Maillard

«J’ai découvert un jardin tropical sous la banquise. J'étais surpris de retrouver au pôle Sud des tons et des couleurs dans la flore sous-marine qui me rappelaient les Caraïbes! Il y fait froid mais les organismes profitent des conditions stables qui y règnent...» Le projet «Gombessa» mené par le biologiste et photographe sous-marin français Laurent Ballesta a déjà donné lieu à trois expéditions majeures. La première l’a mené à la rencontre du coelacanthe, véritable «poisson-fossile», au large de l’Afrique du Sud. La seconde l’a conduit dans l'atoll de Fakarava en Polynésie française, pour y observer l’intrigant rassemblement annuel des mérous camouflage. Cette fois, l’explorateur a emmené ses objectifs et sa combinaison de plongée thermique sur la base polaire française Dumont d’Urville,

en Antarctique, en compagnie du réalisateur et fondateur de Wild Touch Luc Jacquet (La Marche de l’Empereur) et du photographe animalier Vincent Munier. Si le manchot empereur règne en maître solitaire en surface, la vie sous-marine y est incroyablement riche: phoques de Weddel, coraux mous, crustacés, méduses, étoiles de mer. Un festival de couleurs totalement inattendu à ces latitudes. Des couleurs qui contrastent fortement avec le blanc immaculé de la glace omniprésente: «Mon idée était notamment de photographier pour la première fois la partie émergée d'un iceberg de 60 mètres de long, en superposant plusieurs prises de vue», précise Laurent Ballesta. Mais les multiples plongées dans les eaux glacées de l’Antarctique, qui auront nécessité une préparation de deux ans pour deux mois et demi sur place, n’ont pas été de tout repos: «Ce sont les plongées les plus dures

que j’ai jamais réalisées... On vieillit très vite en nageant en eau glaciale, à -2°C. Il n'était même plus possible de me reconnaître en sortant de l’eau, tant mon visage était marqué par le froid. Ce sont mes orteils qui ont le plus souffert: ils ont mis des mois à s’en remettre!» Un médecin accompagnait en permanence l’expédition en Terre Adélie: «Si l'on reste plus de trois quarts d'heure dans cette eau, cela devient vraiment risqué.» Le risque en valait néanmoins la chandelle: «Nous avons effectué les plongées les plus profondes et les plus longues jamais réalisées sous les pôles. Nous sommes descendus à 70 mètres: nous aurions pu et voulu descendre plus bas mais nous n’avons pas obtenu d’autorisation du gouvernement pour le faire... Cela nous a néanmoins permis de découvrir déjà de nouvelles espèces de faune et de flore jusque-là non répertoriées.»

L’expédition, qui visait aussi à mesurer l’impact du bouleversement climatique sur les régions polaires, a résulté en un film documentaire Antarctica, sur les traces de l’empereur sur Arte, ainsi qu’un livre, Adélie, Terre & Mer. Sans oublier, bien sûr, le documentaire L’Empereur de Luc Jacquet. A cette occasion, Blancpain présente sa nouvelle montre Fifty Fathoms Bathyscaphe Chronograph Flyback Blancpain Ocean Commitment II (BOC II), dont une partie du produit sera reversée à des projets scientifiques. Les ventes du premier modèle avaient déjà permis de soutenir le projet Gombessa de Laurent Ballesta à hauteur de 250’000 euros, via le programme Ocean Commitment (www.blancpain-ocean-commitment.com). Le plongeur et biologiste peut ainsi poursuivre son observation du comportement des requins gris de récif en Polynésie française.


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Après plusieurs jours passés au bord de la banquise, c’est l’heure du grand plongeon pour les bébés manchots empereurs! Ils se lanceront finalement, avec un peu d’hésitation...


François-Henry Bennahmias

«Jouer avec les prix, c’est suicidaire!» Echaudé par le dernier dossier d’Europa Star sur le thème sensible des prix pratiqués en horlogerie, François-Henry Bennahmias, le patron d’Audemars Piguet, a tenu à réagir: non, le prix ne doit pas devenir la question centrale du moment; mais oui, la transparence va devenir la nouvelle norme en horlogerie. Entretien. Propos recueillis par Serge Maillard

Cela commence par un coup de téléphone. François-Henry Bennahmias, l’homme fort d’Audemars Piguet, est au bout du fil. Courtois, mais énervé. Le dernier dossier d’Europa Star, consacré à la délicate voire taboue question des prix des montres, l’a fait «décoller comme la fusée Ariane». Plus particulièrement un tableau comparant l’évolution des prix de modèles emblématiques depuis l’an 2000, et montrant une augmentation considérable des tarifs pratiqués. «Vos chiffres sont inexacts! Ces modèles ont évolué et on ne peut pas comparer des pommes et des poires...» Ajoutant: «En termes de prix, l’horlogerie est très sage par rapport à ce qui se pratique dans la maroquinerie, l’hôtellerie ou encore l’automobile!»

On sent que la question le titille. «Je veux être constructif et je suis transparent!» Alors, prolongeons la discussion. Rendez-vous est pris au Brassus, pour une longue conversation... qui, derrière le prix, révèlera bien d’autres facettes de l’industrie horlogère et de l’état d’esprit d’Audemars Piguet, de son patron, de la notion de valeur, le tout entre ses figurines de Maître Yoda, un autographe d’Arnold Schwarzenegger et même l’évocation du film Rain Man... Nous avons réalisé dans notre dernière édition (Europa Star Chapter 1/17) un tableau qui montre, en prenant l’exemple de quelques modèles emblématiques sur le marché français, une forte évolution globale du prix des montres, de l’ordre de 60% entre 2000 et 2010, avant de ralentir à environ 12% entre 2010 et 2015.

Vous avez sorti votre tableau, et j’ai fait le même travail de mon côté. J’ai mobilisé mes équipes pour retrouver ces chiffres, et je n’arrive pas au même résultat en ce qui concerne le modèle Royal Oak acier et date. Mais surtout, les modèles comparés ont évolué: nous sommes passé à un fond ouvert, à un calibre manufacture, à des dimensions plus importantes... C’est un meilleur modèle! Et j’ai un œil de lynx en ce qui concerne les chiffres. Tout me saute aux yeux. Je suis un peu comme le caractère principal de Rain Man... Sur ce modèle comme d’autres, les augmentations pratiquées sur le prix des montres vous semblent justifiées? Je trouve que l’horlogerie a été très pondérée par rapport à d’autres secteurs d’activité ou d’autres marques. Un exemple: en l’an 2000, le prix d’une chambre dans un palace coûtait l’équivalent de 160 euros. Combien pensez-vous qu’elle coûte aujourd’hui? Plus de 1’000 euros! Autre exemple: J’ai reçu un sac à dépêches d’Hermès en 1994, pour mes 30 ans. A l’époque, il coûtait 14'000 francs français, soit environ 2'000 euros. Son prix aujourd’hui: 8'000 euros. De même, de beaux escarpins de femmes coûtaient 500 francs français, soit moins de 100 euros en

2000, contre au moins 600 euros aujourd’hui! Tout de même, au-delà des comparaisons avec d’autres secteurs, la question du prix reste prioritaire pour le client, on ne peut l’écarter d’un revers de la main... La thématique du prix est là depuis deux ans. En 2010, on n’en parlait pas. Pourquoi aujourd’hui, alors? Parce qu’il y a une forme de crise. On croit pouvoir trouver dans le prix une solution. Ce n’est pas la bonne solution. La solution, il faut la trouver dans l’innovation. On ne peut pas simplement associer le luxe au prix, c’est une pente périlleuse. Je suis d’accord sur ce point avec Jean-Christophe Babin, lorsqu’il dit dans votre dossier que l’«on associe la crise avec un manque d’argent, mais ce n’est pas le bon réflexe et l’on ne s’en sort pas forcément en baissant les prix». Un certain nombre de marques ont pourtant baissé leurs prix et nombre de détaillants pratiquent des rabais importants. Peut-on revenir en arrière? Regardez: la réponse, c’est cette montre que je porte au poignet, la nouvelle Royal Oak Perpetual Calendar noire en céramique. Elle vaut 91'800 francs, soit à peine

moins qu’une Royal Oak en or. On l’a présentée le vendredi avant le SIHH et elle est partie comme un feu de forêt. Tous les détaillants la voulaient. Or, je n’ai pas reçu un e-mail qui me demandait des explications sur son prix. Nous aurions pu en vendre plus, mais notre capacité de production est limitée à 100 unités par an. Les histoires de concurrence me font rire: aujourd’hui, la concurrence pour notre marque ne vient pas que des autres marques de montres, elle peut venir d’une œuvre d’art, une voiture, un voyage... Le vrai luxe n’est pas une question de prix. Quelle est votre définition du luxe? Le seuil du luxe commence pour moi à 7'000.- CHF. Descendre en dessous serait du suicide! Vous savez pourquoi personne ne pratique des prix finissant en 99.- CHF en horlogerie? Cela rappelle les actions du supermarché, ce n’est pas le monde du luxe. Psychologiquement, c’est la tranche des 10'000.- CHF qui compte davantage: le seuil entre 43'000 et 49'000.- CHF est moins important qu’entre 49'000 et 55'000.- CHF par exemple. Mais ce qui compte vraiment, c’est l’émotion! Et, lorsqu’on a les moyens, l’émotion se situe au-delà du seul critère du prix. Récemment, un de nos ambassadeurs est venu visiter la manufacture avec ses enfants.

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SUIVI

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SUIVI Ce sont des gamins qui ont grandi à l’ère du tout digital: qu’est-ce qui pourrait bien les intéresser dans un produit mécanique comme une montre? Je peux vous assurer qu’ils étaient tout simplement émerveillés. Là, ils ont lâché leur tablette. Des tablettes qui rendent néanmoins les consommateurs mieux informés... et donc plus sourcilleux et conscients de la pertinence ou non des tarifs. Aujourd’hui, les clients sont bien souvent mieux informés que les vendeurs. Or, les détaillants parlent beaucoup d’argent et de prix car cela a été trop souvent leur principale arme de combat. Souvent, je remarque qu’un vendeur de voiture en sait plus qu’un vendeur de montre sur son produit. S’il ne lui reste que l’argument du prix, c’est qu'il a échoué.

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Oak à moins de 7'000.- CHF, je tuerais la marque! Le prix n’est pas une fin en soi quand on parle du vrai luxe. La crise actuelle n’est pas une crise du luxe. Il n’y a jamais eu autant de richesse sur notre planète et de clients potentiels. Mais quand le temps se couvre, on se tourne vers les marques les plus solides, qui privilégient la qualité à la quantité. Nous faisons partie de ce cercle et en bénéficions, c’est pourquoi nous avons presque atteint les 900 millions de francs de chiffre d’affaires en 2016. Lors de la crise de 20082009 déjà, on pouvait observer cette concentration vers les meilleures

marques. Nous devons absolument figurer dans le tiercé de tête. Qu’est-ce qui vous distingue des autres? Nous sommes une marque sérieuse qui ne se prend pas au sérieux. Les codes ont changé. On ne peut plus juger «à l’apparence»: je répète toujours à mes équipes «recevez de la même manière le client en short que celui en complet-cravate»! Mais je suis surpris à quel point certaines enseignes de luxe ont du mal à s’adapter. Une autre anecdote: récemment, j’étais habillé casual dans

un grand établissement parisien à l’heure du brunch et le maître d’hôtel m’a dit, lorsque nous sommes arrivés: «Je vous rends attentif au fait que cela va coûter 150 euros». C’est incroyable, inadmissible! Face à vous, vous avez aussi des clients de plus en plus habitués à accéder gratuitement à des services ou des produits, comme de la musique ou des films... Comment résister à cela? La qualité et la créativité prennent du temps et ont un prix, ou mieux: une valeur! Aujourd’hui, la notion

de gratuité fait beaucoup de tort à notre société. Je ne télécharge jamais de musique gratuitement, je l’achète toujours. Mais je pense qu’à l’heure du tout-jetable et du tout-gratuit, les gens recherchent paradoxalement plus d’authenticité. Ils veulent découvrir l’envers du décor et que ce soit cohérent avec l’image présentée. Alors avoir un prix élevé, oui, mais s’il est justifié. Europa Star reviendra encore cette année sur ce premier grand dossier de 2017 consacré à la question des prix en horlogerie, avec des réactions, follow-up et opinions.

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Qu’il s’agisse du prix, de la manière de distribuer les montres ou des nouveautés à proposer, les mutations sociales, géopolitiques et digitales sont si rapides que nombre d’horlogers semblent un peu déboussolés... Face aux mutations de notre société, tout le monde part dans tous les sens. C’est un peu l’anarchie, on voit des stratégies qui changent à 360°. Ce que l’on observe derrière tout cela, c’est que la notion de transparence est de plus en plus importante. Nous sommes à l’ère de la transparence! L’industrie ne peut plus continuer à tout cacher. Et nous voulons jouer le jeu. Allez voir d’autres marques horlogères et regardez s’ils sont aussi transparents que nous sur cette question du prix... Mais si nous vous comprenons bien, au delà d’un certain seuil la question du prix n’est plus un critère déterminant dans l’acte d’achat? Nous devons bien sûr faire attention aux prix, nous réalisons des benchmarks mais c’est une donnée qui doit rapidement sortir de l’équation. L’adéquation doit être totale entre le prix et la valeur perçue. Il y a deux ans, Axel Dumas, le patron d’Hermès, l’a très bien dit au Forum de la Haute Horlogerie: les produits Hermès sont chers… à fabriquer! Les prix en sont d’autant plus justifiés. En quinze ans, les montres de plus de 3'000.- CHF sont passées de 10% à 60% de la valeur des exportations de montres suisses. Cette «ruée vers le luxe» n’est-elle pas aujourd’hui en train de connaître son contrecoup? Attention, cela reste un exercice très difficile de vendre des produits luxueux! Beaucoup de petites marques indépendantes connaissent des difficultés actuellement, même en vendant des produits de qualité. Les exigences sont élevées, il ne faut pas décevoir, au contraire surprendre. Mais si je faisais une Royal JS_1.indd 1

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LAUR’LOGE

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Chère Jacqueline

par

Laurence Janin, laurloge.com

Comme on le dit de LA Callas, LA Bardot, ou dans un autre registre LA Picart (Nicole Picart, ancienne Red’ Chef mode au Figaro Madame, 30’000 pages fashion et 20’000 défilés au compteur), on peut évoquer LA Dimier. Sûr, elle n’aimerait pas. Car la dame a les pieds sur terre et recadre gentiment mais instantanément celle (moi) qui voudrait en faire une héroïne suscitant l’inspiration: «Je ne suis pas Simone Veil!». Oui chère Jacqueline, mais vous êtes l’une des très rares femmes designers en horlogerie de votre génération, contemporaine de Gérald Genta. Vous êtes aussi la maman de la Royal Oak pour femmes (entre autres) et dieu sait qu’il fallait avoir les nerfs solides, un caractère bien trempé et une sacrée vision pour relever le challenge en créant le modèle femme de la fameuse icône. Vous noterez au passage que je n’ai pas écrit le «pendant féminin»,

sorte de déclinaison diminuée de la montre originelle. Non, c’est bien une création distincte, qu’il s’agissait pour vous de ne pas édulcorer. Passionnée par le dessin et la peinture, vous poursuivez des études classiques avant de suivre des cours d’arts décoratifs. Vous auriez aimé travailler avec une orientation design, mais finalement vous rejoignez votre destin. D’abord comme créatrice de bijoux et de montres avant de rejoindre Rolex. Là, vous créez des produits de collection et d’exposition. «Les émirs et les rois dévalisaient les boutiques de Genève», vous souvenez-vous. Vous apprenez

Vous êtes l’une des très rares femmes designers en horlogerie de votre génération, contemporaine de Gérald Genta.

à comprendre le poignet des femmes, bien différent de celui des hommes, pour finalement constater: «J’ai trouvé le cheminement.» Arrivent les années Audemars Piguet. Un quart de siècle de connivence, la recherche de l’ultra-précision au centième près. 40 ans plus tard, François Bennahmias, le CEO de la Manufacture du Brassus, vous appelle pour vous associer à l’anniversaire de la Royal Oak pour dames. Rendre à César… Oui, mais une maison moins intelligente, moins humaine, aurait pu préférer une reine des réseaux sociaux pour incarner la Royal Oak Frosted Gold. C’est vous pourtant – en duo avec Carolina Bucci à qui l’on doit cette merveilleuse technique florentine qui fait le panache de cette création anniversaire givrée – que l’on met à l’honneur pour notre plus grand bonheur. Heureuse? Vous, vous ne vous souhaitez que du soleil. Et une vie ancrée dans la réalité, comme lorsque vous étiez designer et que la finalité, au-delà du dessin, était de le faire réaliser et d’en endosser la responsabilité. A propos de dessins, chère Jacqueline, vous n’utilisiez jamais d’ordinateur, m’avez-vous confié, préférant donner la priorité aux idées sous forme de gouaches. J’aimerais tant un jour que vous me les montriez…

Parmi les montres gagnantes du SIHH 2017, la Laureato de Girard-Perregaux est proposée (entre autres) avec un mouvement quartz. Et c'est très bien ainsi.

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Elle a du cran, du caractère, et elle ne s'en laisse pas compter. On lui doit la Royal Oak pour femmes qui fête ses 40 ans. Rencontre avec une grande (et belle) dame du design horloger.

Quartz décomplexé

Jacqueline Dimier

Pour nombre de marques horlogères, le marché féminin se compose de deux typologies que je caricature à peine. D’un côté l’immense majorité des «pas intéressées» (limite incultes) et ultra-pressées (limite fainéantes incapables de fournir l’effort de remonter la couronne de leur montre). De l’autre, les initiées qui font cas d’un mouvement mécanique, voire de complications. Et puis il y a Girard-Perregaux, Maison suisse de prestige, entrée dans le giron du groupe Kering en 2011 via sa société mère, le Sowind Group. Véritable institution, la Manufacture excelle depuis toujours dans l’art horloger pur et dur, celui qui vous vaut l’admiration de vos pairs et plus d’entrées que les autres manufactures dans les encyclopédies consacrées à l’horlogerie. C’est cette même Maison qui, à la fin des 60’s et considérant la montre avant tout comme un instrument de précision, lance son propre programme de recherche, alors que se profile la révolution que l’on sait. Dès 1970, Girard-Perregaux présente au Salon de Bâle une montre-bracelet à quartz baptisée Elcron. Un an plus tard, elle dévoile un nouveau modèle muni d’un quartz oscillant à 32’768 Hz, une fréquence devenue standard par la suite. La suite justement, a teinté le quartz d’une réputation sulfureuse. La déferlante des montres à quartz japonaises, couplée peut-être à une certaine absence de vision de la part de l’industrie helvétique qui, selon l’expression du chercheur PierreYves Donzé, «s’était endormie sur ses lauriers», a eu les conséquences délétères que l’on sait. Girard-Perregaux assume pourtant pleinement son rôle de pionnière, archi-pionnière en la matière et propose aujourd’hui un portefeuille étendu de mouvements de Haute Horlogerie, de mouvements automatiques, le tout voisinant avec des mouvements quartz parfaitement décomplexés. Entendonsnous, le calibre quartz made by Girard-Perregaux est à l’image de la Manufacture. Il fait l’objet des mêmes finitions, anglage, perlage, Côtes de Genève, qu’un mouvement mécanique.

Girard-Perregaux Laureato

Alors que la marque propose cette année le retour de sa montre phare, la Laureato, au sein d’une famille de modèles très complète, elle rappelle que la Laureato originelle de 1975 fut dotée d’un mouvement quartz mince et compact aux formidables performances chronométriques. C’est dans ce sillage que s’inscrivent les montres Laureato pour femmes, dont l’identité forte (lunette octogonale inscrite à l’intérieur d’un cercle, boîtier intégré, cadran au motif Clou de Paris) a également tout pour plaire.

Girard-Perregaux assume pleinement son rôle de pionnière, et propose aujourd’hui un portefeuille étendu de mouvements de Haute Horlogerie, voisinant avec des mouvements quartz parfaitement décomplexés. Précision utile sur le prix, la Laureato acier sur acier sertie de 34 mm à mouvement quartz est proposée au prix de CHF 9’700 (et son pendant en acier & or rose non serti à CHF 12’200). On est chez GirardPerregaux. Pas chez Casio. Le Casio de la G-Shock d’antan s’entend, car la firme japonaise, fidèle aux mouvements quartz qui font partie de son ADN, est depuis montée en gamme. Certains modèles de prestige pour hommes atteignent jusqu’à 2500 euros. Affaire à suivre pour savoir si la gent masculine (qui à la différence des femmes) a tellement plus de choix, se laissera séduire ou pas. (LJ)


LAUR’LOGE

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Focus sur la Haute Jo

Diamond Outrage d'Audemars Piguet

Le fracas d'une allure, l'autorité d'un style... En matière de montres de Haute Joaillerie, les attentes culminent et rejoignent les sommets de la Haute Couture. Voici quelques uns des coups de cœur de Laur'loge, mais d'autres pièces sublimes auraient aussi mérité d'être sous le feu des projecteurs. Les papillons étaient à l’honneur et déclinés avec le talent que l’on sait chez Van Cleef & Arpels, en particulier sur la Lady Arpels Papillon Automate. Par la grâce de sa complication poétique, le papillon posé sur le cadran vit au rythme de la personne qui porte la montre et bat des ailes à l’unisson de son activité. Alors que la nature a attribué aux ailes des papillons la fonction de capter l’énergie du soleil, le lépidoptère selon Van Cleef & Arpels fait aussi office de réserve de marche. Pour exceptionnelle que soit cette pièce dotée de quatre brevets, je lui ai préféré la montre Heure Marine de la collection Seven Seas, bijou éblouissant. Toutes mes tentatives pour capturer (à travers la vitrine et avec un smartphone…) la montre à secret Caméléon de Cartier sont restées vaines. Cette pièce de haute joaillerie à l’architecture anthropomorphique est pour moi la plus belle illustration du savoir-faire de Cartier.

Choix des pierres, volumes, jeu de transparences, couleurs inouïes, cette montre à secret est époustouflante. Elle aurait mérité d’être photographiée à l’instar de cette autre pièce, également renversante. Il fallait au moins ce hérisson de diamants et de saphirs bleus pour clore en apothéose la trilogie proposée par Audemars Piguet. Débutée avec la pièce Diamond Punk, suivie de Diamond Fury, la Diamond Outrage réussit le tour de force d’évoquer les hivers glacés de la Vallée de Joux, berceau de la Manufacture Audemars Piguet, et les codes insensés (et inégalés) de feu Alexander Mc Queen. Autre ovni, la Flower Power de Urwerk et sa fleur de lotus au centre d’un tableau… bucolique selon les termes de la Maison. Vu comme ça, le steampunk peut commencer à se faire du souci car on pressent que la tendance pastorale hype a de beaux jours devant elle… (LJ)

Monstres sacrés liée au féminin qu’elle en devient organique», explique Victoire de Castellane, Directrice Artistique de la joaillerie Dior.

Monstre - du latin monstrum: prodige. Sacré - qui a pour objet le culte de(s) Dieu(x). Monstre sacré locution inventée par Jean Cocteau à propos de Sarah Bernhardt. S'emploie lorsque le talent est immense. par

Laurence Janin, laurloge.com

L’expression est puissante, violente même. Elle désigne d’abord des acteurs hors du commun à l’aura éternelle comme Bogart ou Brando. Puis elle s’est étendue à d’autres registres. Ainsi cette rencontre historique en 1969 quand le magazine Rock’n Folk réunit autour d’une table ronde les trois monstres sacrés de la chanson française, Georges Brassens, Jacques Brel et Léo Ferré. C’est désormais dans le monde de l’art que les «giants», tiède adaptation anglaise de notre fière expression, se multiplient. Damien Hirst, Yayoi Kusama, Jeff Koons, Lucian Freud… Un nom = une image, un ressenti, une saveur presque tant leurs univers respectifs sont denses et chargés (en adrénaline, en fureur, en messages).

Et puis il y a des marques, plus joliment désignées sous le terme de Maisons, qui atteignent parfois à ce statut. Avec elles nous entretenons un rapport quasi passionnel. Leur sémantique tisse un langage qui ne semble destiné qu’à nous. Leur histoire a l’étoffe d’une mythologie contemporaine connue sur le bout des doigts. J’en veux pour preuve ce cours que je donnais dans le cadre d’un Master Luxe, sous l’égide de l’expert Mark Schumacher. A mes étudiants (de 20 à 40 ans) venus de plusieurs continents, il me suffisait souvent d’un mot pour qu’ils devinent la marque appartenant à cette galaxie d’un autre type. Orphelinat? Chanel! Chanel bien sûr, of course, naturalmente! C’est bien d’un monde à part qu’il s’agit avec une liturgie fondée sur la

Chanel

Dior Exquise Opal

performance des savoir-faire poussée au paroxysme, le désir (chez Chopard), la folie (selon Dior), le génie (de Chanel).

Chopard Chez Chopard, le Queen of Kalahari, un diamant de 342 carats d’une couleur parfaite et d’une pureté absolue a donné lieu à un ensemble de 23 diamants – The Garden of Kalahari – et des pièces divines.

Dior «Pierre mystère, empreinte de croyances. Pierre univers reflétant l’origine des mondes. Pierre narrative qui convoque la rêverie… L’opale, pierre poétique entre toutes «invite au conte, à la magie. Quand je la regarde, je vois la terre de loin, les océans, les archipels, les reflets des étoiles sur les flots… Je la vois comme la pierre de la nature par excellence, une pierre tellement

Vertigineuse, la Première Camélia Squelette de Chanel est animée par le deuxième mouvement in-house de la Maison dont la géométrie aérienne dessine une fleur de Camélia, la fleur préférée de Coco, comme nul n’est censé ignorer. Mademoiselle Privé décor Aubazine rend, elle, un hommage appuyé à l’un des piliers du mythe fondateur de la styliste qui fut envoyée à un jeune âge à l’abbaye cistércienne d’Aubazine en Corrèze. Là, comme le raconte l’écrivaine Edmonde CharlesRoux, il n’existe «pas un ornement sur ces murs, pas une figure sculptée. Les seuls facteurs de beauté sont les volumes, la seule richesse celle de la pierre nue, le seul génie, celui des proportions». C’est sur ce terreau austère qu’est né le style Chanel dont la dramaturgie sert merveilleusement l’horlogerie.


DOSSIER «MOINS»

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Ludwig Oechslin, Dr Less loge j'ai développé mes propres outils mathématiques, outils qui m'ont permis par la suite de développer de nouvelles constructions potentielles. Devoir tout recalculer et reconstruire selon une mécanique préétablie oblige à de profondes réflexions. Et grâce à l’analyse, j’ai pu retrouver des idées perdues qui sont devenues aujourd’hui des idées novatrices.»

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La Trilogie

par

Pierre Maillard

Quand on parle à Ludwig Oechslin de «simplification», il nous corrige aussitôt: «Mon but en-soi n’est pas la simplification pour elle-même mais de faire des montres utiles, fiables, précises et qui fonctionnent à long terme. Réduire le nombre de pièces, donc simplifier le mouvement, permet d’atteindre ce but. En augmentant le nombre de composants, on accumule des possibilités de fautes. Certains paramètres deviennent tout simplement incalculables, notamment en ce qui concerne les problèmes de friction. Mathématiquement, la précision est calculable. Physiquement, elle est relative. A mes yeux, la fonctionnalité prime sur la beauté et sur le nombre de composants accumulés. Mon horlogerie est le contraire de tout ce que fait la Haute Horlogerie.» PUBLICITÉ

Dr Ludwig Oechslin est un personnage atypique parmi les grands horlogers de notre temps. D’une certaine façon, cet ex-conservateur du Musée International d’Horlogerie de La Chaux-de-Fonds (MIH) ressemble à ces hommes de la Renaissance pour qui les frontières entre les différentes disciplines n’existaient tout simplement pas. Qu’on en juge: après des études et une licence en sciences antiques, grec, latin et archéologie, il mène de front un apprentissage d’horloger tout en étudiant «en autodidacte» la mathématique, l’astronomie et la mécanique. Il trouvera aussi le temps d’étudier la physique théorique dans la philosophie des sciences et passera un doctorat à l’Ecole Polytechnique de Zürich avec une thèse portant sur «les prêtres astronomes mécaniciens.» «Mais ce qui a été fondamental pour moi, nous détaille-t-il, est l’analyse

Directement issue de ces recherches, la première réalisation de Ludwig Oechslin, présentée en 1985, marquera durablement les esprits. En compagnie de son maître-horloger Jörg Spöring, de Lucerne, il construit en 1981 une horloge astrolabe. Rolf Schnyder, qui venait de reprendre Ulysse Nardin, lui demande d’en faire une montre bracelet. Ce sera L’Astrolabium Galileo Galilei, avec son mouvement entièrement basé sur des épicycloïdes et qui indique la position du soleil, de la lune et des étoiles dans le ciel à n’importe quelle heure donnée. Sans oublier l’indication du lever et du coucher du soleil et de la lune, les phases de lune, les éclipses du soleil et de la lune, le mois et le jour de la semaine. Le tout dans une montre de 40 mm de diamètre pour une épaisseur, glace comprise, de 12,8 mm. Et une exactitude de 144'000 ans. Du jamais vu.

«Mes pièces semblent simples, mais le parcours intellectuel pour construire simplement est d’une grande complexité. Faire simple, ce n’est pas simplifier. C’est par exemple imaginer qu’une seule pièce puisse accomplir trois tâches différentes et résoudre trois problèmes.» que j’ai dû effectuer de l’horloge de Farnese du Musée du Vatican. C'est une horloge extraordinaire, très compliquée, avec des rouages épicycloïdaux sur plusieurs niveaux. Ce qui est fascinant c'est que Bernardo Facini, le constructeur de l'horloge farnésienne n'avait pas tous les outils mathématiques nécessaires aux calculs de ces rouages, une bonne partie de son travail était donc empirique. En travaillant sur cette hor-

Vont s’ensuivre deux autres montres qui, avec l’Astrolabium, formeront une Trilogie astronomique: la Planétarium, «plus simple mécaniquement, car les 5 planètes tournent sur un seul axe avec une précision de quelques milliers d’années, mais plus compliquée mathématiquement» puis la Tellurium, qui utilise le principe d'un dôme coloré montrant la partie éclairée de la Terre. «Mais il fallait trouver une solution extrêmement fine pour le cadran d'une montre. J'ai eu l'idée d'un fil qui pouvait se déformer grâce à 2 points de torsion aux extrémités. La Lune est montée sur un épicycloïde de telle sorte qu'elle regarde toujours le soleil.» Mais au-delà de ces performances astronomiques, la quête de fiabilité dans laquelle s’est lancé Ludwig Oechslin trouve un de ses aboutissements dans la Perpetual Ludwig que l’horloger crée pour Ulysse Nardin en 1996. Délaissant les traditionnels leviers au profit de l’uti-

lisation exclusive de roues et d’engrenages, il parvient à éliminer tout risque de mauvaise manipulation qui jusqu’alors était le risque majeur couru par un Quantième perpétuel. La «simplification» opérée est bel et bien au service de la fiabilité. S’ensuivra encore pour Ulysse Nardin la géniale Freak, apparue en 2001. Son nouvel objectif, qui lui a demandé dix ans de travail, est alors de réaliser «un échappement plus simple et plus fiable que l'échappement à ancre. J'y suis parvenu grâce à un échappement entièrement symétrique: les 2 roues donnent la même impulsion à une toute petite pièce centrale. C'est très simple du point de vue théorique par rapport aux angles complexes de l'échappement à ancre. La construction en est facilitée et la fiabilité aussi. D'autre part il y a très peu de friction, ce qui rend inutile l'huilage. Pour cet échappement, nous avons utilisé le silicium: il fallait en effet un matériau très résistant et très léger pour diminuer l'inertie». Cet échappement est monté sur un carrousel qui fait un tour en une heure. «Et tout est épicycloïdal, à l'exception du barillet qui fait toute la face postérieure de la montre et assure une réserve de marche de huit jours. On remonte le mouvement grâce à une lunette à l'arrière de la montre et on la met à l'heure grâce à la lunette à l'avant de la montre.» Il suffisait d’y penser, mais «penser» ainsi n’est pas donné à tout le monde.

Simplification radicale De 2002 à 2014, Ludwig Oechslin a dirigé et a été le conservateur du Musée International d’Horlogerie de La Chaux-de-Fonds. A son départ d’Ulysse Nardin, il avait laissé à la marque toutes les nombreuses idées développées alors que, dans le domaine horloger, il travaillait exclusivement pour la marque. Parmi celles-ci, une idée allait donner naissance à la montre MIH qui a pu être produite car Rolf Schnyder en avait généreusement cédé les droits. «Je voulais faire une montre vraiment utile, avec un calendrier réunissant sur une seule ligne le jour, la date et le mois. Ça n’existait que sur des montres de poche de Patek Philippe. Il me fallait trouver une solution pour que ça soit grand, très lisible. J’ai déplacé la ligne sur le côté car au centre ce n’était pas possible. Ainsi est né mon calendrier annuel…» Mais Oechslin a encore bien d’autres envies. «Au cours de mon mandat auprès d’Ulysse Nardin, j’avais proposé beaucoup de choses à Rolf Schnyder, dont certains projets qu’il estimait ‘trop simples’ pour sa marque. Il a accepté de libérer ce potentiel pour que je puisse l’utiliser ailleurs.» C’est ainsi qu’est née la marque Ochs und Junior. Avec pour la première fois sa propre marque, Oechslin va dès lors pouvoir développer en pleine liberté toutes ses idées de «simplification» technique et de lisibilité optimale.


DOSSIER «MOINS»

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CALENDRIER PERPÉTUEL Pour son Calendrier Perpétuel, dont l’affichage analogique par trous est identique à celui du Calendrier Annuel, Oechslin est parvenu à une «simplification extrême» avec seulement 9 composants additionnels et 3 composants modifiés. Cette réduction drastique signifie une baisse considérable des interactions entre les composants et donc une fiabilité supérieurement accrue. Par ailleurs, le réglage du Calendrier Perpétuel ne s’opère plus par un système traditionnel de poussoirs mais en utilisant tout simplement la couronne. La date est ainsi ajustable dans les deux sens. L’assemblage du Calendrier Perpétuel ne prend que 23 minutes.

CALENDRIER ANNUEL Le but d’Oechslin est non seulement technique, passant par la réduction maximale du nombre de pièces, mais aussi fonctionnel et ergonomique en offrant la plus simple et plus directe façon d’afficher les indications calendaires. Ici, pour son Calendrier Annuel, les «trous» aménagés dans le cadran servent d’indicateurs analogiques: 31 trous sur le pourtour pour l’indication de la date, 7 trous à 6h pour l’indication du jour de la semaine et 12 trous à 12h pour l’indication du mois. L’ajustement de la date se fait une fois par an, le 1er mars. Techniquement, Oechslin est parvenu à concevoir le mécanisme de ce calendrier annuel avec seulement 5 composants (contre environ 150 usuellement).

PHASE DE LUNE Une même simplification technique extrême a été apportée par Oechslin à la fonction phases de lune (avec une précision de 3,478.27 années) tout en proposant une lecture immédiate et quasiment didactique du jeu entre Terre, Lune et Soleil. Le centre de la montre représente la Terre et le disque doré à 12h représente le Soleil. La pleine lune est quand la Lune est positionnée à 6h, opposée à la Terre et au Soleil. La nouvelle lune est quand la Lune est cachée entre la Terre et le Soleil à midi. Elle est alors représentée par un disque noir à 6h. De plus, les 31 trous indiquent la date.


DOSSIER «MOINS»

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Une seconde foudroyante, dont l'aiguille fait moins de 1 mm, tourne à l'intérieur même du mouvement. On peut la voir à travers un orifice doté d'une loupe et positionné sur les flancs de la boîte.

Au-delà de la miniaturisation... Greubel Forsey Mechanical Nano Le nano est la prochaine frontière de l’horlogerie. Depuis quelques années déjà, des marques explorent cette piste prometteuse dans leurs centres de R&D. C’est le cas de Greubel Forsey qui, depuis dix ans au sein de son EWT Laboratory, oeuvre « dans le plus grand secret » à repousser les limites de la miniaturisation. Greubel Forsey vient de brûler la politesse à tous les autres en dévoilant au cours du dernier SIHH quelques unes de ses avancées théoriques et en faisant entrevoir une petite seconde foudroyante haute d’à peine un millimètre qui tourne follement… à l’intérieur du boîtier. par

Pierre Maillard

Sur le papier, les avancées que permettrait l’approche nanométrique de l’horlogerie sont spectaculaires et augurent de profonds bouleversements. Qu’on en juge à ces avantages mis en avant par Greubel Forsey à la suite de leurs recherches fondamentales: • Gain d’espace volumique allant jusqu’à 90% en plus de volume à disposition • Gain en énergie avec une diminution de la consommation supérieure à 60 fois • Simplification des mécanismes, jusqu’à trois fois moins de composants nécessaires (dans le prototype 2016) • Inventivité renouvelée et nouvelles compositions générées.

De visu, on a déjà été autorisé à admirer à travers la loupe intégrée dans les flancs du boîtier la folle nano-aiguille foudroyante marquant les 8ème de seconde logée au cœur de la montre. Véritablement bluffant. «Gagner à ce point en énergie et gagner en place nous ouvre des voies jusqu’à présent inédites», nous explique Stephen Forsey. «En économisant la consommation énergétique jusqu’à 60 fois, on parvient à des réserves de marche qui vont, à ce stade de nos recherches, jusqu’à 180 jours, avec un barillet de taille normale. De plus, nous pouvons utiliser l’énergie produite par les turbulences de l’air interne, les «courants d’air» deviennent fonctionnels. Une roue à propulsion peut ainsi fonctionner avec une énergie de 20 nano-newton, soit 100'000 fois moins que l’énergie nécessaire à mouvoir un mobile d’échappement.» Contrairement à ce qu’on pourrait penser, travailler à l’échelle nanométrique (il y a un milliard de nanomètres dans un mètre) ne signi-

fie pas du tout travailler avec les mêmes composants, en plus petits. Bien au-delà de ce qui serait une «reproduction» micrométrique, passer de l’échelle du dixième et du millième à celle du milliardième permet de repenser toute la distribution énergétique et spatiale d’un mouvement. L’espace ainsi dégagé – un espace considérable à l’échelle d’un mouvement de montre – permet d’envisager des fonctions inédites. Lesquelles, au juste? «C’est un espace qui s’ouvre, répond Stephen Forsey, et qui nous oblige à penser: que faire de ce volume? C’est une véritable Terra Incognita. Nous y avons déjà implanté un indicateur de fréquence mais après? Les perspectives créatives et fonctionnelles sont proprement inouïes.» Greubel Forsey dévoilera au cours de 2017 et 2018 l’évolution de ses recherches implémentées dans deux prototypes. Quant à la réalisation du premier garde-temps Mechanical Nano, elle est promise dans «un avenir proche».

Nano roue à propulsion fonctionnant grâce aux turbulences de l'air internes au mouvement.

Barillet, Nbr/tr: 14.70 • ø 35 mm •

MONTRE (MOUVEMENT) CONVENTIONNEL 3 jours de réserve de marche

Barillet, Nbr/tr: 14.70 • ø 35 mm • Zone du mécanisme • mechanical nano

MONTRE (MOUVEMENT) MECHANICAL NANO 180 jours de réserve de marche, gain en volume: + 90%


DOSSIER «MOINS»

EUROPA STAR PREMIÈRE | 25

Moins de stress, plus d'émotion Slim d’Hermès L’Heure Impatiente par

Pierre Maillard

La façon de décompter l’heure transforme notre perception du temps. La vision d’un sablier qui s’écoule n’est pas comparable à celle d’un chronographe qui décompte les secondes. Un sablier rend visible à la fois le temps écoulé et le temps qu’il nous reste, matérialisé par le sable qui attend encore de passer par le petit trou du temps. A l’intérieur d’un sablier, passé, présent et futur cohabitent. Avec son Temps Suspendu, puis son Heure Masquée, Hermès nous a habitués à composer avec le temps en suspendant la marche des aiguilles ou en jouant avec lui une partie de

cache-cache. Avec sa toute nouvelle Heure Impatiente, Hermès complète brillamment ce qui est désormais une trilogie unique en son genre. «Plutôt que de mesurer, séquencer, contrôler, nous préférons jouer avec d’autres temps, susciter des émotions, ouvrir des parenthèses dans le temps, créer des espaces poétiques. Nous aimons faire des pas de côté par rapport à l’horlogerie, être en décalage. Nous aimons la fantaisie, la légèreté, le jeu, la liberté. Sans esprit de sérieux, mais en faisant les choses sérieusement,» explique Laurent Dordet, CEO de La Montre Hermès. L’intuition de L’Heure Impatiente revient à Philippe Delhotal, direc-

teur développement et création. Se souvenant de son impatience d’enfant dans l’attente d’une promesse ou, plus tard, des battements de cœur qui précèdent un rendez-vous amoureux, il a sorti son crayon et dessiné sur le champ son idée. Une montre qui indique un décompte de 60 minutes avant de doucement tinter à l’heure dite. Comme un petit sablier de poignet. Le tout sur un cadran simple, pur, essentiel. «Ça lui a pris deux minutes et à moi 5 ans», rit Jean-Marc Wiederrecht, complice d’Hermès pour ses pièces les plus poétiques. « C’était du jamais vu. Et il fallait le loger dans un boîtier standard de Slim qui, au final, prendra 8/10ème de plus. Un petit

cadran pour régler l’heure du rendez-vous, réglable par poussoir, et un décompte par aiguille de 60 minutes, activable par un autre poussoir. Sans oublier une sonnerie de 1 ½ seconde. Il fallait réussir à produire un son à une heure dite avec une énergie qui ne provienne que du seul mouvement. Il fallait lui demander cette énergie sans perturber sa marche. Nous avons imaginé un ressort-boudin précontraint qui, grâce à une came concentrique de 360°, accumule l’énergie pendant une heure et la relâche à l’heure dite. Il fallait aussi trouver la forme et la matière du timbre, laisser un maximum d’air autour du mouvement pour la qualité du son. La difficulté a

été surtout de résoudre l’équation en la simplifiant au maximum.» Certains, insensibles à cette vision du temps, parleront peut-être de complication «inutile». Mais il est fort à parier que leurs porteurs l’utiliseront plus souvent que les porteurs de chronographes n’utilisent leur complication «utile». Pour les uns le temps se décompte, pour les autres il s’écoule.

Slim d’Hermès L’Heure Impatiente


DOSSIER «MOINS»

26 | EUROPA STAR PREMIÈRE

Tendance Slim par

Pierre Maillard

S’il fallait une démonstration que le temps est cyclique, les flux et reflux des tendances pourraient nous servir de marqueurs. Après une décennie qui a vu les montres augmenter sans cesse de taille, les voici qui diminuent à nouveau, en diamètre comme en épaisseur. Le slim, le mince, l’extra-plat sont désormais à nouveau tendance, comme il l’ont déjà été par le passé. En 1976, par exemple, la couverture d’Europa Star était dédiée à Jean Lassale, qui venait de sortir «la montre la plus plate du monde», avec un mouvement à remontage mécanique de 1.2 mm d’épaisseur, 2.00 mm en version automatique.

Bulgari Octo Finissimo Tourbillon Squelette Avec sa minceur record de 1.95 mm, le calibre Bulgari BVL 268 Finissimo Tourbillon est et reste le mouvement tourbillon le plus plat au monde. Aujourd’hui intégralement squelettisé et visible des deux faces, il révèle au grand jour quelques uns des «secrets» qui ont permis à Bulgari de parvenir à une telle minceur. La cage de son tourbillon volant est entraînée par un mécanisme périphérique monté sur roulements à billes, ce qui permet de considérablement diminuer la hauteur totale du mouvement. Son étonnante réserve de marche de 62 heures, pour un mouvement extra-plat, est due à une innovation qui fait aussi appel à des roulements à billes: le ressort de barillet est à bride glissante et le barillet lui-même est maintenu par trois roulements à bille, ce qui permet de doubler la hauteur du ressort et gagner ainsi «plus de 80% de réserve de marche.» L’Octo Finissimo Tourbillon Squelette vient couronner la collection Octo Finissimo, après la Répétition Minutes exceptionnelle présentée l’année dernière, équipée du Calibre BVL 362 qui «culmine» quant à lui à 3.12 mm. Avec ces deux pièces, Bulgari s’inscrit avec panache dans la longue saga des montres extra-plates.

Vacheron Constantin Patrimony Quantieme Perpetuel Parmi les grandes marques horlogères, Vacheron Constantin possède de très sérieuses références dans le domaine de l’extra-plat, notamment avec son calibre 1003 sorti en 1955. Certifié du Poinçon de Genève, ce mouvement à remontage manuel était, au moment de sa sortie, le plus plat du monde, avec 1,64 mm d’épaisseur (l’équivalent d’une pièce de 20 centimes suisse), soit 0,44 mm de plus que le calibre 1200 de Jean Lassale, présenté 21 ans plus tard. Cet historique dans la finesse de Vacheron Constantin remonte en fait à bien plus loin, à 1931, quand Vacheron Constantin a présenté la montre de poche la plus plate de tous les temps, avec un mouvement de 0.90 mm. Mais à de telles tolérances, l’exercice devient très équilibriste. Le dernier descendant de cette longue fréquentation de Vacheron Constantin avec les millimètres, leurs dixièmes et leurs centièmes, est le calibre automatique 1120 QP, qui affiche 4.05 mm d’épaisseur. Une magnifique performance de miniaturisation et de fiabilisation pour une construction « classique » (une approche traditionnelle, «patrimoniale», à l’opposé de la démarche d’un Ludwig Oechslin exposée ci-avant). Affichant heures, minutes, quantième perpétuel – jour de la semaine, date, compteur 48 mois avec indication bissextile) et phase de lune, la Vacheron Constantin Patrimony Quantième perpétuel, une fois emboîtée, fait 8.90 mm d’épaisseur.

Europa Star, édition avril 1976

A l’époque, Gilles Baillod, rédacteur-en-chef de l’Impartial et grand connaisseur de l’horlogerie, écrivait: «On n'attendait plus guère dans le domaine de l'horlogerie mécanique d'invention à inscrire dans la ligne des découvertes. Et pourtant! Lors de la Foire de Bâle d'avril 1976, un inconnu, ou presque, du milieu horloger présentait une nouveauté qui capta l'attention des techniciens et des stylistes: il s'agissait d'un mouvement si plat qu'il défiait les règles logiques de la mécanique horlogère avec 1,2 millimètre d'épaisseur. Ce calibre est une construction ingénieuse autant qu’audacieuse. Il présente un grand nombre de solutions nouvelles qui pourraient intéresser l’ensemble de la production horlogère mais évidemment pas dans l’épaisseur de 1,2 millimètre…» Imaginé par l’horloger Pierre Mathys, ce mouvement est révolutionnaire sur de nombreux points mais notamment par un de ses aspects particuliers: pour la première fois, chaque élément du rouage tourne sur un seul palier chassé dans un roulement à billes, lui-même solidaire de la platine dont l’épaisseur devient celle du mouvement lui-même. La marque Jean Lassale va néanmoins connaître des difficultés, va être reprise par Seiko en 1979 (Seiko brûlant la politesse à Omega) mais les brevets du calibre 1200 et du calibre 2000 vont finir chez Nouvelle Lemania. Lemania les livrera en exclusivité à Piaget, puis, Cartier ayant pris le contrôle de Piaget, Lemania les fournira aussi à Vacheron Constantin. Aujourd’hui, le slim fait son grand retour.

Piaget Altiplano Piaget n’a pas attendu le mouvement 1200 de Jean Lassalle pour se lancer dans l’extra-plat. Dès 1957, la maison présente à Bâle son calibre 9P à remontage manuel qui culmine à 2.00 mm (soit 0.8 mm de plus que le futur 1200 de Lassale). Trois ans plus tard, en 1960, le 12P fait son apparition: un calibre automatique de 2.3 mm, une finesse rendue possible par l’utilisation d’un micro rotor excentré. Une performance justement saluée à l’époque. Cette maîtrise de l’extra-plat, conjuguée à une grande ouverture de cadran, permet à Piaget de développer un style particulièrement élégant et dépouillé qui s’impose internationalement, traversant notamment les colorées années 70 en se déclinant dans des versions avec cadrans de pierres semi-précieuses. En 2014, à l’occasion de ses 140 ans, Piaget présente l’Altiplano 900P à la construction inversée mettant en scène ponts et rouages du côté du cadran. Et cette année, à l’occasion des 60 ans de l’aventure de Piaget dans l’extra-plat, la marque présente toute une série de nouvelles déclinaisons slim. Parmi celles-ci, retenons l’Altiplano Tourbillon Haute Joaillerie, rare exemple d’un tourbillon logé dans une montre extra-plate. Le mouvement qui l’anime, le 670 P à remontage manuel, est d’une épaisseur remarquable de 4.6 mm. La cage du tourbillon ne pèse que 0,2 g.

FABERGÉ VISIONNAIRE DTZ


DOSSIER «MOINS»

EUROPA STAR PREMIÈRE | 27

Cartier Drive Extra-Plate Avec une épaisseur totale de 6.6 mm, soit 40% plus fine que sa version automatique précédente, la Cartier Drive Extra-Plate est d’une élégance qui ne se discute pas. Cette finesse a pu être atteinte grâce au mouvement à remontage manuel 430 MC. Avec ses 131 composants, ce même calibre équipait déjà la très fine – 5.1 mm d’épaisseur totale – Tank XL extra-plate sortie en 2012.

Audemars Piguet Royal Oak Extra-Thin

Citizen Eco-Drive One

Le calibre 2121 qui équipe cette nouvelle AP Royal Oak Extra-Thin est le secret caché derrière la mythique Royal Oak, lancée en 1972. Car contrairement à ce qu’on pourrait croire, la robustesse apparente du design de Gérald Genta pour la première Royal Oak exigeait un mouvement automatique extra-plat. Mais ce calibre n’a pas surgi de nulle part. Il a été précédé d’une longue histoire de rivalité et de collaboration entre Audemars Piguet, Jaeger-LeCoultre et Vacheron Constantin. Sa lignée remonte à 1921, quand Audemars Piguet introduisit un mouvement de montre de poche de 1.32 mm d’épaisseur, en réponse à celui de 1.38 mm introduit par JaegerLeCoultre en 1907. S’ensuivit en 1953, le calibre 2003, mis au point en collaboration par le trio, puis, en 1967, le premier calibre automatique, le 2020, de 2.45 mm, conçu avec un quatrième partenaire, Patek Philippe. Son descendant, le 2121, d’une minceur de 3.05 mm, lancé par Audemars Piguet de 1972, est aux racines de la saga Royal Oak. Une saga que vient aujourd’hui mettre en lumière – en or jaune – cette nouvelle édition extra-thin motorisée 2121.

Record battu! Emboîtée, l’Eco-Drive One mesure un très mince 2.98mm, ce qui en fait sans contestation la montre quartz à énergie solaire la plus plate au monde. Pour parvenir à ce résultat spectaculaire – et d’une très grande élégance – les ingénieurs de Citizen ont conçu un mouvement de 1.0 mm. Pour y parvenir, ils ont dû redessiner tous les composants et, en ce qui concerne le boîtier, utiliser de nouveaux matériaux, comme le cermet, un composé de céramique et de métal. La lunette est faite de «binderless cemented carbide», qui est d’une grande dureté et est insensible à l’oxydation. Mais le but était surtout de parvenir, grâce à cette minceur extrême, à créer une montre qui soit avant tout belle. «La technologie existe pour magnifier la beauté. C'est ainsi que nous l'entendons.», déclarait Toshio Tokura, le haut responsable de la marque japonaise.

Movado Ultra Slim Créée en 1947 par le désormais célèbre Nathan George Horwitt, la Museum, à plus de 70 ans, n’a pas pris une ride. Elle est restée le symbole absolu de la rigueur et de la simplicité stylistique. Brillamment réinterprétée en 2016 par le designer Yves Béhar qui a accompli cette délicate tâche en osant lui donner une forme concave, elle a pris cette année un nouveau tour, celui de la finesse. Avec sa mince taille de 6.3 mm d’épaisseur, elle se montre plus essentielle que jamais.

Jean Marcel Nano 3900µ Briser la «frontière magique» des 4 mm, telle est le défi que s’est lancé Jean Marcel après le succès de sa collection précédente, l’Ultraslim qui plafonnait à 4.5 mm. Défi relevé après bien des efforts d’ingénierie avec un boîtier que culmine à 3.9 mm. D’où le nom de baptême Nano 3900µ. Résistante à 3 ATM, équipée d’un verre saphir, arborant un visage simple et sobre, la collection Nano est parmi les plus slim au monde.

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ROBOTIQUE

28 | EUROPA STAR PREMIÈRE

Automatisation horlogère: face à l’obsolescence programmée de l’homme

par

Pierre-Yves Schmid, Eurotec

L’Encyclopédia Universalis définit l’automatisation comme l’action consistant à rendre automatiques les opérations qui exigeaient auparavant l’intervention humaine. On peut donc voir dans cet objectif primaire une certaine noblesse puisque ce principe visait notamment à réduire la répétitivité, la pénibilité et la dangerosité des tâches confiées aux ouvriers. Au fil du temps, ces valeurs ont peu à peu cédé leur place à des considérations plus mercantiles, l’industrie ayant vite compris les avantages qu’elle pouvait tirer d’une automatisation à grande échelle: réduction des temps de production, diminution des besoins en main-doeuvre, augmentation de la productivité et des profits.

De formidables avancées... et un impact social immense

En s’alliant à la digitalisation, l’automatisation de la production est tout simplement le bouleversement le plus rapide qu’ait connu l’horlogerie depuis son passage de l’artisanat à l’industrie. Mais comme bien des technologies vouées à améliorer le sort de l’homme, elle risque de se retourner contre lui, rendant son intervention de plus en plus obsolète. Un effet pervers dont les entrepreneurs et responsables politiques commencent à prendre la mesure réelle...

C’est là tout le paradoxe de l’automatisation: elle a d’une part permis d’améliorer de manière incontestable la vie de millions de travailleurs tout en contribuant d’autre part à la perte massive d’emplois. Ce grand écart n’a cessé de grandir au cours des différentes révolutions technologiques de ces cinquantes dernières années et l’arrivée de la robotique, rendue possible grâce à l’informatique et aux capteurs, a encore amplifié le phénomène. Ce nouveau partage du travail, souvent déséquilibré, entre l’homme et la machine ne va pas sans poser de grandes questions de société, à tel point que certains gouvernements de pays industrialisés envisagent désormais d’imposer une taxe sur les robots afin de financer la formation et la reconversion des employés qu’ils auront poussés vers la sortie.

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AGENDA

EUROPA STAR PREMIÈRE | 29

L’AUTOMATISATION, DÈS L’ANTIQUITÉ Quelques grandes étapes ont marqué l’histoire de l’automatisation, bien avant même l’apparition de l’industrie. Au 1er siècle après J.-C., le mathématicien Héron d’Alexandrie construit ainsi de nombreux systèmes automatiques fonctionnant à l’énergie hydraulique. Au 17ème siècle, Wilhelm Schickard, scientifique allemand, développe la première machine à calculer, suivi une vingtaine d’année plus tard par Blaise Pascal. La première application de l’automatisation à l’industrie voit le jour en 1793, lorsque le mécanicien français Joseph-Marie Jacquard automatise un métier à tisser en utilisant des cartes perforées pour séquencer les opérations. A partir de là, l’automatisation industrielle se généralise. Soutenue au début du 20ème siècle par l’introduction de nouvelles méthodes de travail comme le taylorisme, elle aboutit à une révolution dans l’approche de l’activité de production dont l’un des exemples emblématiques furent les chaînes de montage des usines Ford.

Bientôt 700 métiers complètement automatisées? Car il faut bien en être conscient, l’automatisation est aujourd’hui absolument partout. On parle évidemment de l’industrie, mais de plus en plus également de domotique (mélange d’automatisme, d’informatique, d’électronique et de télécommunications pour le contrôle à distance des sytèmes d’une maison), d’autonomisation grandissante des véhicules et même désormais de l’automatisation des métiers administratifs, comptables et de gestion. Des chercheurs de l’Université d’Oxoford ont en effet identifié quelque 700 métiers susceptibles d’être à terme occupés par des machines dotées d’intelligence artificielle. A court terme, l’une des grandes responsabilités de l’homme sera donc de s’imposer des limites afin d’éviter que l’un des apports majeurs au bienêtre des travailleurs ne se tranforme en fossoyeur de l’activité humaine.

En horlogerie, l’apogée d’une épopée industrielle L’automatisation de certaines opérations est étroitement liée à la forte concurrence que les fabricants américains opposaient aux horlogers suisses à la fin du 19ème siècle. Grâce à des commandes publiques (chemin de fer, armée, etc), les volumes produits aux Etats-Unis ne laissaient que peu de place sur le marché pour les montres suisses. La soudaine chute des exportations vers l’Amérique fait alors prendre conscience à l’industrie horlogère suisse de son manque de capacité de production. Par la suite, les deux guerres mondiales forcent les Etats-Unis à concentrer leur industrie de production sur l’armement, mettant de côté l’horlogerie notamment. La Suisse profite alors de cette période pour rattraper son retard en moyens de production automatisés et renonce, parfois à contre-cœur, au système assez répandu de travail à domicile en faveur du travail en usine.

Vente aux enchères

Les sous-traitants horlogers, forts acteurs de l’automatisation Aujourd’hui, l’automatisation horlogère a trouvé un partenaire de choix en l’informatique pour accroître encore la précision de ses opérations. Prenons l’exemple de la société Lécureux de Bienne: connue du monde horloger depuis 55 ans pour ses tournis électriques, elle a développé des coffrets de commande qui détectent automatiquement le tournevis connecté et utilisent ainsi les paramètres corrects. Cette innovation a permis d'améliorer sensiblement la précision et les durées de cycle possibles. L'ensemble des paramètres de vissage et de mesure peuvent être programmés exactement au vissage ou à la mesure souhaités, puis enregistrés via le coffret de commande ou l'interface PC intégrée. Grâce à la possibilité de mise en réseau de tous les postes et l'intégration virtuelle de tous les tournevis sur le serveur, la programmation peut se faire à distance. La sortie de statistiques ou l'enregistrement des paramètres et des résultats sur une carte SD permettent de répondre à une demande croissante de traçabilité durant toutes les opérations. Autre exemple avec la Smart Assembly Machine (SAM): grâce à son robot 6 axes, cette nouvelle machine se montre particulièrement flexible et rapide pour des opérations telles que l'assemblage de petits composants pour l'horlogerie, la pose de piles dans les mouvements quartz, la mise en bouclard, la palettisation, la manutention, le contrôle qualité ainsi que le chargement et déchargement de systèmes de mesure. De formidables avancées, donc! Mais qui posent encore et toujours une vaste question: demain, quelle place pour l’homme dans les chaînes d’opération digitalisées et automatisées? C’est cette interaction qui occupe et occupera de plus en plus l’agenda économique... et politique.

par

Marianne Bechtel

Les 18 et 19 mai 2017, l’hôtel Modern Times de St Légier, dédié à l’univers de Charlie Chaplin, sera l’écrin d’une vente aux enchères d’exception. La maison française Imperator Auction y organise sa première vente dans la région. Deux vacations seront organisées, dédiées à des objets de prestige horlogers, joailliers et d’art précieux. La vente sera diffusée sur Drouotlive PUBLICITÉ

Europa Star's Vernissage Lionel Deriaz et Philippe Loup Janvier 1999

et Invaluable ce qui permettra aux amateurs et collectionneurs du monde entier de la suivre en direct avec la salle. Les pièces joaillères exposées seront toutes composées de gemmes de qualité inestimable, signées Chopard, Cartier ou Piaget ainsi que d’autres pièces uniques, créées par des artistes ayant donné libre cours à l’expression de leurs rêves les plus fous. Plusieurs pièces horlogères, la plupart issues de collections privées, seront

réunies. C’est une véritable pléiade de plus de 6 siècles d’horlogerie qui sera mise aux enchères égrenant des noms tels que Patek Philippe, Breguet, Audemars Piguet, JaegerLeCoultre, ou encore Ellicott, Louis Moinet, Pierre DeRoche et autres artisans horlogers indépendants. Une importante collection de machines outils avec des pièces rarissimes du XVIIIème siècle sera également proposée à la vente, toutes dans un état de conservation parfaite. Si l’on devait mettre en exergue une pièce particulière, arrêtons-nous sur une pendule à automates et musique représentant une cage à oiseaux (Bautte&Moynier-Genève 1825-1830). Cette pièce unique que l’on pourrait qualifier de poésie horlogère est estimée entre 400'000.CHF et 600'000.- CHF. L’Art enfin sera dignement représenté à travers différents tableaux d’écoles suisses et françaises. Il faut citer également des pièces d’archéologie, d’art asiatique, de la verrerie et des bronzes Art Nouveau qui viennent enrichir l’exposition. Amateurs et collectionneurs, à vos marques. Hôtel Modern Times Chemin du Genévrier 20 1806 Saint-Légier-la-Chiésaz / Vevey Horaires, vacations et téléchargement du catalogue en ligne disponibles dès le 20 avril sur le site: www.montresetbijoux.ch


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Éditeur: Serge Maillard

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EUROPA STAR, MANUFACTURE ÉDITORIALE HORLOGÈRE DEPUIS 1927


ANNUAIRE DES HORLOGERS

ARGOVIE AIGNER Wallbach www.aignerworld.com CONTINENTAL Möhlin www.continental-watches.ch CRUISER Möhlin www.cruiser-watches.ch EVERSWISS Möhlin www.everswiss.ch HANOWA Wallbach www.hanowa.ch MONTEGA Remetschwil www.montegauhren.ch POLICE Wallbach www.policelifestyle.com ROAMER Möhlin www.roamer.ch BÂLE ALEXORA Bâle www.alexora.com CHARMEX Bubendorf www.charmex.ch CHRISTIAN JACQUES Bâle www.christian-jacques.com EMKA Binningen www.emka-watches.com EMPORIO ARMANI (Fossil) Bâle www.armani.com FOSSIL (Fossil) Bâle www.fossil.com GROVANA Tenniken www.grovana.ch JAQUET&GIRARD Binningen www.jaquet-girard.com ORIS Hölstein www.oris.ch REVUE THOMMEN Tenniken www.revue-thommen.ch SWISS ALPINE MILITARY Tenniken www.swissalpinemilitary.com SWISS MILITARY WATCH Liestal www.swiss-military.com SWISSPACE Tenniken www.swisspace.it ZEITCENTRALE TIMM DELFS Bâle www.zeitzentrale.ch ZENO WATCH Bâle www.zeno-watch.ch BERNE A.B.ART Bienne www.abartwatches.com ANGULAR MOMENTUM Ittigen www.angularmomentum.com ARMAND NICOLET Tramelan www.armandnicolet.com ARMIN STROM Bienne www.arminstrom.com ATLANTIC Lengnau www.atlantic-watches.ch AUGUSTE REYMOND Tramelan www.augustereymond.ch AZIMUTH Bienne www.azimuthwatch.com AZZARO La Neuveville www.azzaro-watch.com BALMAIN (Swatch Group) St-Imier www.balmainwatches.com BISSET Lengnau www.bisset.ch BOEGLI Moutier www.boegliwatch.ch BREMONT Bienne www.bremont.com CALVIN KLEIN (Swatch Group) Bienne www.calvinklein.com CANDINO (Festina Group) Bienne www.candino.com CATENA Corcelles www.montres-catena.com CENTURY Nidau www.century.ch CLARO WATCH Bienne www.clarowatch.com CODEX Bienne www.codexwatches.com CONCORD (Movado Group) Bienne www.concord.ch DAVIDOFF Bienne www.zinodavidoff.com DAVOSA Tramelan www.davosa.com DE BORTOLI Bienne www.debortoliwatches.com DELANCE Macolin www.delance.ch DELBANA Lengnau www.delbana-watches.ch DELMA Lengnau www.delma.ch DOXA Bienne www.doxa.ch EBEL (Movado Group) Bienne www.ebel.com EBERHARD & Co Bienne www.eberhard-co-watches.ch EPOS Lengnau www.epos.ch FORMEX Lengnau www.formexwatch.com FRANK JUTZI Wichtrach www.frankjutzi.com GEORGE J VON BURG Bienne www.gjvb.com GEVRIL Tramelan www.gevrilgroup.com GLASHUTTE ORIGINAL (Swatch Group) Bienne www.glashuette-original.com GLYCINE Bienne www.glycine-watch.ch HALDIMANN Thun www.haldimann-horology.ch HAMILTON (Swatch Group) Bienne www.hamiltonwatch.com HERMES Bienne www.hermes.com HORAGE Bienne www.horage.com HUGO BOSS Bienne www.hugoboss.com HUGUENOT Bienne www.huguenot.com INDUCTA Gwatt www.inducta.ch JAGUAR (Festina Group) Bienne www.jaguarwatches.ch JOVIAL Bienne www.jovial.ch L.LEROY Bienne www.montres-leroy.com LEON HATOT (Swatch Group) Corcelles / www.leonhatot.com LONGINES (Swatch Group) St-Imier www.longines.com MARANELLO Bienne www.rotapmaranello.com MAURICE LACROIX Bienne www.mauricelacroix.com MILLERET Bienne www.milleret.ch MILUS Bienne www.milus.com MOVADO (Movado Group) Bienne www.movado.com OGIVAL Bienne www.ogival-watch.com OMEGA (Swatch Group) Bienne www.omegawatches.com PERRELET (Festina Group) Bienne www.perrelet.com PIERCE Bienne www.pierce1883.com PIERRE JUNOD Bienne www.pierrejunod.com RADO (Swatch Group) Lengnau www.rado.com RESSENCE Bienne www.ressence.eu RODANIA Koeniz www.rodania.com RSW La Neuveville www.rsw-swiss.com SCUDERIA FERRARI OROLOGI (Movado Group) Bienne www.store.ferrari.com SECULUS Bienne www.seculus.ch

STROM Nidau www.stromwatch.ch STUHRLING ORIGINAL Bienne www.stuhrling.com SWATCH (Swatch Group) Bienne www.swatch.com SWISS MILITARY Moutier www.genuineswissmilitary.ch SWISS TIME Bienne www.swisstimeintl.com TALLER Bienne www.tallerwatch.ch THOMAS PRESCHER Twann www.prescher.ch TIFFANY & CO Bienne www.tiffany.com TRASER H3 Niederwangen www.traser.com UNION GLASHUTTE (Swatch Group) Bienne www. union-glashuette.com URBAN JÜRGENSEN Bienne www.ujs-chronometry.ch VASTO Tramelan www.vasto.ch VICTORINOX SWISS ARMY Bienne www.victorinox.com VOGARD Nidau www.vogard.com W. GABUS Bienne www.wgabus.com ZEITWINKEL St-Imier www.zeitwinkel.ch FRIBOURG BULOVA Fribourg www.bulova.com CARBON 14 Granges-Paccot www.carbon14.ch CARTIER (Richemont) Villars-sur-Glâne www.cartier.com CECIL PURNELL Belfaux www.cecilpurnell.com GUEPARD Fribourg www.guepard.ch JO SIFFERT Fribourg www.josiffert.com LINDE WERDELIN Fribourg www.lindewerdelin.com MAURON & MUSY Saint-Aubin www.mauronmusy.com SAINT HONORE Fribourg www.sainthonore.com VAN CLEEF & ARPELS (Richemont) Villars-surGlâne www.vancleefarpels.com GENÈVE AKRIVIA Genève www.akrivia.com ALAIN PHILIPPE Genève www.alainphilippe.com ALFRED DUNHILL (Richemont) Genève www.dunhill.com ALPINA Plan-les-Ouates www.alpina-watches.com ALTANUS Genève www.altanus.com ANDERSEN GENEVE Genève www.andersen-geneve.ch ANTOINE PREZIUSO Arare www.antoine-preziuso.com APPELLA Carouge www.appella.com AQUANAUTIC Genève www.aquanautic.com ARTYA Vésenaz www.artya.com ATELIERS DE MONACO Plan-Les-Ouates www.ateliers-demonaco.com BADOLLET Genève www.badollet.com BAUME & MERCIER (Richemont) Bellevue www. baume-et-mercier.com BEDAT & Co. Genève www.bedat.com BERTOLUCCI Genève www.bertolucci-watches.com BLACK BELT Vésenaz www.blackbeltwatch.com BLACKSAND Genève www.blacksandgeneve.com BOGH-ART Genève www.bogh-art.com BOVET Plan-les-Ouates www.bovet.com BREVA Genève www.breva-watch.com BURBERRY (Fossil) Genève www.burberry.com CHANEL Genève www.chanel.com CHARRIOL Genève www.charriol.com CHOPARD Meyrin www.chopard.com CLERC Genève www.clercwatches.com CVSTOS Genève www.cvstos.com CYRUS Versoix www.cyrus-watches.ch DA VINDICE Genève www.davindice.com DANIEL ROTH (Bulgari) Meyrin www.danielroth.com DAVID VAN HEIM Carouge www.david-van-heim.com DE BETHUNE Genève www.debethune.ch DE BOUGAINVILLE Plan-les-Ouates www.debougainville.com DE GRISOGONO Plan-les-Ouates www.degrisogono.com DELACOUR Genève www.delacour.ch DELALOYE Carouge www.garde-temps.ch DELANEAU Genève www.delaneau.com DEWITT Meyrin www.dewitt.ch EMILE CHOURIET Meyrin www.emile-chouriet.ch ENIGMA Genève www.gbenigma.com F.P. JOURNE Genève www.fpjourne.com FABERGE Genève www.faberge.com FRANC VILA / Genève www.francvila.com FRANCK MULLER Genthod www.franckmuller.com FRED (LVMH) Genève www.fred.com FREDERIQUE CONSTANT Plan-les-Ouates www.frederique-constant.com GERALD GENTA (BULGARI) Meyrin www.geraldgenta.com GIO MONACO Genève www.giomonaco.com GRAFF Genève www.graffdiamonds.com GRECO GENEVE Plan-les-Ouates www.greco-watches.com HARRY WINSTON (Swatch Group) Plan-les-Ouates www.harrywinston.com ICELINK Genève www.icelinkwatch.com JACOB & CO. Genève www.jacobandco.com JEAN DUNAND Plan-les-Ouates www.jeandunand.com JORDI Nyon www.jordiwatches.com LACOSTE Genève www.lacoste.com LADOIRE Genève www.ladoire.ch LAURENT FERRIER Plan-les-Ouates www.laurentferrier.ch LE RHONE Satigny www.lerhone.com LEBEAUCOURALLY Genève www.lebeaucourally.com LEONARD Genève www.leonardwatches.com LOUIS VUITTON Genève www.louisvuitton.com LUDOVIC BALLOUARD Meyrin www.ballouard.com M. STEPHANE Vésenaz www.m-stephane.com MAGELLAN Genève www.magellanwatch.com MAREMONTI Genève www.maremontiwatch.ru MATHEY-TISSOT Genève www.mathey-tissot.net MB&F Genève www.mbandf.com

EUROPA STAR PREMIÈRE | 31

MECCANICHE VELOCI Genève www.meccanicheveloci.ch MOYA Genève www.moyawatch.com MYKRONOZ Genthod www.mykronoz.com PATEK PHILIPPE Plan-les-Ouates www.patek.com PETER TANISMAN Meyrin www.peter-tanisman.com PIAGET (Richemont) Plan-les-Ouates www.piaget.com PICARD CADET Genève www.picardcadet.ch PIERRE KUNZ Genthod www.pierrekunzgeneve.com PILO & CO Carouge www.pilo-watches.com QUINTING Genève www.quinting-watches.com RALPH LAUREN Plan-les-Ouates www.ralphlauren.com RATEL Genève www.cyrilratel.com RAYMOND WEIL Genève www.raymond-weil.com RJ - ROMAIN JEROME Genève www.romainjerome.ch ROBERT ET FILS 1630 Genève www.robertfils1630.com ROGER DUBUIS (Richemont) Meyrin www.rogerdubuis.com ROLEX Genève www.rolex.com SARCAR Vésenaz www.sarcar.com SNYPER Genève www.snyperwatches.com SPERO LUCEM Genève www.spero-lucem.com STEELCRAFT Carouge www.steelcraft.ch TECHNOMARINE Genève www.technomarine.com TF EST 1968 Carouge www.tfco.ch TUDOR Genève www.tudorwatch.com UNIVERSAL GENEVE Meyrin www.universal.ch URWERK Genève www.urwerk.com VACHERON CONSTANTIN (Richemont) Plan-les-Ouates www.vacheron-constantin.com VAN DER BAUWEDE Genève www.vdb.ch VENUS Genève www.montresvenus.com VOLNA Genève www.volna.ch YESLAM Genève www.yeslam.ch ZANDIDOUST Genève www.zandidoust.com JURA AEROWATCH Saignelégier www.aerowatch.com ANDRE MOUCHE Fahy www.andremouche.ch AVIATOR Porrentruy www.aviatorwatch.ch CATOREX Les Breuleux www.catorex.ch CLAUDE BERNARD Les Genevez www.claudebernard.ch EDOX Les Genevez www.edox.ch ERNEST BOREL Le Noirmont www.ernestborel.ch HEBE Alle www.hebewatch.com IKEPOD Bassecourt www.ikepod.com L'DUCHEN Saignelegier www.lduchen.com L'EPEE Delémont www.lepee-clock.ch LOUIS CHEVROLET Porrentruy www.louischevrolet.ch LOUIS ERARD Le Noirmont www.louiserard.ch MATTHEW NORMAN Delémont www.matthew-norman.ch PAUL PICOT Le Noirmont www.paulpicot.ch RICHARD MILLE (Horométrie) Les Breuleux www.richardmille.com RUDIS SYLVA Les Bois www.rudissylva.com SWIZA Delémont www.swiza.ch VALGINE Les Breuleux www.jic.ch/valgine VICENTERRA Boncourt www.vicenterra.ch WENGER Delémont www.wenger.ch LUCERNE CARL F. BUCHERER Lucerne www.carl-f-bucherer.com CHRONOSWISS Lucerne www.chronoswiss.com OCHS UND JUNIOR Lucerne www.ochsundjunior.ch NEUCHÂTEL 88 RUE DU RHONE La Chaux-de-Fonds www.88rdr. com AFFLUENCE Neuchâtel www.affluencewatches.com ALEXIS GARIN Les Verrières www.alexisgarin.ch ARNOLD & SON La Chaux-de-Fonds www.arnoldandson.com BALL WATCH La Chaux-de-Fonds www.ballwatch.com BLAULING Chézard-Saint-Martin www.blauling.com BLU Colombier www.blu.ch BOMBERG Neuchâtel www.bomberg.ch BOUCHERON (Kering) Cortaillod www.boucheron.com BULER La Chaux-de-Fonds www.buler.ch BULGARI (LVMH) Neuchâtel www.bulgari.com CATENA Corcelles www.montres-catena.com CERTINA (Swatch Group) Le Locle www.certina.com CHATELAIN La Chaux-de-Fonds www.chatelain.ch CHRISTOPHE CLARET Le Locle www.christopheclaret.com CHRISTOPHE SCHAFFO La Brévine CHRONOGRAPHE SUISSE CIE La Chaux-de-Fonds www.chronographesuisse.ch CORONA WATCH Neuchâtel CORUM (Haidian) La Chaux-de-Fonds www.corum.ch DIOR HORLOGERIE (LVMH) La Chaux-de-Fonds www.dior.com DREYFUSS & CO La Chaux-de-Fonds www.dreyfussandco.com DUBEY & SCHALDENBRAND La Chaux-de-Fonds www.dubeywatch.com ELLICOTT 1738 La Chaux-de-Fonds www.ellicott.ch ENICAR La Chaux-de-Fonds www.enicar.com ETOILE Le Locle www.montres-etoile.ch FENDI Marin-Epagnier www.fendi.com FERDINAND BERTHOUD Fleurier www.ferdinandberthoud.ch FESTINA Bienne www.festina.com FLIK FLAK (Swatch Group) Cormondrèche www.flikflak.com FREDERIC JOUVENOT La Chaux-de-Fonds www.fjouvenot.com GAMIL WATCH La Chaux-de-Fonds GEBSON Neuchâtel www.gebson.com GERGE Neuchâtel www.gergeswiss.com

GIRARD-PERREGAUX (Kering) La Chaux-de-Fonds www.girard-perregaux.com GRAHAM La Chaux-de-Fonds www.graham-london.com GREUBEL FORSEY La Chaux-de-Fonds www.greubelforsey.com GUCCI (Kering) Cortaillod www.gucciwatches.com HAUTLENCE (Melb Holding) La Chaux-de-Fonds www.hautlence.com HERITAGE Neuchâtel www.hwm-watch.com HOROSWISS La Chaux-de-Fonds www.horoswiss.com HYT Neuchâtel www.hytwatches.com JAERMANN & STUBI Le Locle www.jaermann-stuebi.com JAMES C. PELLATON Le Locle www.jamespellaton.com JAQUET DROZ (Swatch Group) La Chaux-de-Fonds www.jaquet-droz.com JEAN D'EVE La Chaux-de-Fonds www.jeandeve.ch JEANRICHARD (Kering) La Chaux-de-Fonds www.jeanrichard.com JULIEN COUDRAY 1518 Le Locle www.juliencoudray1518.ch LOUIS MOINET Saint-Blaise www.louismoinet.com MAITRES DU TEMPS La Chaux-de-Fonds www.maitresdutemps.com MARATHON La Chaux-de-Fonds www.marathonwatch.com MARVIN Vaumarcus www.marvinwatches.com MCGONIGLE STEPHEN Neuchâtel www.mcgonigle.ie MCT Neuchâtel www.mctwatches.com METAL.CH Neuchâtel www.metalch.com MIDO (Swatch Group) Le Locle www.mido.ch MONTBLANC (Richemont) Le Locle www.montblanc.com MUREX Le Locle www.murexwatch.com NOBEL Neuchâtel www.nobelwatch.ch OPTIMA Le Locle www.optimawatch.com PARMIGIANI FLEURIER Fleurier www.parmigiani.ch PIERRE THOMAS La Chaux-de-Fonds www.pierrethomas.ch RAIDOX Le Locle www.raidox.ch RIBA MUREX Le Locle www.murexwatch.com ROD Neuchâtel www.rodwatches.ch ROTARY La Chaux-de-Fonds www.rotarywatches.com SCHWARZ-ETIENNE La Chaux-de-Fonds www.schwarz-etienne.ch SULTANA La Chaux-de-Fonds www.sultana.ch TAG HEUER (LVMH) La Chaux-de-Fonds www.tagheuer.com TAUCHMEISTER La Chaux-de-Fonds www.michel-perrenoud.ch TEMPVS COMPVTARE Neuchâtel www.tempvscompvtare.ch TISSOT (Swatch Group) Le Locle www.tissot.ch ULYSSE NARDIN (Kering) Le Locle www.ulysse-nardin.com VOUTILAINEN Môtiers www.voutilainen.ch VULCAIN Le Locle www.vulcain-watches.ch WALTHAM Marin-Epagnier www.waltham.ch ZENITH (LVMH) Le Locle www.zenith-watches.com

DAMIANI Manno www.damiani.com DWISS Lugano www.dwiss.com GLAM ROCK Lugano www.glamrockwatches.com GUESS Bioggio www.guesswatches.com N.O.A Balerna www.noawatch.com ORA Locarno www.oraswisswatch.com SALVATORE FERRAGAMO (Timex Group) Manno www.ferragamotimepieces.com SEA-GOD Chiasso www.sea-god.ch TENDENCE Lugano www.tendencewatches.com TIMEX (Timex Group) Manno www.timexgroup.com TONINO LAMBORGHINI Chiasso www.lamborghini.it VERSACE (Timex Group) Manno www.versace.com ZITURA WATCH Magliaso www.zitura.com THURGOVIE ANDREAS STREHLER Sirnach www.astrehler.ch HANHART Diessenhofen www.hanhart.com VAUD

ADRIANO VALENTE Lausanne www.adrianovalente.com ALAIN SAUSER CRÉATION Chamby www.alainsauser.ch ALFRED ROCHAT - AROLA Les Bioux www.arola-alfred-rochat.ch ANONIMO Chavannes-de-Bogis www.anonimo.com AUDEMARS PIGUET Le Brassus www.audemarspiguet.com BLANCPAIN (Swatch Group) Paudex www.blancpain.com BREGUET (Swatch Group) L'Abbaye www.breguet.com C3H5N3O9 Gand www.c3h5n3o9.com CABESTAN L'Orient www.cabestan.ch CHAUMET (LVMH) Nyon www.chaumet.com CLAUDE MEYLAN L'Abbaye du Lac de Joux www.claudemeylan.ch DE HAVILLAND Yverdon-les-bains www.dehavilland-watches.com DODICI Montreux www.dodici.ch FRERES ROCHAT (Automates) Le Brassus www.freres-rochat.com HD3 COMPLICATION Luins www.hd3complication.com HUBLOT (LVMH) Nyon www.hublot.com HYSEK Lussy-sur-Morges www.hysek.com JAEGER-LECOULTRE (Richemont) Le Sentier www.jaeger-lecoultre.com JANVIER Ste-Croix www.vianney-halter.com LOISEAU St-Prex www.atelier-loiseau.ch LOUIS GOLAY Lonay www.louisgolay.com MANUFACTURE ROYALE Vallorbe www.manufacture-royale.com PHILIPPE DUFOUR Le Sentier www.philippedufour.com PIERRE DEROCHE Le Lieu www.pierrederoche.com REBELLION Lonay www.rebellion-timepieces.com REUGE (automates) Sainte Croix www.reuge.com REVELATION Lully www.revelation-watches.ch OBWALD ROMAIN GAUTHIER Le Sentier www.romaingauthier.com ANTOINE MARTIN Alpnach www.antoinemartin.ch SLYDE Luins www.slyde.ch SPEAKE-MARIN Bursins www.speake-marin.com SCHAFFHOUSE VALBRAY Lausanne www.valbray.ch VINCENT CALABRESE Morges A. LANGE & SOEHNE (Richemont) Schaffhouse www.vincent-calabrese.ch www.lange-soehne.com H. MOSER & CIE (Melb Holding) Neuhausen am Rheinfall www.h-moser.com ZOUG IWC (Richemont) Schaffhouse www.iwc.ch CIMIER Baar www.cimier.com DIETRICH Zoug www.dietrich-watches.com SCHWYTZ FAVRE LEUBA Zoug GC WATCHES (Timex Group) Zoug COINWATCH Pfäffikon www.coinwatch.ch LES www.gcwatches.com MILLIONNAIRES Pfäffikon www.millionnaires.ch PANERAI (Richemont) Steinhausen LUMINOX Pfäffikon www.luminox.com www.panerai.com MIRA Pfäffikon www.mirawatch.ch RAM Cham www.ram-watches.ch PHILIP ZEPTER Wollerau www.zepter.com RECONVILIER Zoug www.reconvilier.com SOLEURE ZURICH ARLEA Wolfwil AUREMA Grenchen ZASPERO Regensdorf www.zaspero.com BIJOUMONTRE Grenchen www.bijoumontre.com CAMEL ACTIVE Zurich www.mondaine.com BREITLING Grenchen www.breitling.com CORNAVIN Zurich www.cornavin-watches.ch CAT Solothurn www.catwatches.com HELVETICA Zurich www.mondaine.com COACH Grenchen www.coach.com JUSTEX Zurich www.justex.ch COVER WATCHES Solothurn LALIQUE Zollikerberg www.lalique.com www.coverwatches.com M-WATCH Zurich www.mondaine.com CYCLOS Dornach www.cyclos-watch.ch MARC JENNI Zurich www.marcjenni.com ETERNA (Haidian) Grenchen www.eterna.ch MAURICE DE MAURIAC Zurich FORTIS Grenchen www.fortis-watches.com www.mauricedemauriac.ch GENIE Grenchen www.genieswiss.ch MIKI ELETA (Pendules) Zurich www.eleta.ch HARWOOD WATCH CO. Grenchen MONDAINE Zurich www.mondaine.com www.harwood-watches.com MONTILIER Zurich www.montilier.com JOWISSA UHRE Bettlach www.jowissa-watches.com O&W Zurich www.chronotime.ch KIENZLE Egerkingen www.kienzleuhren.de PAUL GERBER Zurich www.gerber-uhren.ch MANJAZ Welschenrohr www.manjaz.ch PHILIP STEIN Kilchberg www.philipstein.com NORD ZEITMASCHINE Büsserach SEVENFRIDAY Zurich www.sevenfriday.com www.nord-zeitmaschine.ch SWAROVSKI Männedorf www.swarovski.com PORSCHE DESIGN Grenchen TORSO Zurich www.torsoswiss.ch www.porsche-design.com URBACH Zurich www.urbach.ch ROAMER Soleure www.roamer.ch XEMEX Zurich www.xemex.ch SWISS MILITARY-HANOWA Solothurn www.swissmilitary.ch TITONI Grenchen www.titoni.ch Liste non contractuelle ST. GALL LUNESA Sevelen www.lunesa.com TESSIN ADRIATICA Camorino www.adriaticawatches.ch ALFEX Manno www.alfex.com ARMAAN Agno BUCCELLATI Chiasso www.buccellati.com Pour des informations complètes sur CANOPUS Magliaso www.amanzoni.com toutes les marques suisses et internationales, CUERVO Y SOBRINOS Capolago consultez www.europastar.com/brand-index www.cuervoysobrinos.com


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