PATRIMOINE HORLOGER
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Le passé est le futur, ou comment les horlogers exploitent leur patrimoine. ............................ pages 8 à 17
Europa Star a mis en ligne un incroyable trésor d’archives horlogères depuis 1960. ......................... pages 18 et 19
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EUROPA STAR PREMIERE LE JOURNAL DE L’ÉCOSYSTÈME HORLOGER SUISSE
NO 2/19 (Vol.21) MARS 2019 | 12.00 CHF/€ | EUROPASTAR.CH
ÉDITORIAL
Jeu de go entre Bâle et Genève par
Pierre Maillard
Commencer par les bords; Rechercher le positionnement avec la plus grande valeur; Savoir abandonner en temps voulu. Tels sont les 3 grands principes du jeu de go, jeu de territoire et d’encerclement. C’est précisément ce qui se déroule en ce moment entre les deux grands salons horlogers internationaux, le SIHH et Baselworld. Dès 1991, le SIHH a bel et bien «commencé par les bords» sa longue partie de go, avec les trois marques Cartier, Piaget et Baume & Mercier – plus Gérald Genta et Daniel Roth, deux petites maisons alors indépendantes. A partir de ce «bord», le SIHH a graduellement agrandi son territoire au fil de ses acquisitions et de quelques ralliements. La stratégie? Encercler progressivement Bâle pour parvenir à régner depuis le centre du territoire en suivant la seconde règle du go: «Rechercher le positionnement avec la plus grande valeur». En l’occurrence se placer sous la bannière de l’aristocratique Haute Horlogerie. Jusqu’à cette année 2019, on pouvait penser que la stratégie territoriale du SIHH était pleinement gagnante. Avec un Carré des Horlogers dans lequel figurent les horlogers indépendants les plus importants du moment et les puissants «territoires» annexes venus s’agréger autour de lui, le SIHH semblait en passe de maîtriser la partie centrale des territoires du goban aux 361 intersections (le plateau sur lequel se joue le go).
Maître d’un autre territoire central, le Swatch Group semblait avoir porté un coup fatal à Baselworld en s’appliquant tout seul et à luimême le troisième principe directeur du go, «Savoir abandonner en temps voulu», laissant derrière lui un immense espace vide. Seuls tenaient bon les royaumes de Rolex, de Patek Philippe et de quelques autres seigneurs comme Chopard. Positionnées sur un des bords du goban, les marques de LVMH semblaient quant à elles indécises, ainsi que d’autres «seigneuries» telles que Breitling ou Chanel. Allaientelles se rendre à l’adversaire? Une annonce surprenante vint déséquilibrer la partie qu’on pensait jouée: les deux territoires opposés faisaient alliance en se regroupant temporellement dès 2020 (soit du 26 au 29 avril à Genève puis du 30 avril au 5 mai à Bâle)! Et du coup cessaient la partie sur un «nul». Sauf que dans le go, le «nul» n’existe pas à cause du komi, une compensation qui comporte un demi-point. Dans tous les cas il y a donc vainqueur, ne serait-ce que d’un demi-point. Quel sera celui de la partie encore en cours? Un Baselworld qu’on pensait pourtant au bord de l’étranglement? Un SIHH qui risque pourtant une hémorragie à l’intérieur de son Carré et dans le périmètre doré des hôtels du bord du lac, petits et grands se demandant pourquoi et comment exposer à Genève pour aussitôt filer à Bâle. Ou un Swatch Group replié dans une position d'observateur (tout comme Richard Mille et Audemars Piguet, retirés eux du SIHH)? Mais tant que ni Rolex ni Patek Philippe ni LVMH ni Chopard ni Chanel ni Breitling ne bougeront de leur territoire, le jeu de go ne sera pas terminé.
DR
ISSN 2297-4008
Calatrava Semainier Référence 5212A-001
Par Pierre Maillard
La semaine selon Patek Philippe
C’est une toute nouvelle montre de Patek Philippe qui prend place dans la riche gamme des «petites complications» utiles de la Maison genevoise: un semainier. Une première pour la manufacture qui a produit un historique florilège de montres à calendrier, de la simple date en guichet au très complexe quantième perpétuel séculaire (à ne corriger qu’une fois atteint le XXVIIIe siècle), en passant par de nombreux quantièmes perpétuels (à corriger en 2100) et sans oublier le fameux quantième annuel breveté de 1996. Mais manquait effectivement le semainier. C’est désormais chose faite – et de quelle façon! (Lire en page 3)
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Patek Philippe: le diable est dans le détail Calatrava Semainier Référence 5212A-001
Par Pierre Maillard
En découvrant cette montre qui vient à peine de sortir des ateliers, on a aussitôt l’impression qu’elle existe depuis toujours. Ne semblet-elle pas être déjà un «classique» de la manufacture? Et pourtant, cette impression est tout à fait erronée puisque jamais encore Patek Philippe n’avait proposé une telle
fonction, indiquant le numéro de la semaine de l’année. Alors, à quoi cette impression tient-elle? Elle provient sans doute d’une série de détails inédits, qu’un coup d’œil un peu rapide ne perçoit pas aussitôt mais qui pourtant se ressent immédiatement. Ce qui frappe d’emblée est sa grande lisibilité. L’œil n’a pas besoin d’aller fouiller le cadran pour comprendre comment le lire: la
hiérarchie des indications horaires et calendaires, fournies par 5 aiguilles centrales et un seul guichet, est d’une évidence limpide. Cette «géométrie inédite» s’affiche en noir sur fond de cadran opalin argenté. Seule tranche la pointe rouge en forme de marteau des deux aiguilles centrales qui indiquent le jour de la semaine (dans un cercle central), et concomitam-
ment son mois et son numéro (dans les deux échelles concentriques en périphérie). Seule la date s’affiche traditionnellement à 3h en guichet. Mais l’ensemble de cet affichage, qui pourrait théoriquement paraître un peu rigide et technique, efficacement utilitaire, vibre d’un attrait tout particulier. Ce cadran nous «retient». Mais à quoi tient cette séduction? >
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Regardez! En s’y penchant encore un peu mieux, on découvre que la vibration toute particulière de cette pièce provient non seulement de sa géométrie parfaitement centrée mais aussi, surtout peut-être, de sa typographie. Pas un chiffre, pas une lettre qui soit semblable à l’autre, chacun est unique et légèrement différent de l’autre. Car tout est écrit à la main. En l’occurrence, de la main d’un designer de la manufacture dont l’écriture manuscrite, spécifiquement conçue et dessinée pour cette montre, a été reprise telle quelle et décalquée sur le cadran. Une décision assez inspirée de Thierry Stern lui-même, nous affirme-t-on. Et sans doute est-ce cette typographie qui donne le ton immédiatement vintage à ce semainier. Mais c’est un vintage jamais vu, dans son affichage comme dans son expression, discrètement poétique, nostalgique de la calligraphie, de l’écriture manuscrite.
Tout est écrit à la main. En l’occurrence, de la main d’un designer de la manufacture dont l’écriture manuscrite, spécifiquement conçue et dessinée pour cette montre, a été reprise telle quelle et décalquée sur le cadran.
CALATRAVA SEMAINIER RÉFÉRENCE 5212A-001 Cadran opalin argenté avec décalques noires reproduisant une écriture manuscrite. Index appliques de type «bâton» en or gris 18 carats noirci, lapidés 4 faces. Boîtier acier. Diamètre: 40 mm. Epaisseur totale: 11,18 mm. Etanche à 30 m. Fond verre saphir. Bracelet Cuir de veau, cousu main, brun clair, avec boucle à ardillon en acier. Affichages par aiguilles : heures, minutes et secondes depuis le centre. Jour depuis le centre. Numéro de la semaine avec mois correspondant depuis le centre. Par disque: guichet de date à 3h. Correction du jour à 8h, du numéro de la semaine à 10h. Poinçon Patek Philippe.
Cette impression vintage est renforcée par le boîtier rond de style Calatrava, de 40 mm sur 11,18 mm, en acier, ce qui n’est guère courant chez Patek Philippe. Avec sa lunette rapportée et ses attaches de bracelet incurvées à double godrons, il s’inspire directement d’un modèle unique de 1955 (la référence 2512 que les aficionados peuvent aller voir au Patek Philippe Museum de Genève). Mettez par-dessus un verre saphir légèrement «box» et la Calatrava Semainier se présente à vous. Et à notre sens, c’est une très belle réussite, dont on peut sans risque prendre date. >
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MOUVEMENT PATEK PHILIPPE 26-330 S C J SE Mouvement mécanique à remontage automatique avec seconde centrale, date, jour et numéro de la semaine. 26 mm x 4,82 mm (mouvement de base 3,3 mm, semainier semi-intégré 1,52 mm). 304 composants (mouvement de base 212, semainier semiintégré 92). Réserve de marche min. 35h – max. 45h.Rotor central en or 21 carats, remontage unidirectionnel. 28 800 alternances par heure (4 Hz). Balancier Gyromax®. SpiralSpiromax® (en Silinvar®).
Un nouveau mouvement de base Et qu’en est-il de sa motorisation? L’affichage du jour de la semaine en cours et de son numéro est assuré grâce à un mécanisme semi-intégré dans un tout nouveau mouvement de base à remontage automatique, le calibre 26-330. Basé sur le calibre 324, il s’en distingue par plusieurs innovations et optimisations. Afin de supprimer tout risque de chevrotement de l’aiguille des secondes, la roue de moyenne traditionnelle a été remplacée par «un système de troisième roue à rattrapage de jeu». Fabriqué par procédé LIGA en nickel-phosphore revêtu d’une couche d’or/cuivre/indium, ce composant supprime tout risque de chevrotement grâce à des lames-ressort de 22 microns d’épaisseur, insérées dans ses longues dents fendues en deux. La lame agit en plaquant la dent de la troisième roue contre l’aile du pignon, empêchant effectivement tout chevrotement. Par ailleurs un stop-seconde a été ajouté, qui permet d’interrompre le balancier, de régler la seconde exacte et de le relancer grâce à une impulsion donnée par la couronne. En ce qui concerne le système de remontage automatique, certaines avancées très techniques ont permis d’en améliorer la performance et la fiabilité en remplaçant par des
composants high-tech des pièces qui entraînaient des frottements et exigeaient des réglages supplémentaires. Ainsi en est-il, par exemple, du remplacement de la traditionnelle bascule d’embrayage par une nouvelle roue (de fabrication très complexe, nous explique-t-on) qui, dans un sens entraîne le barillet, et débraye dans l’autre. Autre optimisation, l’ajout d’une roue de réduction qui débraye le remontage automatique lors du remontage manuel. Supprimer les frottements, accroître les performances, la fiabilité, autant, là aussi, de points de détail…qui additionnés font l’essentiel.
Le mécanisme semi-intégré Le mécanisme semi-intégré du semainier comporte 92 composants supplémentaires et ne mesure que 1,52 mm d’épaisseur, ce qui porte la hauteur totale du mouvement et du mécanisme semi-intégré à 4,82 mm pour 304 composants. Une minceur obtenue grâce à une platine spécifiquement développée et usinée pour intégrer ce mécanisme. L’affichage des jours est piloté par une étoile à 7 branches placée au centre du mouvement, sur la roue des heures. La roue des semaines, qui comporte 53 dents (car tous les 5 à 6 ans, l’année compte 53 semaines au
lieu des 52 semaines usuelles, la prochaine occurrence interviendra en 2020), est entraînée via une bascule par une deuxième étoile à 7 branches qui comporte un doigt plus long pour le dimanche, faisant ainsi démarrer la semaine suivante le lundi (selon la norme internationale ISO 8601, lire l’encadré ci-contre). Afin d’éviter des pics de consommation d’énergie – le mouvement automatique a une réserve de marche d’un minimum de 35 heures à un maximum de 45 heures – les changements des indications calendaires sont semi-instantanées et leur saut respectif est légèrement décalé. Par ailleurs, une complication dite «utile» doit pleinement mériter son nom. Ainsi les systèmes de sécurisation mis en place par les constructeurs du mécanisme permettent à l’utilisateur de procéder aux corrections nécessaires à toute heure du jour ou de la nuit. Pour le jour et le numéro de la semaine, cellesci s’effectuent grâce à deux poussoirs respectivement placés à 8h et à 10h. La date, quant à elle, se règle par le biais de la couronne (tirée en position intermédiaire, la position maximale permettant la mise à l’heure exacte par le stop balancier). Redisons-le tout haut, cette Calatrava Semainier est une réussite en tous points et est très certainement promise à un bel avenir. Ne dit-on pas aussi «Dieu est dans le détail»?
UN SEMAINIER PERPÉTUEL EST-IL ENVISAGEABLE? Le système de numérotation de la semaine est défini par la norme ISO 8601. Créée en 1988 et basée sur le calendrier grégorien et le système horaire des 24 heures, cette norme «spécifie la représentation numérique de la date et de l’heure» et, partant, de la numérotation des semaines. Une numérotation principalement utilisée à des fins organisationnelles par l’industrie, le commerce, l’informatique. Cette norme ISO, reconnue internationalement, précise que la semaine commence le lundi, que les jours sont numérotés de 1 à 7, que la semaine 1 est celle qui contient le premier jeudi de l’année et la dernière semaine celle qui contient le dernier jeudi de l’année. Mais, comme l’explique Wikipedia, «l'année civile ne contient en général que 52 semaines de sept jours, mais cela ne fait qu'un total de 364 jours. L'année faisant en réalité 365 jours un quart, la date du premier jour de chaque semaine recule d'une année sur l'autre, d'un jour, ou de deux dans les années bissextiles. S'il n'y avait pas de temps en temps une 53e semaine intercalaire, la semaine 1 d'une année finirait par appartenir entièrement à l'année précédente.» Question aux horlogers: sachant que la 53e semaine intercalaire apparaît de façon un peu «aléatoire», serait-il envisageable de construire un semainier mécanique perpétuel? On se gratte la tête en examinant ces quelques exemples: en 2020/21, 2026/27, 2037/38 et 2048/49, la semaine 53 commencera un lundi 28 décembre pour s’achever un dimanche 3 janvier; mais en 2032/33 la semaine 53 commencera un lundi 27 décembre et s’achèvera un dimanche 2 janvier… A vos calculs!
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Les horlogers font leur test ADN Les grandes maisons à l’histoire ininterrompue, comme Rolex, Audemars Piguet ou Patek Philippe, maintiennent avec constance leur patrimoine, qu’elles conservent jalousement. Tous les horlogers n’ont pas cette chance, ayant vu une part de leur mémoire disparaître au fil de rachats et reprises. D’autres n’y ont accordé jusqu’ici que peu d’intérêt. Plusieurs marques tentent aujourd’hui de rattraper le temps perdu. Par Serge
et
Pierre Maillard
Les bestsellers de 2019 rappellent furieusement ceux d’il y a plusieurs décennies. La Royal Oak, la Daytona ou la Nautilus – ce trio magique – n’a pas pris une ride. Tout change et rien ne change... Au sein du Swatch Group, la Speedmaster d’Omega figure également parmi les meilleurs exemples de modèles traversant les âges sans vieillir. La marque dirigée par Raynald Aeschlimann a d’ailleurs opéré un travail remarquable sur son patrimoine, bien illustré par la Trilogy 1959 ou par le succès répété de son opération Speedy Tuesday. Ces mises à profit du patrimoine, dans un contexte qui semble donner une prime aux «icônes horlogères», font bien des envieux. Elles Détail du cadran d’un chronographe de Baume & Mercier de 1950
répondent en effet parfaitement à un phénomène de fond: loin de reléguer la montre mécanique au rang des incongruités du passé, l’ère numérique a remis sur le devant de la scène l’horlogerie la plus «noble», par l’entremise de millions d’images partagées sur les réseaux sociaux et la constitution à marche rapide d’une culture horlogère mondialisée. Un peu comme si les outils du futur nous ramenaient en arrière. Partout, on insiste sur le besoin d’authenticité.
Reconstituer ce qui a été dépoussiéré Face à ce phénomène, tout le monde n’est pas logé à la même enseigne. Les néo-marques de l’horlogerie
contemporaine du 21ème siècle, par exemple, ne possèdent naturellement pas un patrimoine qu’elles puissent faire valoir sur la durée, insistant plutôt sur la notion de «rupture». Un positionnement qui marche particulièrement bien lorsque l’économie a le vent en poupe et que les marchés émergents «créent» des milliers de nouveaux millionnaires, aux goûts moins conservateurs que les collectionneurs du Vieux Continent. Un nombre important de ces marques a ainsi été fragilisé par le repli horloger de 2015. Et la question de fond des collectionneurs-investisseurs reste souvent la même: est-ce que cette marque existera dans cinq à dix ans? Alors que la première décennie du nouveau millénaire a semblé presque entièrement dédiée au «dépoussiérage» – nécessaire – de l’industrie, pour l’ancrer dans la modernité, casser les codes et élargir son horizon, on se rend aujourd’hui compte qu’il y avait des trésors d’ingéniosité et de design dans ces «poussières horlogères».
Baume & Mercier, vaste potentiel en vue Plusieurs maisons qui possèdent une légitimité historique n’ont ainsi guère exploité tout le potentiel lié à cet héritage, davantage occupées qu’elles étaient à moderniser leur image et à conquérir de nouveaux marchés depuis la renaissance de l’horlogerie mécanique des années 1990.
Preuve de l’alliance entre nouveaux réseaux et créations anciennes, le jeune patron ne poste presque que des modèles vintage sur son compte Instagram. Fondée en 1830, Baume & Mercier semble illustrer ce cas de figure. Son directeur Geoffroy Lefebvre* entend y remédier: «On a trop peu parlé de l’histoire extraordinaire de Baume & Mercier, notamment en ce qui concerne l’habillage des montres. La première chose que j’ai faite en arrivant à la tête de la marque a été de m’enfermer une journée avec 200 pièces de notre patrimoine aux Brenets. On retrouve très tôt des montres au design incroyable, comme les chronos complets des années 1950 ou la Riviera.» *Entre-temps, Geoffroy Lefebvre a pris un autre poste stratégique chez Richemont, celui de la distribution digitale, ndlr.
La Rado Original des années 1970 figure toujours parmi les bestsellers de la marque.
Preuve de l’alliance entre nouveaux réseaux et créations anciennes, le jeune patron ne poste presque que des modèles vintage de Baume & Mercier sur son compte Instagram. «Remettre ce patrimoine sur le devant de la scène fait clairement partie de ma stratégie», nous explique-t-il. Passé au sein du groupe Richemont par deux marques au long héritage, Vacheron Constantin et Jaeger-LeCoultre, le nouveau CEO possède certainement une sensibilité historique... dans l’ère du temps, justement.
«Le regard sur l’horlogerie a changé ces dernières années, Rado: la marque avec un engouement futuriste lorgne très fort du public pour vers son passé le passé: se rattacher Au sein du Swatch Group, Rado a à une forme de de son côté toujours fait figure de patrimoine est rassurant «marque futuriste» du géant hor- pour nos clients.» loger, via son exploration de matériaux comme la céramique. Avec ce profil, et par rapport à un Omega ou un Longines, la maison a «pris du retard en terme de valorisation du patrimoine», reconnaît le directeur Matthias Breschan. Depuis son arrivée en 2011, ce dernier avait plutôt entrepris une mise à jour de la marque, qui était handicapée sur le marché chinois par son accent sur les montres de forme et le quartz... des caractéristiques justement héritées du passé. La stratégie mise en place depuis lors sur des formats plus classiques, ainsi que l’intégration de davantage de calibres mécaniques, tout en poursuivant dans la veine des nouveaux matériaux, a permis à Rado de gagner en popularité en Asie. Mais l’heure est maintenant à la revalorisation de l’héritage de la marque: «Nous sommes en train de constituer une somme d’informations sur l’histoire de Rado, explique Matthias Breschan. D’ici à deux ans, notre utilisation des archives devrait devenir vraiment intéressante.» La Rado Original des années 1970 reste ainsi l’un des bestsellers de la marque basée à Lengnau. Matthias
Matthias Breschan, CEO de Rado
Breschan livre son analyse: «Le regard sur l’horlogerie a changé ces dernières années, avec un engouement très fort du public pour le passé: se rattacher à une forme de patrimoine est rassurant pour nos clients. Partout, on voit un retour à des valeurs plus simples, à la nature, à la durabilité. Aujourd’hui, Rado peut travailler sur les designs forts de son histoire, tout en continuant à introduire des matériaux innovants. Pour nous, c’est la bonne formule.» Un travail sur les archives qui pourra être utile y compris en Chine, souligne le patron, en exhibant une annonce parue dès la fin des années 1970 dans un journal de la République populaire: «A l’époque il y avait également un spot à la télévision chinoise intitulé Rado Quiz. Nous avons encore un beau potentiel de croissance en Chine. En Inde également, nous avons été pionniers et conservons une position dominante pour les ventes de montres suisses.»
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tuelles, avec un côté traditionnel et un côté très innovant. Maintenant, nous devons creuser l’héritage. Il y a en effet aujourd’hui une reconnaissance très forte de l’artisanat, du fait-main. C’est la définition actuelle du luxe, qui repose sur des connaissances historiques.» Pour Patrick Pruniaux, ce travail revient quasiment à une «obligation morale». La marque a recours aux services d’un historien pour reconstituer son héritage. Problème: d’une part, acquérir des modèles historiques est une mission coûteuse; d’autre part, Ulysse Nardin n’a pas la totalité de ses archives entre ses mains, une partie importante se trouvant au Château des Monts du Locle.
Le projet «Naissance d’une montre» vise à transmettre un savoir-faire rare: la conception d’une montre mécanique de A à Z selon des procédés non industriels.
Il n’y a pas d’âge pour s’intéresser au patrimoine Même une marque aussi «jeune», à l’échelle de l’industrie, que Frédérique Constant – elle vient de fêter ses 30 ans – entend déjà capitaliser sur son patrimoine. «Pour une marque horlogère, il est bien plus aisé de travailler sur des succès du passé, qui ont déjà fait leurs preuves. Sans en dévoiler plus, je peux déjà vous dire que je suis en train de travailler sur notre patrimoine pour la préparation d’une future nouvelle collection», révèle Niels Eggerding, directeur général de Frédérique Constant. Marque encore plus jeune (elle a été fondée en 1994), Bell & Ross a dès ses débuts misé sur une esthétique «vintage», à une époque où la tendance était à la couleur flashy. «Avec nos montres rondes militaires à chiffres blancs sur cadrans noirs, nous étions clairement à contre-courant, se rappelle le co-fondateur Carlos-A. Rosillo. Certaines marques très établies n’avaient d’ailleurs plus aucun modèle de ce type! Ce n’était alors ni la mode du vintage ni celle des montres militaires.» De son côté, malgré ses 15 ans seulement, la maison Greubel Forsey a carrément pris l’initiative de sauver des savoirs anciens via le projet «Naissance d’une montre» de la Fondation Time Aeon qu’elle a co-fondé. Une ambition chère à Robert Greubel et Stephen Forsey: leur protégé Michel Boulanger, qui a entamé la réalisation d’une série de montres à la force de ses seules mains, sous le parrainage de Philippe Dufour, tourne aujourd’hui dans le monde entier pour partager son expérience. En 2016, sa «Montre Ecole» a été vendue aux enchères chez Christie’s à Hong Kong pour la somme de 1,46 million de dollars.
Ulysse Nardin: une «obligation morale» Patron d’Ulysse Nardin (et depuis peu de Girard-Perregaux), Patrick Pruniaux a fait de la remise à niveau du patrimoine de la marque un axe prioritaire de son mandat, démarré juste après l’introduction du modèle Marine Torpilleur, qui permettait de «rafraîchir» une ligne historique de la maison fondée en 1846. Une série limitée, la Marine Torpilleur Military US Navy, est déjà un fruit de ce travail sur le patrimoine. «Nous avons redécouvert
qu’Ulysse Nardin était le fournisseur unique de la marine américaine pendant plusieurs décennies à partir de 1905, explique Patrick Pruniaux. Cela nous donne une légitimité évidente. Les militaires n’oublient pas d’où ils viennent!» Sous l’influence de Rolf Schnyder, ancien propriétaire de la marque qu’il a portée à bout de bras durant 30 ans, Ulysse Nardin avait pris un virage très futuriste, illustré par la Freak avec son affichage et son mouvement démentiels, ainsi qu’avec l’intégration pionnière du silicium dans l’échappement. «Il était incroyablement orienté vers le futur, ce qui a permis d’établir la marque sur ses deux jambes ac-
Trois classeurs fédéraux pour bâtir l’avenir Les objectifs sont posés et l’autre marque dirigée par Patrick Pruniaux, Girard-Perregaux, est également en pleine exploration de son patrimoine. Mais elle aussi butte sur plusieurs obstacles, comme l’explique son historien et véritable «mémoire vivante» de la maison Willy Schweizer: «L’ensemble de nos archives tient aujourd’hui dans trois classeurs fédéraux seulement. Cela est dû à l’histoire tumultueuse de notre maison.» Fondée en 1791 par l’horloger genevois visionnaire Jean-François Bautte, la maison a dès ses débuts eu pour ambition de réunir en un même lieu, la «fabrique», artisans et ouvriers qui travaillaient auparavant à domicile. De successions en rachats, la manufacture oscille ensuite pendant un siècle entre déve-
Ulysse Nardin Marine Torpilleur Military US Navy
Les Trois Ponts d’Or, véritable emblème de Girard-Perregaux
loppement et difficultés sur le plan commercial. La fusion en 1906 de la Maison Bautte avec la coopérative Girard-Perregaux donne son nom actuel à l’entreprise. «De toutes ces années, il ne reste pas grand chose dans les archives, souligne Willy Schweizer. Une grande partie des documents a été dispersée, partiellement détruite, voire jetée. Au hasard des recherches, on peut faire certaines trouvailles, récupérer quelques éléments, mais peu de choses.» Passé par le marketing et la publicité puis responsable des marchés suisses et MoyenOrient, ce féru d’histoire locale est tombé amoureux du patrimoine de Girard-Perregaux le jour où on lui a confié une valise bourrée de montres anciennes, dont il a patiemment analysé le contenu qu’il a fini par remettre en valeur. En 1991, Willy Schweizer ouvre un petit musée sous les combles du bâtiment principal de GirardPerregaux pour les présenter publiquement. Encouragé par l’ancien propriétaire Gino Macaluso qui a bien compris tout l’intérêt de ces recherches historiques, il ouvre ensuite un musée dans la Villa Marguerite, attenante à la manufacture et propriété du groupe. En 2007, celle-ci est néanmoins victime d’un grave cambriolage. Un nouveau musée est en gestation.
La part inconnue de l’Histoire Quoiqu’il en soit, cette collection de montres historiques reste déterminante pour la marque: pas une visite de détaillant ou de clients qui ne fasse l’impasse sur la présentation de cette collection. Et surtout, c’est la valorisation de ce patrimoine
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que l’on trouve derrière la «renaissance» des Trois Ponts d’Or, devenus sous diverses formes la signature absolument emblématique de la marque. «Son cas est unique: c’est la seule montre qui se reconnaisse immédiatement à son mouvement.» Autre exemple, celui de la Laureato, relancée récemment – une montre qui symbolise les profonds changements intervenus dans les années 1970. «L’Histoire aide à créer aujourd’hui, souligne Willy Schweizer. Elle donne de la cohérence. L’intérêt pour les montres vintage et les montres anciennes est très net. Le nombre de
Les horlogers se découvrent parfois un héritage génétique insoupçonné. recherches est sans cesse en augmentation, y compris sur les modèles quartz, dont Girard-Perregaux a été un pionnier.»
La marque continue à acheter des montres anciennes. Elle en possède aujourd’hui environ 400 exemplaires. «Le problème, pour cette recherche, c’est qu’on ne sait pas toujours ce que nous avons fait. Et parfois, nous avons des surprises.» A l’instar de ces tests ADN si populaires aujourd’hui, qui laissent souvent place à l’étonnement, les horlogers se découvrent parfois eux aussi un héritage génétique insoupçonné.
Le modèle Montblanc 1858 Geosphere, d’inspiration vintage
Montblanc: racheter un patrimoine, purement et simplement Certaines maisons, enfin, se constituent un patrimoine horloger glorieux via un rachat astucieux. C’est le cas de Montblanc, qui met un fort accent depuis deux ans sur la manufacture historique Minerva, spécialiste du chronographe acquise en 2006 par le groupe Richemont et purement et simplement «attribuée» à sa marque.
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«Le patrimoine est extraordinaire: nous avons la chance que Minerva n’ait jamais été victime d’incendies ni d’inondations malgré ses
160 ans d’histoire, souligne Davide Cerrato, responsable de la division horlogère de Montblanc. Tout est dans un état de conservation extraordinaire, qu’il s’agisse du millier de garde-temps historiques, de mouvements anciens, de composants, de boîtiers ou des archives papier. Nous possédons encore tous les livres de compte de la maison.» Alors qu’il était chez Tudor, Davide Cerrato avait déjà remis au goût du jour, avant l’ère de «vintagemania» que nous connaissons aujourd’hui, le patrimoine de cette marque, notamment avec la relance du modèle Heritage Chrono en 2010, puis de la Black Bay. Avec Minerva, il retrouve chez Montblanc un terreau fertile... lorsque nous l’avons rencontré, cet esthète féru d’histoire avait d’ailleurs dans sa poche un cadran vintage des années 1950! «Tout n’a pas encore été exhumé de ce véritable tombeau de Toutankhamon, s’enthousiasme-t-il. J’y fais des découvertes chaque semaine. Nous commençons seulement à établir un catalogue raisonné de tout ce patrimoine. Nous entamons également sa numérisation, qui pourra aboutir à des expériences interactives à travers le passé de Minerva, grâce aux possibilités des technologies numériques.» Un patrimoine qui constitue une source d’inspiration inépuisable pour celui qui est aussi designer. La marque poursuit dans cette veine, ayant présenté lors du dernier SIHH de nombreux modèles dans la collection Heritage, au nom explicite… Mais pourquoi ne pas avoir conservé la manufacture Minerva en tant que telle? «C’est inédit, certes, répond Davide Cerrato. Montblanc n’a que deux décennies d’histoire horlogère. Nous sommes en train de la fusionner avec Minerva pour extraire le meilleur de ces deux mondes.» Il suffit de regarder le catalogue des productions Montblanc de ces deux dernières années, à l’image de la 1858 Geosphere, pour comprendre le travail en cours sur le patrimoine, au sein d’une marque
qui explore en parallèle le monde de la connexion avec la Summit et celui des hautes complications. Le spectre est large... Le vintage n’est pas une vague tendancielle, mais «un grand cycle de fond», estime Davide Cerrato. «Les années 1970 étaient la dernière période où l’on considérait encore l’avenir avec optimisme. On imagi-
«Les années 1970 étaient la dernière période où l’on considérait encore l’avenir avec optimisme. Aujourd’hui, nous sommes passés à un regard plutôt catastrophiste sur le futur.» Davide Cerrato, responsable de la division horlogère de Montblanc
nait des lendemains qui chantent, avec des voitures volantes. Cette confiance dans les technologies s’exprimait fortement dans le design, ce qui explique l’intérêt actuel pour cette période. Aujourd’hui, nous sommes passés à un regard plutôt catastrophiste sur le futur. Beaucoup préfèrent regarder vers l’histoire, car une nouvelle vision de l’avenir ne s’est pas encore imposée. La discussion ne fait que commencer.» A ce titre, on peut s’attendre à une explosion des recherches sur le patrimoine horloger dans les années à venir.
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Swiss style et horlogerie: le rendez-vous manqué Grands utilisateurs de caractères, les horlogers suisses n’ont pas capitalisé sur la réputation d’excellence de leur pays en matière de typographie. Ils font même preuve d’une certaine négligence, estiment les professionnels. Enquête. Par Pierre Grosjean /
Un «vide sidéral» Le designer horloger indépendant Eric Giroud, qui travaille pour plusieurs fabricants, se montre tout aussi sévère: «L’usage de la typographie dans l’horlogerie suisse relève d’un vide sidéral, lâche-t-il. C’est très étonnant. Je suis architecte de formation, j’essaie donc d’être rigoureux sur ces questions-là. Mais je constate une méconnaissance terrible du côté des marques: les responsables ne se rendent pas compte de l’importance de la typographie.» Il arrive que des horlogers choisissent un logo en se basant sur leur seul goût personnel. Plutôt que d’aller à l’essentiel en réduisant le vocabulaire graphique, ils optent pour un mélange de polices et donnent libre cours à leur fantaisie. Résultat: des incohérences que l’on remarque sur de nombreuses pièces, y compris auprès des fabricants les plus réputés. Le logo d’Audemars Piguet, par
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Les horlogers suisses répètent volontiers qu’ils maîtrisent leur production jusqu’au moindre détail. Dans une montre, disent-ils, chaque micro-élément occupe sa juste place. C’est sans doute vrai en matière de mécanique. Mais il y a aussi, dans la pièce, un éléphant dont personne ne parle: la typographie. Qu’il s’agisse des chiffres (pour les heures et la date) ou des lettres (pour le logo de la marque, le nom du modèle ou encore l’indication Swiss made), les caractères typographiques jouent un rôle central dans l’identité d’une montre. Ils peuvent évoquer le classicisme, la tradition, mais aussi la force, la précision, la technique… Chaque police typographique renvoie à un univers précis. Dans l’horlogerie suisse, pourtant, les caractères sont souvent choisis et assemblés sans véritable réflexion. «Il suffit de jeter un œil sur la production horlogère contemporaine pour s’en rendre compte: chez la plupart des fabricants, les choix typographiques manquent d’originalité et de professionnalisme», dit le designer Vincent Sauvaire, qui a écrit un mémoire sur ce sujet lors ses études à l’Ecole cantonale d’art de Lausanne (Ecal).
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le brief se résume à une discussion dans un café!» Comment expliquer une telle légèreté? Le soin maniaque du détail qui avait fait la réputation de cette industrie se serait-il émoussé dans l’euphorie des années de croissance? «C’est possible, répond Eric Giroud. Les marques ont pu écouler leurs modèles sans se donner trop de peine en matière de recherche typographique.» La question est aussi culturelle. «Les compétences de graphiste ne sont pas valorisées dans l’horlogerie et c’est regrettable, poursuit son confrère Antoine Tschumi. La question du budget domine toutes les autres: pour créer une montre de milieu de gamme, par exemple, un designer dispose de 100 à 200 heures de travail au total. Il aurait besoin de davantage de temps pour effectuer un vrai travail typographique.»
«Les erreurs Une vraie carte typographiques ne se limitent pas aux cadrans. à jouer On les remarque aussi Encore faudrait-il que les desisur les mouvements.» gners horlogers soient formés à la ferroviaire, ou encore Ventura qui Eric Giroud, designer horloger indépendant
exemple, a longtemps affiché deux types d’empattements peu compatibles (il a été corrigé récemment). Sur un cadran de Vacheron Constantin, les jours de la semaine étaient bizarrement indiqués dans des typographies différentes. Même le géant Rolex, considéré comme l’un des plus fiables en matière de typo, est parfois pris en faute: il présente sur son site internet un cadran de son modèle Explorer avec un interlettrage irrégulier entre le L et le O.
Abus d’Arial? Chez la plupart des fabricants, c’est «un vrai festival de maladresses», résume Eric Giroud. «Et les erreurs typographiques ne se limitent pas aux cadrans. On les remarque aussi sur les mouvements, où des gravures indiquent par exemple le nombre de rubis… Les ingénieurs ajoutent tout un blabla sans se soucier de typographie: ils collent de l’Arial partout» (le caractère Arial est considéré comme une copie bon marché du célèbre Helvetica, ndlr). Le problème est souvent lié au processus de création. «Quand nous recevons un brief pour une nouvelle montre, l’univers typographique n’est même pas évoqué, indique le designer Antoine Tschumi, dont l’agence Neodesis travaille pour plusieurs maisons. Il arrive même que
typographie… «La filière horlogère des Hautes écoles spécialisées à Neuchâtel n’inclut pas de cours de typo, déplore Antoine Tschumi. Leur formation n’est pas assez pratique.» Même constat à Genève, où la nouvelle chaire en design horloger de la HEAD (Haute école d’art et de design) n’inclut pas non plus de cours de typographie. Ce désintérêt est d’autant plus étonnant que l’horlogerie suisse dispose d’une vraie carte à jouer pour séduire les clients sensibles à la beauté des chiffres. Le pays est considéré comme le berceau de la typographie moderne. Les professionnels vénèrent le fameux Swiss style, celui qui a dominé le secteur graphique mondial pendant plusieurs décennies et qui a influencé tant le minimalisme des produits Apple que la signalétique du métro new-yorkais. Or les marques horlogères suisses n’ont pas voulu, ou pas su, capitaliser sur cette réputation – mis à part quelques exceptions comme Mondaine et sa reprise du cadran
a commandé un cadran à Adrian Frutiger. «Mais il ne faut pas oublier que le graphisme suisse est une notion relativement récente: elle remonte aux années 1940 tout au plus», rappelle le professeur de typographie François Rappo. Alors que les grandes manufactures horlogères font appel à une tradition beaucoup plus ancienne. «Leur ADN est plus fort que celui du graphisme suisse», ajoute-til en évoquant les créations de Patek Philippe et Breguet.
Des Allemands plus sensibles Au cours des dernières décennies, ce sont ainsi des marques allemandes comme Junghans (avec son cadran dessiné par Max Bill en 1961) ou encore Nomos Glashütte qui ont pu se positionner sur le segment de la rigueur contemporaine. «Le grand talent de ces marques, c’est de travailler avec des designers qui ont
Un bel exemple de Swiss Style dans les pages d’Europa Star en 1961: la collaboration entre l’artiste suisse Max Bill et la marque allemande Junghans demeure une référence stylistique et typographique.
été formés à la typographie», relève le journaliste horloger Timm Delfs, co-auteur d’un livre sur le design horloger («On Time», Museum für Gestaltung, Zurich). Les marques suisses vont-elles les imiter? Vincent Sauvaire y croit. «C’est parce que j’étais fasciné par le style typographique international et notamment le travail de Josef Müller-Brockmann autour du système de grille que j’ai choisi de venir étudier le graphisme et la typographie en Suisse, raconte-t-il. Et comme j’ai été étonné par l’ampleur du travail qui restait à faire à ce sujet dans l’horlogerie, j’ai commencé à proposer mes services aux grandes marques.» Avec un certain succès: il a eu l’occasion de collaborer avec plusieurs entreprises basées en Suisse, dont Vacheron Constantin et La Montre Hermès.
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Les générations de Patek Philippe La notion de patrimoine est chevillée au corps de Patek Philippe, pourrait-on dire. Le célèbre slogan de la marque, «You never actually own a Patek Philippe. You merely look after it for the next generation», n'est pas qu'une simple formule publicitaire devenue culte. Elle reflète une réalité multiple qui s'incarne certes dans la qualité «intemporelle» des garde-temps produits par la manufacture genevoise mais qui trouve ses racines tout aussi bien dans son splendide Musée en Ville de Genève que dans son Service Client capable de réparer toutes les montres produites par Patek Philippe depuis sa création en 1839 ou encore dans la gestion ultra-rigoureuse de ses archives historiques. Pour en parler, Europa Star a eu le rare privilège de s'entretenir avec Philippe Stern. Désormais retiré du pilotage opérationnel de la maison, qu'il a confiée depuis 2009 à son fils Thierry Stern, il a bien voulu sortir de sa réserve pour évoquer précisément la notion de patrimoine et son importance fondamentale. Propos recueillis par Pierre Maillard
Europa Star: Commençons par le plus visible, le plus public. La plus spectaculaire démonstration de l'importance du patrimoine pour Patek Philippe n'est-elle pas son Musée? Un des plus beaux musées d'horlogerie qui soit. Comment s'est-il constitué et pour quelles raisons? Philippe Stern: J'ai rejoint la maison familiale en 1962 et je me suis vite rendu compte que nous n'avions pas de véritable collection interne. A peine quelques montres de poche dans de petites vitrines qui regroupaient une quarantaine de garde-temps un peu épars retrouvés dans nos stocks. Or, au cours de mes voyages aux Etats-Unis où l'on m'avait envoyé, je me suis rendu compte qu'il existait une base de collectionneurs qui s'intéressaient à notre passé et au passé de l'horlogerie en général. J'ai donc commencé à m'y intéresser de plus près et je me suis mis à constituer pas à pas une collection de montres Patek Philippe de toutes époques, rachetées au gré des différentes opportunités qui se présentaient. Il s'agissait alors essentiellement de rassembler une collection à but patrimonial. A l'époque, dans les années 1960, on pouvait trouver des montres-bracelet, qui n'intéressaient guère les collectionneurs, à des prix incroyables. Je me souviens par exemple d'avoir acheté à l'époque une très rare répé-
«Notre service d'extraits d'archives accessible au public à travers un site dédié a connu une augmentation de trafic phénoménale. Ces cinq dernières années tout particulièrement, ces demandes de renseignement ont décuplé.» tition minutes Référence 2419 pour 30'000 CHF. Une somme, mais aujourd'hui, une telle montre se négocie autour du million.
Philippe Stern, du temps de sa présidence, dans le local où sont précieusement conservés tous les Livres d’Etablissement de la Manufacture depuis 1839. Chaque montre produite y est individuellement inscrite et documentée selon une classification qui est restée identique depuis les débuts.
Votre ambition a vite dépassé la seule collecte de montres Patek Philippe pour embrasser toute l'histoire de l'horlogerie...
quement les montres Patek Philippe qui prennent le relais et illustrent chronologiquement la suite de cette continuité historique.
Au départ, l'ambition était de retracer l'évolution de l'horlogerie de Patek Philippe depuis sa création en 1839. Mais dès les années 1975-76, je me suis aussi intéressé aux montres anciennes depuis les débuts de l'horlogerie. L'idée était d'être en mesure de retracer pas à pas l'intégralité de l'évolution technique et esthétique de l'horlogerie depuis son invention au XVIème siècle, avec notamment la première montre jamais construite, et ce jusqu'en 1839. A partir de cette date, ce sont uni-
Constituer une telle collection cohérente témoigne visiblement d'une ambition aussi pédagogique... Dès le départ j'avais la volonté de pouvoir un jour exposer cette collection au public. Il n'existait pas vraiment jusqu'alors de musée qui retrace ainsi l'histoire de l'horlogerie. Toutes nos nombreuses acquisitions, notamment dans les ventes aux enchères, se sont faites dans cet objectif. Je recherchais des pièces en bon état, documentées, incarnant
les étapes les plus importantes et les évolutions les plus marquantes de cette industrie et de cet art décoratif. En tout, ce sont environ 2’500 pièces qui ont été réunies. En ce moment, au Musée, vous renforcez encore l'aspect pédagogique de vos présentations. Oui, nous revoyons l'intégralité des vitrines afin de mieux situer les pièces dans leur contexte historique. Le visiteur pourra désormais accomplir son parcours avec un iPad en mains. Chaque vitrine est numérotée et, via son iPad ou des bornes interactives, le visiteur pourra trouver une explication détaillée sur
chaque montre exposée. L'idée est de mettre en relation l'objet horloger avec l'évolution culturelle, le contexte historique, la civilisation européenne, les développements apparus en Allemagne, en Angleterre, puis en Suisse. L'horlogerie n'est pas un produit «hors sol», elle témoigne aussi fortement de son époque, sous tous ses aspects. Cette amélioration de notre présentation a demandé un effort considérable. J'ai d'ailleurs personnellement tout relu. Les vitrines ont été adaptées, le nombre de pièces exposées a été réduit. Il y en avait trop, le nombre idéal a été fixé à un millier, réparties dans 150 vitrines. Il ne faut pas non plus saouler le public!
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ne se perdent pas dans les brumes de l'Histoire. Et aujourd'hui, nous sommes bien aise d'avoir pris une telle décision. Et nos pendulettes Dôme sont revenues sur le devant de la scène. Qui l'aurait cru il y a plus de 50 ans! Les ventes aux enchères ont joué semble-t-il un rôle essentiel dans le regain d'intérêt envers le patrimoine horloger dans son ensemble. Or avec Patek Philippe vous avez joué un rôle central dans ce domaine, ce qui a aussi grandement contribué à la très haute cote de vos montres.
Le jeune Philippe Stern aux côtés d’Henri Stern, alors président, dans les années 1960. Derrière les deux hommes, on peut entrevoir les petites vitrines qui constituaient alors toute la collection privée de Patek Philippe.
Ce vaste travail patrimonial ne se limite pas aux seuls garde-temps exposés... Non, bien sûr. Nous exposons aussi des automates, des objets en peinture miniature sur émail – une grande spécialité genevoise – ou encore des machines, sans oublier notre bibliothèque qui comprend plus de 8'000 ouvrages relatifs à l'horlogerie, dont certains très rares, des documents ainsi que les archives de notre maison. Il s'agit d'un travail en vue de la transmission. Quelle importance a-t-elle pour l'horlogerie? Elle est essentielle. Mais pour que transmission s'opère, il faut qu'il y ait au préalable conservation. Cette notion de conservation est véritablement ancrée au coeur de notre entreprise familiale. Au cours de tous les déménagements de notre histoire, nous avons toujours pris soin de tout conserver, et ce même durant la période du quartz qui a vu tant d'horlogers se débarrasser de ce qui était alors considéré comme devenu inutile. Courriers, échanges, écrits fondateurs, photos, dessins, publicités, maquettes, tout a été conservé. Nous pouvons aussi retrouver dans nos livres d'établissement soigneusement tenus depuis notre fondation tous les détails liés à chacune de nos montres produites au cours de notre histoire: type de montre, numéro de mouvement, calibre, numéro de boîtier, style, type de cadran, date de fabrication, date de vente, type de bracelet, autres informations le cas échéant. Depuis quelques années, la vogue de la montre dite vintage bat son plein. Avez-vous ressenti un regain d'intérêt envers les pièces anciennes?
Notre service d'extraits d'archives accessible au public à travers un site dédié a connu une augmentation de trafic phénoménale. Ces cinq dernières années tout particulièrement, ces demandes de renseignement ont décuplé. Il en va de même avec notre Service Client qui peut prendre en charge la réparation voire la restauration de n'importe quelle montre produite depuis 1836. Nous conservons de 6 à 8 millions de composants, dont certains ont plus de 150 ans et qui couvrent environ 95% de nos besoins. Chaque fois que la production d'un modèle s'arrête, nous produisons des composants supplémentaires qui couvrent nos besoins pour une cinquantaine d'années. C'est un patrimoine vivant, un véritable trésor qu'il est très coûteux de conserver mais qui est indispensable pour que la transmission ne soit pas un vain mot mais une réalité concrète. Chaque année, nous effectuons près de 90'000 interventions, services complets et restaurations. Et ce chiffre, qui dépasse de loin celui de notre production annuelle, est en constante augmentation. Mais le patrimoine n'est pas seulement matériel, il est aussi immatériel. Il y a les savoir-faire, les secrets du métier... Effectivement, un patrimoine, pour rester vivant, pour être conservé, doit être entretenu. Cela passe évidemment par la transmission des techniques et des savoir-faire d'une génération d'horlogers à l'autre, et ce même quand on pense qu'une technologie particulière est dépassée ou ne sert plus à rien. Qui sait si elle ne reviendra pas un jour? L'exemple de nos pendulettes Dôme, qui sont le reflet de notre maîtrise des métiers d'art les plus rares, l’illustre bien. Vers 1965,
nous en avions une centaine déjà en stock, elles ne se vendaient plus mais pourtant nous avons continué à en produire. Il s'agissait avant tout de conserver les savoir-faire nécessaires à leur réalisation. A l'époque, plus personne ou presque ne faisait de l'émail. Nous avons continué à donner du travail à nos émailleurs pour que leurs «secrets»
Coïncidant avec nos 150 ans, en 1989, Osvaldo Patrizzi, le fondateur d'Antiquorum, a organisé The Art of Patek Philippe, qui est sans doute la première vente thématique en horlogerie. En véritable visionnaire et en pleine «renaissance» de l'horlogerie mécanique, il a joué un important rôle de précurseur. A la même date, après neuf ans de travail, nous avons présenté notre montre commémorative Calibre 89 avec ses 33 complications dont un carillon avec Grande et Petite Sonneries et répétition minutes. Si je cite tout particulièrement cet exemple, c'est qu'il est emblématique du travail mené autour du patrimoine horloger. Notre première répétition minutes date de 1845 puis nous en avons produit régulièrement, en poche, puis sur montre-bracelet dès 1906, la plupart à partir d'ébauches de la
Vallée de Joux. Et ce jusqu'à la fin des années 1950. Il s'agissait essentiellement de pièces rares, réalisées de manière classique avec les outils traditionnels par des maîtres-horlogers qui travaillaient sans filet, ajustaient et réglaient leurs pièces individuellement. Ce qui explique l'absence de véritables plans. La conception puis la réalisation du Calibre 89 marque un changement d'approche fondamental car l'idée était de pouvoir reproduire à l'identique ces mécanismes compliqués. C'est l'entrée dans la danse des ingénieurs... Tout à fait. Nous avons mis en place un véritable bureau technique et d'ingénierie qui devait réaliser des plans, déterminer les cotes, etc., de façon à rendre les opérations reproductibles. Mais tout à côté, nous avions encore des ébauches de la Vallée de Joux, confiées à nos horlogers-restaurateurs, des dessins, des descriptions de pièces anciennes: une mine d'informations de premier ordre sur le fonctionnement de tel ou tel mécanisme, sur les solutions imaginées par nos ancêtres. Sans ce patrimoine, sur le-
«La conception puis la réalisation du Calibre 89 marque un changement d'approche fondamental car l'idée était de pouvoir reproduire à l'identique ces mécanismes compliqués.» quel les ingénieurs se sont méticuleusement penchés, peut-être que nous ne serions jamais parvenus à réaliser ce chef d'oeuvre de complication qu'est le Calibre 89. Cette démarche, à la fois de l'ordre de la transmission et de la transformation des méthodes et des solutions, du passage de l'ingéniosité purement manuelle à la gestion technique et reproductible, a tracé la voie vers la naissance d'une nouvelle génération de montres à sonnerie. Une véritable renaissance, un nouveau futur rendu possible aussi par le recours aux enseignements du passé. En documentant toutes les opérations, en se donnant les moyens d'être toujours capable de reproduire une pièce dans le futur, on assure au patrimoine sa subsistance dans le long terme. En 1996, Patek Philippe regroupe tous ses centres de production à Plan-les-Ouates, dans la banlieue de Genève. A l’époque, on estime que le nouveau bâtiment ultra-moderne fera l’affaire pour des décennies. Mais en 2015, la décision est prise de construire un nouveau bâtiment supplémentaire, devisé à 500 millions de francs, entièrement en fonds propres. «C’est la dernière décision que j’ai prise», commente Philippe Stern qui a passé le relais à de son fils Thierry Stern, désormais président. Un sacré pari sur l’avenir.
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Museum in Motion est un programme d’exposition itinérante lancé par TAG Heuer.
«Le monde étoilé de Zenith», une formule originale de découverte du patrimoine de la manufacture fondée en 1865.
La quête d’une histoire sans fin Jamais le patrimoine horloger des marques n’a été aussi documenté. La mode du vintage y contribue, contraignant les maisons à se référer sans cesse aux archives. Au-delà de cette tendance, la préservation du patrimoine des marques est une mission qu’elles abordent en ordre relativement dispersé. Question de philosophie, de densité d’héritage mais aussi de priorité et de moyens. Par Olivier Müller
L’amorce est facile mais, une fois de plus, l’on n’y résistera pas: sonder les archives et le patrimoine revient déjà à savoir comment véritablement les définir. Sur ce point, l’étymologie est une fois encore d’un grand secours – et pleine de surprises! L’illustre Dictionnaire historique de la langue française d’Alain Rey (2’383 pages d’érudition de haute voltige) rappelle que le patrimoine représente tout ce qui est hérité du père (pater). Au Moyen Age, l’on pouvait d’ailleurs opposer le patrimoine... au matrimoine. Beaucoup plus surprenant: contrairement à ce que l’on pourrait penser, les «archives» ne proviennent absolument pas du grec archeos, qui signifie «ancien», mais de arkheion: la «résidence des hauts magistrats de la cité». En somme, les archives ne sont pas les documents anciens auxquels on pense de prime abord, mais les documents importants de la cité. Voilà qui pose le débat! Aujourd’hui, avec leur patrimoine, les maisons horlogères n’ont d’autre mission que de nourrir leur propre histoire. Chacune avance à sa manière. Globalement, toutes les mai-
sons ont compris l’importance de cet exercice, mais trois éléments différencient leur approche: les moyens qu’elles y consacrent, l’état d’avancement de la sauvegarde de leur patrimoine et l’usage qu’elles en font.
Une organisation interne qui en dit long La plupart des manufactures possèdent aujourd’hui un département dédié. On l’appellera tantôt Patrimoine, Image ou encore Brand Heritage. Premier constat: le service auquel est rattaché ce département est tout sauf anodin. Il révèle très clairement l’usage envisagé pour le patrimoine de la marque. Cas le plus fréquent: un rattachement direct au service marketing. La volonté organisationnelle est dans ce cas sans équivoque, le patrimoine de la marque étant mis essentiellement au service du storytelling construit sur mesure pour chaque nouveau produit. En ces temps où le vintage fait rage, c’est évidemment un immense avantage que de pouvoir ancrer une réédi-
tion contemporaine dans son environnement originel, avec force publicités d’époque, extraits d’archives, catalogues et réclames. Quelques cas diffèrent. L’un des plus singuliers est celui de Zenith: le département Patrimoine y est rattaché au service clients. «Notre mission est d’écouter où bat le cœur des collectionneurs qui nous contactent afin de mieux construire l’avenir, explique Laurence Bodenmann, Heritage Manager au sein de la marque du Locle. Nous recevons une quinzaine de questions par jour sur le site et nous discutons en direct avec les clients et collectionneurs. Nous collaborons alors avec le département produits et mouvements, auquel nous remémorons au passage nos anciennes réalisations, afin qu’ils puissent construire la suite de l’histoire Zenith.»
Quand TAG Heuer et Breitling ressuscitent leur patrimoine Autre cas atypique, toujours dans le groupe LVMH: le travail titanesque de TAG Heuer pour reconstruire son patrimoine. La Direction Héritage a été concrétisée par Jean-Claude Biver en 2017 pour construire l’histoire autour des récentes relances de la marque – Carrera et Autavia en tête. «Auparavant, le patrimoine était géré par le SAV, sans réelle connaissance du prix des composants historiques. Nous avons notamment constaté une hémorragie de cadrans d’époque, explique Catherine Eberlé-Devaux, qui occupe la fonc-
tion depuis deux ans. Aujourd’hui, nous avons référencé et indexé plus de 10'000 documents et prix qui nous permettent autant de reconstruire notre histoire que de connaître la valeur de notre stock de composants historiques. Le plus important est d’éviter que nos collaborateurs arbitrent eux-mêmes, en interne, ce qui est important et
Preuve de l’importance particulière de la redécouverte du patrimoine pour la communication en ligne des marques, l’un des acteurs de ce travail chez Breitling n’est autre que le responsable des réseaux sociaux. ce qui ne l’est pas. Par exemple, le mois dernier, le département légal m’a remis un carton dont il n’avait plus l’usage. J’y ai retrouvé nos contrats originaux d’engagement de commandes du tout premier Calibre 11!» Cas singulier également que celui de Breitling, la marque aujourd’hui emmenée par Georges Kern. Deux postes ont été créés en 2017 pour littéralement recréer son patrimoine. L’un d’eux est géré à temps partiel par... le responsable des réseaux sociaux de la manufacture. L’objectif est donc triple: collecter, partager, fédérer. Une tâche colossale: en effet, «le patrimoine n’était pas une priorité de la marque par le passé, explique
Tim Sayler, directeur marketing de Breitling. Nous n’avions que 200 pièces, mal documentées. Depuis un an, nous en avons racheté une bonne trentaine, aux enchères, auprès de collectionneurs, mais pas seulement. Nous recherchons pièces et documents à Granges, à La Chauxde-Fonds, dans nos sous-sols... Il reste beaucoup à faire.»
1,4 km d’archives... Le volume des pièces conservées au patrimoine n’est certes qu’un chiffre, mais il témoigne malgré tout de la puissance de la volonté patrimoniale d’une marque. Certains sont éloquents. «La collection Cartier a été créée en 1983 et comporte aujourd’hui plus de 2’000 pièces», indique Pierre Rainero, Directeur style, image et patrimoine de la maison. Son département est probablement l’un des plus imposants à l’heure actuelle: une quarantaine de collaborateurs. Toujours chez Richemont, Van Cleef & Arpels atteint des chiffres astronomiques en cumulant horlogerie et joaillerie: 1’400 mètres linéaires d’archives, 100'000 dessins, 250'000 gouaches, 100'000 diapositives, 50'000 photos. La Direction du Patrimoine a été créée il y a près de 20 ans et est toujours occupée par la même personne. Les archives sont complètes depuis 1906. Enfin, il ne faudrait pas oublier la précision nippone de Seiko: «Notre musée totalise 13'794 montres, dont 497 sont exposées, et 1’836 horloges, dont 235 exposées, explique la marque avec une rare précision. Neuf personnes travaillent à plein temps au musée et forment, chez nous, l’équivalent d’un Département Patrimoine.»
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Une première vision du nouveau musée d’Audemars Piguet, qui ouvrira ses portes l’an prochain au Brassus.
Un descendant direct au Patrimoine Le caractère complet (ou non) des archives est d’ailleurs un Graal que tous les historiens horlogers poursuivent. Ils ne jouent pas à jeu égal. Chez Breguet, la présence au Comité de Direction d’Emmanuel Breguet est un atout considérable pour la manufacture: «J’ai publié la première véritable biographie de mon aïeul il y a un peu plus de vingt ans. Il n’y a jamais eu de rupture dans l’indexation des pièces, mouvements et cadrans de chacune de nos montres. C’est un corpus très homogène, un cas rarissime en horlogerie.» Emmanuel Breguet poursuit: «Tout le patrimoine depuis 1780 a été numérisé sans exception et toute demande d’authentification passe par moi. Je peux y répondre en quelques minutes d’un coup d’œil mais, au besoin, j’ai toujours avec moi ma tablette depuis laquelle je peux consulter en quelques secondes 250 ans d’archives toutes parfaitement indexées.»
Emmnanuel Breguet supervise le patrimoine au sein de la marque fondée par son ancêtre.
Outre la volonté mémorielle de l’homme, celle du Swatch Group est évidente. Ce dernier applique des processus industriels autant à son horlogerie qu’à son héritage. Tout ce qui est produit par le Swatch Group est indexé, numérisé, classé, archivé, qu’il s’agisse de marques
sur ce qui a déjà été fait. Il ne faut pas oublier que les principaux faussaires de l’histoire des marques, ce sont les marques elles-mêmes. A travers leurs livres, elles ne poursuivent pas toujours une vérité historique mais une gloire dont elles pourront tirer bénéfice. C’est flagrant, hier comme aujourd’hui, sur les inventions et dépôts de brevets dont un grand nombre de paternité sont contestables.»
«Les principaux faussaires de l’histoire des marques sont souvent les marques elles-mêmes. A travers leurs livres, elles ne poursuivent pas toujours une vérité historique mais une gloire dont elles pourront tirer bénéfice.» Sébastien Chaulmontet, auteur du livre Chronographes de collection
purement horlogères ou d’un fabricant de mouvements comme ETA. La démarche est particulièrement évidente chez Longines. De ses 185 ans d’histoire, la marque a conservé pas moins de 10'000 montres et la totalité – sans exception – de ses registres de production. «C’est probablement le patrimoine horloger le plus complet et le mieux organisé au monde», explique Sébastien Chaulmontet, co-auteur du très remarqué Chronographes de collection, dont il est un expert. «Il ne faut pas oublier que lorsque les marques ont traversé des périodes difficiles, la première chose passée par la benne, c’était généralement les archives, rappelle-t-il. En ces temps où l’on fait l’apologie de la micro-différence de cadran, d’aiguille ou d’index, il est bon d’avoir un recul historique complet
Incontournable musée? Pour beaucoup de marques, les archives restent confidentielles. L’approche muséale «se cherche» encore. Les manufactures hésitent le plus souvent entre deux possibilités: le musée centralisé ou l’exposition itinérante. Audemars Piguet ouvrira ainsi son musée en 2020. « Nous y exposerons 95% de pièces maison et quelquesunes représentatives de la Vallée de Joux, explique Sebastian Vivas, Directeur Musée et Patrimoine de la manufacture. Depuis 2012, nous avons racheté près de 500 pièces qui y seront exposées en collections permanentes ou temporaires.» De son côté, Zenith a adopté une approche grand public avec son initiative récente, baptisée «Le monde étoilé de Zenith»: chaque vendredi matin, un groupe de dix personnes suit un parcours dédié. Ce concept original est mené en partenariat avec l’Office de Tourisme de Neuchâtel. «Faire un musée pour un musée ne m’intéressait pas, explique Julien Tornare, CEO de la maison. Beaucoup trop de marques sont prisonnières de leur histoire. Il faut expliquer le lien entre son patrimoine et les collections actuelles.» D’autres projets sont en cours: Eberhard & Co, dont le patrimoine reste méconnu, vient tout juste de revenir en son immeuble historique de La Chaux-de-Fonds.
Sebastian Vivas, Directeur Musée et Patrimoine chez Audemars Piguet
«Créer un musée sur place, en notre lieu de naissance, aurait tout son sens», glisse le CEO Mario Peserico. Le projet est à l’étude.
Le numérique encore très peu exploité L’idée d’un partage du patrimoine et des archives horlogères se répand – et sur ce point, le digital offre des perspectives qui restent largement sous-exploitées aujourd’hui. «Nous croyons d’abord au contact physique avec le public. Il est dommage que le Musée Virtuel de la Reverso ne soit plus en ligne mais il y a des priorités à respecter, autant que des budgets», explique Stéphane Belmont, Directeur du Patrimoine chez Jaeger-LeCoultre Les Ateliers Louis Moinet ont pris la balle au bond: faute de budgets à hauteur du groupe Richemont, la marque indépendante nichée dans les coteaux de Saint-Blaise (NE) a ouvert son musée digital cette année, permettant d’exposer virtuellement une partie non négligeable des créations Louis Moinet, inventeur du chronographe en 1816 et dont l’histoire reste en grande partie à découvrir. Cette initiative digitale est à rapprocher de celle d’IWC, manufacture dont le musée jouit à lui seul de sa propre page Facebook. Enfin, les expositions itinérantes restent l’apanage de grandes maisons aux moyens substantiels. Cartier en fait partie et reste en tête en la matière. Depuis 1989, la maison a organisé 34 expositions dans les plus grands musées du monde. Celles de Van Cleef & Arpels sont bien moins nombreuses (moins d’une di-
zaine), mais peuvent attirer jusqu’à 180’000 visiteurs – un score honorable, mais qui reste malgré tout loin, très loin, des 420'000 visiteurs de l’exposition Cartier Anniversary tenue à New York en 1997, le plus important succès de la maison à ce jour. TAG Heuer a également développé un format itinérant, baptisé Heuer Globetrotter, dans 9 villes d’exposition dans le monde. La route se poursuit aujourd’hui avec Museum in Motion, un nouveau programme muséal itinérant d’un an à travers 70 villes. A sa mesure, le musée IWC n’a pas à rougir, avec 8'000 visiteurs par an à Schaffhouse, contre 3'000 personnes à Saint-Imier pour le Musée Longines. De son côté, Bulgari a investi rien de moins que le Kremlin à Moscou pour une grande rétrospective qui s’est tenue jusqu’en janvier. Le symbole éclatant d’un patrimoine qui revient sur le devant de la scène et légitime plus que jamais les marques dans leurs créations contemporaines. Le musée IWC à Schaffhouse, à la scénographie ultra-contemporaine
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Vacheron Constantin: une vision à 360° du patrimoine et des archives La manufacture genevoise a été pionnière dans la restauration et la vente de ses garde-temps les plus anciens, lançant même un compte Instagram dédié. Une compétence qui se base d’abord sur le maintien impeccable des archives et qui est en train de faire des émules dans l’industrie. Par Serge
et
Pierre Maillard
Comment faire vivre les archives et... vivre des archives? Vacheron Constantin a élaboré une formule inédite: via sa ligne des Collectionneurs, la marque rachète, restaure et revend ses propres gardetemps vintage – datant d’avant 1970. Un compte Instagram dédié, @thehourlounge, a même été établi dans ce but, la maison ayant bien saisi que les réseaux sociaux étaient aujourd’hui le premier vecteur d’information – voire de vente – en ce qui concerne les modèles d’antan. «Une maison classique comme la nôtre se nourrit naturellement d’éléments du passé, souligne Christian Selmoni, directeur Style et Patrimoine chez Vacheron Constantin. Notre entreprise a aujourd’hui 264 ans d’histoire continue et documentée. Il y a une constance dans le style: cette conscience provient des archives qui représentent pour nous une mine d’or à plus d’un titre.» Les archives de la marque équivalent à 420 mètres linéaires de papier, soit 4 millions de pages, et 200'000 lettres de correspondance. Sa collection privée comprend 1'500 pièces horlogères depuis le 18ème siècle. Une petite dizaine d’«enquêteurs» sont employés par Vacheron Constantin pour entretenir, préserver, sauvegarder et ultimement numériser ce vaste corpus – un travail de longue haleine: la marque en est à l’heure actuelle à environ 10% de numérisation du total de ses archives.
Le pouvoir du vintage «Nos documents remontent jusqu’à la première montre fabriquée et vendue, précise Christian Selmoni. Les archives ont de nombreuses utilités, qu’il s’agisse de présenter notre héritage aux clients ou d’entretenir et de restaurer des pièces à leur intention.» Vacheron Constantin offre aujourd’hui une garantie de deux ans sur les modèles de la série des Collectionneurs, qui sont proposés dans son réseau de boutiques lors d’événements dédiés. Toutes les pièces sont accompagnées de documents attestant
de l’origine et de l’histoire de la montre, provenant directement du travail effectué par le département du patrimoine. Des documents qui, en lien avec les équipes du service après-vente, permettent aussi de refaire ex nihilo des composants disparus ou trop altérés. «La clientèle pour ce genre de produits est vraiment globale, explique Christian Selmoni. Nous venons par exemple de vendre à un client coréen, via Instagram, une montre de poche datant de 1924 qui servait au chronométrage de courses de chevaux.»
«Nous venons de vendre à un client coréen, via Instagram, une montre de poche datant de 1924 qui servait au chronométrage de courses de chevaux.» Christian Selmoni, directeur Style et Patrimoine de Vacheron Constantin
Vacheron Constantin a donc choisi d’internaliser la revente de ses garde-temps historiques: une forme de contrôle direct sur son héritage, qui aujourd’hui fait des émules. A travers son service Patrimoine créé en 2016, F.P. Journe rachète, restaure et revend également ses montres anciennes. On peut d’ailleurs voir très précisément sur son site les modèles que l’horloger recherche. Même une marque aussi contemporaine que MB&F, fondée en 2005, restaure désormais elle-même ses propres produc-
tions «anciennes» (façon de parler). D’autres maisons vont sans doute suivre le mouvement. Au sein du groupe Richemont, qui a racheté la plateforme de vente de montres d’occasion Watchfinder, Vacheron Constantin est en effet pour l’heure la seule maison qui réalise ce travail.
Montée en puissance des archivistes Le département des archives joue également un rôle de garant dans la légitimité des rééditions, réinterprétations et relances de modèles historiques, comme c’est le cas autour de la collection Fiftysix, dont le nom trahit bien les origines... Les catalogues de 1956 sont d’ailleurs mis à disposition par les archives de la marque pour accompagner le lancement du modèle
«Le patrimoine est passé du statut de simple prestataire de services à véritable outil de vente, de promotion et de communication.»
sur les marchés. «Il arrive aussi que nous mettions notre veto sur certains développements en cours, précise Christian Selmoni. Depuis quelques années, notre rôle a vraiment gagné en puissance au sein de la maison. Le patrimoine est passé du statut de simple prestataire de services à véritable outil de vente, de promotion et de communication.» Avec des travaux aussi aboutis sur
Montre de poche répétition à quarts datant de 1812. Or rose 18 carats, lunette cannelée, carrure et fond guillochés, centre et bord du fond gravés, cadran en émail. Collection privée Vacheron Constantin.
son héritage, pourquoi ne pas ouvrir un musée? Le concurrent direct Patek Philippe a établi ce qui est sans doute aujourd’hui la référence muséale mondiale dans la capitale globale de l’horlogerie – et qui s’impose d’autant plus que le Musée d’horlogerie de Genève a fermé en 2002 suite à un grave cambriolage. «Ouvrir un musée n’est pas si évident, répond Christian Selmoni. De nombreuses questions légales se posent. Nous optons plutôt pour un redéploiement des visites de notre site à Plan-lesOuates en incluant le patrimoine. Nous sommes aussi en train de développer des solutions innovantes en collaboration avec l’EPFL pour créer des expériences en trois dimensions autour de nos archives et collections privées.» La bataille de l’archive ne fait que commencer!
DOSSIER PATRIMOINE
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Une journée à Saint-Imier Une Longines Flagship de 1957
Plonger dans le patrimoine de Longines, c'est comprendre à quel point cette société a marqué l'industrie horlogère, tant sur le plan technique qu'au travers de créations parmi les plus audacieuses et les plus raffinées jamais imaginées. Si Longines est très respectée par la communauté des collectionneurs, elle est, d'une certaine manière, encore sous-estimée sur le circuit des ventes aux enchères et sur le marché de l'occasion, bien que l'appréciation de la marque soit en hausse. Nous examinons comment Longines gère son patrimoine et son héritage, ce qu'elle a fait méticuleusement depuis de nombreuses années. Par Lorenzo Maillard
Un sentier piétonnier sous la gare mène directement à un passage étroit, gardé par une allée d'arbres parfaitement alignés, qui descend vers le siège historique de Longines. Celui-ci s’y dresse fièrement depuis plus de 150 ans. Bien que la petite ville de SaintImier ait été fondée ici bien avant que l'usine ne soit imaginée, elle donne l'impression d'avoir été construite pour et autour de la manufacture, fournissant à l'entreprise la main-d'œuvre nécessaire et offrant plusieurs lieux où les employés pouvaient déguster une bière bien méritée à la fin d'une journée de travail. Après avoir navigué à travers les services de direction et d'exploitation répartis sur les différents étages de l'immeuble, nous arrivons à l'Atelier du patrimoine mondial, situé directement sous les poutres en bois de la charpente.
Utilisation très concrète des registres historiques Ici, dans une pièce relativement exiguë, dix horlogers ont la tête baissée et les mains au travail pour nettoyer, restaurer et réparer des Longines anciennes. De la Conquest relativement courante des années 1960 à la version militaire originale Majetek, ces horlogers ont la difficile tâche de travailler sur une variété impressionnante de montres et de calibres. Pour les aider, ils disposent de l'une des archives les plus complètes de données historiques, bien entretenues et méticuleusement organisées, depuis les plans de conception d'un calibre des années 1960 jusqu'aux envois pour un détaillant sud-américain dans les années 1930. La quantité et la qualité d'informations sont surprenantes, tout y est magnifiquement préservé. Des personnes dévouées sont aussi constamment à la recherche
de données supplémentaires pour compléter leurs ressources d'information déjà encyclopédiques. Il en va de même pour les pièces de calibres, le mobilier et les fournitures; le département est truffé de tiroirs et d'armoires remplies de calibres, de boîtes, de cadrans, d'aiguilles, de balanciers, de couronnes, de poussoirs... tout ce qu'il faut! Tout est bien rangé et étiqueté. On pourrait passer des heures à ouvrir des tiroirs et à lire de vieux livrets. Tant que le nom Longines ou Wittnauer apparaît sur le cadran ou le mouvement, ces horlogers auront les compétences nécessaires pour réparer ou restaurer ces pièces. Les coûts de restauration/réparation sont assez raisonnables, compte tenu du niveau d'expertise. La marque investit également du temps et de l'énergie pour aider et accompagner les propriétaires de Longines anciennes à en savoir plus sur leur garde-temps en leur fournissant pléthore d’informations. En fait, le service du patrimoine reçoit jusqu'à 50 nouvelles recherches par jour pour des pièces historiques/ vintage. Ils authentifient et identifient les modèles ainsi que les calibres, et peuvent retracer la date exacte de fabrication et, la plupart du temps, le détaillant d'origine. La tâche est prise au sérieux et Longines va même jusqu’à fournir aux propriétaires un certificat d'authentification gratuit, ce qui est rare dans l'industrie.
Le musée de Longines à Saint-Imier
L'entreprise travaille également à la numérisation de ses archives et, à cette fin, elle a signé un partenariat avec une start-up de l'EPFL, en vue de développer une technologie de reconnaissance optique des caractères et des symboles, un projet ambitieux qui a initié un dialogue intéressant entre programmeurs, scientifiques et archivistes.
Parmi les fondateurs de l’industrie Le reste de la journée a été consacré au musée de la marque, située au cœur des locaux de Saint-Imier. Ouvert en 1992 et entièrement rénové en 2012, le musée est en fait ouvert au public, mais il est préférable de réserver à l'avance, car toutes les visites doivent être accompagnées par un guide. Nous avons eu le plaisir d'être accueillis par l'historienne du musée, aimable et passionnée par son domaine d'expertise, qui nous a émerveillés par sa connaissance et
ses anecdotes. Elle est personnellement responsable de la sélection des pièces d'horlogerie qui sont exposées dans tout le musée, et parallèlement, elle est toujours à la recherche de pièces inédites qui pourraient étoffer l’exposition. Il suffit de jeter un coup d'œil aux vitrines pour se rendre compte à quel point la marque a été importante pour l'industrie horlogère. Instruments d'aviation, montres militaires, chronomètres de sport, chronographes de pilotes, instruments de chronométrage olympique et bien d'autres pièces témoignent d'une multitude de détails historiques et d'anecdotes. Longines a été l'une des premières entreprises horlogères à développer des instruments de chronométrage d'événements sportifs, comprenant très tôt le lien profond entre ces deux mondes et réalisant le potentiel marketing d'une telle union. Il en va de même pour l'aviation: les pionniers de la première moitié du 20ème siècle ont également collaboré avec la marque pour améliorer les instruments de navigation, ce qui en a fait une activité beaucoup plus sûre. Weems, Lindbergh et d'innombrables pilotes et explorateurs anonymes portaient des montres et chronographes Longines, non pas parce qu'ils étaient de beaux objets, mais simplement parce qu'il s'agissait des garde-temps les plus avancés techniquement de l'époque. Longines a été à la pointe de l'innovation dans les années 1930 et 1940 et fut à l'origine d’inventions parmi les plus révolutionnaires de cette période. Ces deux décennies virent
ainsi naitre les modèles les plus iconiques de la marque. N'oublions pas non plus le reste de la production, des montres capturant l'essence d’un dessin classique et d’un design élégant, tout en gardant un sens de l'innovation. Si l’on s’enfonce un peu plus dans le musée, la collection de montres à boîtier rectangulaire représente elle parfaitement l’influence du mouvement art déco, des pièces particulièrement désirables. Et puis il y a les célèbres chronographes 13ZN et 30CH, considérés par beaucoup comme faisant partie des plus beaux calibres de chronographes maison jamais produits. Le premier chronographe Flyback breveté, les monopoussoirs, les premières itérations de la Weems, les horloges de train, la très rare montre 24H Swissair, la série Avigation – tant de garde-temps sont exposés dans le musée qu'il faudrait des heures pour scruter à peine la surface de la résonance historique de la marque, et comprendre l'histoire de tous ces produits. Tout comme l'immeuble de SaintImier, le patrimoine de Longines est grandiose et imposant. C'est un parcours captivant, pavé d'années d'innovations techniques et de succès esthétiques, construit sur un lit d’histoires épiques d’aventure et d'exploration. Longines reconnaît pleinement cet incroyable patrimoine et veille à ce que son héritage soit bien conservé et maintenu. Pour toutes ces raisons, Longines est une marque qui mérite sa place parmi ceux que l'on peut qualifier de «fondateurs» de l'industrie horlogère.
«La Suisse va-t-elle arrêter de produire des montres mécaniques? Après avoir coulé lentement pendant cinq ans, nous avons à présent touché le fond. Tout semble s’être ligué pour détruire les fondations de ce qui était autrefois une industrie florissante et apparemment indestructible.» (Europa Star, numéro 119, 1980)
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8 UTILISATEURS
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INNOVATIONS
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Un perpétuel perpétuel
Vacheron Constantin Traditionnelle Twin Beat Quantième Perpétuel Gros plan des deux balanciers au dos de la montre A gauche, le balancier 5Hz du mode Actif, à droite, le balancier 1,2Hz du mode Veille. Reconnaissable à son grand diamètre et à sa lente oscillation, son spiral, plus délicat, est quatre fois plus petit en section transversale. A noter également que ce même calibre est doté d’un nouveau mécanisme de saut instantané de la date, du mois et de l’année bissextile qui réduit notablement l’effet sur l’amplitude du balancier du saut des affichages.
Par Pierre Maillard
Un calendrier perpétuel est censé indiquer au moins heure, minute, date, mois et année bissextile jusqu’en 2100 et ce, théoriquement, sans intervention humaine. Sauf que, s’il vient à s’arrêter au bout de sa réserve de marche, il faut se lancer dans une fastidieuse opération de réglage. Un problème que Vacheron Constantin vient de résoudre avec brio. La solution? Elle est inscrite dans son nom: Twin Beat. L’inspiration provient des pendules japonaises de l’ère Edo (1603-1868) au cours de laquelle le jour et la nuit étaient divisés en six segments de durée différente, variant selon les saisons. Ces horloges étaient équipées de balanciers à simple ou double foliot qui permettaient de modifier leur vitesse de fonctionnement. Comment transposer une semblable fonctionnalité dans une montre de poignet?
Deux balanciers distincts Certifiée Poinçon de Genève, la Vacheron Constantin Traditionnelle Twin Beat Quantième Perpétuel se présente dans un boîtier très classique en platine 950 de 42 mm de diamètre et 12.3 mm d’épaisseur qui contraste avec son cadran ajouré à double niveaux à l’esthétique très contemporaine, décoré d’un guillochage radial et de surfaces sablées.
La Traditionnelle Twin Beat quantième perpétuel est équipée d’un double barillet et de deux ressorts moteur transmettant leur énergie à deux trains de rouages distincts aboutissant à deux organes de régulation également distincts et fonctionnant à deux fréquences distinctes. Il y a le mode dit Actif, avec un balancier haute fréquence à
5Hz (36'000 alternances/h) offrant 4 jours de réserve de marche; et le mode Veille, avec un balancier basse fréquence oscillant à 1,2Hz (8'640 alternances/h) offrant au minimum 65 jours de réserve de marche! A l’aide d’un simple poussoir situé à 8h, l’utilisateur peut faire passer sa montre d’un mode à un autre, selon qu’il la porte – à la fréquence de 5Hz la montre conserve une précision optimale insensible aux mouvements brusques du porteur - ou la laisse tranquillement au repos en basse fréquence. Il ne devra alors la remonter manuellement que tous les deux mois. Affichée en haut du cadran, la réserve de marche est unique en son genre: une seule aiguille permet de l’afficher automatiquement selon le mode Actif ou Veille choisi: 4 ou 65 jours.
Le calendrier perpétuel le plus pertinent Au passage d’un mode à un autre, l’affichage de l’heure et des indications calendaires ne subit aucun décalage, et ce grâce à un système de commutation instantanée qui arrête un balancier au même instant que démarre l’autre, une opération réalisée en une fraction de seconde. Au cœur de ce dispositif très innovant, un différentiel permet aux aiguilles de lire des sources d’information variables provenant de deux trains de rouages pour indiquer un affichage unique de l’heure quel que soit le mode choisi. Un autre différentiel, monté sur le barillet, transmet le couple adapté à son fonctionnement au balancier du mode Veille dont le très fin et très sensible spiral (dont la section est très inférieure à celle d’un cheveu humain) a été spécialement conçu pour ce rythme très lent. Enfin, deux différentiels supplémentaires permettent de transmettre l’information spécifique à l’unique aiguille indiquant une des deux réserves de marche. Les 480 composants de ce calibre 3160 QP tiennent dans un espace de 6 mm d’épaisseur et de 32 mm de diamètre. Une véritable performance. Son prix: CHF 210,000.-
INNOVATIONS
EUROPA STAR PREMIÈRE | 21
«La R&D, c’est faire de la substance»
Guy Sémon, à propos du très innovant spiral en nanotubes de carbone de la TAG Heuer Carrera Calibre Heuer 02T Tourbillon Nanograph Les spiraux en nanotubes de carbone
Par Pierre Maillard
«Depuis 1675, date de l’invention du balancier-spiral par Huygens, rien n’a bougé dans le domaine du spiral. Sauf l’introduction du silicium. Certes, c’est amagnétique, mais le processus de fabrication est cher, compliqué, tout ça pour faire un ‘zinzin’ cassable. Et par ailleurs, LVMH n’a pas accès au silicium. Raison de plus pour s’attaquer au problème et doter LVMH de la capacité à produire ses propres spiraux, en toute indépendance. C’est là que la R&D intervient. «C’est une longue histoire. Je vous la fais courte. Je mène alors des recherches sur les matériaux flexibles, je suis en visite dans un labo au Nouveau-Mexique. Le dimanche, je m’ennuie alors je lis de la littérature scientifique. Et là, je tombe sur un article sur le carbone. Je vais y voir de plus près, dans l’Utah, et je comprends qu’avec le carbone on pourrait faire des spiraux. «J’engage alors un doctorant mormon, Jason, qui travaillait théoriquement sur le carbone et avait conçu des réacteurs chimiques pour produire des composites à base de graphite et de diamant, deux atomes de carbone mais organisés différemment. En 1996 déjà, on avait découvert le graphène à partir duquel on pouvait produire des nanotubes aux propriétés intéressantes: pas de fatigue, pas d’usure. Mais les lois physiques sont différentes à l’échelle atomique et à l’échelle macroscopique. Elles ne sont pas transposables. Mais avec mes équipes, je suis parvenu à mettre au point un passage de l’échelle atomique à l’échelle macroscopique. C’est une avancée théorique majeure, avec des applications en physique importants et qui fera bientôt l’objet d’une publication. «En gros, ça consiste à faire un gâteau, tout en construisant le four
et en imaginant la recette. On calcule mathématiquement la géométrie du spiral que l’on veut faire selon les spécifications recherchées, la fréquence, etc… et, à l’aide d’un crayon moléculaire, on le dessine avec des atomes de fer sur un support silicium, un wafer, recouvert d’une couche d’oxyde d’aluminium (comme du beurre sur la plaque à gâteau). On l’enfourne alors dans un réacteur (le four que nous avons conçu) dont l’enceinte est en quartz massif et qui travaille à 950°. On y introduit deux gaz, un vecteur hydrogène et un précurseur éthylène, qui vont libérer les molécules de carbone. Ces molécules viennent se poser sur les atomes de fer pour créer une réaction catalytique et former ainsi des tubes de carbone, comme un champ de blé. Ces nanotubes sont vides, formés de mailles vides, l’intérieur est vide, c’est du vide à 95%. Entre ces différents nanotubes de carbone qui ont poussé en suivant la forme du spiral dessiné, on va insuffler des atomes de carbone qui vont agir comme une colle moléculaire. «Au final, on obtient un module d’élasticité, qui se déforme et revient en position – propriété essentielle d’un spiral – sans fatigue, sans fluage. Le spiral est très léger, réduisant l’effet de choc et encaissant jusqu’à 5’000G. C’est amagnétique, parfaitement thermo-compensé avec son balancier en aluminium éloxable. Quant au réglage, il se fait de façon traditionnelle, avec masselotte, raquette standard – ce qui n’est pas possible avec le silicium. Ce spiral en nanotubes de carbone est extrêmement plat, ce qui facilite le montage, et 100% sont certifiés chronomètres. «Avec nos deux machines, nous atteignons déjà une capacité de 120'000 unités par an mais on a déjà prévu de monter en puissance. Pour sa sortie, on a choisi de l’implémen-
ter dans une montre à tourbillon, un mouvement 4 Hz mais on peut sans problème produire selon ce processus de fabricationplus qu’innovant des spiraux pour toutes les fréquences imaginables. «Ça n’a donc rien d’un coup de marketing, c’est de la science, qui débouche sur de la substance et offre l’opportunité ainsi trouvée de rendre LVMH enfin pleinement autonome, et novateur, dans le spiral.»
TAG HEUER CARRERA CALIBRE HEUER 02T TOURBILLON NANOGRAPH Calibre Heuer 02T, mouvement de manufacture TAG Heuer. Tourbillon doté du nouveau spiral en composite de carbone. Chronographe avec calibre automatique et tourbillon certifié chronomètre, diamètre 31 mm, 28800 alternances par heure (4 Hz). Réserve de marche 65 heures. Chronographe avec compteurs des heures et des minutes. Affichage des heures, minutes et secondes. Boîte 45 mm et cornes en titane PVD noir. Lunette carbone avec échelle tachymétrique. Etanche jusqu’à 100 mètres. Cadran ajouré avec découpe de forme hexagonale. Compteurs des heures et des minutes du chronographe et cage du tourbillon plaqués or noir. Index et aiguilles rhodiés à revêtement SuperLuminova®. Prix : 24'900.- CHF. Ecrin spécial avec remontoir intégré.
MONTRES D’EXCEPTION
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JAEGER-LECOULTRE MASTER GRANDE TRADITION GYROTOURBILLON WESTMINSTER PERPÉTUEL Boîtier or blanc de 43 mm x 14.08 mm. Etanche à 30 mètres. Cadran guilloché bleu en émail ou argent. Fond verre saphir. Calibre 184 à remontage manuel. Réserve de marche de 50h. Heure, minute, date sautante, calendrier perpétuel (Jour, Date, Mois, Année). Répétition minute Carillon Westminster. CHF 800,000.-
F.P.JOURNE TOURBILLON VERTICAL 30 SECONDES AVEC REMONTOIR D’ÉGALITÉ ET SECONDE MORTE Heures et minutes à 3h, Petite seconde à 6h, Réserve de marche à 12h, Tourbillon vertical à 9h. Autonomie du système horaire 80 heures ± 2h. Calibre 1519 à remontage manuel / 29 tours de couronne. Boîte platine PT 950 ou Or 6N 18 ct. 42 mm sur 13.60 mm. Mouvement en or rose 4N 18 ct. avec cadran horaire en émail sur or blanc. Décoration haut de gamme: guillochage Clous de Paris sur les ponts, Côtes de Genève circulaires sur la platine, têtes de vis polies, fente anglée. CHF 248'000.-
HERMÈS ARCEAU L’HEURE DE LA LUNE La montre Arceau L’Heure de la Lune est éditée en deux séries limitées à 100 exemplaires chacune et montée sur bracelet en alligator mat graphite ou bleu abysse à boucle déployante en or gris. Mouvement automatique, glace et fond saphir. Boîtier en or gris de 43 mm. CHF 26,000.-
ANTOINE PREZIUSO BAROCCO Barocco est le dernier modèle de la collection «L’Art du Tourbillon», lancée il y a quelques années déjà par Antoine Preziuso. Dépourvu de cadran, il laisse pleinement voir son mouvement manuel à tourbillon APG/28T, gravé en bas-relief de motifs baroques qui se prolongent sur son boîtier. Aiguilles style Louis XV en or 18 carats. Boîtier de forme en or rose, 42 mm x 42 mm x 12 mm. 110 heures de réserve de marche. Une magnifique pièce classique. Prix non communiqué.
BOVET 1822 RÉCITAL 26 BRAINSTORM CHAPTER ONE Le boîtier «écritoire» de Bovet 1822 révèle tout son potentiel volumique avec ce boîtier de 48 mm x 15,50 mm en saphir. Cornes et anneau de fond en titane. Bracelet alligator avec boucle ardillon en or blanc. Etanche à 30 m. Heure, minute, seconde sur tourbillon, grande date, indicateur de réserve de marche, indication des phases de lune hémisphérique. Garantie 5 ans. Système de remontage sphérique. Tourbillon volant double face. CHF 295,000.-
MONTRES D’EXCEPTION
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GÉRALD GENTA 50ÈME ANNIVERSAIRE - ARENA BI-RETRO PAR BULGARI A l’heure du 50ème anniversaire de la création de la marque du plus fameux designer horloger de la «renaissance» mécanique, les initiatives se multiplient. L’Association Gérald Genta vient d’être créée par sa veuve Evelyne Genta et Bulgari honore le créateur en sortant une Arena BiRetro sobrement siglée Gérald Genta. Ce qu’on n’avait plus vu depuis longtemps. Un rappel en temps opportun qui a le mérite de remettre sous les projecteurs un design de régulateur rétro d’une rare évidence. Mouvement mécanique de manufacture à remontage automatique (bidirectionnel). Calibre Bi-rétro BVL 300, heures sautantes, minutes rétrogrades (210°), date rétrograde (180°). Boîtier de 41 mm de diamètre en platine, cadran laqué bleu, bracelet en alligator bleu, boucle déployante en or blanc. CHF 55,000.-
MB&F + L’ÉPÉE 1839 MEDUSA Son dôme et ses tentacules de verre – bleu, vert ou rose, 50 pièces par couleur - sont soufflées à la main à Murano. Elle peut-être suspendue au plafond ou posée sur un bureau, et dans tous les cas elle fera sont effet. Cette fascinante Medusa est non seulement un objet étonnant mais elle abrite aussi un mouvement constitué de deux anneaux tournants, un pour les heures et l’autre pour les minutes, animés par un mouvement mécanique battant à 2,5 Hz, construit selon un axe vertical «qui reproduit la symétrie radiaire du système nerveux d’une méduse» et qui est placé juste sous l’affichage. Dans l’obscurité, la Medusa brille d’une lueur qui évoque les profondeurs marines. Cette ensorcelante créature de verre et de mécanique est le fruit de la collaboration entre le designer Fabrice Gonet, MB&F et l’Epée 1839. C’est la dixième collaboration entre MB&F et le fabricant suisse d’horloges qui, ensemble, ont totalement renouvelé le genre. CHF 25,500.-
DE BETHUNE DB28GS GRAND BLEU
FABERGÉ VISIONNAIRE DTZ GALLIVANTER De nouveaux habits pour la Visionnaire de Fabergé, une montre très remarquée, primée en 2016 par le GPHG. Avec son boîtier en or jaune et son cadran facetté bleu, elle arbore une légère touche vintage. Au centre, le second fuseau horaire se lit parfaitement grâce à un verre-loupe qui lui donne toute sa profondeur et offre une lecture immédiate et intuitive. Sans doute la plus intelligente et la plus esthétique de toutes les montre à second fuseau horaire. Garantie: 10 ans! CHF 29,500.-
Denis Flageollet est un des horlogers les plus conséquents de la planète haute horlogerie. Son style totalement contemporain mais nourri de culture classique est unique et chacune de ses pièces mérite attention. Il en va certainement de la DB28GS, première montre 100% sportive de sa marque. Dotée d’un nouveau calibre à remontage manuel et réserve de marche de 5 jours (le 27ème calibre maison), amagnétique, thermo-compensé, de haute qualité réglante, cette plongeuse descend à 100 m de profondeur et est équipée du système triple pare-chute d’absorption des chocs. Particularités novatrices: c’est sa lunette rotative qui fait tourner sa glace pour calculer les temps d’immersion et elle s’éclaire intérieurement grâce à un dispositif intégralement mécanique: une dynamo miniature allume à la demande une lumière LED blanche légèrement bleutée. CHF 85,000.-
CHANEL BOY-FRIEND TWEED ART Quoi de plus antinomique, a priori, que le tweed et l’émail. D’un côté une laine souple et chaude, à gros tissage, et de l’autre, de dures et fragiles plaques de métal, peintes par couches et passées au four. Tout les sépare et si une seule maison pouvait les réunir, c’est bien Chanel. La texture et les couleurs du tweed ont inspiré un tableau abstrait tout en délicatesse, cloisonné et réalisé Grand Feu. Le cadre qui l’entoure est en or beige 18 carat et le bracelet de satin. Un sans-faute. Grand modèle (37 x 28,6 x 7,75 mm). Edition limitée à 20 pièces. Mouvement mécanique à remontage manuel. Étanchéité: 30 mètres. Prix non communiqué
MONTRES D’EXCEPTION
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TRILOBE LES MATINAUX SÉRIE INAUGURALE «Impose ta chance, serre ton bonheur et va vers ton risque. À te regarder, ils s’habitueront.» René Char, Les Matinaux. Il est rare qu’un horloger cite un poète aussi exigeant que l’était René Char pour «résumer l’esprit dans lequel Gautier Massoneau a créé Trilobe». A regarder la montre, pour sûr on va s’habituer à cet affichage horaire aussi innovant qu’élégant et, à sa façon, classique comme l’est sa géométrie et son motif «trilobés». A la manœuvre, il y a un maître-horloger suisse reconnu, Jean-François Mojon. Une série inaugurale de 100 pièces numérotées pour une histoire qui «ne fait que commencer». Boîtier en acier de 41,5 mm. Mouvement à remontage automatique 2892, avec module additionnel. Prix de lancement: 7320.-€ TTC. LOUIS VUITTON TAMBOUR SPIN TIME AIR L’affichage de l’heure se fait par l’entremise de douze cubes rotatifs. A chaque changement d’heure, deux d’entre eux tournent sur euxmêmes de façon instantanée, cachant l’heure écoulée et faisant apparaître l’heure nouvelle. Un concept né en 2009, rendu ici aérien et joaillier, grâce à un nouveau calibre automatique situé dans un «container» suspendu au centre de la montre. Sept modèles en or blanc, de 42,5 mm, se déclinent avec sertissages de diamants ou de pierres de couleur, laquées ou satinées. Inédit et ludique. Prix non communiqué. PUBLICITÉ
Certaines personnes pensent être toujours à l’heure. En réalité, elles portent des montres magnétisées. Venez vérifier. Baselworld 2019 - G07 - Hall 4.1
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Maurice Lacroix Aikon La renaissance de la Calypso LA CALYPSO
AIKON AUTOMATIC
En 1990, Maurice Lacroix dévoile une nouveauté qui deviendra rapidement son modèle bestseller, la ligne Calypso. Bonne nouvelle: cette star des années 1990 est de retour, dans des versions réinterprétées! Ce fut d’abord le cas en 2016 avec le lancement de l'Aikon en quartz, puis en 2018 avec l'Aikon Automatic, une réinterprétation adaptée aux codes contemporains. Europa Star a trouvé un trésor de données sur la Calypso dans ses propres archives, preuve de l’impact de ce modèle durant plus d’une décennie. Le succès originel de la Calypso peut être attribué à plusieurs éléments-clés de sa conception. L’aspect particulièrement soigné et élégant de la glace saphir plate. La lunette à six cavaliers particulièrement reconnaissable, les cornes au design innovant et le boîtier élancé accentuant encore un sentiment de légèreté dans la pièce. La Calypso a été produite de 1990 à 2003, dans des versions automatiques et quartz. Son succès a été immédiat et s’est traduit par la vente de plus de 100’000 montres à son apogée. C'est le modèle le plus vendu de l'histoire de la marque et de ses partenaires. L'Aikon est la nouvelle ligne de Maurice Lacroix qui s'inspire de la légendaire Calypso. Tout le processus de conception et de développement a été entrepris pour conserver l'ADN de cette dernière tout en modernisant cette ligne, afin d'obtenir un produit au meilleur rapport qualité/prix, une philosophie constante chez Maurice Lacroix.
L’Aikon Automatic, d’un diamètre de 42 mm, a été imaginée comme une renaissance contemporaine de la Calypso. On retrouve ainsi tous les codes majeurs de cette pièce maîtresse des années 1990: le boîtier intégré et étanche (à 200 mètres), la glace saphir plate entourée de sa fameuse lunette à six cavaliers, ainsi qu'une qualité de fabrication exceptionnelle. La boîte en acier se décline en une multitude de choix de cadrans afin de satisfaire toutes les envies. Ceux-ci s’associent avec le bracelet en acier à 5 maillons ou des cuirs de couleur noire, bleue ou marron, ornés du logo M de Maurice Lacroix en applique. Le cadran Clou de Paris est reconnaissable entre tous. Et ce n’est qu’un début, puique la collection Aikon ne cesse de se décliner et de se réinventer, que ce soit dans ses dimensions (notamment une ligne à 39 mm), dans l'ajout de fonctions comme le chronographe ou dans son squelettage. Un vaste choix!
AIKON FEMMES 35MM
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tar 1/1 Europa S
993
tar 1/1 Europa S
Ce garde-temps associe féminité et commodité d'un mouvement à quartz. La beauté du boîtier en acier inoxydable est accentuée par un cadran proposé en différentes versions. La diversité des pièces proposées est un élément fondamental de la collection, puisque l’on peut également opter pour un luxueux bracelet en acier 5 rangs ou un bracelet en cuir de grande qualité.
1 tar 4/199 Europa S
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Biver: passé, présent, futur
Un géant de l’industrie dans le miroir des archives Europa Star êtes un Seigneur, et un Seigneur n’a pas besoin de l’heure précise! Mais ça n’a pas été sans mal. Un jour, je reçois une lettre de la Fédération Horlogère qui me reproche d’avoir déclaré dans une réunion du Crédit Suisse que le quartz était cancérigène, dangereux à cause de ses piles – c’est vrai que j’avais inventé l’histoire d’un médecin zurichois qui interdisait à ses patients de conserver leur montre quartz au poignet et leur offrait en échange une montre mécanique (rires).
Comme on le sait, Jean-Claude Biver s’est retiré de l’opérationnel tout en restant – pour l’instant – président non-exécutif de la division montres de LVMH et des trois marques Zenith, Hublot et TAG Heuer. L’occasion pour Europa Star – qui vient de numériser ses archives de 1960 à aujourd’hui – de le rencontrer longuement pour évoquer avec lui son parcours et les transformations successives subies par l’horlogerie suisse. Propos recueillis par Pierre Serge Maillard
et
Europa Star: En 1975, après des études économiques à l’Université de Lausanne et vous être installé dans la nature, à la Vallée de Joux, vous entrez chez Audemars Piguet et devenez responsable des ventes pour les pays européens, et principalement l’Allemagne. La manufacture vient de sortir la Royal Oak, des décisions stratégiques sont à prendre qui vont orienter la marque de façon décisive… Jean-Claude Biver: Georges Golay, alors charismatique patron d’Audemars Piguet, avait eu le courage de lancer la Royal Oak dessinée par le génial Gérald Genta. Un beau jour il nous convoque: il se fait du souci, cette première montre en acier, alors totalement disruptive – on voyait même les vis sur la lunette – était majoritairement rejetée par les marchés, sauf en Italie. Et d’un autre côté, il avait noté que Patek Philippe rachetait ses anciennes pièces. Que fallait-il faire? La jeune génération, dont je faisais partie, souhaitait investir pour conquérir le futur, pas pour renforcer le passé. M. Golay a répondu: «Ok, mais attention, il ne faut pas que la Royal Oak cannibalise la collection!» On pensait que cela n’arriverait jamais, les ventes se montaient alors à quelques centaines de pièces. M. Golay avait toutefois bien pressenti le risque et aujourd’hui, force est de constater qu’Audemars Piguet, en lançant sa Code 11.59, tente de sortir de ce qu’il avait anticipé il y a quelques décennies. Ceci dit, l’incroyable fortune de la Royal Oak démontre parfaitement que les succès majeurs de l’horlogerie sont le fait de montres immédiatement reconnaissables. C’est le client final qui éprouve le besoin que sa montre soit socialement reconnaissable. Une leçon à ne jamais oublier.
Et, au-delà de la communication, quelle était votre idée pour le produit Blancpain lui-même?
En 1979, en pleine révolution du quartz, vous quittez Audemars Piguet et passez chez Omega… Omega me confie alors la responsabilité du développement et de la vente du produit or. Omega faisait alors beaucoup de produits plaqués or et le danger était que ceuxci risquaient de tuer les produits or. Les montres en or s’adressent à une autre clientèle, il fallait donc qu’elles soient différentes, se distinguent nettement. J’ai alors créé un département spécifique pour y développer une collection or. Mais à partir de 1980, la production était essentiellement constituée de montres quartz. Le prestige d’alors, la valeur suprême, c’était la précision. C’était ça l’avant-garde! Pour suggérer visuellement que la précision du quartz était bel et bien là, et ne nécessitait donc pas de corrections, nous avons alors lancé une collection De Ville sans couronne, une montre très spéciale. Cette courte période chez Omega a duré jusqu’en 1981, date du début du «plan Hayek» de restructuration de l’industrie horlogère. Fritz Ammann, le patron d’Omega, a démissionné et je ne me suis pas entendu avec le nouveau, Peter Gross, qui débarquait de la banque UBS. Alors à mon tour, avec la «bande d’Ammann», j’ai démissionné et je suis parti sans avoir de nouveau job.
Une Omega De Ville quartz en or et sans couronne
C’est peu après que commence l’aventure Blancpain… Frustré par mon passage chez Omega, peu séduit par la montre à quartz, j’étais par contre impressionné par Lemania, qui fabriquait notamment le Calibre chronographe mécanique 321 – qu’Omega vient d’ailleurs de relancer! Je savais par ailleurs que la SSIH avait dans son portefeuille plusieurs marques dont elle voulait se débarrasser, dont Blancpain, qu’elle avait rachetée à Villeret en 1963. J’étais ami avec Jacques Piguet, qui travaillait dans la manufacture de mouvements mécaniques de son père Frédéric Piguet. Je lui téléphone et lui parle de Blancpain, fondée en 1735, qui avait de tout petits mouvements. Pourquoi ne pas racheter la marque? On décide de tenter le coup, à contre-courant de l’époque. La SSIH nous l’a vendue pour 21'500 CHF. Mais il n’y avait rien, toutes les archives avaient été détruites. On s’est installé dans la Vallée de Joux, dans la ferme historique de Louis-Elisée Piguet, attenante à la manufacture Frédéric Piguet. A l’époque, celle-ci livrait le Calibre ultra-plat 21 à Patek Philippe, à Corum pour ses montres-dollars, à Vacheron Constantin et à Audemars Piguet, notamment le Calibre 71P ultra-plat avec rotor décentré. En même temps, Frédéric Piguet avait signé un contrat avec Ebel. Pierre-Alain Blum voulait un mouvement quartz spécial pour Cartier, un quartz mieux fini, plus habillé que les quartz courants. En
acceptant ce contrat, Frédéric Piguet a dû licencier des horlogers mais savait parfaitement que, pour lui, le futur n’était pas dans le quartz, qu’il lui était impossible de régater sur la longue distance avec les industriels du secteur. Avec la création de Blancpain, de nouvelles synergies pouvaient naître entre Frédéric Piguet et nous. Il fallait que Blancpain ait du succès.
Je ne voulais pas relancer Blancpain uniquement avec des montres heure et minute. Il leur fallait de la sobriété traditionnelle, de belles finitions mais aussi des fonctions additionnelles. La Lune était une indication idéale, dans notre esprit, avec sa charge de nostalgie et de poésie. Dans les greniers de Frédéric Piguet, nous avions retrouvé tout l’outillage nécessaire, inutilisé depuis les années 1940, pour faire un mouvement jour, mois, date, lune. Nous l’avons aussitôt relancé et modifié pour que le mois change automatiquement chaque 31.
Et dans le contexte d’alors, ce n’était pas chose évidente… Certes, mais en 1982 la génération post-68 arrivait au pouvoir économique. Des gens dans les 30-35 ans qui avaient été influencés par le mouvement hippie, avec une forte propension intellectuelle, une prise de conscience des valeurs, du fait que le futur se bâtit sur et avec la tradition… On a transformé le discours ambiant, bouleversé la communication en parlant des «Mains du miracle», en faisant comprendre qu’au fond le quartz n’a pas d’âme ni de futur car, contrairement à la mécanique, son obsolescence est programmée. Avec notre slogan, «Depuis 1735, il n'y a pas eu de montre Blancpain à quartz. Et il n'y en aura jamais», on parlait de crédibilité, de sagesse patriarcale. Philippe Stern nous a écrit pour nous féliciter. La fameuse précision du quartz devenait secondaire. Dans la vie quotidienne, qui se soucie de l’ultra-précision au quart de seconde? Comme l’expliquait alors un fameux détaillant italien à ses clients: vous
La relance de la marque Blancpain sur des bases purement mécaniques a été l’un des premiers «coups» de Jean-Claude Biver.
En parcourant nos propres archives, que nous venons de numériser, nous nous sommes rendus compte que la renaissance de la montre mécanique est en fait allée très rapidement. Le quartz a fait de dégâts, a transformé profondément la structure de l’horlogerie suisse mais n’a pas brillé bien longtemps au premier rang. La remontée de la montre mécanique a pris à peine quelques années. A partir de 1985 déjà, au vu du succès grandissant de Blancpain, la montre mécanique revient en force. Franck Muller est l’un des pre-
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Europa Star 2/1985 La vente de Blancpain au groupe SMH, dans l’édition Europa Star 4/1992
miers, Günter Blümlein, alors patron d’IWC et de Jaeger-LeCoultre, joue un rôle prépondérant, d’autres aussi… Mais il convient de souligner que durant tout ce temps, à part le seul modèle Oysterquartz – d’ailleurs recherché aujourd’hui – Rolex, contrairement à d’autres, n’a jamais interrompu sa production de montres mécaniques.
sion, car il voulait engager un entrepreneur. De 1992 à 2001, notre relation a été exceptionnelle, forte et directe. Je lui disais «on prend Cindy Crawford», et lui, tout de suite, «ok». Aujourd’hui, beaucoup de marques sont dirigées par des technocrates qui parlent d’émotion mais ne connaissent rien au métier véritable.
Mais en 1992, pourtant, vous vendez Blancpain à Nicolas Hayek…
Au cours de ces années, la progression d’Omega semble fulgurante.
Oui, je vends Blancpain à Nicolas Hayek à un moment difficile pour moi, un divorce que je supporte très mal. La vente s’est passée le 7 juillet 1992, pour 60 millions de CHF, alors que Blancpain faisait 12 millions de bénéfices. Un verre de porto et c’était fait. Le lendemain, le 8 juillet, je l’ai annoncé à tout le personnel réuni. Mais trois semaines plus tard je téléphonais déjà à M. Hayek. J’étais déprimé, j’avais perdu mon amour, j’avais perdu ma passion. Je lui demande de me réengager. Ce qu’il fait, mais en me prévenant: «Vous allez être frustré: je vous donne un défi, remonter Omega.»A l’époque, Omega était une marque déstructurée, qui allait dans tous les sens, avec un marketing désuet. On a jasé, les gens disaient qu’il m’avait acheté. Mais M. Hayek a sauté sur l’occa-
Chez Omega, je suis en charge du marketing et du produit. Mais par ailleurs, je reste CEO de Blancpain et responsable de la SMH (qui ne s’appelle pas encore le Swatch Group) pour le Japon, la Corée du Sud et Singapour. Entre 1972 et 2001, Omega passe d’un chiffre d’affaires de 370 millions de CHF à 1 milliard. Une des raisons centrales de ce succès est l’ouverture de la Chine, dès 1993, que nous mettons sur le podium. Jusqu’alors, la Chine était considérée par tous les horlogers comme un marché «dépotoir», mais j’instaure une tout autre politique: en Chine, on livre les mêmes produits qu’en Europe ou aux Etats-Unis. On y apporte non seulement Cindy Crawford, mais aussi James Bond, la NASA, Michael Schumacher. En même temps qu’à tous les autres marchés. >
Quand Nicolas Hayek parle de Jean-Claude Biver… (Extrait Europa Star 4/1993)
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Mais pourquoi et comment se termine cette aventure extraordinaire? En 1999, j’attrape une légionellose qui me terrasse et en 2001, à bout de forces, je quitte mes responsabilités chez Omega, tout en conservant les autres. Je deviens un électron libre. Mais je ne rapporte plus, on m’oublie un peu. Alors deux ans plus tard, fin 2003, je quitte complètement le Swatch Group. Mais la passion d’entreprendre ne me quitte pas pour autant et en 2004, je m’approche de Hublot et de son patron et propriétaire Carlo Crocco, que je connaissais car il avait été distributeur de Blancpain en Italie. Il avait l’intention de se dégager un peu de l’opérationnel et de mieux se consacrer à ses importants projets philanthropiques, notamment en Inde. Lors de notre entretien, je lui demande: «Avec votre marque, quel est votre message?» Carlo Crocco me répond: «On a fait une montre or montée pour la première fois sur bracelet caoutchouc. Son design, qui ressemble à un hublot, rappelle l’univers du yachting, de la mer…» Je lui réponds: «Mais ce que vous me dites là c’est la description du produit, ce n’est pas un message!» Et je lui fais un dessin, qu’un enfant comprendrait (voir ci-contre). Je lui explique que le plus important, c’est le concept. Je dessine le ciel, et voilà la Terre. Sur cette Terre, il y a des arbres, sous terre il y a des tré-
sors, le pétrole, l’uranium, l’or. Mais l’or et le caoutchouc n’ont jamais été associés, car l’or est sous terre et le caoutchouc dans les arbres. Mais, mais, mais… ils étaient réunis une fois: avant le Big Bang, et quand le Big Bang est advenu, l’or a dit «moi je vais sous terre» et le caoutchouc a dit «moi, je fous le camp sur l’arbre». Et depuis le Big Bang jamais plus ils n’ont été ensemble mais vous, M. Crocco, vous avez remonté l’or de sous la terre et vous avez descendu le caoutchouc de l’arbre et vous les avez fusionnés. Et vous avez créé la première fusion de l’art horloger. Et bien le message de la marque, je vais l’appeler l’«Art de la Fusion», et la montre, je vais l’appeler Big Bang. Un gamin de 5 ans, il comprend, il répète et il fait le même dessin. Ça c’est la force du message, la simplicité du concept. Et ce simple concept de fusion s’applique au produit mais aussi au-delà… Il s’applique à tout. Vous retrouvez partout cette dualité: chaud/froid; jour/nuit; ying/yang. Toujours les contrastes: Hublot, c’est toujours
les contrastes. D’ailleurs il s’applique même à la vie: seuls les vivants peuvent connecter hier et demain. Les morts ne peuvent que connecter hier et maintenant. Donc ce concept de fusion, c’est le concept de la vie. Quand vous avez ainsi un concept qui est celui de la vie et qu’en plus vous pouvez le dessiner pour les gamins, comment pouvez-vous rater votre coup! Même les footballeurs, ils arrivent à comprendre (rires). Peu de marques ont un concept aussi clair, et il explique le succès de Hublot, qui est sans doute la marque qui a connu la plus forte progression de ces 15 dernières années.
Mais aussi bien avec Blancpain autrefois qu’avec Hublot plus près de nous, vous agissez par ruptures. Or aujourd’hui, on a l’impression que l’industrie horlogère se tourne plutôt vers son passé que vers son futur.
«Le marketing, c’est de l’air, pas de la substance; (…) l’investissement en R&D doit être proportionnel non pas au chiffre d’affaires mais aux investissements marketing.»
L’oscillateur imaginé par Guy Sémon et ses équipes de recherche est un véritable choc, une véritable rupture. Pour la première fois, on dépasse Huygens, on fait entrer l’horlogerie de plain-pied dans le futur tout en restant dans la mécanique. Car le propre de la montre mécanique, contrairement à tous les autres produits, est que sa technologie est peut-être obsolète, mais que le produit, lui, n’a pas d’obsolescence. La montre mécanique est le seul objet qui vient du passé mais vous connecte au futur, à l’éternité. Ceci dit, il n’y a plus de raison, face à la montre connectée, d’acheter une montre mécanique à 500 CHF qui n’indique que l’heure et la minute. A 50 CHF, oui, par contre. Ou à plusieurs milliers de francs. C’est tout le milieu qui est en danger.
A cause des millenials. Ceux qui n’ont pas connu le passé veulent le redécouvrir. Ils roulent avec les vespas des années 1950 de leurs parents, ils recherchent des photos de Brigitte Bardot… Mais quelle pourrait être une rupture, aujourd’hui? Vous avez introduit la montre connectée chez TAG Heuer, l’oscillateur révolutionnaire de la Defy chez Zenith…
Avec Hublot, avec TAG Heuer, avec Zenith, vous avez fortement investi dans la recherche, dans les matériaux, mais aussi dans les fonctions, on pense notamment au 100e puis au 1'000e de seconde…
Dessin de Jean-Claude Biver, le 16.01.2019 reproduisant le concept «BIG BANG» pour Hublot.
J’ai toujours investi énormément dans la R&D. J’ai toujours cru dans la R&D et j’ai toujours dit: si je fais beaucoup de marketing, il faut bien garder en tête que le marketing, c’est de l’air, pas de la substance; à
un moment donné, le ballon gonflé à l’air va se dégonfler et retomber. Donc, construisons de la substance et de la crédibilité avec la R&D, ainsi le ballon sera soutenu, il ne retombera pas. En tant qu’entrepreneur, je crois être un des seuls à avoir toujours pensé et dit que l’investissement en R&D doit être proportionnel non pas au chiffre d’affaires mais aux investissements marketing. Mais la R&D demande de la patience, il y a toujours des déchets dans la recherche fondamentale, on n’est jamais sûr d’y parvenir et bien souvent en cherchant ceci on trouvera cela. Il ne faut pas regarder uniquement les chiffres, il faut avancer, parfois dans l’obscurité. Et ça, les financiers ne le comprennent pas bien, ils s’impatientent, ils veulent des résultats immédiats. Sans Guy Sémon, physicien, mathématicien, chercheur, jamais je ne serais arrivé à faire ce qu’on a fait chez TAG Heuer, que ce soit la montre connectée ou toutes les innovations mécaniques. Il m’a conseillé, m’a guidé et ce dès le premier jour de notre rencontre. Vous êtes désormais arrivé au bout d’un cycle. Etes-vous prêt à vous lancer dans de nouvelles aventures? Honnêtement, moi-même je ne sais pas quoi faire avec moi (rires). Il est possible qu’un jour j’aie une idée et que je redémarre. Mais tant que je n’ai pas une idée choc, je ne me lancerai pas. Il me reste un «coussin» d’une petite dizaine d’années et on ne m’attend pas au tournant pour une montre automatique extra-plate. Je ne veux pas faire le match de trop. Bon, j’aurais pu aller voir M. Arnault et lui dire qu’on faisait fifty-fifty et qu’on allait lancer l’oscillateur de Guy Sémon sous mon nom. De quoi faire un carton, je vous assure! Mais c’est désormais Zenith qui s’y emploie et c’est très bien ainsi. Ceci dit, si un jour vous avez une idée très forte, n’hésitez pas à venir me voir. Mais je ne bougerai que pour quelque chose d’exceptionnel.
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Anne Biéler, la culture de la rencontre
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Pierre Maillard Guillaume Perret / lundi13
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«Pourquoi je suis entrée en horlogerie? Pourquoi y suis-je restée?» se demande à haute voix Anne Biéler, l’œil plein de malice. La réponse fuse aussitôt: «Pas tant pour la montre elle-même que pour les humains qui la font, les horlogers et les artisans d’art. J’y ai fait des rencontres exceptionnelles.» En dehors d’une fascination précoce envers les métiers d’art, rien ne prédisposait Anne Biéler à devenir une figure marquante du monde de la haute horlogerie. C’est en 1995 que la Fondation Sandoz vient la chercher pour s’occuper de la communication de la marque Parmigiani qu’elle s’apprête à lancer. A cette époque, Anne, après avoir parcouru le monde avec son mari diplomate, s’occupait de danse, de théâtre, était responsable de l’ARC, une résidence d’artistes à Romainmôtier, au pied du Jura. Quand elle découvre l’atelier dans lequel Michel Parmigiani restaure des chefs-d’œuvre horlogers historiques, elle «tombe en amour» pour cet art exceptionnel. Une fascination qui ne la quittera plus. «J’ai tant appris auprès de Michel. A l’époque, les rapports avec les hor-
logers étaient directs, sans intermédiaire. Tout ça a bien changé, peu à peu tout est devenu contrôlé, balisé, compartimenté. Alors que la richesse c’est la rencontre», soupiret-elle, «mais en ça, l’horlogerie ne fait malheureusement que suivre l’évolution de la société.» En 2000, elle quitte Parmigiani sur une décision prise dans l’instant et se retrouve sans travail. Mais trois jours plus tard, voilà que Franco Cologni l’appelle: il aimerait qu’elle s’occupe de la communication et des relations presse du SIHH. « J’ai adoré travailler avec lui et avec Fabienne Lupo. Franco Cologni a été mon mentor. Il est intraitable mais brillant, c’est un vrai visionnaire. Il vous oblige à vous surpasser intellectuellement. Il est malin, séducteur et parvient à rassembler. Par contre, il vaut mieux ne pas tomber dans ses mauvais papiers… Des personnages semblables, il n’y en a plus dans l’horlogerie. Le formatage a fait des dégâts.» Autre rencontre marquante, Gino Macaluso, alors patron et propriétaire de Girard-Perregaux. Elle va travailler en parallèle avec lui de 2004 à 2010, pour la presse suisse. «Gino était un grand seigneur, un esthète plus qu’un homme d’affaires. Avec lui, tout tournait autour de la
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beauté. Et tout ça dans une belle atmosphère. J’ai beaucoup aimé cet homme.» L’étape suivante sera pour Vacheron Constantin, où Juan Carlos Torres l’a fait venir. «J’y ai essentiellement travaillé sur les grands partenariats culturels, l’Institut des métiers d’art et le Ballet de l’Opéra de Paris, l’Orchestre de la Suisse Romande, etc… J’y suis restée 4 ans, à travailler de plain-pied avec les métiers d’art.» Désormais, Anne Biéler, qui a toujours travaillé en free-lance, a quitté l’horlogerie et poursuit son chemin dans la culture, accompagnant des artistes et s’occupant entre mille autres choses du célèbre Festival de musique classique de Verbier. «C’est toujours ce qui a le plus compté pour moi: être proche des artistes, des créateurs, de la beauté, de la diversité et de la relève. J’ai beaucoup reçu. Et c’est ça qui compte.» Mais comme le dit le proverbe: qui donne, reçoit.
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1. LIVRE DE RECETTES, DÉBUT XXÈME «Il est de la main de ma grand-mère maternelle. Une femme exceptionnelle, une amie qui m’a tout appris de la vie. Toujours entourée de jeunes et d’artistes. Ses recettes ne me quittent pas. Et je l’ai intégralement photocopié pour mes enfants. Une histoire de transmission.»
4. PHOTOGRAPHIE, HOMME DANS UNE LIBRAIRIE, LE CAIRE, ANNÉES 1930 «C’est une photo prise par Lehnert & Landrock, dans la librairie ouverte par ce duo de photographes installés au Caire dans les années 1930. Elle existe toujours, d’ailleurs. Cette photo, je la trimballe partout avec moi. Elle représente ma prise de conscience de l’inégalité des chances et de l’accès à la culture. En Egypte, j’ai découvert la pauvreté, la précarité, mais intimement mélangées avec l’accueil, la générosité.»
2. BOL DE HAMMAM, ALEP «Tu mets un peu d’eau dans le bol, le savon au milieu pour qu’il ne glisse pas. C’est un objet très intime, qui exprime une forme de sagesse féminine. Dans le hammam, les femmes s’y retrouvent, échangent. J’y ai fait des rencontres extraordinaires. C’est un objet de calme, de pause, de partage. Dans ce simple bol de hammam, il y a toute ma relation au Moyen-Orient.»
5. MAISON À TAVIRA, DESSIN DE DOMINIQUE APPIA «Dominique Appia, un peintre et ami, a croqué ma maison portugaise. Au départ, c’est une bergerie que j’ai achetée il y a 40 ans. Maintenant, de fil en aiguille, c’est presque un hameau. J’y ai découvert le Portugal. Un pays aux gens délicats, fiers et modestes à la fois. Ce n’est pas la Méditerranée mais l’Atlantique. Il y a cette ouverture vers le grand large, cette mélancolie, un sens du fatalisme aussi. C’est un lieu en décalage, à part, loin de l’agitation. Mon refuge.»
3. MONTRE GIRARD-PERREGAUX «C’était lors d’une vente privée pour les collaborateurs. Gino Macaluso m’a dit «Achetez celle-ci!» Je lui ai obéi. J’aime cette montre pour sa simplicité, sa finesse extra-plate, ses index qui ne sont que de fins traits, sa sobriété. En fait, tout ce que Gino aimait aussi. C’était un homme de culture, de savoir-vivre, il avait un sens affûté du détail. La classe. Un grand monsieur.»
6. BOUGEOIRS EN VERRE DE TCHÉCOSLOVAQUIE, FIN XIXÈME «Ils sont soufflés à la main, argentés, très légers, ils étaient dans ma famille. J’ai récemment déménagé et je n’ai emporté avec moi que des objets qui ont une histoire. Celle-ci me relie à mon amour pour les métiers d’art. C’est aussi une forme de filiation: j’ai reçu en partage cette sensibilité à la beauté et à la sobriété.»
ANNUAIRE DES MARQUES HORLOGÈRES EN SUISSE
30 | EUROPA STAR PREMIÈRE
GENÈVE
18-21 JUIN 2019 PALEXPO GENÈVE 20’000
VISITEURS PROFESSIONNELS
PLUS DE
800
EXPOSANTS
W W W. E P H J. C H
ARGOVIE AIGNER Wallbach www.aignerworld.com CONTINENTAL Möhlin www.continental-watches.ch CRUISER Möhlin www.cruiser-watches.ch EVERSWISS Möhlin www.everswiss.ch HANOWA Wallbach www.hanowa.ch MONTEGA Busslingen www.montegauhren.ch POLICE Wallbach www.policelifestyle.com BÂLE CHARMEX Bubendorf www.charmex.ch DUBOIS & FILS Bâle www.duboisfils.ch EMKA Binningen www.emka-watches.com EMPORIO ARMANI (Fossil) Bâle www.armani.com FOSSIL (Fossil) Bâle www.fossil.com GROVANA Tenniken www.grovana.ch JAQUET&GIRARD Binningen www.jaquet-girard.com ORIS Hölstein www.oris.ch REVUE THOMMEN Tenniken www.revue-thommen.ch SWISS ALPINE MILITARY Tenniken www.swissalpinemilitary.com SWISSPACE Tenniken www.swisspace.it ZEITCENTRALE TIMM DELFS Bâle www.zeitzentrale.ch ZENO WATCH Bâle www.zeno-watch.ch BERNE A.B.ART Nidau www.abartwatches.com ANGULAR MOMENTUM Ittigen www.angularmomentum.com ANTIMA Bienne www.antima.ch ARMAND NICOLET Tramelan www.armandnicolet.com ARMIN STROM Bienne www.arminstrom.com ATLANTIC Lengnau www.atlantic-watches.ch AUGUSTE REYMOND Tramelan www.augustereymond.ch AZZARO La Neuveville www.azzaro-watch.com BALMAIN (Swatch Group) St-Imier www.balmainwatches.com BISSET Lengnau www.bisset.ch BOEGLI Bienne www.boegliwatch.ch BREMONT Bienne www.bremont.com CALVIN KLEIN (Swatch Group) Bienne www.calvinklein.com CANDINO (Festina Group) Bienne www.candino.com CATENA Corcelles www.montres-catena.com CENTURY Nidau www.century.ch CIMIER Bienne www.cimier.com CLARO WATCH Bienne www.clarowatch.com CODEX Bienne www.codexwatches.com CONCORD (Movado Group) Bienne www.concord.ch DAVIDOFF Bienne www.zinodavidoff.com DAVOSA Tramelan www.davosa.com DE BORTOLI Bienne www.debortoliwatches.com DELANCE Macolin www.delance.ch DELBANA Lengnau www.delbana-watches.ch DELMA Lengnau www.delma.ch DOXA Bienne www.doxa.ch EBEL (Movado Group) Bienne www.ebel.com EPOS Lengnau www.epos.ch FORMEX Lengnau www.formexwatch.com FRANK JUTZI Wichtrach www.frankjutzi.com GEORGE J VON BURG Brügg www.gjvb.com GEVRIL Tramelan www.gevrilgroup.com GIBERG Bienne www.giberg.com GLASHUTTE ORIGINAL (Swatch Group) Bienne www.glashuette-original.com GLYCINE Bienne www.glycine-watch.ch
HALDIMANN Thun www.haldimann-horology.ch HAMILTON (Swatch Group) Bienne www.hamiltonwatch.com HERMES Bienne www.hermes.com HORAGE Bienne www.horage.com HUGO BOSS Bienne www.hugoboss.com HUGUENOT Bienne www.huguenot.com INDUCTA Gwatt www.inducta.ch JAGUAR (Festina Group) Bienne www.jaguarwatches.ch JOVIAL Bienne www.jovial.ch L.LEROY Bienne www.montres-leroy.com LEON HATOT (Swatch Group) Corcelles www.leonhatot.com LONGINES (Swatch Group) St-Imier www.longines.com MARANELLO Bienne www.rotapmaranello.com MILLERET Bienne www.milleret.ch MILUS Bienne www.milus.com MOVADO (Movado Group) Bienne www.movado.com OMEGA (Swatch Group) Bienne www.omegawatches.com PERRELET (Festina Group) Bienne www.perrelet.com PIERCE Bienne www.pierce1883.com PIERRE JUNOD Bienne www.pierrejunod.com RADO (Swatch Group) Lengnau www.rado.com RODANIA Koeniz www.rodania.com ROVENTA-HENEX Bienne www.roventa-henex.com RSW La Neuveville www.rsw-swiss.com SCUDERIA FERRARI OROLOGI (Movado Group) Bienne www.store.ferrari.com SECULUS Bienne www.seculus.ch STROM Bienne www.stromwatch.ch STUHRLING ORIGINAL Bienne www.stuhrling.com SWATCH (Swatch Group) Bienne www.swatch.com SWISS TIME Bienne www.swisstimeintl.com TALLER Bienne www.tallerwatch.ch THOMAS PRESCHER T Ispach www.prescher.ch TRASER H3 Niederwangen www.traser.com UNION GLASHUTTE (Swatch Group) Bienne www. union-glashuette.com URBAN JÜRGENSEN Bienne www.ujs-chronometry.ch VASTO Tramelan www.vasto.ch VICTORINOX SWISS ARMY Bienne www.victorinox.com
www.horotec.ch
VOGARD Nidau www.vogard.com W. GABUS Bienne www.wgabus.com ZEITWINKEL St-Imier www.zeitwinkel.ch FRIBOURG BULOVA Fribourg www.bulova.com CARBON 14 Givisiez www.carbon14.ch CECIL PURNELL Fribourg www.cecilpurnell.com GUEPARD Fribourg www.guepard.ch JO SIFFERT Fribourg www.josiffert.com LINDE WERDELIN Fribourg www.lindewerdelin.com MAURON & MUSY Saint-Aubin www.mauronmusy.com SAINT HONORE Fribourg www.sainthonore.com
AKRIVIA Genève www.akrivia.com ALAIN PHILIPPE Genève www.alainphilippe.com ALFRED DUNHILL (Richemont) Genève www.dunhill.com ALPINA Plan-les-Ouates www.alpina-watches.com ALTANUS Genève www.altanus.com ANDERSEN GENEVE Genève www.andersen-geneve.ch ANTOINE PREZIUSO Arare www.antoine-preziuso.com AQUANAUTIC Genève www.aquanautic.com ARTYA Vésenaz www.artya.com ATELIERS DE MONACO Plan-Les-Ouates www.ateliers-demonaco.com BACKES & STRAUSS Genthod www.backesandstrauss.com BADOLLET Genève www.badollet.com BAUME & MERCIER (Richemont) Bellevue www. baume-et-mercier.com BEDAT & Co. Genève www.bedat.com BERTOLUCCI Genève www.bertolucci-watches.com BLACK BELT Vésenaz www.blackbeltwatch.com BLACKSAND Genève www.blacksandgeneve.com BOGH-ART Genève www.bogh-art.com BOVET Plan-les-Ouates www.bovet.com BREVA Genève www.breva-watch.com CARTIER (Richemont) Genève www.cartier.com CHANEL Genève www.chanel.com CHARRIOL Genève www.charriol.com CHOPARD Meyrin www.chopard.com CLERC Genève www.clercwatches.com CVSTOS Genève www.cvstos.com CYRUS Plan-les-Ouates www.cyrus-watches.ch CZAPEK genève www.czapek.com DA VINDICE Genève www.davindice.com DANIEL ROTH (Bulgari) Meyrin www.danielroth.com DAVID VAN HEIM Carouge www.david-van-heim.com DE BETHUNE Genève www.debethune.ch DE BOUGAINVILLE Plan-les-Ouates www.debougainville.com DE GRISOGONO Plan-les-Ouates www.degrisogono.com DELACOUR Genève www.delacour.ch DELALOYE Carouge www.garde-temps.ch DEWITT Meyrin www.dewitt.ch EMILE CHOURIET Meyrin www.emile-chouriet.ch ENIGMA Genève www.gbenigma.com FLORIAN TRESLER SA Genève www.floriantresler.com F.P. JOURNE Genève www.fpjourne.com FABERGE Genève www.faberge.com FRANCK DUBARRY Genève www.franckdubarry.com FRANC VILA / Genève www.francvila.com
FRANCK MULLER Genthod www.franckmuller.com FRED (LVMH) Genève www.fred.com FREDERIQUE CONSTANT Plan-les-Ouates www.frederique-constant.com GERALD GENTA (BULGARI) Meyrin www.geraldgenta.com GIO MONACO Genève www.giomonaco.com GRAFF Genève www.graffdiamonds.com GRECO GENEVE Plan-les-Ouates www.greco-watches.com GRENACHER Genève www.grenacher.com GVCHIANI Genève www.gvchiani.com HARRY WINSTON (Swatch Group) Plan-les-Ouates www.harrywinston.com HELFER Genève www.helferwatches.com HERITAGE Neuchâtel www.hwm-watch.com ICELINK Genève www.icelinkwatch.com IMPERIALI Genève www.imperiali-geneve.com JACOB & CO. Genève www.jacobandco.com LAURENT FERRIER Plan-les-Ouates www.laurentferrier.ch LE RHONE Satigny www.lerhone.com LEBEAUCOURALLY Genève www.lebeaucourally.com LEONARD Genève www.leonardwatches.com LOUIS VUITTON Genève www.louisvuitton.com M. STEPHANE Vésenaz www.m-stephane.com MAGELLAN Genève www.magellanwatch.com MAREMONTI Genève www.maremontiwatch.ru MATHEY-TISSOT Genève www.mathey-tissot.net MB&F Genève www.mbandf.com MECCANICHE VELOCI Genève www.meccanicheveloci.ch MONTBLANC (Richemont) Versoix www.montblanc.com MONTRES AF&F SA Genève www.afavrefils.com MOYA Genève www.moyawatch.com MYKRONOZ Genthod www.mykronoz.com OGIVAL Genève www.ogival-watch.com PATEK PHILIPPE Plan-les-Ouates www.patek.com PIAGET (Richemont) Plan-les-Ouates www.piaget.com
PIERRE KUNZ Genthod www.pierrekunzgeneve.com PILO & CO Carouge www.pilo-watches.com QUINTING Genève www.quinting-watches.com RALPH LAUREN Plan-les-Ouates www.ralphlauren.com RATEL Genève www.cyrilratel.com RAYMOND WEIL Genève www.raymond-weil.com RJ - ROMAIN JEROME Genève www.romainjerome.ch ROGER DUBUIS (Richemont) Meyrin www.rogerdubuis.com ROLEX Genève www.rolex.com SARCAR Vésenaz www.sarcar.com SNYPER Genève www.snyperwatches.com TF EST 1968 Carouge www.tfco.ch TUDOR Genève www.tudorwatch.com UNIVERSAL GENEVE Meyrin www.universal.ch URWERK Genève www.urwerk.com VACHERON CONSTANTIN (Richemont) Plan-les-Ouates www.vacheron-constantin.com
VAN CLEEF & ARPELS (Richemont) Meyrin www.vancleefarpels.com VAN DER BAUWEDE Genève www.vdb.ch VENUS Genève www.montresvenus.com YESLAM Genève www.yeslam.ch JURA AEROWATCH Saignelégier www.aerowatch.com ANDRE MOUCHE Fahy www.andremouche.swiss AVIATOR Porrentruy www.aviatorwatch.ch CATOREX Les Breuleux www.catorex.ch CLAUDE BERNARD Les Genevez www.claudebernard.ch EDOX Les Genevez www.edox.ch ERNEST BOREL Le Noirmont www.ernestborel.ch L'DUCHEN Saignelegier www.lduchen.com L'EPEE Delémont www.lepee-clock.ch LOUIS CHEVROLET Porrentruy www.louischevrolet.ch LOUIS ERARD Le Noirmont www.louiserard.ch LUNDIS BLEUS La Chaux-de-Fonds www.lundis-bleus.com MATTHEW NORMAN Delémont www.matthew-norman.ch MAURICE LACROIX Saignelégier www.mauricelacroix.com PAUL PICOT Le Noirmont www.paulpicot.ch RICHARD MILLE (Horométrie) Les Breuleux www.richardmille.com RUDIS SYLVA Les Bois www.rudissylva.com SWIZA Delémont www.swiza.ch VALGINE Les Breuleux www.jic.ch/valgine VICENTERRA Boncourt www.vicenterra.ch WENGER Delémont www.wenger.ch LUCERNE CARL F. BUCHERER Lucerne www.carl-f-bucherer.com CHRONOSWISS Lucerne www.chronoswiss.com OCHS UND JUNIOR Lucerne www.ochsundjunior.ch SEQUENT Lucerne www.sequentwatch.com NEUCHÂTEL ACCORD WATCH La Chaux-de-Fonds www.accordwatch.com ALEXIS GARIN Les Verrières www.alexisgarin.ch ARNOLD & SON La Chaux-de-Fonds www.arnoldandson.com AZIMUTH Neuchâtel www.azimuthwatch.com BALL WATCH La Chaux-de-Fonds www.ballwatch.com BIJOUMONTRE La Chaux-de-Fonds www.bijoumontre.com BLAULING Chézard-Saint-Martin www.blauling.com BOMBERG Neuchâtel www.bomberg.ch BOUCHERON (Kering) Cortaillod www.boucheron.com BULER La Chaux-de-Fonds www.buler.ch BULGARI (LVMH) Neuchâtel www.bulgari.com CATENA Corcelles www.montres-catena.com CERTINA (Swatch Group) Le Locle www.certina.com CHAMPS ÉLYSÉES Neuchâtel www.champselyseestimepieces.com CHATELAIN La Chaux-de-Fonds www.chatelain.ch CHRISTOPHE CLARET Le Locle www.christopheclaret.com CHRISTOPHE SCHAFFO La Brévine CHRONOGRAPHE SUISSE CIE La Chaux-de-Fonds www.chronographesuisse.ch CORONA WATCH Neuchâtel CORUM (Haidian) La Chaux-de-Fonds www.corum.ch DIOR HORLOGERIE (LVMH) La Chaux-de-Fonds www.dior.com DREYFUSS & CO La Chaux-de-Fonds www.dreyfussandco.com
DUBEY & SCHALDENBRAND La Chaux-de-Fonds www.dubeywatch.com EBSA EMMANUEL BOUCHET SA Les Bayards www.emmanuelbouchet.com ELLICOTT 1738 La Chaux-de-Fonds www.ellicott.ch ENICAR La Chaux-de-Fonds www.enicar.com ETOILE Le Locle www.montres-etoile.ch FENDI Marin-Epagnier www.fendi.com FERDINAND BERTHOUD Fleurier www.ferdinandberthoud.ch FESTINA Bienne www.festina.com FLIK FLAK (Swatch Group) Cormondrèche www.flikflak.com FREDERIC JOUVENOT La Chaux-de-Fonds www.fjouvenot.com GAMIL WATCH La Chaux-de-Fonds GERGE Neuchâtel www.gergeswiss.com GIRARD-PERREGAUX (Kering) La Chaux-de-Fonds www.girard-perregaux.com GRAHAM La Chaux-de-Fonds www.graham-london.com GREUBEL FORSEY La Chaux-de-Fonds www.greubelforsey.com GUCCI (Kering) Cortaillod www.gucciwatches.com HAUTLENCE (Melb Holding) La Chaux-de-Fonds www.hautlence.com HESJY Fleurier www.hesjy.ch HOROSWISS La Chaux-de-Fonds www.horoswiss.com HYT Neuchâtel www.hytwatches.com JAERMANN & STUBI Le Locle www.jaermann-stuebi.com JAMES C. PELLATON Le Locle www.jamespellaton.com JAQUET DROZ (Swatch Group) La Chaux-de-Fonds www.jaquet-droz.com JEAN D'EVE La Chaux-de-Fonds www.jeandeve.ch JEAN DUNAND Le Locle www.jeandunand.com JEANRICHARD (Kering) La Chaux-de-Fonds www.jeanrichard.com JULIEN COUDRAY 1518 Le Locle www.juliencoudray1518.ch JUVENIA La Chaux-de-Fonds www.juvenia.com KERBEDANZ Neuchâtel www.kerbedanz.com LOUIS MOINET Saint-Blaise www.louismoinet.com MAITRES DU TEMPS La Chaux-de-Fonds www.maitresdutemps.com MARATHON La Chaux-de-Fonds www.marathonwatch.com
MARVIN Vaumarcus www.marvinwatches.com MCGONIGLE STEPHEN Neuchâtel www.mcgonigle.ie MCT Neuchâtel www.mctwatches.com METAL.CH Neuchâtel www.metalch.com MIDO (Swatch Group) Le Locle www.mido.ch MOUAWAD Les Breuleux www.mouawad.com MUREX Le Locle www.murexwatch.com OPTIMA Le Locle www.optimawatch.com PANERAI (Richemont) Neuchâtel www.panerai.com PARMIGIANI FLEURIER Fleurier www.parmigiani.ch PIERRE THOMAS La Chaux-de-Fonds www.pierrethomas.ch RAIDOX Le Locle www.raidox.ch RENLEY Neuchâtel www.renley.com RIBA MUREX Le Locle www.murexwatch.com ROTARY La Chaux-de-Fonds www.rotarywatches.com SCHWARZ-ETIENNE La Chaux-de-Fonds www.schwarz-etienne.ch SULTANA La Chaux-de-Fonds www.sultana.ch TAG HEUER (LVMH) La Chaux-de-Fonds www.tagheuer.com TAUCHMEISTER La Chaux-de-Fonds www.michel-perrenoud.ch TELOS La Chaux-de-Fonds www.teloswatch.ch TEMPVS COMPVTARE Neuchâtel www.tempvscompvtare.ch TISSOT (Swatch Group) Le Locle www.tissot.ch ULYSSE NARDIN (Kering) Le Locle www.ulysse-nardin.com VOUTILAINEN Môtiers www.voutilainen.ch VULCAIN Le Locle www.vulcain-watches.ch WAKMANN La Chaux-de-Fonds www.wakmann.ch WALTHAM Marin-Epagnier www.waltham.ch ZENITH (LVMH) Le Locle www.zenith-watches.com OBWALD ALBERT RIELE Sarnen www.albertriele.ch ANTOINE MARTIN Alpnach www.antoinemartin.ch SCHAFFHOUSE A. LANGE & SOEHNE (Richemont) Schaffhouse www.lange-soehne.com
EUROPA STAR PREMIÈRE | 31
PHILIPPE DUFOUR Le Sentier www.philippedufour.com PIERRE DEROCHE Le Lieu www.pierrederoche.com REBELLION Lonay www.rebellion-timepieces.com REUGE (automates) Sainte Croix www.reuge.com REVELATION Lully www.revelation-watches.ch ROD Lausanne www.rodwatches.ch ROMAIN GAUTHIER Le Sentier www.romaingauthier.com SLYDE Luins www.slyde.ch SPEAKE-MARIN Bursins www.speake-marin.com VALBRAY Lausanne www.valbray.ch VINCENT CALABRESE Morges www.vincent-calabrese.ch
H. MOSER & CIE (Melb Holding) Neuhausen am Rheinfall www.h-moser.com IWC (Richemont) Schaffhouse www.iwc.ch SCHWYTZ COINWATCH Pfäffikon www.coinwatch.ch LUMINOX Freienbach www.luminox.com MIRA Pfäffikon www.mirawatch.ch PHILIP ZEPTER Wollerau www.zepter.com SOLEURE ARLEA Wolfwil AUREMA Grenchen www.aurema.ch BREITLING Grenchen www.breitling.com CAT Solothurn www.catwatches.com COACH Grenchen www.coach.com COVER WATCHES Solothurn www.coverwatches.com CYCLOS Dornach www.cyclos-watch.ch ETERNA (Haidian) Grenchen www.eterna.ch FAVRE LEUBA Solothurn www.favre-leuba.com FORTIS Grenchen www.fortis-watches.com GENIE Lohn-Ammannsegg www.genieswiss.ch HARWOOD WATCH CO. Grenchen www.harwood-watches.com JOWISSA UHREN Bettlach www.jowissa-watches.com KIENZLE Egerkingen www.kienzleuhren.de MANJAZ Nidau www.manjaz.ch NORD ZEITMASCHINE Büsserach www.nord-zeitmaschine.ch PORSCHE DESIGN Grenchen www.porsche-design.com ROAMER Soleure www.roamer.ch SWISS MILITARY-HANOWA Solothurn www.swissmilitary.ch TITONI Grenchen www.titoni.ch
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THURGOVIE ANDREAS STREHLER Sirnach www.astrehler.ch HANHART Diessenhofen www.hanhart.com VALAIS WEST-END Leytron www.westendwatchco.ch VAUD
ADRIANO VALENTE Lausanne www.adrianovalente.com ALAIN SAUSER CRÉATION Chamby www.alainsauser.ch ALFRED ROCHAT - AROLA Les Bioux www.arola-alfred-rochat.ch ANONIMO Chavannes-de-Bogis www.anonimo.com ARCADIA Versoix www.arcadiageneve.ch AUDEMARS PIGUET Le Brassus ST. GALL www.audemarspiguet.com BLANCPAIN (Swatch Group) Paudex LUNESA Sevelen www.lunesa.com www.blancpain.com BREGUET (Swatch Group) L'Abbaye www.breguet.com TESSIN C3H5N3O9 Gand www.c3h5n3o9.com CHAUMET (LVMH) Nyon www.chaumet.com ADRIATICA Camorino www.adriaticawatches.ch CHRISTIAN JACQUES Lausanne ALFEX Manno www.alfex.com www.christian-jacques.com BALCO WATCH Mendrisio www.balcowatch.ch CLAUDE MEYLAN Le Pont www.claudemeylan.ch BUCCELLATI Chiasso www.buccellati.com DE HAVILLAND Yverdon-les-bains CANOPUS Magliaso www.amanzoni.com www.dehavilland-watches.com CUERVO Y SOBRINOS Capolago DODICI Montreux www.dodici.ch www.cuervoysobrinos.com EVILARD WATCH SA Aubonne www.evilard-watch.com DAMIANI Manno www.damiani.com FRERES ROCHAT (Automates) Le Brassus DIANTUS Mendrisio www.freres-rochat.com DWISS Lugano www.dwiss.com HD3 COMPLICATION Luins EBERHARD Paradiso www.eberhard-co-watches.ch www.hd3complication.com GUESS Bioggio www.guesswatches.com HUBLOT (LVMH) Nyon www.hublot.com ORA Locarno www.oraswisswatch.com HYSEK Lussy-sur-Morges www.hysek.com SALVATORE FERRAGAMO (Timex Group) Manno JAEGER-LECOULTRE (Richemont) Le Sentier www.ferragamotimepieces.com www.jaeger-lecoultre.com SEA-GOD Chiasso www.sea-god.ch JANVIER Ste-Croix www.vianney-halter.com TENDENCE Lugano www.tendencewatches.com JORDI Nyon www.jordiwatches.com TIFFANY Chiasso www.tiffany.com LOUIS GOLAY Lonay www.louisgolay.com TIMEX (Timex Group) Manno www.timexgroup.com MANUFACTURE ROYALE Vallorbe RL_Eurotec-Bulletin_98x47_v1.pdf 1 13.02.17 18:30 VERSACE (Timex Group) Manno www.versace.com www.manufacture-royale.com ZITURA WATCH Magliaso www.zitura.com MUSE St-Cergue www.muse-watches.com
DIETRICH Zoug www.dietrich-watches.com GC WATCHES (Timex Group) Zoug www.gcwatches.com RAM Cham www.ram-watches.ch RECONVILIER Zoug www.reconvilier.com ZURICH ALEXORA Zurich www.alexora.com BÓLIDO WATCH SÀRL Dübendorf www.bolido.rocks CAMEL ACTIVE Zurich www.mondaine.com CARL SUCHY Zurich www.carlsuchy.com CORNAVIN Zurich www.cornavin-watches.ch HELVETICA Zurich www.mondaine.com JUSTEX Zurich www.justex.ch LALIQUE Zollikerberg www.lalique.com
LES MILLIONNAIRES Zurich www.millionnaires.ch M-WATCH Zurich www.mondaine.com MARC JENNI Zurich www.marcjenni.com MAURICE DE MAURIAC Zurich www.mauricedemauriac.ch MIKI ELETA (Pendules) Zurich www.eleta.ch MONDAINE Zurich www.mondaine.com MONTILIER Zurich www.montilier.com O&W Zurich www.chronotime.ch PAUL GERBER Zurich www.gerber-uhren.ch PHILIP STEIN Kilchberg www.philipstein.com SEVENFRIDAY Zurich www.sevenfriday.com SWAROVSKI Männedorf www.swarovski.com TORSO Zurich www.torsoswiss.ch URBACH Zurich www.urbach.ch WEINBECK Zurich www.weinbeck.ch WERENBACH Zurich www.werenbach.ch XEMEX Zurich www.xemex.ch ZASPERO Regensdorf www.zaspero.com
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