On part en septembre - Frederick Tubiermont

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Les embrassades furent brèves mais intenses. Louise et Augustine se blottirent toutes deux contre moi et, accroupi sur le quai, je les serrai aussi fort que mes bras le pouvaient. Je voulais que nos corps gardent le souvenir de cette tendre étreinte si jamais le destin décidait qu’elle fusse la dernière. Je montai dans le train, le pied lourd, l’âme en peine. Et le coeur déchiré, j’agitai un mouchoir que Louise m’avait glissé furtivement dans le creux de main. Aux portes et aux fenêtres du wagon pendaient des bouquets de fleur, comme autant de couronnes mortuaires arrimées à un long sarcophage. Le convoi s’ébranla, puis j’essuyai mes larmes avant d’entonner malgré moi des chants de patriote, emporté par la liesse de mes compagnons d’arme. A défaut d’être heureux, nous étions exaltés. Et la mort dans tout ça, y pensions-nous déjà ? Comme le disait Napoléon Bonaparte : “La mort n'est rien, mais vivre vaincu et sans gloire, c'est mourir tous les jours.” Tombés au champ d’honneur, nous serions immortels dans la gloire éternelle. Nous 64


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