Entre Deux Eaux: Démarche & Objectifs

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Entre Deux Eaux Analyse de projets de coopĂŠration dans 10 bassins transfrontaliers. - DĂŠmarche et objectifs -

Emeline Hassenforder Benjamin Noury 3 av. JF Kennedy 59170 CROIX +33 658 214 987 entredeuxeaux@gmail.com http://entre2o.free.fr


Une étude terrain de dix projets de coopération transfrontalière « Entre Deux Eaux » est né d’une idée simple : aller voir sur le terrain comment étaient gérés les projets de coopération transfrontalière dans dix bassins hydrographiques. Forts d’une formation en management de projet et curieux d’appréhender avec un regard neuf de jeune diplômé les pratiques existantes dans ce domaine, nous sommes partis pendant dix-neuf mois à travers ces dix bassins hydrographiques à la rencontre de porteurs de projets. Le domaine de l’eau nous avait été dicté depuis quelques années par une passion commune. Quant à la géopolitique et à la gestion des ressources en eau, ces sujets se sont imposés comme des problématiques actuelles incontournables et pour lesquelles il est nécessaire de commencer à agir. En témoignent les divers forums et conférences mondiales qui se tournent de plus en plus vers les eaux transfrontalières et ouvrent le débat, non plus uniquement aux scientifiques, mais aux managers.

Nous sommes partis pendant 19 mois à travers 10 bassins hydrographiques à la rencontre de porteurs de projets.

Nov. 2008

Recherche documentaire

Juin 2010

Collecte d’information Interviews semi-ouvertes Visites terrain

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Analyse des projets avec la méthode DM®

Sep. 2011

Formalisation de 10 etudes de cas & 1 analyse comparative


Après avoir écrit un mémoire de fin d’étude sur « Le management des ressources en eau - Huit recommandations pour le manager de l’eau» explorant de façon théorique les apports potentiels des grandes théories de management de projet (H.I. Ansoff, M. Crozier & E. Friedberg, V. Giard & C. Midler, H. Mintzberg, H.A. Simon,…) pour les acteurs de l’eau agissant sur le terrain, il nous semblait impératif d’écouter et de recenser de façon pragmatique quelles étaient les difficultés et les bonnes pratiques de dix projets transfrontaliers sur le terrain. Cette expérience pratique a duré de novembre 2008 à Juin 2010 et nous a permis de mener 273 interviews semi-ouvertes de parties prenantes dans les projets sélectionnés .

Notre retour d’expérience: 10 Etudes de cas & 1 analyse comparative

Associées à la collecte d’information à la fois documentaire et informelle sur les projets, ainsi qu’à des visites terrain des sites associés aux projets, ces interviews ont pour objectif de faire une analyse ex-post des projets afin d’identifier, grâce aux outils Development Modeling®, les difficultés et clés de succès des porteurs de projet. Cette analyse sera publiée sous la forme de 10 études de cas sur chacun des projets ainsi qu’une analyse comparative permettant de mettre en avant, transversalement, les bonnes pratiques managériales observées. Certains bassins (comme le Nil et le Mékong en 2007), organisent occasionnellement des rencontres dans le but d’échanger sur leurs expériences respectives mais jamais ce

travail n’avait pu être réalisé dans 10 bassins transfrontaliers. Se concentrer sur les projets et non sur les bassins est Cette expérience pratique a duré de novembre 2008 à un choix qui permet de considérer le management Juin 2010 et nous a permis de mener interviews des ressources en eau dans leur cadre concret. Selon la semi-ouvertes de parties prenantes dans les projets définition du Project Management Institute (PMI) de 2004, sélectionnés : « un projet est un effort temporaire exercé dans le but de - Danube: Danube Regional Project (DRP) créer un produit, un service ou un résultat unique ». Nous - Tigre & Euphrate: South Eastern Anatolian Project (GAP) estimons donc que toute forme de coopération passe - Jourdain: Good Water Neighbours (GWN) and Red-Dead Conduit (RDC) Feasibility Study par des projets. Le projet est un prétexte à rassembler Gange: Ganges Water Sharing Treaty les pays pour construire un cadre de coopération plus - Cauvery: Cauvery Water Dispute grand - Mékong: Fisheries Programme of the Mekong River

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Commission (MRC) - Guarani: Environmental Protection and Sustainable Develop ment of the Guarani Aquifer System Project (SAG) - Okavango: Every River Has Its People (ERP) - Nil: Transboundary Environmental Action Project (NTEAP) - Sénégal: GEF/BFS Project

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catégories d’acteurs furent interviewées dans chacun des pays concernés par les projets :

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- les politiques et commissions de bassin, - les investisseurs/financeurs, - les experts et universitaires, - la société civile/ONG, - les prestataires, - les populations locales.


Premières constatations tirées de nos études terrain Malgré des cultures, des religions, des régimes politiques, des niveaux de développement et des stratégies différentes, les bassins font souvent face à des problématiques similaires : prédominance des préoccupations politiques, sous-implication des acteurs terrain et des populations, lobbying, polémique médiatique, conflits d’intérêts,…Notre étude terrain nous a permis de mettre en avant un certain nombre de dysfonctionnements et de facteurs clés de succès (FCS) dans le management de ces 10 projets. Qu’elles soient positives ou négatives, ces expériences ont été exprimées par les porteurs de projets euxmêmes et permettent l’apprentissage de bonnes pratiques managériales de différentes natures : techniques, humaines, organisationnelles,…

Quelques-uns des FCS constatés sur les dix projets étudiés

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Echange et transparence des données Les projets de coopération sont facilités lorsque toutes les données sur le bassin (à la fois nationales et régionales) sont disponibles. Ces aspects sont primordiaux pour le bon fonctionnement des projets. La Commission Internationale pour la Protection du Danube (ICPDR) a inclus l’échange et la transparence des informations dans ses statuts (Article 12, “Exchange of information”).

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Intégration de tous les acteurs Cet aspect permet d’empêcher que certains acteurs deviennent bloquants et d’anticiper de potentiels conflits en s’assurant que tous prennent part à la prise de décision. Il est préférable de laisser émerger ces divergences d’opinions dès la formalisation du projet plutôt que de les voir ressurgir après et de menacer sa réalisation. Le projet «Every River has its people» a créé un forum regroupant les villagois du bassin de l’Okavango et les dirigeants politiques afin d’établir un canal de communication priviligié.

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Un cadre juridique L’existence d’une tierce partie à un niveau supranational permet de mettre un cadre juridique et facilite les échanges entre les pays.

Lorsque les projets échouent, c’est la coopération qui en pâtit, et avec elle la durabilité de la ressource en eau.

Ce rôle est joué par des entités comme l’Union Européenne pour le Danube ou le Rhin ou encore par la Communauté de Développement d’Afrique Australe (SADC) pour l’Okavango, l’Orange ou le Zambèze.

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Quelques-uns des dysfonctionements constatés sur les dix projets étudiés

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Pas ou peu de management des risques Bien souvent, les problèmes sont gérés lorsqu’ils apparaissent et non en anticipation. Sur l’aquifère du Guarani, une seule entreprise (SNC Lavalin) a répondu à un des deux appels d’offre lancés, et proposant un tarif beaucoup plus élevé que le budget prévu, retardant l’exécution du projet et nécessitant l’utilisation de techniques de négociations de conflit plutôt que d’anticipation.

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Dissociation entre les notions de financement et de durabilité De nombreux projets et activités s’arrêtent prématurément avec la fin des financements. Le Projet d’Action Environnementale Transfrontalière du Nil (NTEAP) n’a pas eu l’impact escompté dans le temps car peu d’activités ont été maintenues après la fin du projet.

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Manque de volonté politique Les pays montrent peu de volonté de coopérer dans les faits et/ou ont des objectifs divergents. Le projet de canal entre la Mer Rouge et la Mer Morte est entrepris actuellement par la Jordanie, Israël et les Territoires Palestiniens pour trois motifs différents (respectivement augmenter l’offre en eau, mettre en avant une volonté de coopérer et être reconnu en tant que pays.)

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Faible apprentissage par l’expérience Peu d’échanges de bonnes pratiques sont organisés entre les différents bassins. Au sein même des bassins, les projets ont peu tendance à capitaliser sur leurs expériences passées.

Ces dysfonctionnements et facteurs clés de succès peuvent être synthétisés dans une roue systémique de projet:

Technique Juridique

- FCS -Dysfonctionnements

Le Programme Pêche de la Commission du Mékong (MRC) a perdu une grande quantité de données à deux occasions : la rotation géographique du siège de Phnom Penh à Vientiane et le changement de directeur du programme.

Social Politique

PROJET Financier Académique

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Ces listes sont bien entendu non-exhaustives et présentent uniquement un échantillon des diverses bonnes pratiques et contraintes tirées des projets étudiés. Pour un descriptif plus complet, se référer aux études de cas.


Comment minimiser ces dysfonctionnements? Une fois identifiés et recensés, ces dysfonctionnements ne doivent plus continuer à impacter des projets d’une envergure et d’une importance géopolitique telles (Les dix projets étudiés ont à eux seuls un budget total de 31,5 milliards d’euros et impliquent directement plusieurs milliers de personnes). Quant aux FCS, il est important de les communiquer et de les échanger entre les différents bassins. Les méthodes traditionnelles de management (Prince2, PMBoK, MSP, OP3M, Balanced Scorecard) visent majoritairement à maintenir le trio coût-délai-qualité du projet dans le cadre des objectifs fixés. Ces trois notions sont primordiales pour la performance du projet. Cependant, dans le cadre de projets complexes, d’autres paramètres entrent en jeu : risques géopolitiques, difficultés des acteurs sur le terrain, problématiques liées aux financements internationaux, impacts du projet sur la culture du pays… Ces facteurs peuvent mettre en danger la performance du projet. Ainsi, certains projets avortent ou n’atteignent pas les objectifs fixés pour des raisons qui sont extérieures aux maîtres d’ouvrage. Dans le cas de projets complexes, le manager de projet peut se retrouver confronté à des obstacles auxquels il ne peut pas faire face en utilisant ses méthodes habituelles. Nous pensons que l’analyse de la complexité, via le management stratégique des projets, est une nouvelle compétence à utiliser sur tous les projets complexes, et particulièrement les projets de coopération dans les bassins transfrontaliers. Aujourd’hui, les outils de gestion de projet utilisés le sont principalement par les politiques et les bailleurs de fond. Ils définissent la stratégie globale du projet : le but stratégique, les composants, les principaux livrables… Nombre d’acteurs rencontrés sur le terrain ont des difficultés à matérialiser les actions quotidiennes qui résutent de ces objectifs globaux.

L’enjeu est de définir une stratégie globale au service d’une implémentation locale.

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Notre ambition Notre objectif: Faciliter la gestion des projets de coopération dans les bassins transfrontaliers

Partant des constatations faites dans 10 bassins transfrontaliers, nous souhaitons proposer un accompagnement stratégique des projets, afin de prendre en compte les facteurs de la complexité et diminuer leur impact sur la performance des projets. Cette démarche surfe sur la tendance actuelle d’un monde de l’eau de plus en plus tourné vers des notions de gestion intégrée et de gouvernance : une démarche unique qui correspond aux attentes du conseil de demain et aux besoins des porteurs de projet actuels. La méthodologie sur laquelle nous nous appuyons, le Development Modeling®, est une méthodologie de modélisation de projets complexes et de pilotage du développement qui allie les dimensions de stratégie, de finance et de projet. Elle intervient en complément des méthodes traditionnelles de management (Prince2, PMBoK, MSP, OP3M, Balanced Scorecard). Les outils Development Modeling® de représentation et d’analyse des projets agissent comme des supports à la décision stratégique des dirigeants et managers. Ce mode de management, appelé management stratégique de projet, ne change pas le mode de travail existant des porteurs de projet mais intervient en complément, permettant d’y intégrer les paramètres liés à la complexité. Nous souhaitons allier cette base scientifique à notre expérience unique et transversale de dix grands bassins pour accompagner les projets en gestation dans une réalité terrain.

Les porteurs de projet

que nous souhaitons accompagner sont ceux impliqués dans le management de projets de coopération dans les bassins transfrontaliers. Notre désir est de faciliter la gestion des projets par leurs C’est à dire les personnes que nous avons rencontrées managers grâce à un mode de management adaptatif et pendant notre expérience terrain : multidisciplinaire capable de proposer des scenarii qui - Les commissions de bassin, s’adaptent aux réalités du terrain, dans le but, à terme, - Les gouvernements (ministères responsables de la mise en place de projets sur l’eau, en général les ministères de l’eau ou de d’assurer la durabilité à la fois des projets complexes et l’agriculture) et les organismes publics (organismes de gestion des ressources en eau. de l’eau au niveau régional et local mettant en place des projets transfrontaliers), - ONG mettant en place des programmes transfrontaliers sur l’eau (exemple: Friends of the Earth), - Les équipes projet, - Les bailleurs de fond.

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