LA LECTURE S’INVITE SUR LES PLAGES DE NOUMÉA
LES DESSOUS DES FESTIVALS DE LEUR FINANCEMENT À LEUR RAYONNEMENT CULTUREL
p. 32 Enquête
p. 10 La Grande interview Vevelan, au rythme de la musique
p. 20 Portrait Dewé Gorodé
p. 52 Parcours Jean-Pierre Paillard, une drôle de vie
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GRATUIT
Spécial Silo
ENDEMIX n째 08 septembre - octobre - novembre 2014
OPT (EPIC de la NC) - 2 rue Paul Montchovet 98841 NOUMEA CEDEX - RCS NOUMEA B 132 720 - Document non contractuel
édito
4 LA CULTURE BOUGE 6 CULTURE WEB 8 CHRONIQUES D'AILLEURS LA GRANDE INTERVIEW 10 Vevelan, « La musique, c’est presque une drogue pour moi »
12 LIRE UN PAYS 14 PORTRAITS Siman - Artiste pluriel
Stéphanie Wamytan - Artiste sans tabou Gayulaz - Note tribale Darling & Co - Rock Connection Léopold Hnacipan - Une soif d’écrire Dewé Gorodé - La plume au bout de la sagaie Les 5 Fantastiques - À la conquête de la lecture Claudine Jacques - Écrivaine avant tout
KANEKA 25 «ERA Angaishola » de Nodeak LE CRI DU CAGOU 26 Art’i’flam
27 L'ART AUTREMENT La musique en prison
28 QUESTIONS À
Walles Kotra, directeur de NC1ère
IDÉAL 30 LeLElightGENRE art
31 LeÉVÉNEMENT Salon international du livre océanien se raconte
© Théo Quillier
ENQUÊTE 35 Vous avez dit festival ?
PALABRES D'ÉCRIVAINS 40 Rencontres avec Hamid Mokaddem, essayiste, et Ku’ualoha Ho`omanawanui, poétesse
FICHE PRATIQUE 42 Devenir intervenant artistique CRITIQUES 44 Musique
My Family, Vevelan Step One, Othello and the Scaffolders Caledonia +687, Collectif Bersema, Matahari Littérature Quintet, Frédéric Ohlen La Dernière jeep, Firmin Mussard
S’il est une idée tenace, c’est bien celle qui voudrait que l’ensoleillement et la proximité de la plage ne favorisent pas l’intérêt pour la chose culturelle, encore moins la lecture. Le rat de notre couverture semble pour sa part n’avoir aucun problème à concilier plaisirs nautiques et nourritures de l’esprit. En cela, il est aidé par le poulpe qui, comme le veut la légende, s’est probablement encore fait avoir. Cette année le Salon international du livre océanien (Silo) s’implante à Nouméa : du livre, encore du livre, cette fois au cœur de la ville, mais toujours face à la plage… Sachant que le poulpe est justement l’emblème du Silo, vous comprendrez l’invitation qui vous est faite à travers le dessin de Jilème ! Christophe Augias, directeur de la bibliothèque Bernheim
MÉTIER 50 Conservateur de bibliothèque PARCOURS 52 Hommage à Jean-Pierre Paillard SUR 54 LeRETOUR Festival des arts mélanésiens LIEU 56 Centre culturel de Voh ÉTAIT UNE FOIS... 58 LeILSalon international du livre océanien
60 AGENDA 62 ANNUAIRE
Endemix est publié par : Le Poemart : Pôle Export de la Musique et des Arts de NouvelleCalédonie 27, rue de Sébastopol Le Central 310, 98800 Nouméa Nouvelle-Calédonie Tél. : (687) 28 20 74 contact@poemart.nc www.poemart.nc
La Maison du Livre de la Nouvelle-Calédonie 21, route du Port-Despointes Faubourg-Blanchot 98800 Nouméa Nouvelle-Calédonie Tél. : (687) 28 65 10 accueil@maisondulivre.nc www.maisondulivre.nc
La bibliothèque Bernheim 41, avenue du Maréchal Foch 98800 Nouméa Nouvelle-Calédonie Tél. : (687) 24 20 90 bernheim@bernheim.nc www.bernheim.nc
Directeur de la publication : Chris Tatéossian Rédactrice en chef : Gaëlle Bessaudou-Perrier (perrier.gaelle@gmail.com) Rédactrice en chef adjointe : Virginie Soula Coordinatrice : Claire Thiebaut (claire@poemart.nc) Rédaction : Léna Quillier, Frédérique de Jode, Aurélie Cornec, Claire Thiebaut, Sylvain Derne, Jean-Marc Estournès, Anne Bihan, Stéphane Camille, Coralie Cochin, Virginie Grizon, Théo Rouby Photographies : Éric Dell’Erba, Damien Heinrich, Théo Rouby, Coralie Cochin Couverture : Jilème Corrections : Jean-Marc Estournès Publicité : Rezo, tél. : 25 50 90 Maquette, réalisation et couverture : Push&Pull, tél. : 24 22 49 Impression : Choice Company Tirage : 15 000 exemplaires Distribution : Totem ISSN : en cours Le Pôle Export de la Musique et des Arts de Nouvelle-Calédonie est une association à but non lucratif créée en décembre 2007. Il a pour mission de promouvoir la création locale à l’intérieur et à l’extérieur du territoire en accompagnant collectivement les artistes et en mettant à leur disposition des outils et un réseau-ressources local et international.
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La culture bouge a
rts vivants
ces arts qui dialoguent Pourquoi mettre des bornes là où on est libre de passer ?
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lors que le public perçoit souvent l’artiste comme un héraut de la liberté, il s’avère que ces créateurs peuvent se sentir enfermés dans leurs propres expressions artistiques. Arts plastiques et spectacles vivants, quelles qu’en soient les disciplines, sont orientés par un certain nombre de codes qui peuvent les rendre imperméables au mélange des styles. Pourtant quelques artistes du Caillou s’essaient à la transdisciplinarité, pour abaisser ces frontières entre les arts et proposer au public des expositions-performances. Les danseurs et comédiens s’immiscent dans les salles d’expo alors que les œuvres d’art s’animent dans des chorégraphies souvent très contemporaines.
Quand l’exposition prend vie
Kanak, l’Art est une Parole. À croire que la danse était plus puissante que les mots : elle a guidé les visiteurs d’objet en objet, les mettant en scène, leur rendant la vie. Ces artefacts sont ainsi sortis de leur état d’œuvres de musée.
Transversalité On peut également citer la création de Liza Prouchandy Fais-moi un geste. À partir du texte d’Eric-Emmanuel Schmitt Quand j’étais une œuvre d’art, la chorégraphe « a mis en scène des danseurs dans une salle d’exposition ». Elle raconte que « l’interdisciplinarité offre plus de liberté, et a donné un nouveau souffle dans la création. Elle offre aussi plusieurs perceptions d'un même sujet, donc plusieurs niveaux de lecture ». Plus de possibilités rime aussi avec plus de contraintes, car on « n’expose » pas un artiste comme une œuvre d’art. « Il faut créer les espaces pour l’expression du corps en mouvement », précisent-ils tous. À la même enseigne, les scénographies d’exposition doivent être pensées pour exister sans la performance vivante. Mais, comme le résume Liza Prouchandy, « ces contraintes ont été bénéfiques car elles ont permis de travailler différemment, d'ouvrir un peu ces “boîtes” disciplinaires qui peuvent être sclérosantes pour l’expression artistique ».
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© Justine Collomb
© Cie Traversées
En juin dernier, les sœurs Collomb ont présenté DORa au centre d’Art de Nouméa. Charlotte, la comédienne, et Justine, la photographe-vidéaste, ont donné vie à un personnage de la pièce de théâtre Les névroses sexuelles de nos parents. « Associer nos arts a d’abord permis de multiplier les moyens d’incarner ce personnage. » Pour ces deux artistes qui travaillent sur la notion de subjectivité, de la perception de soi par l’autre, mélanger les supports est un bon moyen de s’interroger sur ce que nous donnons à percevoir et la façon dont nous nous montrons. Un peu plus tôt dans l’année, c’est Richard Digoué, danseur chorégraphe contemporain, qui a mis en scène Reflets de paroles dans le cadre de l’exposition Charlotte Collomb s’anime sous les effets de la projection de Justine.
Liza Prouchandy en poupée de cire dans Fais-moi un geste.
La danse au pied du lit
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epuis plusieurs années, les professionnels des arts et de la culture multiplient les initiatives pour intégrer les publics dits fragiles ou sensibles. Dernier projet en date sur le territoire calédonien, Le pont des arts, lancé par Linda Kurtovitch et sa compagnie de danse, ParlesTempsquiCourent. Dans le service de pédiatrie de Magenta, les artistes se donnent rendez-vous chaque semaine pour offrir aux enfants hospitalisés des spectacles ou des ateliers. « Unique expérience pour les danseurs, conteurs, plasticiens et autres chanteurs, c’est aussi la seule organisation du territoire qui intervient de façon hebdomadaire à l’hôpital », précise la jeune femme. Bien que soutenue par les institutions publiques et des sponsors privés, Linda a appelé également les particuliers à participer à ce beau projet sur le site www.kisskissbankbank.com. Elle est parvenue à recueillir la somme nécessaire, permettant ainsi au projet de continuer d’enrichir la vie des enfants malades.
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rts vivants
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La coutume dans l’objectif
La culture bouge
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ombien de fois entend-on « la coutume ne se raconte pas, elle se vit » ? Sébastien Lebègue, photographe et reporter graphique, en a fait l’expérience. Pendant quatre mois, il a sillonné les tribus de Nouvelle-Calédonie pour recueillir témoignages, portraits et moments de vie. Ses tirages et croquis seront exposés au centre culturel Tjibaou du 4 novembre 2014 jusqu’en avril 2015, puis compilés dans un recueil. L’exposition partira ensuite à l’ambassade de France et à l’Institut français de Tokyo, pour terminer son voyage à la Maison de la Nouvelle-Calédonie à Paris.
© Sébastien Lebègue
Contact : lepontdesarts.nc@gmail.com
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n septembre 2013, l’association La Distillerie voyait le jour avec, pour ambition principale, le montage d’une exposition hommage à la créatrice de parfums Sandrine Videault. « Nous voulions créer un événement qui soit une réminiscence de l’œuvre de cette parfumeuse passionnée, méconnue des Calédoniens », racontent les organisatrices, Patricia Bourgeois, Patricia Charles et Véronique Menet. Ces trois plasticiennes amies d’enfance de Sandrine se sont lancées dans la création d’œuvres fantasmagoriques et investissent le château Hagen pour créer une exposition 100 % sensorielle. Château Hagen, du 3 au 29 novembre 2014 Informations Facebook/La Distillerie
© Azuma Makoto
Hommage Évanescent
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cebook ? Une page Fa jourd’hui le au Indispensab ire connaître pour fa (et Les artistes ien . il a v a r t n o s es) l’ont b les entreprisis savez-vous compris. Ma t optimiser au commen espace de et maximum c couvrir cinq dé propose de grand réseau s u o v ix m e nd lus diffusion ? E ieux appréhender le p ocial du monde : s m r astuces pou
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Photograph © Jayson
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Culture web
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Les étoiles du Wetr
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country boy
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n juillet dernier, Jean-Luc Leroux a réalisé une série de concerts aux États-Unis, surtout du côté de Nashville et de la Caroline du Nord. L’amoureux du bluegrass en a profité pour enregistrer son sixième album. Son originalité ? Il a réuni sur cet opus tous ses amis américains, des musiciens avec qui il travaille depuis une dizaine d’années. Dans Voyages, amours, etc., l’homme au chapeau explore à nouveau l’origine de la country music sans pour autant oublier d’où il vient ; ses chansons sont écrites en français et même en tahitien. Disponible bientôt dans les bacs de Nouvelle-Calédonie.
de Pantin pour suivre une formation du 15 septembre 2014 au 23 janvier 2015. Régine Chopinot est enthousiaste : en trente années de création et de transmission, elle n’a jamais vu de jeunes artistes progresser à cette vitesse. « Il faut dire qu’ils travaillent comme des fous. Le niveau exigé pour obtenir le diplôme d’Etat en danse contemporaine (l’examen a lieu en février 2015) au CND de Pantin est très élevé. »
© João Garcia
rois jeunes danseurs de la troupe du Wetr ont quitté leur île en janvier dernier pour la France afin de suivre une formation de danse contemporaine à Toulon. Drengen Hnamano, Ixepe Sihaze et Epiätre Wawine ont notamment participé au spectacle Very Wetr ! chorégraphié par Régine Chopinot et présenté au Festival d’Avignon en 2012. Cette dernière les a encouragés et soutenus pour continuer leur apprentissage en Métropole. Grâce à une bourse attribuée en début d’année, « une formation sur mesure a été imaginée, pensée et mise en place au plus près de leurs besoins. Ils suivent des cours techniques en danse contemporaine le matin, avec trois professeurs et moi-même, explique Régine Chopinot. L’après-midi, ils rendent compte – à l’écrit ou à l’oral – de toutes leurs expériences, travaillent sur la culture et l’histoire chorégraphiques, étudient des vidéos, analysent des mouvements dansés et l'anatomie du corps du danseur ». En plus des cours, ils participent aussi à plusieurs projets comme une création interdisciplinaire avec le conservatoire et les Beaux-Arts de Toulon, ou encore une création à Ouagadougou au Burkina Faso avec les danseurs de l’École de danse internationale d’Irène Tassembédo. Ils seront également au Centre national de la danse (CND)
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Artiste ambassadeuR
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kson a participé au Darwin Festival du 7 au 24 août 2014. Le festival accueillait musiciens, comédiens, plasticiens, humoristes, danseurs locaux et internationaux, pour dix-huit jours intenses de spectacles. Si Ykson a déjà été invité par plusieurs festivals australiens (Woodford Festival et Dream Festival), il n’en est pas pour autant désabusé et garde en tête ses objectifs. « Je suis très heureux d’avoir représenté la Nouvelle-Calédonie. C’est toujours un challenge car je veux montrer que les artistes du pays sont capables et qu’ils peuvent être reconnus sur l’échiquier mondial. » L’artiste a pris la double casquette pour l’occasion : enflammer les scènes australiennes tout en exposant ses tableaux.
© Eric Dell’Erba
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Chroniques d'ailleurs
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Grande interview
Le kaneka a sa place à l’international ; nous avons des spécificités musicales, des messages à faire passer
© Damien Heinrich
Propos recueillis par Léna Quillier
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« La musique, c’est presque une drogue pour moi » My Family, le deuxième album solo de Hervé Wahéo aka Vevelan, est sorti dans les bacs en mai dernier. Douze morceaux dansants et inspirés qui parlent d’amour et de partage. Rencontre avec un artiste ouvert sur le monde et sur les autres.
Le rêve de Vevelan : conquérir le monde avec sa musique. À 34 ans, il fera tout pour y parvenir, en saisissant au passage toutes les opportunités qui se présenteront.
D’où vous vient cette passion pour la musique ? Là où j’ai grandi, nos papas sont aussi musiciens. Ils nous amenaient très régulièrement chanter dans les petites chorales de l’église et nos grands-pères nous apprenaient les Doh*. Plus tard, je me suis mis à la guitare, en autodidacte. Si je n’ai pas ma musique, je suis perdu. C’est presque une drogue pour moi. Lorsque je suis tendu, ceux qui me connaissent savent tout de suite pourquoi : « Ah, Vevelan n’a pas sa guitare ! ».
Comment envisagez-vous votre avenir dans la musique ? Vivre de ma musique. Mon rêve. Je pense qu’un jour j’y parviendrai et ma passion m’y aidera. Mon père m’a toujours dit que que ce n’était pas un métier rentable. J’aimerais tellement un jour lui prouver le contraire. Mon rêve ultime serait de pouvoir m’exporter. Le kaneka a sa place à l’international ; nous avons des spécificités musicales, des messages à faire passer. Mais ça commence à bouger. Dick et Hnatr sont allés au Mali, Sumaele au Maroc et il y a les Flèches de la musique à la fin de l’année avec le « Prix Export ». Ça pourrait être un bon tremplin.
Deux ans entre vos deux albums solo. Qu’est-ce qui a changé dans votre méthode de travail pour éditer My Family ? Je compose beaucoup. Mes morceaux se sont accumulés au fil des années, tant et si bien que j’ai eu envie de les enregistrer pour les partager avec le public. C’est comme ça que j’ai réalisé mon premier album. Malheureusement, j’ai eu peu de retours financiers. J’ai juste réussi à rembourser ce que j’avais dépensé, même si je travaille avant tout pour le plaisir de la musique. My Family, mon deuxième album, a été produit par Mangrove. J’ai pu me concentrer sur la création et me prendre moins la tête sur l’aspect financier. C’est pour cette raison que je sens cet album plus abouti. Avec les musiciens, nous avons fait deux semaines d’enregistrement et deux semaines d’arrangement. L’idéal. J’ai eu le temps de bien travailler, de concrétiser toutes les idées qui me venaient au fur et à mesure.
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C’est un peu ça. Quand l’inspiration est là, il faut savoir la saisir et ne pas la laisser passer. Tu pourrais attendre des mois avant qu’elle ne revienne. C’est pour ça que je pense déjà au troisième album.
Qu’est-ce qui fait la particularité de cet album ? J’ai essayé de m’enrichir de plusieurs styles musicaux. J’ai toujours eu cette démarche mais avec My Family, on sent bien les différentes influences. Je travaille sur des rythmes variés tout en gardant l’esprit kaneka. C’est très festif, ça bouge beaucoup. J’ai aussi voulu rendre hommage à la famille, que ce soit nos parents ou nos amis. Sans oublier les musiciens du pays, une autre fratrie, liée non pas par le sang mais par l’amour de la musique. Nous vivons des moments forts ensemble sur scène ou en studio. C’est pour cela qu’il y a de nombreux featurings sur l’album : Sadro, Ada... J’ai également invité certains musiciens des groupes Hnamous, Kirikitr, Wifi Connexion à jouer sur mes morceaux. Tout ce mélange m’enrichit. J’ai demandé aux artistes d’apporter leur vision des morceaux, je ne voulais pas d’un album perso. C’est vraiment important pour moi de partager. C’est le message de l’album : amour, paix et partage. C’est mon petit destin commun à moi.
Grande interview
Vevelan : J’ai très vite intégré le groupe Expression qui réunissait des Calédoniens, des gens de la Grande Terre, des Wallisiens, des îliens, tous expatriés à Toulouse pour les études ou le travail. C’est avec eux que ma musique s’est construite. Nous avons participé à des festivals et animé pas mal de concerts. Puis je suis devenu leader du groupe et nous nous sommes rebaptisés Toulélouzé. Nous étions tellement motivés que nous avons réussi à sortir un album en autoproduction, Ciroi sésé. Quand je suis revenu sur le Caillou en 2011, c’était tout naturel pour moi de continuer dans cette voie et, un an plus tard, je sortais mon premier album solo Wawaly.
On peut parler de temps d’inspiration.
BIO EXPRESS
Vevelan chante et joue de la guitare depuis son plus jeune âge. Il part faire ses études à Toulouse en 2001 pour ne revenir sur le territoire que dix ans plus tard. En Métropole, tout en exerçant des petits boulots à droite et à gauche, il affirme sa passion pour la musique et se professionnalise en tournant avec un groupe calédonien. De retour au pays, il devient ambulancier mais continue l’aventure musicale en fédérant autour de lui de nombreux musiciens. Deux albums plus tard, il n’a pas l’intention de s’arrêter en si bon chemin.
DISCOGRAPHIE
2009 : Ciroi sésé, « vivre ensemble » en langue de Maré, avec le groupe Toulélouzé, autoproduction 2012 : Wawaly, autoproduction 2014 : My Family, Mangrove
ANECDOTE
« Lors d’un concours musical organisé à Paris, mon groupe Toulélouzé est arrivé parmi les premiers. Une personne du jury s’est approchée de moi et m’a félicité personnellement. C’était Serge Teyssot-Gay, le batteur de Noir Désir. Je n’en revenais pas. »
HUMOUR PAYANT
Vevelan a invité Landry et les Wifi Konnexion sur un titre de l’album intitulé « Bo gosse ». Résultat ? Un morceau de zouk endiablé et plein d’humour qui donne tout de suite envie de se déhancher sur la piste de danse. Le public a d’ailleurs apprécié, comme en témoigne sa première place sur le site Top 20 calédonien au mois de juin. Saito !** * Chant religieux protestant kanak inspiré des cantiques des missionnaires. ** « Pas mal ! » en jargon des îles !
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es Calédoniens vous ont vu revenir de Métropole et conquérir à grande vitesse les scènes locales. Que s’est-il passé durant cette décennie en France ?
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Lire un pays
Les salons permettent de forger un réseau d’ambassadeurs du livre calédonien.
l © Mike Hosken
ittérature
Un outil au service des et des
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ecritures auteurs
Par Anne Bihan
Si en terre océanienne « l’Art est une Parole », pour reprendre le titre de l’exposition qui vient d’être consacrée à l’art kanak, cette parole a besoin de conques et de passeurs pour se faire entendre par-delà la barrière de corail. Lorsque cette parole devient livre, c’est au pôle Lire un pays... la Nouvelle-Calédonie que revient d’organiser son indispensable promotion.
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Association des éditeurs (AEDE) a porté sur les fonts baptismaux ce pôle dont le nom dit bien la vocation : donner à lire à tous les publics, proches ou lointains, toutes les écritures – poésie, théâtre, nouvelle, roman, bande dessinée, essai, etc. – qui, chacune à leur façon, témoignent du pays qui est le nôtre. L’enjeu est majeur, indissociable de la construction de la Nouvelle-Calédonie. Il s’agit de rendre visible la contribution singulière aux représentations et aux défis du monde contemporain. Poursuivre un tel but commence par la logistique : il faut assurer la distribution des livres jusqu’aux lecteurs. Un important travail est accompli en ce domaine depuis une dizaine d’années. Sa partie émergée, portée par Cathie Manné et Bénédicte Griffon, est manifeste lors des divers salons organisés en Nouvelle-Calédonie (Silo, Fête du livre aux Loyauté, à Koné), à Tahiti (Lire en Polynésie) et en Métropole (salons du livre de Paris, d’Ouessant, de Montreuil, de Rochefort, etc.). Pour ces derniers, la convention entre la Maison du Livre et la Maison de la Nouvelle-Calédonie à Paris est un précieux atout. En dehors de ces événements, les livres calédoniens doivent aussi pouvoir être aisément commandés, notamment en France, par une librairie, une médiathèque. C’est l’objectif de la convention, proposée par le pôle, avec la plate-forme de distribution Pollen. La structure est construite, et ses rouages désormais bien identifiés.
À la rencontre du public métropolitain Assurer une meilleure distribution toutefois ne suffit pas. Faut-il encore que la production calédonienne soit connue de son lectorat potentiel. C’est ce défi que le pôle s’efforce de relever avec, en plus des actions sur le territoire, une démarche de promotion à l’international. Et ça marche. Ils sont libraires, bibliothécaires, journalistes ou responsables de centres régionaux du livre en Métropole. Ils ont un jour accueilli un écrivain calédonien lors d’une simple rencontre, découvert notre richesse éditoriale lors d’un salon, ou leur projet entre en résonance avec ce que nous sommes. Le travail consiste à identifier ces proximités, saisir leur désir au bond, le susciter de manière volontariste si nécessaire et à accompagner dans la durée leur découverte du livre calédonien. Comment ? Ici en proposant une journée de présentation et lectures des littératures de Nouvelle-Calédonie, là en assurant l’interface avec les auteurs, les structures, là encore en aidant à bâtir une programmation, ou un projet de résidence. Exemples de projets en cours, avec présence à chaque fois de plusieurs auteurs : en novembre la richesse linguistique calédonienne sera sous les projecteurs du Salon multilingue du livre jeunesse de Pluguffan dans le Finistère ; et décembre 2014 sera le mois de la NouvelleCalédonie en Saône-et-Loire, région métallurgique, autour de la thématique des transformations du monde. Pas à pas, d’acteurs à acteurs, de territoire à territoire, la natte ainsi se tresse, la parole circule et des horizons s’ouvrent.
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Artiste pluriel
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Plus jeune, la danse lui a permis « de poursuivre un objectif et d’éviter les ennuis ». Slam, danse, break et comédie, aujourd’hui Ludovic “Siman” Wenethem est un artiste complet, investi à la fois dans ses créations et dans son travail d’accompagnateur jeunesse.
Par Claire Thiebaut
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our l’aider à tracer son chemin, Siman a trouvé des grands frères. Fratrie de sang, comme Sylvain et son jumeau Jacques, et aînés de cœur, Richard, Paul, Soufiane. Tous au fondement de son identité d’homme et d’artiste. Inexorablement, il est conduit et revient sur les traces de sa culture laissée à Lifou en 1993, lorsque sa famille déménage à Nouméa. « Ma base, c’est la danse traditionnelle kanak. Mon grand frère, Sylvain, était danseur et je voulais faire comme lui... En mieux ! » Pour cet artiste, la danse est « une excuse pour un retour à la tradition et à ses valeurs ».
Il n’y a pas que l’école pour donner du sens à sa vie. Les arts et la culture sont aussi un débouché.
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De l’art utile Des valeurs coutumières comme l’intégration sociale, la collectivité, le partage. Alors, lorsqu’en 2005, les jeunes de Tuband demandent à la mairie de Nouméa la création d’un lieu dédié à la culture hip-hop, Siman en est. « Au début, c’était Sylvain le moteur. Mais il est parti en Métropole. D’un coup, j’ai été propulsé pour prendre la suite et on a abouti à la création du Rex. » Nouvel engagement depuis 2010 au collège de Rivière-Salée : un rôle d’accompagnateur d’éducation. Pas de suivi des devoirs pour lui ; le principal a rajouté deux adjectifs à son poste : artistique et culturel. « Quand j’étais au collège, la danse m’a permis de poursuivre un objectif et d’éviter les ennuis. C’est ça qu’il faut proposer aux jeunes. » En 2011 et 2012, un Siman d’à peine 25 ans
emmène une trentaine d’élèves en Nouvelle-Zélande pour la création d’un spectacle de cirque/slam. « Certains élèves étaient en décrochage scolaire, socialement perdus. Sur scène, les gens les ont vus comme des artistes. Ça les a fait réfléchir : il n’y a pas que l’école pour donner du sens à sa vie. Les arts et la culture sont aussi un débouché. »
Le partage Un leitmotiv chez beaucoup d’artistes, presque une esthétique de vie pour Siman. Pas de compagnie, pas d’attache, libre de papillonner de troupe en troupe et de rester « un patenté indépendant ». Trois mentors cependant : Richard Digoué, « qui m’a invité dans son univers contemporain » ; Soufiane Karim, l’alter ego hip-hop. Et, Paul Wamo, le grand frère de Lifou avec qui il partage les mots du slam. D’autres aussi, comme le collectif Street Force Attitude, la compagnie Maado et le crew Résurrection. En 2009, Siman est à l’initiative du spectacle Jet mot : handicapable, qu’il travaille avec son jumeau. Pièce singulière, coup de gueule et de courage, qui met en scène Siman « le valide » et Jacques « le handicapé capable » dans une chorégraphie commune.
Diversité des projets Dans un avenir proche, il enregistrera et compilera ses textes en un recueil d’inspiration et hommage à Paul Wamo. La danse et toujours la danse avec la création d’un one man show de slam et danse. Et, qui l’eût cru, le timide enfant de Lifou est devenu comédien, quand il a participé à la fiction documentaire Walpole en 2010. Il souhaite d’ailleurs tracer cette nouvelle voie et marcher, pour une fois, seul en tête…
© Damien Heinrich
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Sa dernière exposition Révolution 2014 a été présentée à la Galerie 11 & ½ durant le mois de juillet.
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© Éric Dell’Erba
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WaMYTAN Sans tabou
Par Frédérique de Jode
Vous avez pu voir ses robes « libérées » lors de l'exposition Kanak, l'Art est une Parole, au centre culturel Tjibaou. Stéphanie Wamytan poursuit, à travers une démarche artistique forte, son questionnement sur l'identité.
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n visage lunaire, presque poupon, un rire spontané, un caractère franc et bien trempé : Stéphanie Wamytan fait partie de ces artistes qui ne laissent pas indifférent. D'autant plus qu'elle développe depuis des années une démarche plasticienne cohérente et intelligente axée sur la recherche identitaire, le métissage, les détournements d'images, de signes ou d'objets en lien avec la culture kanak. Une démarche qui chamboule véritablement les codes artistiques du Caillou. Ses robes mission « libérées » – autrefois vêtements imposés par les missionnaires et aujourd'hui symboles d'une communauté – ont été présentées en 2013 à Paris puis en 2014 à Nouméa lors de l'exposition Kanak, l'Art est une Parole. Des robes imprimées de scènes et de motifs érotiques. Une consécration pour l'artiste âgée de 34 ans. « J'étais fière lorsque les deux commissaires de l'exposition, Emmanuel Kasarhérou et Roger Boulay, m'ont proposé d'intégrer cette œuvre, explique-t-elle. Je ne m'y attendais pas du tout ».
Un autre regard Ce n'est pas la première fois que l’artiste indépendante explore cette dimension taboue de la sexualité. L'exposition Excès de convoitise regroupait une série de gravures et de bambous gravés en clin d'œil à l'œuvre de Gustave Courbet, L'origine du monde. Stéphanie Wamytan serait-elle une provocatrice dans l'âme ? « Ma démarche est avant tout artistique, souligne-t-elle.
Je ne traite pas d'un sujet tabou pour la simple envie de choquer
Je ne traite pas d'un sujet tabou pour la simple envie de choquer ou de transgresser la morale ou les codes. C'est ma manière d'échanger avec le spectateur, de susciter un questionnement. Mon travail artistique est pleinement réfléchi ». La plasticienne se risque aussi à expérimenter différentes techniques artistiques. Si elle se passionne pour la gravure à son retour de Métropole en 2005, elle s'appuie par la suite sur la peinture pour l'exposition KnK m'en vôtre présentée à Nouméa en 2012 et à Maré cette année.
De l’œuvre unique à l’installation En résidence à Taïwan en 2013, elle réalise une création constituée de quatre tentes en tissu, intitulée Le lien, en rapport avec le geste coutumier et le sacré. Une installation présentée fin 2013 à Nouméa dans l'exposition À la lumière d'un doute. Après les robes mission, l'artiste s'est emparée cette fois-ci de l'image de la tunique des îles qu'elle se réapproprie pour en faire un support de création. Un travail que l'on a pu découvrir en juillet dernier à la Galerie 11 & ½ sous le titre Révolution 2014. Une mise en scène sous la forme d'une boutique éphémère avec des mannequins habillés de robes et de tuniques noires sur lesquelles se détachent des signes identitaires, comme le « drapeau Kanaky ». Toujours avec ce désir d'apporter un autre regard. Mais n'est-ce pas le rôle de l'artiste ?
BIO EXPRESS
1980 : naissance Juin 2005 : obtention d'un diplôme national d'arts plastiques à l'Ensa (Nancy) 2006 : Excès de convoitise, Galerie 11 & ½ 2009 : Latitudes 2009, Hôtel de ville de Paris et Beaux-Arts de Besançon 2010 : Robe mission : un art de la rue ?, centre culturel Tjibaou 2012 : KnK m'en vôtre, centre culturel Tjibaou 2013 : À la lumière d'un doute, château Hagen, centre culturel Tjibaou, Maison du Livre 2013-2014 : Kanak, l'Art est une Parole, musée du quai Branly et centre culturel Tjibaou 2014 : KnK m'en vôtre, centre culturel de Maré ; Révolution 2014, Galerie 11 & ½
© Eric Dell’Erba
Gayulaz porte les valeurs des traditions kanak sur des rythmes modernes et des thèmes fédérateurs. Son troisième album, très attendu du public, est en route pour la fin de l’année. Portrait d’une nouvelle génération d’artistes kaneka, les pieds sur terre, toujours dans le bon tempo.
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Devoir de mémoire
À travers leurs morceaux, les membres du groupe Gayulaz souhaitent transmettre des idées, des valeurs qui leur sont chères. « Avec Adriana, nous avons voulu rendre hommage à Christian Karembeu. En prenant l’exemple de ce parcours atypique mais local, le but était de prouver à toute la jeunesse de ce pays qu’avec de la volonté, de la discipline et de l’envie, nous pouvons réaliser de grands projets ». Lucide quant aux problématiques contemporaines auxquelles est confrontée la société kanak, Gayulaz apporte une parole engagée. « L’igname aujourd’hui est détrônée par le sucre et le riz dans les cérémonies coutumières telles que les mariages, déplore Jean-Pierre. En tant qu’artistes, nous avons ce devoir d’interpeller les gens sur l’importance de la transmission des valeurs de notre culture ». Depuis sa création, le groupe s’implique également dans la vie quotidienne de la tribu en animant des après-midi “musique” avec les jeunes, le week-end. Vecteur d’intégration sociale, fédérateur, Gayulaz contribue humblement, et en rythme, à l’évolution du pays.
DISCOGRAPHIE
2005 : Gayulaz, sous le nom de groupe JJNS, autoproduction 2011 : Adriana, Cap Wessel 2012 : Jurédémé, Cap Wessel
Entre Lifou et Nouméa, malgré des emplois du temps serrés, les membres du groupe ne rateraient une répétition pour rien au monde.
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usique
Note tribale
Par Léna Quillier
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riginaires de la tribu de Nang, dans le district du Wetr, les musiciens de Gayulaz sont fiers de perpétuer une lointaine tradition musicale qui a commencé dans les années 1970 avec le groupe les Rescapés. De génération en génération, la tribu s’est affirmée comme étant l’écrin d’un vivier d’artistes prolifiques : le GZ, groupe des années 1980, puis Hnatr, Paul Wamo, JJNS et enfin Gayulaz. « Lorsque tu écoutes Hnatr, tu entends vraiment les sonorités de Nang. Nous avons un style bien particulier dans notre tribu », assure Jean-Pierre Wacapo Taine, l’un des leaders du groupe. Mélange de kaneka et de folk mélanésien, la musique de Gayulaz a largement dépassé les rives turquoises de Lifou. Il s’impose comme l’un des groupes de kaneka les plus populaires du pays. La société de production Cap Wessel signe son premier album, juste après avoir remarqué la formation sur scène lors d’un concert. Le succès qui l'attend n’est pas un hasard ; le groupe travaille beaucoup, constamment en recherche d’originalité, comme l’explique JeanPierre : « Nous rentrerons en studio pour un troisième album produit par Mangrove, qui sortira à la fin de l'année. Nous voulons retourner à un son plus traditionnel, moins électronique. Nous voulons une musique moins chargée pour mettre en valeur le vocal ».
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Les influences musicales de Darling & Co viennent principalement de groupes mythiques comme U2, Pink Floyd, Kyuss, Incubus ou encore Pearl Jam.
& Co DRock arl iN G Connection Par Frédérique de Jode
© Damien Heinrich
Enfin un EP dans les bacs pour Darling & Co. Après trois ans de répétition et de live, le groupe s’est lancé dans le grand bain en février dernier avec Close Connection : six titres qui parlent d'amour, de société, d’universalité, sur fond de musique pop rock progressive.
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arling & Co, un drôle de nom pour un groupe de rock composé uniquement de quadras ! On s'attendait plutôt à rencontrer une formation de filles sexy se trémoussant sur une musique acidulée. « Auparavant, Gilbert, Patrick et moimême faisions partie de ShotGun, un nom qui sonne – c’est vrai – un peu plus rock », confirme Thierry, le chanteur. Séparée en 2010, une partie de la formation décide de se recréer fin 2011 en intégrant Fred, un nouveau guitariste. Ils cherchent évidemment une autre appellation. « Après un brainstorming, on s'est arrêtés sur Darling & Co, inspiré du petit surnom que me donne ma femme », confie le dernier arrivé. Le nom colle bien aux textes du groupe qui prônent l'amour, le bonheur, le respect, le vivre ensemble et qui s'engagent sur des questions environnementales et de société. Des messages universels plutôt que politiques. En 2013, un dernier comparse, Jérôme, rejoint le groupe un mois avant le départ en NouvelleZélande pour enregistrer Close Connection, un EP de six titres en anglais. « Ce fut une expérience vraiment enrichissante à tous les niveaux, musicalement et humainement », s'enthousiasme Thierry.
communicative et une vraie stimulation artistique. « Tout est naturel entre nous ; on commence à improviser, à trouver des sonorités et des accords que l'on pense intéressants et on avance dans la création. La musique inspire ensuite Thierry qui écrit les paroles », relate Patrick. À l'écoute, Close Connection s'affiche comme un premier album maîtrisé aux consonances seventies portées par les riffs de guitare de Fred. Sans oublier une couleur pop rock qui donne la pêche. Et Darling & Co ne compte pas s’arrêter à un seul EP. Le groupe planche déjà sur d'autres titres avec des textes en français. Une grande première et un vrai défi pour Thierry. « C'est vrai que j'ai toujours eu plus de facilité à composer en anglais, souligne le chanteur, une langue qui offre une plus large visibilité grâce au Web. Mais, je reconnais qu'écrire en français va me permettre de donner un autre relief aux textes et d'avoir un impact différent sur le public ».
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Il n'y a pas de problèmes d'ego entre nous, pas de place de leader. La musique, c'est notre passion.
Énergie Si la formation est récente, une entente sincère semble régner dans la bande, une complicité non feinte entre ceux qui se connaissent depuis une vingtaine d'années – les amis d'hier – et les nouveaux membres. « Il n'y a pas de problèmes d'ego entre nous, pas de place de leader. La musique, c'est notre passion », appuie Gilbert, le bassiste. Il en découle une énergie
LEUR ACTU
Darling & Co sera en concert le 27 septembre au Mouv’ dans le cadre du Nomad Festival.
QUI FAIT QUOI ?
Thierry Maillot dit Pinpin : chanteur / Gilbert Séliman : bassiste Patrick Eriale : batteur / Fred Mazoyer : guitariste Jérôme Goffin : clavier Pour en savoir plus : http://www.reverbnation.com/darlingco
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ittérature
HNACIPAN Une soif d'écrire
Par Frédérique de Jode
Il s’est fait connaître sur la scène littéraire avec des nouvelles. Il place la femme kanak au centre de sa création et n’hésite pas à aborder des sujets aussi tabous que la sexualité dans le monde mélanésien... Léopold Hnacipan est un auteur qui ose.
© Théo Rouby
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éopold Hnacipan aime rappeler ses racines qui prennent vie à Lifou, à Hunöj, la tribu de son père, et à Hnadro, celle de sa mère, où il a grandi auprès d’elle de 5 à 10 ans. Il sera ensuite élevé par ses oncles maternels. Une enfance en osmose avec la nature mais aussi marquée par des privations et des souffrances. « J'ai décrit mon enfance modeste dans la nouvelle Manger du rat publiée dans Olé Oléti. À cette époque, on mangeait du rat parce qu'on n'avait rien d'autre ! », raconte l'auteur. Mais ces années lui ont apporté une force pour surmonter les épreuves. Très jeune, la rencontre avec la littérature sera déterminante. Sa passion pour les livres l'amènera à l'écriture. « Lorsque je n'écris pas, je souffre. L'écriture, c'est comme une thérapie », confie l'écrivain qui fête cette année ses 50 ans.
Si dans ses écrits, la femme kanak tient une place principale, Léopold Hnacipan aborde également la question de la religion apportée par les missionnaires dans la société kanak.
Noëlla Poemate. « Mes écrits donnent aux femmes kanak une place centrale, une place qu'elles méritent car sans elles nous ne sommes pas grand-chose. Je reconnais, ponctue-t-il, que la femme est mon obsession ! ». Autre thématique abordée : la sexualité. Un sujet plutôt tabou dans la société mélanésienne. « Parfois, mes écrits ont pu choquer ma communauté. On m'a même qualifié d'auteur pornographique. Mais je réponds : j'écris pour ceux qui veulent me lire et si ce n'est pas moi qui parle de sujets osés, qui le fera ? Il faut aller au-delà du non-dit. La sexualité, c'est la vie aussi. Nous venons du ventre de nos mères ! » Transmettre, c'est aussi l'envie de l'écrivain. Évoquer les règles oubliées qui régissent sa communauté. Parler d'un temps passé pour le faire revivre. Écrire, pour Léopold Hnacipan, c'est une manière de s'impliquer dans son pays, de laisser une trace de l'histoire du peuple kanak pour les générations futures.
Les femmes, ses héroïnes Son bac en poche, Léopold Hnacipan entreprend des études de Lettres à Grenoble, entrecoupées par un retour en NouvelleCalédonie pendant les “Événements” auxquels il prend part activement. De retour en Métropole, il obtient un diplôme de français langue étrangère, puis commence sa carrière de professeur de français à Houaïlou, avant d'enseigner au collège de Tiéta à Voh où il exerce toujours. Si Léopold Hnacipan manie la plume sans relâche dans sa case loin des bruits du monde, ce n'est qu'en 2010 qu'il fait son entrée sur la scène littéraire calédonienne. Il remporte le concours de nouvelles organisé par « Écrire en Océanie », grâce à son texte Hélène, dans lequel il relate sa naissance. Suivra un recueil poignant de nouvelles Olé Oléti, co-écrit avec
OUVRAGES
Hélène, éditions Écrire en Océanie, 2010 Olé Oléti, co-auteure Noëlla Poemate, éditions Écrire en Océanie, 2011
VETCHAONG (“APPRENDS-MOI” EN FRANÇAIS)
C'est le titre du journal qu'a lancé l'écrivain en 2008 au sein du collège de Tiéta et qu'il chapeaute. L'hebdomadaire, rédigé en grande partie par les élèves, permet un dialogue, un échange où la parole se libère à travers l'écrit.
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Il faut aller au-delà du non-dit
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ittérature
Dewe Gorodé La plume au bout de la sagaie Par Coralie Cochin
Invitée au Silo, la ministre de la culture n’a rien perdu de sa verve d’écrivain ni de militante. Rencontre avec Déwé Gorodé, un auteur engagé qui croit, avec ferveur, en l'importance du rayonnement culturel de son pays.
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Il était une fois une petite fille rêveuse, qui parlait à des amis imaginaires et traçait de drôles de signes devant sa case, sur le sol en terre battue. Cette enfant a vu le jour le 1er juin 1949 à la tribu de l’Embouchure, à Ponérihouen. « Ma grande sœur, aujourd’hui disparue, a toujours pensé que je deviendrais écrivain », confie Déwé Gorodé, membre du gouvernement. Certaines amitiés de jeunesse vont se révéler décisives. Inscrite au lycée Lapérouse pour préparer le “bac philo” – l’ancêtre du bac littéraire –, la jeune lycéenne se retrouve aux côtés de Fote Trolue, qui deviendra le premier magistrat kanak du pays, de Madeleine Wetta épouse Gurrera, la sœur de Marie-Claude Tjibaou, et de Jimmy Ounei, à l’origine du Challenge Michelet, une compétition sportive dédiée aux jeunes. « Les Kanak qui allaient jusqu’au bac à cette période étaient rares. Nous étions peu nombreux dans la classe », observe-t-elle. Grâce à Jimmy Ounei, qui supervise le Réveil Canaque, la revue des Foulards Rouges, Déwé Gorodé découvre ce mouvement de revendication identitaire fondé par de jeunes Kanak. La rencontre avec Nidoïsh Naisseline, l’un de ses leaders, « reste gravée dans (sa) mémoire ». C’était en 1969, au foyer protestant de la rue Taragnat, où se trouve l’actuel lycée Do Kamo. « Il avait les cheveux longs et un foulard rouge autour du cou. Il était éclairé d’une lumière. Quand je l’ai vu, pour moi, c’était Che Guevara. » Déwé Gorodé est à quelques mois du départ pour Montpellier, où elle vise une licence d’enseignement en Lettres modernes. Là-bas, elle rejoint l’Association des Canaques de France et fréquente de nombreux militants tiers-mondistes maghrébins, africains… « Nous ressentions encore l’euphorie de Mai-68. J’ai été portée par ce courant. » C’est aussi le début des premiers émois littéraires, avec la découverte des auteurs de la négritude tels qu’Aimé Césaire ou Léopold Sédar Senghor.
Déwé Gorodé est une femme impliquée. Elle milite depuis de nombreuses années pour défendre la culture de son pays, mais aussi en faveur du droit des femmes.
L’écriture est une compagne qui a toujours été là pour moi
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les week-ends, elle remonte à la tribu de l’Embouchure pour entretenir son champ. « Ce lien m’apporte la paix et la sérénité au même titre que l’écriture. »
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De retour au pays, Déwé Gorodé découvre les tourments de la vie militante aux côtés des Foulards Rouges et du groupe 1878, un mouvement créé par les jeunes de la Grande Terre, qui réclame l’indépendance et le retour sans condition des terres aux Kanak. Un événement va particulièrement la marquer. En 1974, les Foulards Rouges décident de manifester contre le défilé militaire du 24 Septembre à l’anse Vata. Cette date, qui marque la prise de possession de la Nouvelle-Calédonie par la France, est perçue par ces jeunes comme « un jour de deuil ». Deux militants, Elie Poigoune et Henri Bailly, sont arrêtés. En signe de solidarité, un sit-in est organisé devant le palais de justice. La réponse des forces de l’ordre est immédiate. « On s’est fait tabasser et une dizaine d’entre nous se sont faits embarquer, direction le Camp-Est. » Après trois mois d’incarcération, la jeune enseignante est autorisée à sortir de prison pour voir sa fille qui n’a pas
encore un an. Les réunions politiques reprennent. Elle se retrouve deux autres fois sous les verrous. Ces trois séjours derrière les barreaux vont confirmer sa prise de conscience politique. Et puis vient la création du Palika en 1976. Ils réveillent aussi un besoin vital d’écrire. « Il n’y avait pas d’auteurs kanak à l’époque. Qui d’autre que nous pouvait dire notre vécu de la colonisation ? » En prison, elle couche sur le papier une large partie de son premier ouvrage, Sous les cendres des conques, qui paraît en 1985. « L’écriture est une compagne qui a toujours été là pour moi », confie-t-elle. Depuis la création du gouvernement en 1999, Déwé Gorodé est membre de l’institution, dont elle a été vice-présidente pendant huit ans. Mais le personnage politique n’a pas fait disparaître la femme de lettres. L’auteure s’apprête à rééditer son recueil Utê Mûrûnû, petite fleur de cocotier, auquel sera ajoutée une nouvelle inédite. Le lien avec les mots et avec la terre ne l’a jamais quittée, assure-t-elle. Presque tous
Déwé Gorodé sera invitée au Salon international du livre océanien (Silo) en tant qu'écrivain. Onze ans après la création du Silo, la ministre continue de saluer cet événement qui est « une manière de soutenir les plumes du pays ». Son expérience d’écrivain lui permet de comprendre les difficultés rencontrées par les auteurs. « Il nous faut faire avec ces problématiques que sont l’étroitesse du marché, la concurrence du numérique, mais aussi l’isolement. Nous sommes dans un océan anglophone », pointe Déwé Gorodé. D’où l’importance de la traduction pour exporter les ouvrages calédoniens. L’auteure a fait ce choix pour certains de ses romans, recueils de nouvelles et de poèmes, comme L’Epave ou La Saison des pommes kanak, entre autres, traduits en anglais. Si « la littérature calédonienne est très peu connue en France par rapport aux auteurs antillais ou africains », Déwé Gorodé se réjouit de voir qu’un roman calédonien, Quintet de Frédéric Ohlen, vient d’être publié chez la prestigieuse maison d’édition Gallimard.
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Un besoin vital d’écrire
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À la conquête de la lecture
Par Virginie Grizon
Lancé début juillet, Les Cinq Fantastiques est une invitation à la lecture et à la rencontre avec les auteurs locaux. Dans quelques semaines, les abonnés des bibliothèques de la province Sud auront élu leur héros parmi la sélection proposée. La clôture des urnes est proche, Lecteurs mobilisez-vous! a lecture, c’est avant tout une aventure. Un plaisir à partager, une histoire à découvrir. C’est dans cet esprit que la bibliothèque Bernheim, soutenue par la Province Sud, a créé « Les Cinq fantastiques », un jeu littéraire pour adultes et adolescents dont le nom fait référence aux célèbres héros de l’univers Marvel. Depuis la fin juin, quinze médiathèques proposent à leurs lecteurs d’élire leur ouvrage préféré parmi “cinq fantastiques” ouvrages calédoniens. « La sélection a été faite de façon à avoir un choix très varié de style, d’écriture et d’informations », explique Virginie Soula, coordinatrice du projet. Deux romans, une bande dessinée, deux livres « documentaires », il y en a pour tous les goûts et tous les âges. Pour participer, il suffit d’être inscrit dans l’une des médiathèques de la province Sud, de compléter un bulletin en indiquant son ouvrage et son auteur préférés, avant de le glisser dans l’urne prévue à cet effet.
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Les « Fantastiques » près de chez vous La clôture des urnes est prévue le 27 septembre et les résultats seront communiqués début octobre dans chaque établissement. À l’issue du concours, des rencontres seront organisées avec les auteurs élus dans chacune des médiathèques. « Elles seront accompagnées d’une petite mise en scène théâtrale afin de présenter les ouvrages, précise Virginie Soula. Il y aura un livre gagnant par bibliothèque et un autre pour l’ensemble de la province Sud ». En plus de l’échange avec leurs auteurs préférés, les participants auront la possibilité d’être tirés au sort pour gagner une tablette numérique ainsi que les cinq ouvrages de la sélection dédicacés, bien sûr, par les auteurs. Une raison de plus pour voter et prendre part à l’aventure, il ne reste plus beaucoup de temps !
La lecture c'est avant tout une aventure
Endemix a rencontré les auteurs des ouvrages sélectionnés. Ça vous fait quoi de faire partie des Cinq Fantastiques ?
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Anne Pitoiset et Claudine Wéry, auteures de Karembeu, un champion kanak Nous sommes très flattées de faire partie de cette sélection. Ce concours est une belle initiative qui fait la promotion de la lecture et des auteurs, c’est très positif. À travers notre ouvrage, Karembeu, un champion kanak, nous avons voulu mettre en avant le destin exceptionnel et exemplaire d’un Calédonien. Comment passe t-on d’une vie en tribu au Stade de France, puis dans les bras d’Adriana ? Cela dit, le livre ne parle pas uniquement d’un footballeur ou du football. Nous racontons aussi l’histoire de la Nouvelle-Calédonie à travers la vie de Christian Karembeu. Si nous devions adresser un message à nos lecteurs, ce serait d’aborder ce livre sans a priori, sans préjugé. Le second message serait : qui ne tente rien n’a rien. Ce n’est pas parce que l’on vient d’un petit pays que l’on ne peut pas accomplir de grandes choses.
Lorsque l’on m’a appelé pour faire partie de la sélection du concours, j’ai été agréablement surpris, car je ne me considère pas comme un écrivain. J’ai écrit Mille et une plantes en NouvelleCalédonie en espérant qu’il serve comme aidemémoire. C’est le genre de livre qui vit dans une voiture ou un sac à dos, dans le cadre d’un usage quasi quotidien. Les informations sont, je crois, à la portée de chacun. Les textes sont courts, il y a beaucoup de photos et les plantes sont classées par couleur. J’aime ce côté pratique et tout ce que j’espère, c’est que les lecteurs s’en servent sur le terrain, dans le même esprit qu’un guide.
p. 23 Vincent Vuibert, auteur de Chroniques de la mauvaise herbe Je suis un passionné de lecture et je suis heureux de partager ce plaisir à travers ce concours. Il met en avant la littérature calédonienne, longtemps sous-estimée. C’est en train de changer et c’est très bien car il y a de plus en plus de récits de grande qualité. Il y a même de vieux ouvrages qui sont très bien d’ailleurs. J’espère que les lecteurs prendront plaisir à lire Chroniques de la mauvaise herbe. J’aime les mots et la fiction, c’est dans cet état d’esprit que je l’ai écrit. Je raconte l’expérience d’une certaine jeunesse, mais dans mon esprit, il n’y a aucun jugement moral, je ne me positionne pas en termes de bien ou de mal. Je décris simplement les choses. Certains s’y reconnaîtront, d’autres pas. Peu importe, j’espère que ça leur donnera envie de lire d’autres livres.
Nicolas Kurtovitch, auteur de Good night friend Je suis très heureux d’avoir été sélectionné et de voir que mes livres sont appréciés. Good night friend est sorti il y a un moment, ces morceaux d’histoires me trottaient dans la tête et j’avais envie de faire vivre ces personnages. Si je devais résumer cet ouvrage en une phrase, je dirais : nous nous en sortirons. Car c’est ce qui arrive aux personnages. Dans un premier temps, j’aimerais que les lecteurs passent un bon moment. Dans un second temps, ils pourront repenser aux personnages de façon à les faire vivre avec eux.
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Bernard Suprin, auteur de Mille et une plantes en Nouvelle-Calédonie
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Jilème, auteur de Léannie, le monde ado Ça me fait vraiment plaisir de faire partie de cette sélection parmi les autres auteurs. J’ai l’habitude de rencontrer mes lecteurs à travers des séances de dédicaces, mais c’est la première fois qu’une de mes bandes dessinées est sélectionnée pour un concours. L’album choisi est le deuxième de la série et je pense que les gens aiment ce personnage, l’apprécient comme une bonne copine, elle est rigolote et attachante. Globalement, je trouve que la BD a toute sa place en Calédonie. Il y a une offre de plus en plus grande, mais contrairement, à la Métropole, peu d’éditeurs qui se lancent. Ce concours, c’est l’occasion de mettre en valeur notre travail.
© Claudine Jacques
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Claudine
Jacques Par Frédérique de Jode
Écrivaine avant tout
Nouvelles, romans, livres pour la jeunesse, théâtre, Claudine Jacques est, depuis vingt ans, une figure du milieu littéraire calédonien. Auteure prolifique, elle peaufine le deuxième tome de sa saga, Un si long battement de cœur, alors même que son dernier roman, Le Bouclier rouge, vient de paraître. Et son amour du livre ne s’arrête pas là... Claudine Jacques est une écrivaine impliquée dans la vie littéraire calédonienne, particulièrement à Boulouparis où elle réside.
C
est un rituel. Chaque matin, Claudine Jacques se réfugie dans la solitude de son bureau pour y trouver l'inspiration, au calme, sans interaction avec l'environnement qui l'entoure. « Je me frotte les mains avec délectation lorsque je m’installe pour écrire, confie-t-elle. Je rentre dans un monde de création où tout est possible, tout est permis ». Néanmoins, l'auteure reste toujours en connexion avec la Nouvelle-Calédonie. Ses ouvrages ont pour toile de fond ce pays qu'elle aime tant et qui l'a accueillie alors qu'elle était adolescente. Des textes qui révèlent le Caillou avec ses lumières mais aussi ses parts d’ombre. « J'ai écrit Les Cœurs barbelés pour raconter les “Événements”, à travers l'histoire de Malou et de Sery, à ma fille et à tous ces enfants qui ne les ont pas vécus », rappelle l'écrivaine. On peut aussi citer Ataï et moi, pièce en un acte où Claudine Jacques fait dialoguer, non sans humour, la relique du grand chef de Komalé avec une jeune fille blanche. Une situation surréaliste qui met en lumière la question du destin commun.
ENDEMIX n° 08 septembre - octobre - novembre 2014
Une femme impliquée Sans langue de bois, Claudine Jacques se fait le témoin d'une société multiculturelle. Si sa plume est parfois acérée, c’est pour évoquer la vie dans les squats, le viol ou la condition féminine. Thématique qui lui a d'ailleurs inspiré Un si long battement de cœur, une saga calédonienne des années 1860 à nos jours. « Je termine le deuxième tome qui narre l'histoire de Kalika dans le tumulte de la Seconde Guerre mondiale en Nouvelle-Calédonie. » Sans être une féministe militante, Claudine Jacques épouse dans ses romans la cause des femmes. « Je suis affectée par la discrimination dont sont victimes les femmes. Le combat doit perdurer car il existe encore de grandes inégalités. Je crois d’ailleurs en une sororité universelle. »
Quand elle n'est pas happée par l'écriture, l'écrivaine s'implique dans la vie littéraire calédonienne, puisqu'elle est à l’initiative du Festival de la bande dessinée de Boulouparis et de l'association Écrire en Océanie qui apporte son soutien aux auteurs. « J'aime entendre de nouvelles voix et je sais combien il est frustrant de ne pas être publié lorsqu'on a du talent. Je suis persuadée également que le livre, la bande dessinée, l’image, sont des vecteurs essentiels à l’épanouissement des jeunes. » Infatigable, Claudine Jacques travaille en ce moment sur un recueil de nouvelles qui « parlera de nos instants fragiles », alors que sort en librairie son dernier roman Le Bouclier rouge. Un thriller océanien, nourri de mythes, de légendes et d'aventures.
BIBLIOGRAPHIE EXPRESS
Les Cœurs barbelés, La Table ronde, 1999 À l’Ancre de nos vies, Grains de sable, 2000 L’Homme-lézard, HB éditions, 2002 L’Âge du perroquet-banane, parabole païenne, L’Herbier de Feu, 2003 Le Cri de l’acacia, Au Vent des Îles, 2007 Nouméa Mangrove, Au Vent des Îles, 2010 Ataï et moi, Noir au blanc, 2012 Un si long battement de cœur, tome I, Noir au blanc, 2013 Le Bouclier rouge, Noir au blanc, 2014
SES LIVRES DE CHEVET
« J'ai eu un coup de foudre pour Féroces, puis Arrive un vagabond de Robert Goolrick, et Désolations de David Vann. »
UN LIVRE QUI LUI TOMBE DES MAINS
« Belle du seigneur, d'Albert Cohen, que je n’arrive pas à commencer malgré de nombreux essais. »
C
e
s
chant de kanekA
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Era Kaneka /
Hom mage aux f Mme à travers le titre ANGAISHOLA
hant
Par Virginie Grizon et l’Académie des langues kanak
Numu angaishola, Ci konetu Ci xexe Ci nureti ore enae Ci carati ri len.
Hna etashongi Ci kewiwi Ci xewe ri du Se ci ua hmayaion Ke roidi hnapan.
Numu hmayen, Ci konetu Ci xexe Ci nureti ore enae Ci carati ri len.
Ci thera thera re wathera Ri hnidekoc Ci ura ura re shodrong Ri parowo.
Wathera nore wazinew, Wathera nore seseko (2x).
Wathera nore wazinew Wathera nore seseko.
Femme
Il existe une épouse, Qui s’appuie sur une canne Qui rampe Qui s’alourdit d’une charge Qui s’écroule sur la route. Il existe une mère, Qui s’appuie sur une canne Qui rampe Qui s’alourdit d’une charge Qui s’écroule sur la route.
Elles ont été brûlées par le soleil Leurs supplications Leurs soupirs Leurs soucis d’y arriver Mais c’est leur devoir. Coule coule une larme Sur sa nuque Coule coule la sueur Sur son visage. Larme de sueur Larme véritable.
Larme de sueur, Larme véritable (2x).
Quels mots se cachent derrière la mélodie d’« Angaishola » ? Le texte, à la fois puissant et poétique, est signé Pierre Gope comme tous les titres de l’album Corilen ; un clin d’œil à sa pièce de théâtre Où est le droit ?*. « Les paroles parlent de la condition des femmes dans la tribu », précise Clément Waya, le compositeur. « Angaishola », qui signifie “épouse” dans le registre soutenu de la langue nengone**, est une sorte d’hommage à toutes les mamans. La chanson décrit le rôle central de celles qui donnent la vie et qui assument, malgré tout, leurs responsabilités au champ pour faire vivre la famille à la sueur de leur front. « On fait référence à la terre, les entrailles de la vie, dont le lien est si important dans notre culture. » Elle évoque entre autres « les soupirs, les
larmes de sueur et les larmes véritables ». Il est aussi question de « devoir » et de souffrance.
Inscription dans le temps Lorsque le titre sort en 1997, il résonne à travers toute l'île. « On le chante encore aujourd'hui, à l'occasion des fêtes sur Maré et ailleurs, explique Clément Waya qui l'interprète avec Honoré Bearune. Nous avons simplement réactualisé la musique pour la mettre au goût du jour. Histoire de la rendre un peu plus moderne ». Les paroles, elles, ne se démodent pas. Si la condition de vie des femmes a évolué, leur courage et leur humilité restent des valeurs centrales reconnues par tous. * Le personnage principal de la pièce de Pierre Gope s’appelle Corilen, qui signifie fleur d’hibiscus. Un rapprochement fort entre l’album et l’œuvre du dramaturge maréen. ** Cette terminologie est principalement employée pour désigner l’épouse des chefs coutumiers ou des pasteurs de l’île. Dans le registre courant, on utilise le mot “Hmenew”.
Retrouvez toute l’histoire du kaneka
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© Eric Dell’Erba
Des paroles vibrantes, une mélodie qui touche en plein cœur, la chanson « Angaishola » du groupe Nodeak a marqué les esprits dans les années 1990. Retour sur un titre qui en dit long sur la vie des femmes en tribu.
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Cri du cagou
Les membres du Cri du Cagou se sont emparés d’une page d’Endemix pour parler, à chaque numéro, d’un thème qui leur tient à cœur.
Plus belle la nuit, quand flamboient les bolas, les « mains de feu » et autres « bâtons du diable ». Depuis quatre ans, Art'I'Flam embrase les soirées à travers la Calédonie, façon d'y développer les arts de la rue et en particulier la jonglerie enflammée. Et chaque jeudi à partir de 18 h, la joyeuse troupe illumine Nouméa en travaillant ses agrès sous la Croix de Lorraine où l'association prend aussi de nouveaux adeptes sous son aile ardente. Art'I'Flam : 98 15 03
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Retrouvez Art'I'Flam sur le Cri du Cagou : www.lecriducagou.org
L’astuce « Techniquement, cette photo est toute simple », explique Patrick Hamm. L'appareil sur un trépied, l'auteur a choisi une pause longue de trois secondes pour obtenir un filet avec les bolas multicolores, et une focale courte qui permet de rendre la Croix de Lorraine à l'arrière et les bolas au premier plan.
© Patrick « Patham» Hamm
Art'I' Flam
L'art autrement
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Planter des graines, insuffler l’envie... Avec ce projet, Théo Menango veut apporter l’espoir aux prisonniers du Camp-Est.
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La musique adoucit les coeurs
Humaniser la prison grâce à l’harmonie de la musique : Théo Menango y croit dur comme fer. Avec le soutien du Camp-Est, l’artiste de Montravel prépare un atelier où le kaneka servira de fil conducteur.
Par Coralie Cochin
Derrière les barreaux Vingt ans plus tard, le besoin d’ouvrir les détenus à des activités est bel et bien ancré au Camp-Est. La conseillère d’État, Mireille Imbert-Carreta, en a même fait l’une de ses préconisations dans son rapport rendu fin 2012 sur la prison de Nouville. La musique, incontournable dans le monde océanien, s’est imposée avec évidence. « Ce fut la première chose interdite par les missionnaires. C’est notre relation avec le spirit, notre lien avec Dieu », rappelle celui dont le prénom est dérivé de Théos, « dieu » en grec. Ce n’est donc pas un hasard non plus si, en nengone, musique se dit « era ». « Ça signifie “harmonie sociale”. C’est l’antidote de la guerre. » Au travers de cet atelier, l’idée n’est pas d’agir « pour » ces jeunes – qu’il considère comme ses enfants –, mais bien « avec » eux, nuance l’artiste. « Il faut que la musique soit un vecteur, une expression de soi. » La musique, « dans le sens océanien du terme, comme un tout, pour apporter de l’humanité à la prison ». Avec le kaneka comme support, pour éveiller la conscience. « Le kaneka, ce n’est pas un style de musique, ce sont des couleurs, précise le musicien. C’est dire à nos enfants de bien travailler à l’école et tendre l'oreille pour écouter. C’est le contenant de la pensée ». Théo Menango voit en cet atelier bien plus qu’une activité socioculturelle, mais quelque chose de l’ordre de l’engagement. Car l’objectif est bien d’inscrire ce projet dans la durée. Et d’accompagner les détenus dans cette démarche musicale, surtout une fois sorties de prison. L’atelier pourra donner lieu à un enregistrement ou une représentation devant le public. « Pour l’instant, on va débroussailler le champ, résume l’artiste. Avant de planter et de récolter ».
La musique, c’est l’antidote de la guerre
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héo Menango écrit comme il respire. Des paroles, des notes, de la musique. Mais le chanteur ne se reconnaît pas dans le statut d’artiste. « À la maison, dans mon entourage, tout le monde est artiste, je suis plutôt un travailleur non salarié. » C’est pourtant son nom qui s’est retrouvé mentionné sur un papier, au bureau du Spip, le service pénitentiaire d’insertion et de probation, chargé de piloter les activités culturelles de la prison. Avec l’ambition de développer un atelier musique au Camp-Est. L’ancien fonctionnaire, qui se décrit luimême comme un « drôle de personnage », ne croit pas au hasard. « Dans la vie, tout est programmé. » Le 24 septembre, il avait dédié aux détenus du Camp-Est une chanson rappelant que « la prison n’existe pas chez les peuples premiers, autrement, il n’y a pas de force de coercition. Chez nous, on rentre quelqu’un dans ce qu’on appelle la “solitude désolée”. On l’ignore pendant un certain temps pour qu’il prenne conscience de sa bêtise ». Lui aussi a déjà poussé les portes de la prison. C’était en 1994. « Grâce au Secours catholique, j’ai pu passer près de six mois avec les détenus pour créer le premier atelier musique derrière les barreaux. » En sortent une formation, qu’il baptise « Sun city », la « Cité du soleil », puis un spectacle en décembre pour célébrer Noël. Ce dernier a été précédé du premier geste coutumier réalisé à l’intérieur de la prison. « On a ensuite fait une tournée dans les différents blocs et compartiments du Camp-Est. »
© Théo Rouby
usique
p. 28
Questions à... c
ulture
Walles
© Damien Heinrich
KOT Directeur régional Par Virginie Grizon
« Les Calédoniens s'expriment à travers nous » Pour exister au-delà de son créateur, la culture a besoin d’être diffusée. Télé, radio, presse écrite ou encore Internet, les médias sont indispensables dans la promotion des œuvres, mais remplissent-ils leur rôle en Nouvelle-Calédonie ? Rencontre avec Walles Kotra, directeur régional de NC 1ère.
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elon vous, quelle est la place de la culture dans l'audiovisuel calédonien ? Walles Kotra : NC 1ère, c'est à la fois une chaîne nationale, une chaîne calédonienne et une chaîne océanienne ; nous regroupons aussi la télé, la radio et Internet. Nous avons donc un rôle très particulier, bien plus qu'une chaîne régionale métropolitaine. Finalement, nous sommes ce que les Calédoniens partagent le plus, ils s'expriment à travers nous et nous renvoyons une certaine image du pays, de sa diversité, sa complexité. Je suis conscient de cela et lorsque je suis arrivé à ce poste en 2011, j'ai essayé de prendre en compte l'ensemble de ces paramètres pour déterminer une stratégie. Comment traduire cette culture à l'antenne ?
Comment être chacun et ensemble, comment reconnaître l'univers de chacun sans être exclusif ? Il y a, dans ce pays, une dynamique, une volonté de construire quelque chose de commun et nous avions envie de retranscrire cela. C'est possible grâce à la culture. Depuis que je suis arrivé, tout s'est enchaîné. Il y a d'abord eu les Jeux du Pacifique puis les élections, l'actualité est très dense, avec une société en mouvement. La culture a toute sa place dans ce mouvement et nous sommes là pour la mettre en valeur. Depuis quelques années, il y a une explosion de l'offre. Il y a plus de pièces de théâtre, plus de concerts...
Justement, comment avez-vous fait pour mettre en valeur cette explosion culturelle sur le Caillou ? Grâce à des rendez-vous récurrents pour en parler. En premier lieu, il fallait une présence du livre. Nous avons donc mis en place, en radio, des rubriques quotidiennes autour de la lecture avec notamment Frédéric Ohlen et Pierre Faessel. Nous avons ensuite créé une émission mensuelle, diffusée en télévision depuis le début de l'année, qui s'appelle Des livres et nous, présentée par Cris. Deuxièmement, nous nous sommes intéressés à l'histoire du pays. En Calédonie, chacun vit son histoire dans son coin, or l'histoire des Vietnamiens, celle du bagne, du monde
En termes de droits d'auteur, nous devons être le principal contributeur
p. 29 2002 : directeur régional de RFO Polynésie 2005 : directeur délégué de France Ô 2011 : directeur régional de Nouvelle-Calédonie 1ère 2012 : nommé président du conseil d'administration de l’Agence de développement de la culture kanak (ADCK)
Questions à...
BIO EXPRESS
PATRIMOINE EN DANGER L’un des grands projets de la chaîne est de préserver la mémoire audiovisuelle accumulée ces dernières années, car les pellicules se détériorent. « Tout ce qui a été filmé pendant la période des Evénements commence à s'abîmer trente ans après. » En collaboration avec l’Ina (Institut national de l’audiovisuel), des milliers d’heures vont donc être numérisées grâce à la campagne de sauvegarde des archives d'Outre-mer. « Déjà 10 000 heures ont été protégées, explique le directeur régional. En octobre, une cellule de numérisation sera installée sur place, pour quelques mois, le temps de faire le reste. Une table ronde est d'ailleurs organisée fin septembre pour que le public prenne conscience de cette valorisation de notre patrimoine ».
ère
kanak... ce sont nos histoires. Nous avons créé une émission radio hebdomadaire intitulée C'est toute une histoire (le mardi midi, NDLR) animée par Bernard de la Vega. Elle est traduite en télé avec Terre de mémoire (le dimanche à midi, NDLR). Enfin, depuis deux ans nous organisons le mois du spectacle. Chaque samedi durant cette période, nous proposons une pièce de théâtre ou un spectacle vivant.
de la musique ou encore le Festival Akawan à Lifou. Nous développons des coproductions, comme Lakoustic et Endemix. Des concerts du Mouv et du centre culturel Tjibaou sont aussi retransmis. Il faut savoir que le groupe France Télévisions est un acteur important de la musique. En termes de droits d'auteur, nous devons être le principal contributeur. Nous sommes conscients de cela et nous tenons à maintenir ce rôle.
Quelle place accordez-vous à la musique ?
Internet est un peu le parent pauvre de votre politique culturelle, avezvous une stratégie de développement de la culture via ce support ?
Je trouve que, depuis quelques années, nous sommes passés d'une musique très identitaire à quelque chose de plus ouvert, les styles se mélangent davantage. Nous essayons de traduire cela à l'antenne. Nous avons d'abord changé certaines habitudes pour diffuser davantage de musique locale. Auparavant, nous passions France Inter la nuit. Aujourd'hui, il y a essentiellement de la musique calédonienne. Nous captons aussi de nombreux événements comme la Fête
C'est vrai que pour l'instant, nous diffusons beaucoup de conférences, mais une réflexion stratégique est menée pour le développement des émissions sur Internet. En juin, nous avons créé une application afin de pouvoir consulter nos programmes sur tous les supports numériques tels que les smartphones, tablettes, etc. Toutes nos émissions sont mises en ligne et peuvent être podcastées.
Aujourd'hui, nous devons aussi imaginer un contenu spécifique et complémentaire pour offrir un support moderne à la culture.
La télévision est un acteur très important pour relayer la culture Comment envisagez-vous l'avenir de la culture dans l'audiovisuel ? Je pense que le gouvernement, les diffuseurs et les producteurs devraient davantage réfléchir à l'avenir. La télévision est un acteur très important pour relayer la culture. Or si l'on veut investir dans la production audiovisuelle locale, il faut s'organiser. À Tahiti, il existe un fonds d'aide à la production, ce qui n'est pas le cas ici. Or c'est le seul moyen de développer une production digne de ce nom en Calédonie.
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RA de NC 1
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Genre idéal
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Le light pain tiNg
rt visuel
Jeux de lumières
Par Frédérique de Jode
Même s’il est en vogue dans de nombreux pays depuis l’explosion du numérique, le light painting reste une pratique confidentielle en Nouvelle-Calédonie. Cet art permet la création de scènes fantasmagoriques sur un mode ludique très agréable. Mise en lumière d’un genre peu connu sur le Caillou.
L
e ligth painting offre d'immenses champs de possibilités et nourrit un imaginaire sans limite. » Guillaume Leroy, assistant réalisateur de formation, s'est essayé à cette technique photographique il y a déjà quelques années et a « tout de suite été captivé par les univers qui se dégageaient des clichés ».
Le sorcier du clic Peu développé en Nouvelle-Calédonie, le light painting est un mode d'expression artistique qui se déploie sur la scène internationale, grâce notamment à la démocratisation des appareils photo numériques. « Son principe est simple, expose Guillaume. Il s’agit de combiner dans le noir un temps de pose long et des dessins réalisés dans les airs à l’aide d’une source lumineuse : une simple lampe torche, des lampes à LED, un faisceau laser ou encore une bougie ». Comme par enchantement, les coups de pinceau tracés dans les airs apparaissent sous la forme de sillages lumineux, tandis que l’artiste, lui, disparaît de la scène. Une explication tout à fait scientifique, comme le rappelle Guillaume : « Je suis dans l'ombre, en mouvement et loin de la lumière ».
mon modèle, tout en utilisant un flash ». Autre procédé testé par Paco : « J'utilise en soirée seulement l'ambiance lumineuse du lieu et cela fonctionne aussi très bien pour dévoiler des décors flashy ». Si bien que notre œil est attiré, voire happé, par ces peintures de lumières aux effets spéciaux handmade*, par ces images où les couleurs explosent, et ces serpentins qui flottent dans l'espace. Toute une atmosphère psychédélique et ludique qui émane de cet art si proche de la peinture. * handmade : fait à la main Lors de la soirée Endemix - bar en live, Guillaume Leroy avait proposé aux personnes présentes un petit exercice de light painting.
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Le light painting nourrit un imaginaire sans limite
Le petit chimiste de la technique Le light painting permet aux photographes d'expérimenter à l'envi. « Je me sers de cette technique de façon inversée, commente Johan Legrand. Au lieu d'avoir mon appareil photo fixé sur un trépied et de dessiner dans l'air avec la lumière, je bouge autour de
UN ART PAS SI RÉCENT
On pourrait penser que l'art du light painting est une pratique contemporaine. Pas du tout. C'est le photographe américain surréaliste Man Ray qui, en pionnier, a exploré cette technique dans les années 1930. Un peu plus tard, l'artiste espagnol Pablo Picasso réalisa sous l'objectif du photographe Gjon Mili une série de clichés où l’on peut voir le maestro faire un rapide crayonné dans l'air. D'autres artistes s'essayeront ensuite à cette technique. Aujourd'hui, même les magazines arty et les publicistes s’approprient le light painting. Exemple : l'affiche du Festival de Cannes 2010 qui montrait l'actrice française Juliette Binoche tenant un pinceau lumineux avec lequel elle écrivait le mot « Cannes ».
© Guillaume Leroy
Guillaume Leroy teste la moindre source lumineuse pour voir sa réaction et son utilisation potentielle. Avec une guirlande, il crée un dragon de feu.
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Événement ittérature
Le Silo
mot a mot
Après dix années d’existence, le Silo change de formule. Le rendez-vous est désormais annuel et sera en alternance entre Poindimié et Nouméa. Christophe Augias commente ce qui a fait et fera la singularité de cet événement littéraire. Par Léna Quillier
ouméa
En 2011, le Silo innove en organisant l’événement en deux temps : une partie à Poindimié et l’autre à Nouméa. Le public nouméen est alors nombreux à se déplacer pour profiter des activités du salon. « Nous nous sommes rendu compte qu’il y avait une vraie attente, mais la logistique est lourde : après une grosse installation à Nouméa, il a fallu en quelques jours tout démonter et partir à Poindimié pour tout recommencer. Ce fut très contraignant, tant pour les organisateurs que pour les auteurs invités. » Afin d’impliquer régulièrement le public de Nouméa tout en optimisant les contraintes logistiques, le Silo est désormais un événement littéraire annuel qui se déroulera en alternance à Nouméa et Poindimié. Pour la première édition de cette nouvelle formule, le salon se tiendra du 9 au 12 octobre 2014 à l’anse Vata, sur l’esplanade du complexe La Promenade. « Les auteurs locaux seront bien représentés. 90 % d’entre eux habitent le Sud et notamment Nouméa et le Grand Nouméa, ce qui facilitera leur présence au salon. »
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ublic
« À Poindimié, le Silo s’adresse en priorité aux protagonistes de la filière du livre et aux scolaires. Tous les invités sont à égalité, loin de chez eux, sans obligations familiales. Pendant quatre à cinq jours, ils forment un huis clos très soudé. Cet espace-temps suspendu, propice aux échanges, donne un caractère bien particulier au salon. À Nouméa, ce sera différent car l’événement sera résolument orienté vers le public, laissant une moindre place aux rencontres professionnelles. Nous avons invité moins d’éditeurs
par exemple et plus d’auteurs susceptibles de séduire les visiteurs. Comme le public sera plus nombreux, nous allons pouvoir proposer des animations différentes simultanément. Il pourra très facilement y avoir une cinquantaine de personnes pour une rencontre d’auteur et cent autres personnes pour une table ronde en même temps. Ces chiffres sont difficilement réalisables à Poindimié. »
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rogrammation
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opulaire
Cette année, le Silo sera organisé autour de trois principaux axes : le roman policier, l’histoire et la bande dessinée. Il faudra compter sur la présence de quatre auteurs internationaux de polar, du grand anthropologue Alban Bensa pour l’aspect historique, et de nombreux auteurs de bande dessinée. Frédéric Ohlen est évidemment très attendu. La publication en mars de son roman Quintet aux éditions Gallimard est une véritable consécration pour l’écrivain calédonien.
« Nous souhaitons à Nouméa proposer une édition populaire et décontractée grâce aux cafés littéraires. Ils représentent bien l’esprit de l’événement. Les gens peuvent siroter un verre en écoutant des lectures, de la musique, assister à une projection. Il s’agit de permettre au public d’aborder un auteur de manière très simple et de bavarder ou d’offrir un espace aux dessinateurs pour présenter des performances, par exemple, dessiner du “Tac au Tac”... Approcher les artistes, les voir en pleine création est passionnant et parfois très amusant. »
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© Eric Dell’Erba
Le Silo, à Poindimié en 2011.
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Un tremplin
ittérature
litteraire international
Christophe Augias évoque en quelques mots-clés les précédentes éditions du Silo et dévoile celle à venir.
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ahiti
« Entre le Silo et le Salon du Livre de Tahiti, Lire en Polynésie, une vraie relation de partage s’est instaurée. Dès le début, les Tahitiens ont été des invités privilégiés. Beaucoup d’auteurs participent aux deux salons. Lire en Polynésie était essentiellement au départ un salon d’exposition et de vente. Au fil des années, peut-être inspiré par les événements du Silo, il est devenu un carrefour avec des débats et des tables rondes. À l’inverse, nous avons été inspirés par certaines stratégies de Tahiti, comme par exemple l’invitation de journalistes. Tristan Savin a ainsi publié un dossier sur la Nouvelle-Calédonie dans la revue trimestrielle Long Cours à la suite de son passage au Silo l’année dernière. »
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oisinage
« Les liens entre pays se créent et se consolident à chaque édition du salon. Lorsque Jane O’hara, organisatrice du Salon du Livre de Brisbane, a été invitée à Poindimié, elle n’a pas tardé à rendre la pareille. L’année suivante, en 2012, une délégation d’auteurs calédoniens est allée
Par Léna Quillier représenter la littérature du Caillou au Brisbane Writers Festival. Curieusement, avant son voyage en Nouvelle-Calédonie, Jane O’hara n’avait jamais entendu parler de la littérature océanienne. À Brisbane, le public était aussi très étonné de la découvrir, et cette nouveauté a suscité un véritable intérêt. »
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évélations
Depuis sa création en 2003, le Silo soutient des tremplins littéraires qui ont permis la révélation de plusieurs jeunes talents. C’est le cas de Denis Pourawa, Paul Wamo, Dora Wadrawane, et beaucoup plus récemment de Vincent Vuibert, lauréat du Prix Lagneau 2013. « Vincent Vuibert est la révélation que nous attendions. Il représente la nouvelle génération qui parle de la nouvelle génération », confie Christophe Augias, directeur de la bibliothèque Bernheim. Mais il ajoute : « Le potentiel est toujours à confirmer. La créativité de beaucoup de jeunes auteurs a été étouffée dans l’œuf à cause d’une reconnaissance trop rapide ». La programmation du Silo accueille également les nouvelles plumes lauréates du concours de slam de la bibliothèque Bernheim. Ces jeunes talents viennent de tous horizons : rap, slam ou poésie. « C’est populaire, décomplexé, ça permet d’emmener à l’écriture des personnes qui n’auraient jamais osé le faire sans cela », conclut Christophe Augias.
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ébats
ENDEMIX n° 08 septembre - octobre - novembre 2014
« Les débats permettent d’exprimer et d’affronter des courants d’idées, des regards et des sensibilités différentes sur la littérature, de proposer des analyses et des théorisations. Le Silo a toujours tenu à donner la parole à la contradiction, contribuant ainsi à l’élaboration d’une scène littéraire calédonienne en recherche. »
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venir
« Le prochain lien sera probablement avec le festival d’Ubud à Bali. Les organisateurs sont déjà invités au Silo à Poindimié, en 2015. Nous ignorons tout ou presque des littératures d’Indonésie, malgré l’importante communauté indonésienne implantée en Nouvelle-Calédonie. Voilà l’occasion, après le Japon l’année dernière, de découvrir une tradition littéraire voisine. »
© Eric Dell’Erba
Événement
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Par Claire Thiebaut
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n Nouvelle-Calédonie, il y a presque autant de festivals que de définitions du concept. Tous, public et professionnels, s’accordent pour en souligner l’aspect festif, populaire et divertissant. Pourtant, la notion est bien plus complexe, regroupant des intérêts artistiques et culturels, mais aussi des implications économiques, politiques et sociales, non moins importantes. L’ingénieur culturel Cyril Pigeau en propose une synthèse : « C’est un catalyseur ! Un événement qui s’adresse à un large public, offrant une scène de grande aura aux artistes, qui permet aussi aux institutions de ponctuer leur politique culturelle de moments forts, souvent mémorables ». Date-clé du calendrier de diffusion, les moyens financiers sont en général à la hauteur du projet. Très largement subventionnés en Nouvelle-Calédonie, les portefeuilles s’estiment le plus souvent en dizaine de millions. Guillaume Soulard, actuel directeur artistique du centre culturel Tjibaou et ancien organisateur d’événementiels indépendant, confirme qu’« à ces budgets exceptionnels correspondent le plus souvent des moments exceptionnels ». La force du festival est sûrement là : un point d’orgue dans la programmation culturelle.
DANS FESTIVAL, IL Y A BIEN ESTIVAL ?
Un défi de taille : trouver un tel événement entre la fin novembre et début mars. L'été est quasiment vide de festivités. Plusieurs raisons sont évoquées pour cette absence de rendez-vous d’art vivant : une période entre deux années budgétaires, un public soi-disant évaporé, des professionnels au repos... Tout autant de justifications qui sont démenties par l'affluence des Calédoniens lors de l’opération « Un été au ciné » de la province Sud. « Cette année, pour les dix ans, nous avons même organisé des performances d'artistes avant les projections. Les compagnies ont répondu présent et le public était ravi de profiter de cette unique offre de l'été », rappelle Christine Aïta, chef du service de développement artistique et culturel de la province Sud. Autre rendez-vous qui gagne petit à petit son public, le Festival de sculpture de l'île aux Canards à l’initiative de l’association Arté Faré, téméraire en cette période de sécheresse culturelle. Alors, à quand un nouveau grand festival dans la chaleur de décembre ?
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festival?
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Enquête
p. 36 Enquête
Trouver sa place et son identité La compagnie Les Kidams lors du festival Pikinini en 2013
Amusez-vous !
Les spécialistes entre eux
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© Eric Dell’Erba
Les professionnels du milieu au centre du dispositif. Le public est convié, mais il n’est plus le cœur de cible. On pense alors à des manifestations pointues comme le Kanekawipa, rendez-vous annuel à la tribu de Kawipa à Kouaoua. L’événement réunit « forums, ateliers de création, espaces de discussion et de réflexion, spectacles concerts basés essentiellement sur le kaneka et la philosophie qu’il porte », explique l’équipe de l’Association de Formation des Musiciens Intervenants (AFMI), en charge de la programmation. Certains festivals se situent au carrefour de cette forme studieuse et du divertissement. Le festival international du cinéma des peuples Ânùù-rù Âboro, à Poindimié, « invite les spectateurs à se questionner sur le monde, à partir de documentaires de création et d'échanges avec les réalisateurs », précise René Boutin, directeur artistique. « Notre ambition est de ramener le cinéma de qualité auprès des populations pour susciter de nouvelles réflexions. » Ce dernier bénéficie d’une réelle renommée professionnelle. Un film passé par le filtre d’Ânùù-rù Âboro a souvent un grand avenir dans les plus grands concours internationaux. D’autres rassemblements, comme le Salon international du livre océanien (Silo), sont un focus sur un domaine artistique.
© Eric Dell’Erba
Version divertissement populaire. L’objectif est d’offrir à un large public une programmation de découverte. Le plus souvent, une tête d’affiche internationale, « locomotive de l’événement », rassemble les foules. En première partie, des groupes plus locaux profitent de l’occasion comme tremplin. À l’origine du Gypsy Jazz Festival, Michel Trabelsi raconte qu’il « voulait faire découvrir des styles musicaux qui étaient peut-être mal connus sur le territoire, au début des années 2000 ». Pour d’autres, l’objectif est de mettre en lumière la musique locale. Christophe Ventoume et l’équipe du Mouv’ ont créé le festival Ramdam au cœur de la Fête de la musique pour offrir une scène professionnelle en parallèle des groupes amateurs. « Nous cherchons à valoriser la création locale et à mélanger les styles et les publics. » Pour ces festivals de loisirs, l’essentiel est de bien identifier son public et de ne pas proposer des formes déjà existantes qui pourraient lasser les spectateurs. Catherine Dinevan, directrice de la compagnie de théâtre Les Kidams, s’est volontairement positionnée sur le jeune public avec son Pikinini. « Il y avait un réel manque de lieux qui permettaient aux parents et aux enfants de partager un temps de loisirs ensemble. »
Les festivals des peuples Pour la préservation des arts traditionnels. De nature plus anthropologique, on trouve les festivals des arts du Pacifique et des arts mélanésiens. Dans la lignée de Melanesia 2000, ces rassemblements entre pays donnent lieu à des manifesttations plus culturelles qu’artistiques. En 2012, dans l’exposition du centre culturel Tjibaou, Festivals : Quels enjeux pour le Pacifique ?, on pouvait lire : « Si ces festivals régionaux ont pour vocation historique de mettre à l’honneur les arts traditionnels, depuis le départ, ils sont également le théâtre d’un formidable élan créatif concernant des formes artistiques actuelles. Dès lors, de nouvelles orientations apparaissent afin que le festival reflète la création contemporaine du moment ». Le public est invité à assister aux spectacles, mais c’est bien la vitalité des cultures qui est en jeu.
Les privés à la rescousse Sans parler de philanthropie infaillible des entreprises calédoniennes, il faut bien avouer qu’il y a une certaine appétence du privé pour le financement de la vie culturelle, et en particulier pour les festivals.
© Eric Dell’Erba
Le gagnant-gagnant de l’OPT
Une foule de spectateurs réunie pour le festival Femme Funk 2011
Sponsor de nombreux événements culturels et sportifs, l’OPT « est un acteur social et citoyen qui participe à la création et à la diffusion artistique », explique Guillaume Hervouët, chargé de communication. Au fil des ans, l’institution a soutenu de nombreuses festivités, scrupuleusement choisies. « Il est important
que les organisateurs se demandent ce qu’ils peuvent apporter à l’OPT », tout comme il semble important de ne pas réduire le partenariat à la simple visibilité commerciale. Sponsoriser un événement peut aussi rentrer dans une dynamique d’échange plus constructive et promouvoir par exemple la démarche écologique et le développement durable d’un festival, à l’image de l’association OPT-Femmes Funk.
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Glencore Glencore Nouvelle-Calédonie, anciennement Xstrata Nouvelle-Calédonie, représentant local de la multinationale spécialisée dans le commerce des matières premières, est connue pour le soutien qu’elle apporte dans les domaines social et culturel néo-calédoniens. « Notre choix se porte le plus souvent sur des festivals qui proposent des programmations dans le Nord. Nous sommes le premier employeur privé de la zone VKP, via notre co-entreprise Koniambo Nickel, et nous souhaitons aider les actions culturelles décentralisées pour apporter à nos collègues et employés un peu de l’effervescence du Sud. En guise de contrepartie, nous demandons à ce que les organisateurs mettent en place des activités artistiques et culturelles autour de leur venue », précise Davina Lasalo, chargée de communication.
VOLER DE SES PROPRES AIDES ?
Et si on décidait de n'aider que les projets naissants ? L'idée peut paraître sévère, mais les pouvoirs publics n'ont-ils pas un rôle d'incubateur à jouer ? C'est Jean-Baptiste Friat, directeur de la Culture de la province Sud qui expose le problème : « En tant que financeur, on peut hésiter entre notre fidélité aux anciens, ceux qu'on aide depuis plusieurs années et les nouvelles propositions ». Les institutions pourraient soutenir, le temps de trouver ses marques, son public et ses mécènes, puis inciter les organisateurs rodés à voler de leurs propres ailes.
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des festivals
L'économie
T
outes les institutions politiques culturelles calédoniennes soutiennent les festivals du pays. La Direction de la culture, de la condition féminine et de la citoyenneté du Gouvernement de la Nouvelle-Calédonie, l'Etat, par l'intermédiaire de la Mission aux affaires culturelles du Haut-Commissariat, et les trois provinces subventionnent ces événements à plus ou moins grande échelle. Pourtant, les organisateurs ne peuvent pas se reposer entièrement sur ces fonds publics et doivent trouver d’autres sources de revenus pour boucler les budgets. Et, contrairement aux festivals de Métropole par exemple, où les buvettes rapportent gros, les apports des stands de restauration calédoniens sont bien maigres, notamment en raison de l’interdiction de ventes de boissons alcoolisées. La billetterie, évidemment, est un poste important des budgets, mais non suffisant. C’est pourquoi les programmateurs développent partenariats et sponsoring pour compléter leurs enveloppes.
Enquête
Vous
avez dit festival?
p. 38 Dans l’éventail des propositions culturelles, le festival fait figure de géant. Objet de bien des énergies tant humaines que logistiques ou budgétaires, il est intéressant de s’interroger sur ses retombées culturelles, économiques et politiques sur le Caillou. Le pousse-pousse créatif Premier impact évident, mais difficilement quantifiable : le rayonnement artistique et culturel. Parce que le festival est un bel espace de diffusion, les artistes sont le plus souvent intéressés pour y participer. Du point de vue de la création propre, des dates comme Waan Danse ou celles du cinéma de La Foa motivent les artistes à proposer de nouvelles productions. « L’ouverture sur l’étranger est aussi un bon moteur pour la création locale », ajoute René Boutin, directeur artistique du Festival international du cinéma des peuples. Cette année également, avec l'aide du Poemart, des programmateurs internationaux ont été invités lors de la nuit du Womad Festival et du Waan Danse, pour repérer de potentiels nouveaux talents et dispenser quelques conseils aux artistes réunis. D’autres se donnent des ambitions de tremplin comme le Festival des maisons de musique de Nouméa. Huit groupes, un par maison, sont invités à se produire lors de trois dates, deux sélections et une finale. Les animateurs de maisons de quartier coachent les groupes naissants, tant dans la composition de leur répertoire que pour leur prestation scénique. Un jury réunit des professionnels (Sacenc, Le Mouv’, Conservatoire de musique et de danse) et la Ville de Nouméa, organisatrice. Depuis trois ans, le lauréat gagne l’enregistrement d’un CD 2 titres, édité à 100 exemplaires.
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Les deux sous de la culture Centre d’attraction pour les Calédoniens et les touristes, le festival peut devenir un excellent argument touristique, surtout dans des zones excentrées. Akawan, à la tribu de Xodre, Lifou, est un tremplin pour les artistes, mais aussi un produit commercial qui valorise l’île. Des forfaits hôtel et transport sont proposés pour organiser une venue centrée autour de l’événement. Quand on demande à René Boutin pourquoi il a choisi d’organiser Ânùù-rù Âboro à Poindimié, il répond sans détour : « Rassembler plusieurs milliers de personnes chaque année est une force économique pour cette commune de la côte Est qui sommeille une partie de l’année. Les hébergements sont pleins, les tribus fournissent les repas, et toutes les retombées économiques vont aux populations ».
Vers l'éveil des politiques culturelles Du point de vue politique, on note aussi quelques initiatives qui ont participé à stimuler le pays. Lors du Festival des arts du Pacifique en 2000, Guillaume Soulard se souvient de l’implication des communes. « Avec Emmanuel Kasarhérou, alors directeur de l’ADCK, nous avions choisi de séparer les membres des délégations des pays invités pour recréer plusieurs petits groupes qui ont voyagé dans tout le pays. Les mairies étaient en charge de l’accueil et de la programmation des artistes. Les élus ont alors commencé à réfléchir à la création d’espaces adaptés pour les spectacles. » Ils ont depuis pris conscience de l’importance de mettre en place des politiques culturelles.
FESTIVAL VERSION PAYS
Passeur de festivals du nord au sud, l’Association de formation des musiciens intervenants (AFMI) est le seul outil de décentralisation qui fait ses preuves. L’AFMI et ses départements, notamment celui des musiques traditionnelles, assurent le rayonnement de festivals comme le Blues Up, le Womad, Femmes Funk et Gypsy Jazz. Audrey Mevin, régisseuse générale, explique que « les organisateurs du Sud contactent l’AFMI, essentiellement pour proposer les artistes internationaux qu’ils ont invités et une petite partie des acteurs locaux ». Malgré une volonté commune des organisateurs pro-rayonnement pays et de l’AFMI, l’association avoue les difficultés liées à l’organisation de grandes manifestations dans des zones éloignées, offrant une technique assez pauvre. Mais elle conclut, optimiste : « Pour y faire face, l'AFMI a la chance d'avoir un réseau sur tout le pays ».
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Enquête
La fête est finie. Et après ?
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Les festivals qui ont fait
p. 39 Enquête
Vous
avez dit festival?
date
Melanesia 2000, du culturel et du politique En tête de liste, Melanesia 2000, en 1975. Tim Sameke, créateur du récent festival Caledonia +687, s’en souvient comme étant « le point de départ de l’unification du peuple kanak autour d’une expression commune de sa culture ». La portée identitaire et fédératrice de ce festival participera grandement à ériger son organisateur, Jean-Marie Tjibaou, comme figure phare de l’indépendantisme.
Festival de la musique, la force de la nouveauté Quelques années plus tard, en 1989, nouvelle initiative : le Festival de la musique, premier grand rassemblement autour du kaneka. « Organisé par le Haut-Commissariat, la symbolique post-Événements est forte et plus de quatorze ans après Melanesia 2000, on progresse dans la reconnaissance d’un autre versant de la culture kanak. C’était également la première tribune de grande envergure pour un genre encore adolescent. On comptait jusqu’à 6 000 spectateurs par édition », raconte Dominique Clément-Larosière, qui en prend les manettes à partir de 1990. Beaucoup d’artistes internationaux reggae, zouk et rock ont été invités pour créer une programmation éclectique. Le public se réunissait pour écouter jusqu’à plus de quinze heures de concert.
Equinoxe, l’expression du peuple
Chapeau bas à l’un des plus anciens festivals encore en activité : Femmes Funk, porté par l’association Towanda Prod depuis 1997. Tout est dans le titre : la scène est ouverte en priorité aux femmes, auteurs, compositeurs, interprètes. « La première année, la programmation a étonné. Dans un pays où les femmes sont très discrètes, organiser une fête pour les mettre en lumière a beaucoup surpris », se souvient MarieFrance Auguet, présidente de l’association. Et même si depuis certains invités sont masculins, la féminité reste au centre de l’identité du festival : un accueil fleuri et chaleureux, pensé pour la famille, une bienveillance et le soin du détail. Depuis 2013, l’événement met petit à petit en place les aménagements pour obtenir le label Green’n’Clean et devenir le premier festival écoresponsable du territoire.
DÉTOURNEMENT DE NAINS
Festival Equinoxe 2007, monument des Américains. Les pieds nickelés et le GIPN (groupement d’intervention pour la nature) ont organisé un happening, installant fausse pelouse et nains de jardin sur l’édifice de Port Moselle. En tête de la petite délégation, le nain géant de l’art, prônant une activité artistique libre et provocante. Une journée aura suffi pour que Nouméa et les touristes s’émeuvent du mauvais traitement du monument historique. C’est donc armés de lances à eau que les pompiers ont délogé les champêtres porcelaines...
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Femmes Funk
© Eric Dell’Erba
Dernier festival de rue, Equinoxe laisse un grand vide dans l’agenda des Calédoniens. Créé en 1989, il palliait le manque de structures de diffusion. L’ambiance et l’espace urbain de Nouméa étaient adaptés à ces fêtes, notamment sur l’actuel parking du Banian. « Aujourd’hui, le contexte social, culturel et sécuritaire rendrait plus difficile l’organisation d’une telle manifestation », ajoute Cyril Pigeau qui, en tant qu’ancien responsable du service Culture et Fêtes de la Ville de Nouméa, a organisé avec le théâtre de l'Île, le dernier festival du genre en 2010, rebaptisé alors Nox’tambules.
Hamid
ittérature
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Un anthropologue dans un salon littéraire… Vient-il observer cette curieuse espèce que sont les écrivains? Loin de là (quoique ?), car Hamid Mokaddem a plus d’une corde à son arc.
Pouvez-vous nous dire quelques mots de votre parcours ?
Quelle est selon vous la place de l'essai en Nouvelle-Calédonie ? Au Silo ?
Hamid Mokaddem : Au niveau académique, je viens de la philosophie classique et me suis converti à l’anthropologie pour affûter le regard critique sur les situations postcoloniales. Au niveau existentiel, bien que ces deux niveaux soient enchevêtrés, je me suis orienté en Océanie en tant qu’enseignant, citoyen de la Nouvelle-Calédonie – qui à mes yeux n’est pas un concept creux –, écrivain, militant, chercheur, en somme une identité multiple tout comme chacun d’entre nous.
Incontournable. L’essai est un art d’écrire dont l’exercice se situe entre le système de pensée et la liberté rhétorique. Le rythme de l’essai est rapide, mais moins que les écrits des journalistes contraints par le format, le temps et la vitesse de l’événementiel. L’essai est une expérience, un tâtonnement pour nous sortir d’une impasse. L’essai est une bouffée d’air pour pouvoir respirer et vivre.
Comment passe-t-on de la philosophie à l'anthropologie politique et à l'ethnologie ? En adéquation avec le devenir différencié, hétérogène, multiple de Kanaky-NouvelleCalédonie. La philosophie, du fait de sa procédure, ne peut pas comprendre ces devenirs. Je suis devenu anthropologue par nécessité, pour mieux comprendre ce que nous devenons aujourd’hui dans l’archipel mélanésien francophone avec ses contradictions, ses tensions et ses transformations.
Vous vous intéressez depuis longtemps à la littérature, êtes-vous tenté par l'écriture de fiction ou de poésie ? Dans Sillages et pour d’autres revues, j’ai écrit des fictions. Beaucoup ne sont pas publiées par pudeur, et aussi parce qu’il faudrait une somme de temps, d’énergie, pour travailler l’écriture, dont je ne dispose pas aujourd’hui. On verra ce que l’avenir dira. Écrire (de la fiction), ce n’est pas se contenter de reproduire des canons esthétiques. On doit innover, être percutant, original, faire entendre une voix et créer une atmosphère.
Politique, littérature, citoyenneté, culture kanak, les thèmes que vous abordez sont nombreux. Quel en est le fil conducteur ? Encore une fois, le fil conducteur de cet écheveau est la nécessité de comprendre ce que nous devenons aujourd’hui en Océanie, plus précisément en KanakyNouvelle-Calédonie. La recherche doit explorer les multiples dimensions : arts, cultures, écritures, politiques.
Apollinaire Anova occupe une place importante dans vos travaux, pourquoi cette figure vous tient-elle tant à cœur ? Anova est le premier intellectuel kanak exprimant une pensée du multiple en langue française. Il analyse les identités culturelles constituées par l’histoire. Il est un phare au sens conféré par Baudelaire dans Les Fleurs du mal, à savoir une lumière ouvrant des horizons dans notre propre devenir. Son œuvre pourtant si proche est scandaleusement ignorée.
L’essai est une expérience pour nous sortir d’une impasse
© Éric Dell’Erba
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Mokaddem
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Palabres d'écrivains
p. 41 ittérature
Une Une poetesse
Palabres d'écrivains
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hawaïenne au Silo Que faut-il savoir de vous ?
Comment vous êtes-vous retrouvée invitée au Silo ?
Ku'ualoha : Je me définis d’abord comme une « Kanaka Maoli », c’est-à-dire une Hawaïenne de souche, même si ma mère est une « Haole » (Blanche de Californie) et mon père un « Hapa », un Hawaïen d’Honolulu aux origines chinoises, espagnoles et allemandes ! Je suis née sur l’île d’O’ahu, mais j’ai été élevée sur l’île de Kaua’i, dans un environnement bucolique, entourée de chevaux, de bétail et de chiens. J’ai même participé à des spectacles équestres et des rodéos jusqu’à ce que j’aille à l’université. Je suis actuellement professeure associée en anglais à l’université de Hawaï-Mãnoa, spécialisée en littératures du Pacifique, en ateliers d’écriture et en alphabétisation au sein des communautés autochtones. J’écris de la poésie et des nouvelles en langue hawaïenne et en anglais ; J’ai été publiée et traduite un peu partout dans le monde.
J’ai participé au Salon du Livre de Tahiti en novembre dernier grâce à la détermination de Chantal T. Spitz, que nous avions invitée plusieurs fois à Honolulu. Chantal avait beaucoup insisté pour qu’un auteur hawaïen vienne se rendre compte de ce qui se passait chez elle au niveau littérature. Je dois dire que l’expérience a été tout à fait fascinante et mon séjour à Tahiti a renforcé ma détermination à jeter des ponts entre le Pacifique francophone et anglophone. À Papeete, j’ai rencontré Christophe Augias et Patrice Guirao et nous avons passé des heures à parler de littérature océanienne. Cette invitation est une heureuse surprise qui devrait me permettre de continuer nos échanges, de poursuivre ma découverte du Pacifique francophone et de nouer de nouveaux contacts dans cette partie du monde que je ne connais pas.
Quels sont vos projets du moment ?
Comment vivez-vous votre culture au quotidien ?
Je travaille actuellement sur une traduction et une édition annotée d’un texte qui date de 1899, « La légende de la bataille féroce entre Pelekeahi‘āloa (la déesse du volcan de Hawaï) et Wakakeakaikawai (une déesse lézard) », écrit par Moses Manu, un auteur hawaïen dont le papa est d’ailleurs un Tahitien originaire de Paofai. Bizarrement, cette légende n’avait jamais été ni traduite ni publiée en anglais. Je suis également en train d’écrire une contribution à un ouvrage collectif sur les méthodologies autochtones. Mon texte s’intitule « Retour aux sources : la généalogie en tant que méthodologie dans un contexte littéraire ». Et j’essaie également de concrétiser mon premier recueil de poésie !
Même si je suis une métisse, ce qui est très commun à Hawaï, le fait d’avoir été élevée de manière traditionnelle influence fortement mon approche culturelle d’adulte. J’ai la chance d’appartenir à une génération où je peux parler, écrire et enseigner la langue hawaïenne, ce qui était compliqué pour mon père, né en 1942 juste après Pearl Harbor. C’est ainsi par exemple que je prie et chante tous les jours dans ma langue, une pratique qui me permet de maintenir des liens très forts avec ma culture et mes ascendants.
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Un bon conseil si vous avez l’intention d’échanger quelques mots avec l’auteure hawaïenne invitée au Silo : entraînezvous dès maintenant à dire sans respirer « Ku’ualoha Ho`omanawanui ». Oui, c’est son nom.
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Fiche pratique Devenir © DR
intervenant artistique Par Aurélie Cornec
Vous êtes artiste ou professionnel de la culture et souhaitez transmettre vos connaissances et votre passion à la jeunesse ? Vous êtes intéressé pour devenir « intervenant artistique et culturel » en milieu scolaire ? Suivez le guide.
D
ans le cadre du développement de l’éducation artistique et culturelle, le Gouvernement, les trois provinces, le vice-rectorat et la Mission aux affaires culturelles du Haut-Commissariat favorisent l’intervention d’artistes au sein de dispositifs en milieu scolaire : classes à projet artistique et culturel (APAC), ateliers et options artistiques, classes culturelles, mais aussi hors temps scolaire, notamment dans le cadre des activités des centres culturels. Chaque candidat désirant devenir intervenant artistique doit tout d’abord remplir un dossier complet se déclinant en deux parties :
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Le dossier administratif Formulaire complété, à retirer à la Direction de la culture, de la condition féminine et de la citoyenneté de la NouvelleCalédonie, ou téléchargeable sur www.gouv.nc Photocopie d’une pièce d’identité Extrait du casier judiciaire n° 3 Avis d’identification Ridet Copie des diplômes obtenus (enseignement général et dans la discipline artistique concernée) Copie des attestations de formation Engagement pour mobilité du candidat sur les trois provinces Autorisation de diffusion de coordonnées : téléphone, mail, adresse Autorisation de cumul de rémunération (pour les agents du secteur public) Le candidat doit également donner son accord pour suivre une formation d’intervenant artistique et culturel dans les trois années à venir. Selon la formation initiale de l’artiste, cette formation peut rester facultative. Elle proposée et financée par le Gouvernement de la Nouvelle-Calédonie se déroule sur trois semaines.
Un dossier artistique ou culturel Il s’agit de fournir les documents justifiant d’une expérience ou d’une pratique artistique ou culturelle effective depuis au moins trois ans si le candidat ne présente pas de diplôme d’enseignement supérieur dans la discipline artistique concernée. Pour les diplômés, les justificatifs concernent uniquement les deux dernières années. Exemples de justificatifs : - attestations des lieux de diffusion - articles de presse - photos - albums (CD) - affiches - attestation de maîtrise d’un savoir-faire traditionnel délivrée par les autorités compétentes Chaque document doit être daté.
Explication de sa démarche L’artiste doit être à même, en choisissant une ou plusieurs de ses œuvres (photo, CD ou autres supports), d’expliquer sa démarche artistique et / ou d’indiquer les artistes ou les mouvements artistiques auxquels il se réfère. Un comité d’experts, sous l’égide de la Direction de la culture, de la condition féminine et de la citoyenneté de la NouvelleCalédonie, étudie ensuite chaque dossier une fois par an avant de délivrer un agrément d’une durée d’un an (ou de deux ans si le candidat a suivi avec succès une formation d’intervenant artistique ou culturel)*. S’il le souhaite, l’intervenant artistique remplit une fiche d’actualisation annuelle afin de renouveler son agrément. * Pour 2015, la commission s'est tenue début juin 2014.
PLUS D’INFOS
Direction de la culture, de la condition féminine et de la citoyenneté de la Nouvelle-Calédonie 21, rue Georges-Clémenceau – BP T5 – 98852 Nouméa Cedex Tél. : 26 97 60 - Fax : 26 97 67 Courriel : dccfc@gouv.nc
CENTRE CULTUREL PROVINCIAL POMÉMIE
Cette exposition d’art contemporain représente le cycle de la vie kanak avec les principales étapes que sont: la naissance, le mariage, la mort et la renaissance. L’exposition occupe les différents espaces du centre culturel : le jardin des sculptures, la maison Caujolle avec une exposition-vente dartisanat, la salle d’exposition et le jardin des roches.
Une vingtaine d’artistes de la Province Nord professionnels ou amateurs participent au projet en créant des œuvres dans différents domaines des arts visuels. Exposition photo « je suis une âme d’expression massive » avec Thierry Mangin Exposition décentralisée du 19 septembre au 10 octobre au centre culturel de Voh
SPECTACLE DE DANSES Le mercredi 10 septembre de 17H à 22H Avec différentes troupes de danses traditionnelles et contemporaines du Nord et du pays
PLATEAUX MUSICAUX Le mercredi 19 novembre à 19H Concert de Richard Bona organisé en partenariat avec l’AFMI Le mercredi 26 novembre de 17H à 22H Mercredi musical organisé en partenariat avec le conservatoire de musique et de danse de Koné
2243, route de Pomémie Koné Tél. : 47 11 06 Email : asso.pbvt@canl.nc www.pomemie.com
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EXPOSITIONS
Exposition « l’art est passage » du 20 juin au 13 décembre 2014
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Critiques m on Air usique
Endemix a sorti sa chaîne et ses enceintes pour écouter les nouveautés du marché musical calédonien. Verdict ?
OTHELLO AND THE SCAFFOLDERS STEP ONE
C
es Échafaudeurs (traduction de Scaffolders) auront mis trois ans à poser la première brique de leur édifice musical. Et Step One, E. P. cinq titres aux arrangements méticuleux, certifié « haute qualité instrumentale », augure des lendemains qui chantent pour la formation emmenée par Othello Takosi. À 35 ans, ce dernier – qui a travaillé notamment comme guitariste avec les Soul Sindikate & Dub Troopers – apporte via sa voix rauque une vraie maturité à l'ensemble. Il s'agit donc de reggae, tendance roots, qui évoque l'influence du groupe américain Groundation, assumée par les six comparses. En résulte une trame mélodique subtile et hypnotique, où la pulsation caractéristique du genre sert de lancement aux motifs
à la guitare, à l'instar du très abouti morceau “The Curse”. Les chœurs, plutôt discrets, soutiennent le chant énergique, qui interpelle l'auditeur au cours de brusques embardées. Tous les morceaux en anglais, « considéré comme vecteur régional et international » selon la page Facebook du groupe, font référence aux thématiques familières aux amateurs de culture rasta (ainsi le morceau “HMZ”, pour “Holy Mount Zion” par exemple). Si le reggae concocté par les Scaffolders manque peut-être encore d'un brin de folie ou de personnalité, nul doute que le groupe a trouvé sa voie et que son travail acharné de composition porte déjà ses fruits. On peut également souligner au passage l'intéressant travail graphique de la pochette de l'album, signé Brice Poircuitte. Par SD
VEVELAN
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MY FAMILY
D
eux ans après Wawaly, sa première apparition solo dans le paysage du kaneka, Vévélan – alias Hervé Wahéo – nous revient aujourd'hui avec My Family, album dense et rythmé de douze titres. « Conte de fée », morceau inaugural, nous plonge d'emblée dans l'ambiance : mêlant sonorités traditionnelles (percussions, wessels, refrains) et orchestration électrique maîtrisée, alternant chant en français et en nengone, le cocktail savamment dosé fait mouche. L'auteur-compositeurinterprète enchaîne les couplets de sa voix contrastée, qu'il module selon les messages intimistes ou plus fédérateurs. Ainsi la chanson “Mon rêve” appelle les Calédoniens à la réconciliation. De manière générale, les thèmes incluent les liens à la famille et l'amour. Les seules fausses notes concernent peut-être certains
textes en français, qui laissent une impression de naïveté et d'inachevé (“Ma plus belle histoire”, “Kavish”). Mais l'ensemble séduit par sa remarquable cohérence instrumentale et vocale. La qualité des chœurs lors des refrains n'y est pas étrangère, comme sur le très beau morceau “Ma jolie” et son introduction riche en références traditionnelles, tout comme sur “Papa i nekong”. Notons au passage la fructueuse collaboration avec les musiciens et chanteurs d'Ada sur ce dernier morceau, et de Sadro sur “Javos”. De quoi enrichir encore la palette d'influences du musicien originaire de Maré. Avec “Bo gosse”, Vévélan se paie même le luxe de finir sur une invitation survoltée et pleine d'humour pour aller zouker le week-end ! Par SD
p. 45 Critiques
COLLECTIF Caledonia +687
MATAHARI BERSAMA
indonésien (liste non exhaustive) qui déclinent le destin commun à toutes les sauces. Autant l’avouer tout de suite : le résultat est quelque peu inégal, tant certaines fois le caractère volontariste du message prend le pas sur l’artistique. C’est sans doute la difficulté inhérente à ce genre de compilations, dont le message positif est pourtant à relayer. Parmi les belles compositions que propose l’album, notons “Kanaky/ Calédonie” et son refrain entêtant, le très intéressant travail mélodique qui mêle notamment bwanjeps, guitare et voix sur pilou, ou “Ma Nature”
P
récédé d’une belle réputation suite à de nombreuses prestations live l’an dernier, le groupe Matahari, “soleil” en indonésien, a sorti son premier album en mai dernier. Le nom de ce premier opus, Bersama (“ensemble”), est significatif du projet, traduisant l’idée de fusion qui est au cœur de la démarche du groupe. Celui-ci propose création après création un riche mélange musical aux accents d’Afrique de l’Ouest et du Maghreb, porté par une batterie aux rythmes rock, sur lequel viennent se greffer des chants tour à tour indonésiens, anglais et français. Un ensemble bigarré donc, une savante alchimie avec laquelle la formation emmène son auditoire par couches successives, mêlant avec une complexité croissante des harmoniques exécutées sur
et ses paroles sensibles. Sans oublier le morceau éponyme de l’album, “Où que nous mène le vent”, qui parvient à transformer de multiples influences culturelles en un bel hymne à la tolérance. Par SD
des harpes africaines, créant par la répétition une transe qui emporte l’auditeur conquis et que l’on souhaiterait sans fin. Qu’en est-il au final du passage au format album ? La tracklist a l’originalité d’associer à chaque titre un sous-titre qui renseigne sur le sens de chaque morceau, un parti pris qui participe à l’univers si particulier de Matahari. Il faut reconnaître que si l’ensemble reste très agréable à l’écoute et d’une cohérence indéniable, la formule perd au passage une part de sa puissance et un brin de monotonie s’installe parfois au fil des dix pistes. Bersama reste cependant une belle porte d’entrée pour découvrir ce groupe, mais nous ne saurions trop recommander de le rencontrer très vite sur scène pour en apprécier toute la portée chamanique. Par JB
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e 5 avril dernier se tenait au centre culturel Tjibaou la première édition du festival Caledonia +687, à l’initiative de Tim Sameke. Le leitmotiv de ce grand rassemblement était de convier toutes les cultures du Caillou autour de repas, de danses et d’un grand concert regroupant plus de vingt groupes. Le succès fut d'ailleurs au rendez-vous… Dans la foulée sortait l’album Où que nous mène le vent, sorte de manifeste polyphonique aux multiples accents du Pacifique, matérialisant l’idéal fédérateur du festival. Ils étaient une vingtaine d’artistes et de formations musicales sur scène ; ils sont autant à se partager 17 titres en français, anglais, bichlamar, nengone, futunien,
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Free jazz
Critiques
ittérature
Par Stéphane Camille
Quand une Tête-pointue rencontre un Man-oui-oui, il y a de l’eau dans le gaz ou murène sous patate... Dans son roman Quintet, c’est au temps du mariage forcé entre Europe et Océanie que nous convie Frédéric Ohlen, lors d’un concert où la beauté naît précisément de la discordance. Un coup de maître.
L
e personnage central de Quintet fut témoin du déferlement ancien mais certain de la culture occidentale dans une civilisation qui ne l’avait ni appréhendé, ni voulu. Il s’appelle Fidely et on le repère à son excroissance crânienne. À ses côtés – ou dans ses rêves – on va croiser Maria et Heinrich, colons au grand cœur, Gustin, premier instituteur laïc, invité à exercer à Païta, et le capitaine de Rieu, fonctionnaire polymorphe qui s’adapte au contexte de la Calédonie d’alors, cet embryon colonial. Mais aussi des personnages plus sombres : un chef kanak ambigu, le tout-puissant gouverneur Guillain, alias « l’Imperator » ou « Sa Majesté », le trader historique James Paddon et enfin la pire des engeances : les blackbirders. L’un des navires de ces trafiquants de main-d’œuvre connaîtra d’ailleurs un sort assez réjouissant pour nous, lecteurs contemporains.
Les moissonneurs Avec Fidely, le monde que l’on peut qualifier ici de mélanésien sans être réducteur (puisque dans le roman la distinction entre ce qu’on appelle aujourd’hui Kanak et Vanuatais n’est pas flagrante) apparaît dans toute sa complexité et sa profondeur. Mis à mal par l’arrivée des « moissonneurs », ce monde se défend comme il peut, détruisant ou au contraire adoptant les armes des colonisateurs : fusils, religion et... écriture. Dans ce contexte, les références aux codes de la franc-maçonnerie font un peu pacotille, comme ces présents dont les blackbirders se servaient pour appâter leurs proies, ou ces raccourcis ésotériques de philosophe fatigué offerts aux athées en quête de sens.
Le temps du rêve frédéric ohlen
Quintet
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roman
continents noirs
gallimard
Dans une langue plutôt sobre, très élégante, l’auteur se départit largement du caractère parfois abscons, voire amphigourique, qu’on a pu reprocher à son œuvre poétique. Quintet est fluide et pur comme l’eau à la source de la Dumbéa. Monsieur Ohlen se révèle un excellent romancier, de ceux qui nous emportent dans leur monde en nous épargnant le « travail » énorme nécessité par toute œuvre littéraire de fiction. Alors, bien sûr, on pourra chipoter : déplorer l’abus de phrases sans verbe, procédé qui intensifie l’aspect dramatique mais perd de sa force en se répétant ; se plaindre du manque de corps des personnages féminins, hormis celui de la dévouée Maria qui, justement, n’a que peu de chair sur les os – on aurait aimé pénétrer plus loin dans l’intimité de la flamboyante Naïtani, reine d’Anatom, épouse de Paddon et amante d’un autre. En outre, il n’y a pas de personnages odieux dans Quintet, du moins pas vraiment incarnés. Mais l’auteur parvient à nous plonger dans une époque déjà lointaine, sans permettre à l’histoire d’étouffer le rêve. Et comme l’enterrement terrifiant du grand chef Roy Mata, en compagnie de ses sujets, déborde dans l’esprit des geôliers de Fidely, la magie romanesque contamine rapidement et voluptueusement l’esprit du lecteur cartésien.
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ENDEMIX n° 08 septembre - octobre - novembre 2014
NOUVELLE-CALÉDONIE
p. 48
Démon interieur
ittérature
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Critique
l
Par Roland Rossero
Firmin Mussard aime le polar et le roman noir. Écrivain aussi bien pour les adultes que pour les jeunes, il sait mener un récit avec maîtrise et nervosité. Publié aux Éditions du Cagou, La Dernière jeep n’échappe pas à ces deux qualités qui font un bon conducteur d’histoires. Moteur !
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, A
propos d’écriture, l’auteur n’est du temonio, une créature lacustre férue de mécanique et pas en période de rodage. Il a pas du liquide ambré. En effet, le démon a élu domicile dans mal de lignes kilométriques à les profondeurs où il collectionne jeeps, GMC et half-track son compteur et l’on se souvient M4. La station sous-marine du démon va-t-elle engloutir de ses deux polars musclés : définitivement l’écervelé ? C’est ce que vous saurez en Retrait du percuteur – éditions Baleine/Le Seuil – et Fausse vous immergeant à sa suite dans ce flot d’aventures passe - aux éditions Actes Sud, ayant laissé des traces fantastico-oniriques. (de balles ?) chez le lecteur. En 2004, il avait également De ce mauvais trip aquatique, surgiront de bonnes négocié un virage réussi chez résolutions et des les ados avec Balthazar est valeurs retrouvées. en pétard, déjà aux Éditions On aura aisément du Cagou. L’addiction pour compris que ce sont plus la fumette et ses solutions les démons intérieurs qui y étaient traitées de belle intéressent l’écrivain. manière, à tel point que l’on Cependant, Mussard est pouvait qualifier l’opus de plus pragmatique que polar en herbe – drue de moralisateur et son style y surcroît. est sûrement pour quelque Dans La Dernière jeep, chose car cela se lit Soane, approchant l’âge comme un vrai polar avec de la majorité, fait pas mal castagne, rebondissements, de “conneries majeures”, suspense et poursuites… essentiellement des vols de en voiture ! Le vocabulaire grosses voitures, par goût n’est pas mièvre, la du risque, par rébellion et testostérone adolescente par désœuvrement. Il fait coule dans ses paragraphes partie de cette jeunesse locale et les dialogues ne déboussolée qui pense à manquent pas d’humour. tort que le paradis sur Terre Entre autres, la description ne peut être qu’artificiel. du temonio en fait un Pour avoir abusé d’alcool, émule des ogres de de cannabis et de vols à la Perrault, à la fois terrible tire (le cas de le dire), il se et un brin stupide. retrouve parachuté à Wallis La documentation chez son grand-père. Lequel historique est probante possède une jeep datant et le lecteur apprendra de la guerre du Pacifique, autant que Soane avec son ayant échappé à l’immersion grand-père. Signalons, du matériel US dans le lac La Dernière jeep de Firmin Mussard aux Éditions du Cagou. enfin, la belle illustration Lalo Lalo, l’oncle Sam ayant de couverture, lorgnant préféré le noyer plutôt que le rembarquer. vers la BD, ainsi que des dessins en tête de chapitre qui font respirer le parfum des livres d’aventure d’antan Démon station lorsque l’on tournait leurs pages avec avidité. Que dire d’autre, sinon de vous y plonger ! Toujours porté sur la “bouteille carrée” et le “one”, le fanfaron va rencontrer plus fort que lui en la personne
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Métier
l
Siméi
CONSERVATRICE
Paala Le cœur à l'ouvrage
DE BIBLIOTHÈQUE
© Claire Thiebaut
ittérature
Petite, Siméi Paala feuilletait tous les magazines pour enfants qui lui tombaient sous la main. De nombreuses lectures plus tard, elle est devenue conservatrice des médiathèques du Nord, pour convertir le plus grand nombre à l'amour des livres.
' A
ceux qui serinent que les jeunes générations ne s'intéressent plus aux livres, elle répond qu'ils n'ont qu'à venir jeter un œil à Poindimié. « Les jeunes ont pris l'habitude de fréquenter la médiathèque du Nord après les cours, assure la conservatrice de l'établissement. Elle est un peu devenue leur seconde maison ! ». Quand Siméi Paala se remémore son enfance, ça n'était pas l'envie de lire qui lui faisait défaut, mais bien les livres eux-mêmes, tant il était difficile d’y avoir accès. « On se prêtait des Picsou magazine ou les quelques livres que l'on avait. La lecture était un formidable moyen d'évasion, raconte la trentenaire, originaire de la tribu de l'Embouchure à Ponérihouen. C'est seulement quand je suis entrée au collège que j'ai vraiment pu commencer à lire, grâce au CDI ». Une vocation est née. Depuis 2009, à la tête des médiathèques du Nord, tout l'enjeu de son travail est d'amener les livres à la rencontre du public. « Le problème ici, c'est l'éloignement, poursuit Siméi Paala. La plupart des inscrits sont de Poindimié, voire de Ponérihouen ou de Touho. Quand on monte à Tchemba par exemple (une tribu de Hienghène), on se rend compte qu'il y a une forte demande ». Les actions du bibliobus restent encore à développer selon la conservatrice. Cependant, la plus grosse partie de son énergie, la médiathèque la consacre aux scolaires. Elle organise notamment six tournées par an à travers les établissements de la province.
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COMPÉTENCES MULTIPLES : LE MÉTIER DE BIBLIOTHÉCAIRE CONSISTE À : - cerner les besoins des lecteurs et proposer des listes de documents pour enrichir le fonds de la bibliothèque - traiter les ouvrages depuis la réception jusqu’à leur mise en rayon (catalogage, équipement, conservation, classement) - accueillir, orienter et informer le public - valoriser le livre et la lecture, et diversifier les publics par l’organisation d’actions culturelles
Par Théo Rouby
LES COMPÉTENCES REQUISES : - rigueur, méthode et organisation - goût du contact - intérêt et bonne connaissance de l’outil informatique LES FORMATIONS : les formations au métier de bibliothécaire sont dispensées en Métropole mais peuvent se poursuivre après une licence générale
À l’école du livre « C'est important que la jeunesse prenne conscience que le livre permet de réussir ses études, de se construire », martèle Siméi Paala, qui affirme devoir largement la réussite de sa licence d'histoire-géographie à son amour des livres. À tel point qu'elle s'est rapidement projetée dans le métier de documentaliste, pour partager sa conviction avec un maximum d'élèves. Puis un concours organisé par la province Nord lui a permis d'exercer son poste au plus haut niveau en lui offrant une formation de 18 mois à l'Ecole nationale supérieure des sciences de l’information et des bibliothèques (ENSSIB), à Villeurbanne, dans la banlieue lyonnaise. Car l'art de faire aimer la lecture ne s'improvise pas. Le travail de Siméi consiste principalement à « trouver des moyens détournés pour amener les personnes aux livres », en s'appuyant sur une pièce de théâtre ou des films qui ont un rapport avec un ouvrage par exemple. Elle est aussi en charge de l'organisation d'événements littéraires comme le Salon international du livre océanien, qui se tient depuis plusieurs années à Poindimié en biennale et qui, cette année, sera délocalisé à Nouméa au mois d’octobre. On l'aura compris, Siméi aime les livres. Et même si son poste lui demande de passer du temps à des tâches administratives, il repose avant tout sur une bonne connaissance des ouvrages qui traitent du pays et de la région Pacifique. Des publications scientifiques à la littérature jeunesse, Siméi Paala a trouvé dans le métier de conservatrice de bibliothèque de quoi étancher sa soif de lire.
DEUST ou DUT (bac + 2) : - métiers du livre - information et communication Licence professionnelle (bac + 3) : - ressources documentaires - métiers des bibliothèques - de la documentation et des archives numériques Master professionnel (bac + 5) : - sciences/gestion de l’information - archiviste - métiers du livre
LE CONSERVATEUR DE BIBLIOTHÈQUE Il dirige la bibliothèque, en assure la gestion (financière et administrative) et le management (ressources humaines, conduite de projet…), mais a aussi un rôle scientifique en encadrant la constitution, la conservation et la gestion du fonds documentaire. Les conservateurs sont recrutés sur concours (niveau licence) et sont formés à l’ENSSIB.
Publi-reportage
© Musée de Nouvelle-Calédonie
Les communautés s’exposent au musée de Nouvelle-Calédonie Depuis 2009, le musée de Nouvelle-Calédonie, avec le soutien de l’association Les amis du musée, organise une série de micro-expositions intitulée Mémoires des gestes, héritage à partager. Ce projet s’intègre dans un vaste programme de restitution des travaux de recherches et d’enquêtes-collectes dans la perspective du projet d’extension du musée.
Mettre en lumière les signes identitaires Le musée travaille ainsi en étroite collaboration avec les différentes communautés du territoire qui choisissent une thématique ou un savoir-faire qui les représente dans cette société multiculturelle. Cette collaboration se concrétise par des enquêtes et des collectes sur le terrain, suivies d’un important travail de documentation, avec une ou plusieurs personnes ressources des associations, des amicales et parfois des consulats. Chaque micro-exposition met ainsi en lumière toutes les personnes ressources, leurs pays d’origine, leurs parcours, leurs techniques et leurs savoir-faire, mais aussi l’histoire de leurs communautés en Nouvelle-Calédonie.
Le vernissage, véritable moment de partage Ces micro-expositions sont inaugurées le samedi, au cours d’une journée ponctuée
d’animations. Le vernissage, durant lequel il y a un cocktail d’ouverture accompagné de plats typiques, représente un moment privilégié qu’offre le musée à la communauté qu’il accueille en lui permettant de faire découvrir sa propre culture à travers le thème choisi, mais aussi l’artisanat, les danses, les musiques traditionnelles ou modernes… Pendant la durée de la micro-exposition, le musée sollicite également chaque partenaire pour l’organisation d’ateliers de démonstration visant à développer et élargir la thématique dans un souhait de partage et de transmission de la mémoire et des savoir-faire.
Les micro-expositions passées et à venir > Les chapeaux en pandanus de Marama (Polynésie française), 2010 > Le Ka, écho de l'identité antillaise, 2010 > Les richesses de Tositea, Siapo, gatu et autres étoffes d'Uvea et de Futuna, 2011 > Kain batik, le tissu d'une vie (Indonésie), 2011 > Ukiyo-e, images du monde flottant, les estampes japonaises, 2012 > Tre già mang moc, Quand le bambou se fait vieux, la pousse croît (Vietnam), 2012/2013 > Wivim, colorem, exsensem, les nattes de Vanuatu, 2013/2014 Le musée de Nouvelle-Calédonie prépare actuellement ses deux prochaines microexpositions avec les communautés réunionnaise et calédonienne.
DES VISITES PÉDAGOGIQUES
Le musée de Nouvelle-Calédonie réalise, en partenariat avec le vice-rectorat, des livrets pédagogiques à destination des scolaires. Chaque microexposition fait ainsi l’objet d’un livret téléchargeable sur le site Internet du musée.
INFOS PRATIQUES
Musée de Nouvelle-Calédonie 45, avenue du Maréchal-Foch, Nouméa Tél. : 27 23 42 Fax : 28 41 43 museenouvellecaledonie.nc et sur la page Facebook
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T
outes les données recueillies dans le cadre de ces micro-expositions viennent enrichir les collections du musée de Nouvelle-Calédonie et leur documentation. Ces expositions de préfiguration correspondent aux nouvelles priorités du musée : être un musée de patrimoine et de société de la NouvelleCalédonie, ancré dans l’Accord de Nouméa et la communauté de destin.
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Parcours h
Une drôle
© Eric Dell’Erba
ommage
Jean-Pierre Paillard épouse Marie-Jo le 10 avril 1989. Le couple décide d'arrêter l'aventure trentenaire du célèbre piano-bar le 10 avril 2013. Dernier clin d'œil de l'artiste, il nous quitte brutalement… vingt-cinq ans jour pour jour après son mariage. Retour sur une carrière originale, en compagnie de Marie-Jo.
L
a boucherie familiale lui tend les bras, mais dès 8 ans Jean-Pierre Paillard entre au conservatoire de Dijon, pour dix saisons. Son père, saxophoniste amateur, insiste pour que le cadet passe en parallèle son CAP de boucher. On ne sait jamais ! Il alternera abattoirs et conservatoire… Tout frais médaillé, il est réquisitionné pour remplacer “au pied levé” le pianiste accidenté d'Isabelle Aubret, en tournée dans la région. Au Joker's Club de Dijon, il accompagnera d'autres gloires de l'époque, Georges Chelon, Boby Lapointe ou Lucienne Boyer qui l'initie, le matin, aux croissants trempés dans le champagne. Deux rencontres vont marquer le jeune musicien, amateur de jazz. Brel, un personnage charismatique, avec lequel il partage « un humour de potache ». Et Ferrat. Pour dormir en paix, la star naissante échange sa chambre d'hôtel avec son pianiste. Les fans grattent ainsi toute la nuit à la porte de Jean-Pierre… Après vingt-quatre mois de service militaire dans la musique de l'air (armée de l'air) en Algérie, son imprésario Bernard Hilda, chef d'orchestre de la Piste aux étoiles, lui déniche des contrats dans les plus beaux hôtels d'Europe. La tournée se prolonge à Abidjan où Jean-Pierre s'exile deux ans avec sa petite formation, au Maeva Beach de Papeete, puis à Nouméa pour l'ouverture du Château Royal. Le pianiste itinérant débarque en Calédonie en juin 1973, il a 31 ans.
Formule chansons françaises Très vite il décide de s'installer à son compte, devient une figure incontournable de la vie nocturne locale, fait des pubs pour la télé, un tabac avec le 45 tours Tu vas voir ta gueule, tout en dispensant ses cours (chant et piano). C'est ici, une fois poussé la porte des « Tréteaux de la musique », que Marie-Jo va entrer dans sa vie. Pour ne plus jamais la lâcher. Accompagnée par son prof, elle fourbit ses premières armes le soir au Surf Hôtel, abandonne son métier d'institutrice et se jette dans l'aventure « sentimentale et musicale ». La suite, on la connaît : l'inauguration du piano-bar Paillard en juillet 1984, JP au clavier, Marie-Jo au micro et derrière le comptoir, « une formule chansons françaises qui plaisait énormément ». Mais aussi une vie décalée, à contre-sens, où l'alcool, le tabac et la fatigue accrochent, l'air de rien, quelques bémols aux partitions. Fin 1986, l'artiste en paie le prix fort. Cancer du plancher buccal. Il s'en sortira, au terme d'une lourde hospitalisation, malgré une chirurgie faciale très handicapante. La rééducation est longue : la parole, l'alimentation, la vie.
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Sa pudeur l'empêchait d'exprimer ses états d'âme
Accompagnateur iconoclaste « Jean-Pierre s'est accroché au fait que nous pouvions vivre tous les deux la vie pour laquelle nous étions faits. Il a eu le courage d'accepter, de se faire accepter, et a toujours gardé son humour, il était d'une force et d'un optimisme incroyables. » Le pianobar redémarre. Les amis fidèles défilent. JP l'accompagnateur iconoclaste aux mains magiques, les chanteurs amateurs
de
vie
Par Jean-Marc Estournès
p. 53 Parcours
l'adorent. Lui improvise, multiplie les facéties. Au cours des soirées fastes, comme au cœur des nuits creuses. Mais il ne se livre que rarement. « Sa pudeur l'empêchait d'exprimer ses états d'âme ; je devinais parfois ce qui se passait dans son crâne, mais il brouillait bien les pistes ! » Et puis un matin… « J'avais la sensation que la messe était dite… » Fin juillet 2013, le piano-bar se tait, après trois décennies d'une « Drôle de vie », refrain que Marie-Jo aimait interpréter sur les notes de son compagnon. « On partait pour une troisième mi-temps, on voulait vivre peinards et continuer la musique sur un mode un peu plus cool. » Mais le crabe est revenu. Un direct dans le foie. Plus méchant, plus vorace. La camarde poursuit d'un zèle imbécile l'ami de Ferrat et Brel, prêt à se battre à nouveau, mais hélas trahi par son corps. Huit mois après la “retraite”, un ultime hommage est rendu à JP par tous les orphelins de la baie.
UN 33 TOURS ET PUIS S'EN VONT
Début des années 1980, Jean-Pierre réalise Piano bar soleil, un 33 tours qui met en scène neuf auteurs-compositeurs du Caillou. Après des mois d'arrangements minutieux, il enregistre le disque en Australie. « Avec cette expérience, sa carrière aurait pu prendre un tournant international. Il devait présenter le disque à l'Opéra de Sydney, avait des propositions pour la musique de séries télé. » Hélas à Nouméa, les “négligences” de l'indélicat producteur entraînent un long procès, gagné par l'artiste, mais qui compromet ses projets hors territoire. À toute chose malheur est bon : ce faux départ débouchera sur l'aventure du piano-bar. Jean-Pierre, parti le 10 avril 2014 à l'âge de 72 ans, un musicien atypique qui, selon son épouse Marie-Jo, « ne faisait rien comme tout le monde ».
CIRQUE/DANSE
Festival Culturel du Mont-dore
J’aiMe beauCoup Ce que vous Faites
octobre
CINéMA
Du 1er au 21 septembre
MUSIQUE kANékA jAzz
Yaari Waan Jigo
Vendredi 10 octobre - 20h (salle de spectacle) DANSE
speCtaCle de l’ÉCole de danse tehei
vahine oviri/ FeMMe sauvage
Vendredi 17 octobre - 20h•Samedi 18 octobre 18h•Dimanche 19 octobre - 16h
Renseignements : 41 90 90
ThéâTRE
de la Cie nuMa & Cie Vendredi 24 octobre - 20h•Samedi 25 octobre - 18h
urban FilM Festival
Vendredi 31 octobre•Samedi 1er novembre •Dimanche 2 novembre
novembre MUSIQUE/ThéâTRE/DANSE
les ateliers en sCène
Du lundi 24 novembre au samdi 6 décembre ENDEMIX n° 08 septembre - octobre - novembre 2014
septembre
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Retour sur f
Frères mélanésiens
estival
Par Léna Quillier et Claire Thiebaut
ENDEMIX n° 08 septembre - octobre - novembre 2014
© Léna Quillier
La Papouasie-Nouvelle-Guinée a accueilli le 5e Festival des arts mélanésiens du 28 juin au 11 juillet, achevant ainsi une boucle commencée à Fidji en 1997. Pendant trois semaines, le pays tout entier a célébré la diversité culturelle et la fraternité des cinq pays de Mélanésie.
Mouvement suspendu d’un danseur fidjien. Derrière lui, le drapeau du festival flotte fièrement dans le vent.
Un danseur de la troupe de Poya, quelques minutes avant de monter sur scène.
S
ur le tertre du village festivalier, des centaines d’artistes venus des terres, des îles et des montagnes ont dansé et chanté avec ardeur des journées entières. Organisé en deux parties, il a rassemblé les délégations des vingt-deux régions de Papouasie-NouvelleGuinée ainsi que celles des quatre autres pays de Mélanésie. « Ces rencontres permettent d’approfondir les réflexions sur ce que nous sommes, sur ce que nous faisons et surtout d’où nous venons. Ce festival s’adresse à tous et aux générations futures », a expliqué le ministre du Tourisme, des Arts et de la Culture de Papouasie pour présenter l’événement. Construit en face du Parlement – un édifice symbolique par son architecture moderne inspirée des maisons des hommes –, le site du festival proposait deux scènes dédiées aux musiques contemporaines ainsi que deux espaces pour les danses et chants traditionnels. Au-delà des grilles du village peintes aux couleurs du drapeau papou, les artistes ont également animé toute la ville lors de leurs prestations réparties dans différents lieux comme le stadium ou la plage (Ela Beach).
La Team Calédonie Les deux cent trente artistes de la délégation calédonienne se sont surpassés pour offrir aux spectateurs venus par milliers au moins cinq prestations par jour à Port-Moresby. Chacune des aires linguistiques du Caillou était bien représentée à travers plusieurs disciplines artistiques telles que la danse, la musique, la vannerie, la sculpture, la littérature, la poésie, le slam, la chorale, le graff, la poterie et l’art culinaire. « Nous avons décidé ensemble d’organiser la délégation par espace coutumier en nommant un ou deux responsable(s) à leur tête », explique Armand Goroboredjo, sénateur coutumier en charge des affaires culturelles. Malgré la chaleur accablante et plusieurs problèmes d’organisation, les artistes mélanésiens ont été fiers de montrer leurs cultures et leurs multiples pratiques artistiques vivantes et vibrantes.
p. 55 Retour sur
© Claire Thiebaut
Alors que les groupes de danse papous répètent leur entrée dans les allées du grand stade, les techniciens installent les dernières estrades. Le public, nombreux et familial, photographie les performeurs parés de mille couleurs. En fin de journée, les premiers officiels prennent la parole pour « remercier leurs frères de Mélanésie de s’être réunis en Papouasie ». Baguette à la main, un chef d’orchestre dynamique dirige un ensemble de conques qui entame l’hymne national. Pour distraire le public avant l’arrivée des délégations, deux danseurs se lancent dans une chorégraphie cocasse et caustique sur fond de percussions. L’entrée des artistes mobilise tout à coup l’attention. Tous ont suivi une procession dans la ville et défilent maintenant face aux spectateurs. Et, sous les grands drapeaux flottants, s’immobilisent plus de mille personnes dans un bel esprit de communion.
Aux côtés des arts traditionnels océaniens, la fanfare d’inspiration occidentale annonce l’arrivée des délégations.
TRADITION ET MODERNITÉ : UNE COHABITATION ARTISTIQUE
Tandis que le Festival des arts mélanésiens offre une grande place aux arts traditionnels, la création contemporaine prend aussi la parole. Loin d’être complexées face au retour des formes traditionnelles, les expressions actuelles sont vivaces et ingénieuses. Quand le groupe papou Dema Soul s’est présenté sur scène, le public local s’est rué autour de l’estrade. « Ce sont des stars ! », clament les vigiles qui se massent, eux aussi, dans la fosse. Et, quelques mètres plus loin, un frère du peintre bien connu Mathias Kauage présente ses toiles sur un grillage. Sur l’une d’elles, des bateaux et un avion. Une référence au culte cargo, inspiration des années 1970, suite au passage des premiers porte-conteneurs au large des côtes nord ? « Pas du tout !, rétorque l’artiste. C’est un hommage de la PapouasieNouvelle-Guinée aux disparus du vol de la Malaysia Airlines ». L’art papou, au cœur de l’actualité…
DES ARTS PROTÉGÉS
Après les prestations, les groupes sont approchés par un journaliste un peu spécial. Gedisa Jacob, carnet à la main, questionne avec précision les artistes pour le compte de la commission culturelle nationale papoue. « Depuis des années, le gouvernement mène une grande collecte des arts et traditions papous. Nous allons dans les villages et interrogeons les habitants. » Il faut dire que les arts papous donnent l’impression d’être effectivement protégés, se présentant sur la scène du festival dans toute leur richesse « La Papouasie-Nouvelle-Guinée a et leur diversité. Pour Gedisa, l’explication une identité culturelle forte, multiple, est simple : « Plus de 80 % de la population qu’il faut absolument préserver. » de Papouasie vit dans les villages de jungle. précise Gedisa Jacob Ce que nous appelons "tradition”, elle l’appelle "quotidien” ». Le festival est l’occasion pour le journaliste d’élargir son champ d’action et de recueillir des informations sur les arts mélanésiens dans leur globalité. « Si nous organisons un autre festival, nous pourrons choisir et contacter tous ces artistes pour créer des ponts entre nos cultures. »
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© Léna Quillier
ET QUE LA FÊTE COMMENCE !
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Lieu e
Suite à un acte de vandalisme en août 2013, le chantier du centre culturel de Voh a pris du retard. Il a cependant ouvert le 23 avril dernier afin de ne pas pénaliser le village et les tribus alentour.
© Théo Rouby
xposition
Le centre au cœur de VOH
Sous l’impulsion de l’usine du Nord, Voh se retrouve en pleine mutation économique. Un centre culturel vient de pousser sur la commune afin de préserver son patrimoine et favoriser les échanges.
I
l attend encore sa case d'accueil et quelques finalisations pour l'inauguration officielle (la date n’a pas encore été arrêtée au moment où nous imprimons, NDLR), mais le centre culturel de Voh a bien ouvert ses portes le 23 avril dernier. Il regroupe une bibliothèque municipale, une cyberbase, une salle de spectacle et une case d'exposition dont l'architecture évoque celle du centre culturel Tjibaou. La structure du bâtiment a été pensée pour valoriser le bois, tout en laissant apparaître quelques ouvrages métalliques. Un symbole fort dans cette commune où le développement est impulsé par l'usine de nickel.
Sa mission sera d'abord de consolider les bases de la culture kanak, mais aussi de s'ouvrir aux autres communautés ENDEMIX n° 08 septembre - octobre - novembre 2014
Par Théo Rouby
Le chemin du centre « La mission du centre sera d'abord de consolider les bases de la culture kanak, mais aussi de s'ouvrir aux autres communautés », résume Honoré Dimene, directeur de la structure. À l'image du festival Due Kahok, qui a mis à l’honneur les pratiques culturelles du peuple premier en 2011, celles des pionniers de la région en 2012, et enfin des Asiatiques et des Polynésiens venus pour le nickel (2013). L’édition 2014, sous-titré “Arc-en-Ciel”* sera le premier événement hébérgé par le centre en octobre prochain. De quoi rappeler qu'il est bien au service des habitants
de la commune. « Voh a toujours été une terre d'accueil, ajoute Honoré Dimene. L'aire Hot Ma Whaap regroupe huit langues kanak différentes, car lorsqu'il y avait des guerres, les tribus chassées d'un autre endroit venaient se réfugier ici ».
Musique et langues Le nouveau centre se positionne donc comme un lieu d'échanges culturels. Il recevra évidemment des spectacles ou des expositions, mais réalisera surtout un travail de fond auprès de différents publics. Avec le conservatoire, il prévoit par exemple des ateliers à la découverte de nouveaux instruments, comme la flûte ou les accordéons, « afin d'éviter que les groupes locaux ne s'enferment dans leur pratique ». Honoré Dimene entend aussi développer la programmation de spectacles d'arts vivants en milieu scolaire, ou encore des ateliers de fabrication d'instruments traditionnels, afin de mêler musique et patrimoine. * L’édition “Arc-en-ciel” évoquera toutes les communautés du Caillou et comme chaque année, arts culinaires, danses, chants et démonstrations enchanteront les habitants de Voh et leurs visiteurs.
PATRIMOINE PROTÉGÉ
La sauvegarde des langues constitue l'une des principales missions du centre. Il sert d'ores et déjà d'appui au travail de l'association locale Fatije (“Nos langues”), et compte bien coordonner ses travaux avec différentes organisations (Académie des langues kanak, association des compteurs, ADCK...). Sans oublier le rôle de la médiathèque qui dispose désormais d'un fonds de près de 10 000 documents, axés en priorité sur le pays et la région Pacifique. Une attention toute particulière est portée aux ouvrages qui traitent d'une thématique environnementale, dans une logique de compenser l'impact négatif de l'usine sur l’écosystème de la région.
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Il était une fois e
Le SILO, un lieu de rencontre privilégié entre le public et les écrivains
LE SALON INTERNATIONAL DU LIVRE
oceanien
De la graine à l’arbre
Rendez-vous désormais incontournable des écrivains locaux et internationaux, le Salon international du livre océanien (Silo) est inscrit, depuis 2003, dans le paysage culturel calédonien dessiné par Déwé Gorodé. Une occasion hors pair pour rencontrer des noms proches ou lointains de la littérature : Chantal T. Spitz, J. M. Coetzee (prix Nobel), Jean-Paul Nishi… et, pour le Silo, d’écrire à chaque édition une nouvelle page.
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U
n constat est fait : le livre francophone du Pacifique demeure encore largement méconnu, trop largement ignoré. Le Silo est alors impulsé pour tisser des liens entre l’Océanie et le reste du monde. « Il y a une sorte de contradiction entre “international” et “Océanien”, mais ça montre que toutes ces îles du Pacifique font aussi partie de l’ensemble, plus large encore, qu’est le monde », explique Christophe Augias, directeur de la bibliothèque Bernheim et organisateur de l’événement depuis sa création. « Le nom fait aussi référence au silo à grain et apporte ainsi une dimension nourricière. » Une particularité qui s’est confirmée depuis des années, tant pour les auteurs que pour le public. Dans le paysage littéraire du Pacifique, le Silo est aujourd’hui considéré comme un moment riche en découvertes et en partage pour les auteurs et les professionnels du livre. Si le salon remporte un tel succès, c’est en partie grâce au choix de son emplacement, à Poindimié. Les invités y découvrent non seulement les paysages de la côte Est, mais vivent, avec les auteurs et éditeurs locaux, un moment privilégié d’échanges littéraires et de moments conviviaux. Par ailleurs, en s’installant dans la salle omnisports de Poindimié, le salon se veut résolument populaire. « C’est très
Par Léna Quillier
vivant et familial car les enfants jouent au ballon juste à côté. Poussés par la curiosité, il n’est pas rare de les voir s’aventurer parmi les nombreuses expositions de livres du salon », raconte Christophe Augias. La décentralisation est historiquement l’une des principales missions de la bibliothèque Bernheim. Le Silo réunit tous les deux ans performances, ateliers, expositions, conférences, spectacles et quantité de livres sur la côte Est.
Tressage Pour beaucoup d’auteurs locaux, le Silo est un rendez-vous très attendu. Les rencontres avec d’autres auteurs et professionnels du livre sont propices à l’émergence de nouveaux projets. De sa rencontre avec Philippe McLaren, écrivain aborigène, Anne Bihan a entrepris l’écriture de son polar Utopia. Gilles Colleu, des éditions Vent d’ailleurs basées dans le sud de la France, a publié La tarodière de Denis Pourawa ainsi que La petite tresseuse kanak de Yannick Prigent. Ce sont ici des exemples parmi beaucoup d’autres. Pour Christophe Augias, « le réseau fonctionne très bien. Les invités se souviennent de leur séjour et deviennent des ambassadeurs de l’événement, du pays et des auteurs calédoniens ». Le Silo est là pour encourager l’effervescence artistique. La diversité des auteurs invités offre une image décomplexée et accessible de la littérature, comme un message lancé à toutes les personnes qui aimeraient écrire mais n’osent pas se lancer. L’année dernière, le Silo a fêté ses dix ans et un bilan très satisfaisant. En 2014, l’aventure littéraire se poursuit, mais cette fois à Nouméa avec les mêmes aspirations qui font du Silo un événement incontournable, donnant à lire et à entendre les expressions de la scène littéraire calédonienne et océanienne.
Le Silo est là pour encourager l’effervescence artistique
L’édition de 2007, organisée exceptionnellement à Hienghène, a marqué l’histoire du Silo. Cette année là, le prix Nobel de littérature J.M Coetzee était invité. Lors de ces deux lectures, la moitié de l’auditoire s’est mise à pleurer, tant l’émotion était forte.
© Eric Dell’ Erba
xposition
ENDEMIX n째 08 septembre - octobre - novembre 2014
Du 16/09 au 15/10 Exposition
LE DROIT D’ÊTRE VUE
Le 04/10 Danse
BREAK ON 1
SEPTEMBRE
En partenariat avec l’association Valentin Haüy de Nouvelle-Calédonie (AVH-NC) Photographies de Fred Payet
Battle hip-hop créée par l'association Urban Evolution (Astro-Boy et UBC) Les 15 meilleurs B-Boys du territoire s'affrontent 1 contre 1.
Du 1er au 21/09
À la Médiathèque du Nord à Poindimié
Au Rex
Cirque et danse
FESTIVAL CULTUREL DU MONT-DORE
Au centre d'Art Au centre culturel du Mont-Dore
Du 04 au 25/09 Exposition
LES 100 PORTRAITS
Au centre d’Art
Les 5, 6, 7, 12, 13 et 14/09 Cirque
M2
Les 18, 19, 20, 21, 25, 26, 27 et 28/09 Théâtre
FACE DE CUILLÈRE
Par la compagnie Tandem Adaptation de l’œuvre originale de Lee Hall
Au centre d’Art
Les 26 et 27/09 Musique
LE FESTIVAL NOMAD
Le 8e festival aura lieu au Mouv’ avec toujours la même motivation de mélanger les styles pour brasser tous les publics. Au programme : Vevelan, Darling & Co, Dyna & Family et d’autres encore.
Au café musique le Mouv’ © Compagnie Ea Eo
p. 60
Agenda
OCTOBRE Du 02 au 04/10 Musique
Les 09, 10 et 11/10 Théâtre
LA DANSE DES ABEILLES
Une pièce d’Alain Mardel Par la Fokesasorte Compagnie
Au théâtre de l’Île
Du 9 au 12/10 Littérature
LE SALON INTERNATIONAL DU LIVRE OCÉANIEN DE NOUMÉA
À l'Esplanade du complexe La Promenade – Anse Vata
Le 10/10 Musique
YAARI WAAN JIGO
Au centre culturel du Mont-Dore
Du 10 au 26/10 Spectacle vivant
LE CHAPITÔ À HOUAÏLOU
Au centre d’Art
Festival des moins grands en partenariat avec Mere a gaara et l’AFMI. Ateliers et spectacles pour et par les enfants
Au théâtre de l’Île
Les 03 et 04/10
Le 11/10
Le 13/09
Au café musique le Mouv’
Par la compagnie Ea Eo Quatre jongleurs se partagent une scène dont la surface ne cesse de diminuer : 8 m2 qui vont fondre comme neige au soleil, jusqu’à ne laisser qu’1 m2.
Danse Intervention à la tribu de Baco avec des danseurs invités dans le cadre du Festival Waan Danse
À la tribu de Baco
Lancement 16/09
FESTIVAL DU CINÉMA ITALIEN
Au centre d’Art
FESTIVAL DES MAISONS DE MUSIQUE
Musique
EDOU ET MEXEM EN CONCERT
Du 3 au 05/10 Musique
FESTIVAL FEMMES FUNK - 18e ÉDITION
Au centre culturel Tjibaou
Cinéma
LE MARATHON DE L’IMAGE
Au centre culturel du Mont-Dore
Du 14 au 25/10 Exposition
FRANCIA BOI
À la galerie le Chevalet d’Art
à l’annexe du conservatoire de Koné
Du 17 au 26/10 à Poindimié
Du 21 au 24/10
p. 61
mois à la tribu de Tchamba. Sur place, emprunt et retour de documents (livres, CD, revues), inscription à la médiathèque, information/renseignements.
Le 18/11 Musique
JAM SESSION
Le 30/10
Au centre d’Art
Agenda
Du 13 au 25/10
Slam
au centre culturel Tjibaou
REMISE DES PRIX DU CONCOURS DE SLAM DE LA BIBLIOTHÈQUE BERNHEIM
Cinéma
ÂNÛÛ RÛ ÂBORO, FESTIVAL DU CINÉMA DES PEUPLES
Du 19 au 22/11
au centre culturel Tjibaou Le 19/11 à l’annexe du conservatoire de Koné Musique
Au Rex
Les 24 et 25/10 Théâtre
J’AIME BEAUCOUP CE QUE VOUS FAITES
Le 21/11 Musique
DJ REX CONTEST
Au Rex
NOVEMBRE À partir du 04/11
Exposition
LA COUTUME KANAK
Photographies de Sébastien Lebègue
© Théo Quillier
Au centre culturel Tjibaou
Au centre culturel du Mont-Dore
Le 27/10 au 10/11 Exposition
CONNEXIONS
Marie M pose son pinceau sur l’interaction entre l'homme et son environnement, et convie d'autres artistes – peintres, dessinateurs, photographes, sculpteurs… - à venir exposer avec elle.
À la galerie Lec Lec Tic
Le 29/10 Littérature
BIBLIOBUS
La Médiathèque du Nord se déplace vers la population par le biais de son bibliobus et se rend tous les derniers mercredis du
Du 08/11 au 10/11 LE WEEK-END GEEK
POC, créateur du jeu de rôle Naheulbeuk, sera l'invité de ce rendez-vous.
À la Maison des artisans
Concours de DJ’s ouvert aux amateurs et à tous les styles de musique
Au Rex
Les 21, 22 et 23/11 Musique
FESTIVAL AKAWAN WENEKUKA
À Xodre, Lifou
Du 26/11
Musique / Concert
FESTIVAL LES VOIX DU SUD
Les 13 et 14/11 Théâtre
Renseignements : www.province-sud.nc
Partout en province Sud
PREMIER ACTE
Premier Acte est l’aboutissement d’une année de rencontres et d’échanges entre artistes, enseignants et élèves. C’est aussi l’opportunité pour les jeunes qui font du théâtre en milieu scolaire de présenter le résultat de toute une année de création.
Au théâtre de l’Île
Les 13, 14, 15, 16, 20, 21, 22 et 23/11
Le 28/11
CÉLÉBRATION DES 10 ANS DE LA MÉDIATHÈQUE DU NORD
La Médiathèque du Nord a été inaugurée le jeudi 11 mars 2004, dix ans déjà ! Journée commémorative avec invités, témoignages, chorale, spectacles, expo photos retraçant la vie de la médiathèque en dix ans de parcours.
Théâtre
LES AMIS DU PLACARD
De la compagnie les Incompressibles Adaptation de l’œuvre originale de Gabor Rassov
Au centre d’Art
ENDEMIX n° 08 septembre - octobre - novembre 2014
FESTIVAL LA PREMIÈRE SÉANCE
© Le Rex Nouméa
Cinéma jeunesse
© DR
Du 17 au 25/10
© Le Rex Nouméa
GYPSY JAZZ FESTIVAL
p. 62
Annuaire CENTRES CULTURELS CONTACT
TÉL.
LIEU
SITE INTERNET
Centre culturel de Dumbéa
Alice Pierre
412307
Dumbéa
alice.pierre@mairie-dumbea.nc
www.mairie-dumbea.nc
FOL (Fédération des Œuvres Laïques)
Pascal Hebert
272140
Nouméa
folnc@canl.nc
Centre culturel provincial de Hienghène Goa ma Bwarhat
Édouard Wamai
428074
Hienghène
culturehienghene@mls.nc
Centre culturel provincial de Koné
Pélagie Nerhon
471106
Koné
asso.pbvt.cac@canl.nc
Centre socioculturel de La Foa
Jean-Pierre Lafay
443301
La Foa
jplafay@canl.nc
Centre culturel du Mont-Dore
Grégory Louzier
419090
Mont-Dore
gregory.louzier@ville-montdore.nc
www.mont-dore.nc
Dock socioculturel de Païta
Marc Richer
354404
Païta
marc.richer@ville-paita.nc
www.ville-paita.nc
Centre culturel Tjibaou
Guillaume Soulard
414535
Nouméa
g.soulard@adck.nc
www.adck.nc
Centre culturel Yeiweine Yeiweine
Noël Guanere
450137
Maré
www.alk.nc
www.pomemi.nc
LIEUX DE DIFFUSION ET DE FORMATON Académie des langues kanak
Weniko Ihage
286015
Nouméa
alk@alk.nc
Antenne du Conservatoire de musique et de danse de Koumac
Alfred Haïno
423304
Koumac
antenne-koumac@afmi.nc
Centre musical Mêre â gâârâ
Renaldo Nérhon
424221
Houaïlou
renaldo.nerhon@mereagaara.nc
Complexe culturel/Annexe du Conservatoire de Koné
Hervé Lecren
473033
Koné
h.lecren@afmi.nc
www.afmi.nc
Conservatoire Hnime ulane, antenne de Lifou
Marie Hnanganyan
454575
Lifou
antenne-we@afmi.nc
www.afmi.nc
Conservatoire de musique et de danse de la Nouvelle-Calédonie Francis Gaillot
246315/240206
Nouméa
contact@cmd.nc
www.conservatoiremusique.nc
Ecomusée du Café de Voh
José Kabar
473736
Voh
ecomusee.cafe@gmail.com
FB/ecomuseeducafe.voh
EMI - École du Multimédia et de l'Image
Pascale Gery
471275
Koné
coordination@emi.nc
www.emi.nc
Le Chapitô de Nouvelle-Calédonie
Anne-Sophie Conan
275636
Nouméa
lechapito@gmail.com
www.lechapito.unblog.fr
Le Rex
Manuel Touraille
282629
Nouméa
org.adamic@gmail.com
www.noumea.nc/espace-jeunes/culture/ le-rex-noumea
Café concert le Mouv'
Christophe Ventoume
411518
Nouméa
contact@lemouv.nc
www.lemouv.nc
Maison du Livre de la Nouvelle-Calédonie
Jean-Brice Peirano
286510
Nouméa
accueil@maisondulivre.nc
www.maisondulivre.nc
Musée territorial de Nouvelle-Calédonie
Solange Neaoutyine
272342
Nouméa
smp@gouv.nc
www.museenouvellecaledonie.nc
Théâtre de l'Île
Marie-Ève Delatte
255056
Nouméa
dcl.tdi@mls.nc
www.theatredelile.nc
Théâtre de Poche (Centre d'art de la Ville de Nouméa)
Lydie Gardet
250750
Nouméa
lydie.gardet@ville-noumea.nc
www.noumea.nc/le-centre-dart
Association de Formation de Musiciens Intervenants (AFMI)
Alain Guarese
462000
direction@afmi.nc
www.afmi.nc
Art'Café
Olivier Petit
278003
Nouméa
artcafe@mls.nc
La Barca
Thierry Frottier
281540
Nouméa
labarcanoumea@yahoo.fr
La Bodega Del Mar
Jean-Luc Deroin
261153
Nouméa
www.bodega.nc
286600
Nouméa
FB/leboheme
BARS
Le Bohème
www.restocity.nc
Le Bout du Monde
Eric Napierai
277728
Nouméa
La Fiesta
Eddy
262133
Nouméa
lafiesta.nc@lagoon.nc
Le Flex Club
Elisa Pulpito
Nouméa
flex.nc@gmail.com
FB/flex.nc
FB/mvlounge
L'Imprévu
241145
Nouméa
Le Malecon Café
Antony
282805
Nouméa
Le MV Lounge
Elodie et Romain
78 97 67 / 78 57 35
Nouméa
mvlounge@canl.nc
Le Château Royal
230140
Nouméa
restauration.atr@ncdl.nc
Le Sweet Café
Roxanne Hugeaud
442930
Bourail
chezroxanne@gmail.com
Le Toucouleur
Zakia
765845
Koné
Les 3 Brasseurs
Patrick Hogan
241516
Nouméa
3brasseurs@canl.nc
Le Groove
Michel Trabelsi
26 28 80
Nouméa
legroove.nc@gmail.com
Andemic Art Gallery
Éric Morarin
286990
Nouméa
andemicartgallery@gmail.com
Arte Bello
Patrick Vaudelle
253100
Nouméa
artebello@mls.nc
Artifact/DZ Galerie
Didier Zanette
241385
Nouméa
tribalpassion@gmail.com
www.art-tribal-online.com
Bibliothèque Bernheim
Christophe Augias
242090
Nouméa
c.augias@bernheim.nc
www.bernheim.nc
Galerie 11 & 1/2
Franck Chan San
289115
Nouméa
onze.5@hotmail.com
www.onzeetdemi.com
Le Chevalet d'Art
Eric Valet
249242
Nouméa
chevalet@lagoon.nc
www.lechevaletdart.nc
Lec Lec Tic
Hélène Janet
825601
Nouméa
leclectic@lagoon.nc
Médiathèque du Nord
Nicole Grochain / Marguerite Waly
426700
Poindimié
info@mednord.nc / n.grochain@bernheim.nc / m.waly@mdnord.nc
www.mednord.nc
Tieti Tera Beach resort
Stéphane Brun
436400
Poindimié
info.tieti@tera.nc
www.tera.nc
Médiathèque / complexe culturel de Koné
Morgane Goromoedo
472065
Koné
n-m.goromoedo@bernheim.nc
www.bernheim.nc
FB/LeGroove
ENDEMIX n° 08 septembre - octobre - novembre 2014
LIEUX D’EXPOSITION
Le mois du patrimoine en province Sud
L’H MME ENVIRONNEMENT Du 27 sept. au 26 oct. 2014
Retrouvez le programme complet sur
Dötèpe rè nî, è xwi gû xwâsèn rè nî.
è r e p è t ö D i w x è , î n rè û g n è s â xw nî ENDEMIX n° 08 septembre - octobre - novembre 2014
ET SON
e 2 1 édition