Les publications numériques des musées

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Élise Gruselle Master 2 Lettres modernes appliquées à l’édition Numéro d’étudiant : 10906191 Paris IV- Sorbonne

Les publications numériques des musées

Sous la direction de Jean-Michel Ollé Volume 1 : volume de texte.

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Remerciements

Je tenais à remercier, Anne-Laure Brisac, ma tutrice de stage, pour ses conseils et ses encouragements tout au long de la rédaction de ce mémoire. Je remercie également Jean-Michel Ollé qui a accepté de diriger mon travail. Je remercie vivement toutes les personnes que j’ai rencontrées lors de mes recherches : Mériam Bensassi, webmaster au musée national de la Marine Pauline Bougon, responsable du site « Éducation » d’Universciences Jean-Pierre Dalbéra, chargé de mission à la direction des musées de France, ancien directeur de la Mission recherche et technologie (MRT) Diane Drubay, consultante pour Buzzeum Laurence Imbernon, conservateur du musée des Beaux-Arts de Rennes et le personnel du musée Samuel Bausson, webmaster du site du muséum d’Histoire naturelle de Toulouse Alain Romang, webmaster du site des Abattoirs, musée d’art contemporain de Toulouse. Enfin, je remercie mes proches de m’avoir soutenue pendant cette période de recherche.

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Sommaire

Introduction ___________________________________________________ 4

Partie I. Formes et contenus des publications en ligne des musées_______ 12
 a)
 Diversité des publications__________________________________ 12
 b)
 Du papier au numérique __________________________________ 20
 c)
 L’exposition et le Web_____________________________________ 28

Partie II. Éditeurs et publics, des acteurs multiples ___________________ 38 a)
 Les différentes facettes du métier d’éditeur numérique dans les musées _____________________________________________________ 38
 b)
 Les publics visés et leurs usages_____________________________ 50

Partie III. L’édition collaborative des musées : formes et conséquences __ 62
 a)
 Formes éditoriales participatives : dévoilement du musée et espace d’expression des internautes___________________________________ 63
 b)
 Wikipédia et les musées ___________________________________ 69
 c)
 Politiques et responsabilités éditoriales numériques ____________ 78

Conclusion ___________________________________________________ 85
 Bibliographie _________________________________________________ 88
 Les publications numériques des musées. Volume d'annexes ___________ 95

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Introduction

Le 4 janvier 2002, la loi n° 2002-5 relative aux musées de France introduit le label « Musées de France » attribué aux institutions remplissant « des missions communes, telles que les missions de conservation, d’enrichissement et de recherche scientifique des œuvres, de diffusion et de démocratisation de la culture. Ils ont également l’obligation de rendre accessibles les collections1». Ce label redéfinit les missions du musée, dont celle de médiation, comme le prouve la présence des termes « diffusion », « démocratisation » et « accessibles ». Les moyens mises en place pour remplir ces exigences sont la médiation humaine, par la présence de personnes dans le musée guidant le public, et éditoriale, par la publication d’ouvrages diffusant les collections. Ce dernier type de transmission est déterminant pour l’accès du public au patrimoine. Actuellement, les publications éditées par les institutions, telles que les expositions virtuelles, les ressources en ligne, dossiers pédagogiques, mini-sites, etc. prouvent la prise de conscience par les musées de l’importance du Web et la reconnaissance de ce support comme vecteur de la diffusion du patrimoine. Ces contenus éditorialisés, qui sont la matérialisation de ce travail de transmission du savoir sur le Web, seront l’objet de cette étude. Même si les mots, se référant au numérique, ne sont jamais cités dans le texte de loi, la présence des musées sur l’Internet est un moyen indispensable de diffuser et de rendre accessibles les collections. Toutefois, l’intégration du numérique dans les musées n’est pas récente et elle a débuté bien avant la création de l’Internet2. Dès 1986, à son ouverture, le musée d’Orsay était doté de bornes interactives. Dix ans plus tard, il publiait un cédérom présentant une visite virtuelle de l’ancienne gare. En 1996, Jean-Marc Dreyfus, historien, écrivait un article sur ces types de publication et commentait ainsi l’activité

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Texte de la loi n°2002-5 du 4 janvier 2002 relative aux musées de France, [en ligne] http://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000000769536 consulté le 16 juillet 2010. Pour connaître les décrets et les lois qui suivirent celle relative aux musées de France, consultez le site de la direction des musées de France, [en ligne] www.dmf.culture.gouv.fr consulté le 16 juillet 2010 2 Martine Tayeb propose une chronologie de toutes les entreprises liées au numérique dans le secteur culturel. Celle-ci débute en 1975 par la création de la base Joconde et de la base Léonore. Martine Tayeb, « Des bases de données aux portails culturels », Culture et recherche, N° 122-123, p. 56.

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des musées en matière de multimédia : « Toutes les grandes expositions proposent un ou plusieurs catalogues sur cédérom […] Les principaux musées français éditent, ou préparent la sortie de leur collection sur un support multimédia. La Réunion des musées nationaux [RMN] est active dans ce domaine3 […] » Comme le décrit ce texte, le cédérom a rencontré un grand succès au cours des années 1990 : Le Louvre, peintures et palais s’est vendu à 100 000 exemplaires et Orsay, visite virtuelle est également cité par Jean-Claude Dreyfus comme une réussite. Ces deux publications furent créées par les éditions Montparnasse, qui ont longtemps été pionnières dans ce domaine. Auparavant, en 1994, la publication Charlotte dans la ville, proposée par la RMN pour le centre Georges Pompidou, et conçue par l’agence Hyptique4, spécialisée en design multimédia, avait également marqué les premières expérimentations sur cédérom (fig. 1). D’après Corinne Welger-Barboza, après ces premiers succès, le multimédia s’est imposé dans les politiques éditoriales des musées : « Une fois l’impulsion donnée aux premières tentatives et au vu de la réussite relative du titre phare sur le Louvre, le développement de cédéroms s’est imposé comme partie intégrante du cahier des charges des grandes institutions, engagées dans la diffusion auprès des plus larges publics.5 » Ces publications étaient prises en charge par le département d’édition traditionnelle. Il y avait donc une proximité entre l’activité de conception des ouvrages sur support papier et ces nouveaux contenus numériques éditorialisés. Toutefois, avec la création des sites Internet des musées, des cellules multimédia, indépendantes des départements des publications ont été créées. Actuellement, le lien entre les deux supports peut être formellement visible, mais les deux pôles du musée sont assez peu en relation. Dans le milieu des années 1990, l’Internet se développe. Les musées décident d’intégrer ce nouvel espace permettant une nouvelle forme de visibilité, touchant également un autre public. Les sites de musée apparaissent en 1995 ; un des premiers créé est celui du Muséum d’histoire naturelle de Londres en 1994, suivi en 1995 par celui du Louvre. Cette dernière institution fut devancée dans sa création par un site non-officiel, le Web Louvre, créé par Nicolas Pioch, un amateur6. Depuis, l’État incite 3

Jean-Marc Dreyfus, « À propos des cédéroms historiques », Vingtième Siècle. Revue d'histoire, n°52, octobre-décembre 1996, p. 140-141. 4 Le projet est présenté sur le site de cette agence comme leur première publication, [en ligne] http://www.hyptique.fr/#/projets/charlotte/ consulté le 21/07/2010. 5 Corinne Welger-Barboza, Le Patrimoine à l'ère du document numérique, Paris : L’Harmattan, p. 67. 6 Nous verrons dans la troisième partie que cette information est révélatrice d’une caractéristique constante : la concurrence que peut représenter les pratiques amateurs pour les musées.

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les institutions à être présentes sur ce support. Il a, dès 1997, introduit dans sa politique les nouvelles technologies par le Programme d'action gouvernemental pour la société de l'information (PAGSI). Celui-ci a mis en œuvre les orientations tracées par le Premier ministre le 25 août 1997 lors de l’Université de la communication d’Hourtin. Ce plan avait plusieurs objectifs : l’accessibilité aux nouvelles technologies de communication, l’équipement des établissements, dont les musées, la création de contenus français et francophones de qualité et la mise en ligne des services publics. Lors du développement des sites, les observateurs de ce phénomène, chercheurs en information, communication et en muséologie, ont introduit la notion de « musée virtuel » qui se réfère maintenant à un musée qui n’a pas d’équivalent physique. Cette notion ayant auparavant désigné l’ensemble des sites des musées, notamment dans l’ouvrage de Bernard Deloche7, a été redéfinie en 2004 par James Andrews et Werner Schweibenz. Selon ces derniers, il s’agit d’« une collection d’objets numérisés articulée logiquement et composée de divers supports qui, par sa connectivité et son caractère

multi-accès,

permet

de

transcender

les

modes

traditionnels

de

communication et d’interaction avec le visiteur, il ne dispose pas de lieu ni d’espace réel, ses objets, ainsi que les informations connexes, pouvant être diffusées aux quatre coins du monde »8. Tout en définissant plusieurs types de sites de musées, ils placent cette notion de musée virtuel en continuité avec celle de « musée pédagogique ». Au fil du développement des sites de musées, la définition de ce concept s’est complexifiée, notamment à cause des multiples sens qui s’en dégagent. Selon Nathalie Noël-Cadet dans son article sur les expositions virtuelles, l’ICOM, le Conseil international des musées, propose trois types de musées virtuels : « Le musée simulé réunit des œuvres de différentes sources […] ; le musée virtuel qui existe uniquement sur un support en ligne […] ; le musée interactif qui désigne l’immersion au sein du musée de technologies comme les bornes interactives intégrées dans le parcours de l’exposition »9. L’explication de cette notion est très révélatrice de la difficulté à trouver des termes génériques pour désigner les objets publiés sur l’Internet par les 7

Bernard Deloche publiait un ouvrage sur le musée virtuel, offrant lui aussi une nouvelle définition de cette expression, Le Musée virtuel, Paris : PUF, coll. « Questions actuelles », 2001. 8 James Andrews et Werner Schweibenz, « L’évolution du musée virtuel », Les Nouvelles de l’ICOM, 2004. 9 Nathalie Noël-Cadet, « Les expositions virtuelles comme outil de médiation », Culture et Recherche n°102, juillet-août septembre 2004, [en ligne] http: // www.culture.gouv.fr/culture/edition/r-cr.htm consulté le 21/07/2010, p. 14.

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musées, ce qui est, en partie, causé par l’évolution des technologies. Compte tenu du manque de clarté qu’offre la notion de « musée virtuel », nous ne l’utiliserons que dans son acceptation actuelle, c’est-à-dire, celle d’un site d’une institution qui n’existe que sur l’Internet10. Alors que les chercheurs essayaient de saisir les caractéristiques de cette présence virtuelle des musées, ceux-ci développaient et enrichissaient leur site Internet. Plus ce support s’est développé et répandu dans les usages, plus les sites de musée ont évolué. Ils permettaient d’abord de donner des informations pratiques aux visiteurs (plan d’accès, horaires, etc.). Leurs contenus se sont de plus en plus étoffés en proposant les actualités du musée et en offrant des services en ligne (achat des billets ou réservation). Cette évolution a été marquée par la mise en ligne des collections, de visites ou d’expositions virtuelles et de contenus enrichis. Néanmoins, même si les contenus en ligne ont augmenté, nous sommes conscients qu’il existe une réelle disparité de moyens entre les musées. D’après une étude menée par l’OCIM (Office de coopération et d’information muséographiques) intitulée « Les Institutions muséales et leur site Internet » et datant de novembre 2007, un musée sur deux seulement possède son propre site ; les causes les plus importantes de cette absence sont l’insuffisance des ressources financières pour 40% et le manque de personnel disponible pour 34%. Toutefois, 82% bénéficient d’une visibilité sur un autre site. Ce travail apportera un élément de compréhension d’un paysage multimédia des musées auquel n’appartiennent pas de nombreuses institutions. Cette étude tâchera de comprendre les caractéristiques des publications en ligne et les acteurs qui les produisent. Nous n’avons pas pris en compte la diffusion de l’actualité du musée qui relève davantage de la communication que de l’édition. Pour déterminer ce que l’on appelle aussi « contenus enrichis » et « ressources », nous avons choisi d’employer le terme de publication, au sens le plus stricte, c’est-à-dire ce qui est rendu public et accessible, en l’occurrence via Internet, sans obligatoirement avoir été intégralement éditorialisé. Dans le cas de notre corpus, certains auteurs sont, en partie, éditeurs de leurs contenus. Parfois, l’interface graphique est mise en place par l’éditeur Web mais la sélection et la vérification des informations sont comprises dans le travail de l’auteur. Il n’y pas une séparation nette des rôles de chaque acteur. 10

Cet aspect sera traité dans la deuxième sous-partie du premier chapitre consacrée à l’exposition virtuelle.

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Cette désintermédiation nous oblige à choisir un terme s’opposant à un terme comme « édition » qui induit la présence d’un tiers pour « choisir, reproduire et mettre en valeur » une production11. Ces productions éditoriales instables, difficilement déterminables, sont à la fois influencées par le modèle traditionnel de l’édition et par celui du Web. De plus, elles sont à la fois prises en charge par les départements multimédia des institutions et parfois, par les services de documentation ou de communication. Le groupe de producteurs et d’éditeurs de ces publications n’est pas homogène, comme peut l’être la profession d’éditeur dans l’industrie du livre papier. D’autres auteurs, comme Marin Dacos et Pierre Mounier, ont choisi pour déterminer les productions numériques, le terme d’édition. Même si nous l’avons rejeté, les deux auteurs donnent une typologie des contenus numériques très pertinente, dans le contexte de notre étude, de ce qu’ils appellent l’« édition électronique ». Selon eux, ce secteur se compose de la numérisation, c’est-à-dire l’exploitation numérique d’un support analogique. La prise en compte de cette dernière activité dans le secteur de l’édition peut être contestée. La mise en ligne des objets numérisés peut davantage être considérée comme une activité éditoriale. Les deux auteurs définissent ensuite l’édition numérique de la manière suivante : « Il s’agit de pratiques d’édition qui ne passent pas immédiatement par un support analogique – imprimé – mais exploitent nativement les possibilités qu’offre le texte numérique. » Enfin, ils révèlent la présence d’une édition en réseau qui « s’appuie […] sur les réseaux électroniques pour développer de nouveaux modes de production des textes.12 » Les publications des musées sont caractérisées par ces trois types d’édition. Elles ont permis l’évolution du site de musée, du simple support de communication à celui permettant une diffusion du savoir. Les éditions numérique et en réseau seront les objets principaux de cette étude. La première reprend les opérations de l’édition papier (le choix des contenus, leurs corrections, leurs validation, etc.), mais la création des contenus est soumise au support numérique, qui impose de nouvelles contraintes de lecture et de navigation. La seconde implique un nouveau type de travail ; l’intermédiation de l’éditeur est 11

Définition du mot « éditer », « 1. Choisir, reproduire et mettre en vente l'œuvre d'un écrivain, d'un artiste (musicien, peintre, photographe, chanteur, etc.) : Une maison qui édite des romans. 2. Faire la critique verbale d'un texte (vérification et préparation) en vue de sa publication, en l'accompagnant éventuellement de notes et de commentaires.», Le Larousse, [en ligne] http://www.larousse.fr/dictionnaires/francais/%C3%A9diter consulté le 12/08/2010. 12 Marin Dacos et Pierre Mounier, L’Édition électronique, Paris : La Découverte, coll. « Repères », 2009, p. 5.

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différente de celle exercée traditionnellement. Les institutions sont de plus en plus présentes sur les réseaux sociaux ce qui implique de nouveaux modes de production du texte et une nouvelle place de l’éditeur Web13. Nous souhaitons étudier les publications composées de divers objets (textes, images, etc.) et ne s’appuyant pas uniquement sur des objets numérisés. Parfois, la visite virtuelle pourra être analysée car elle peut devenir une des composantes de l’exposition virtuelle. D’ailleurs, ce type de publication a parfois été pris en compte car elle n’est pas uniquement fondée sur la mise en valeur de fonds numérisés, mais elle peut être aussi la production éditorialisée d’un agencement de textes et d’images au sein d’une structure organisée. Pour sélectionner ces publications, nous avons pris en compte des typologies déjà produites à propos des contenus en ligne des musées. Laure Bourgeaux, dans son mémoire « Musée et bibliothèque : le patrimoine au défi du numérique »14, propose une typologie, qu’elle rapproche de celle produite par celle de Geneviève Vidal15 d’une part et de Gaëlle Bru, Thomas Jouneau, Anne Stenta et Isabelle Suchet-Mercier d’autre part16. Elle repère le type « réservoir », faisant référence à l’offre numérisée en ligne, le type « double éditorial » composé de contenus conçus selon une « logique de sélection et de valorisation ciblée »17, le type « réalité virtuelle » qui met en œuvre « une logique de simulation », et enfin un type « nouveau média » qui exploiterait toutes les potentialités du multimédia. Dans notre étude, il s’agira de nous concentrer sur les doubles éditoriaux mais également sur certains contenus « nouveaux média », catégorie difficile à cerner, mais qui allie conception éditoriale de données à un travail sur les possibilités d’interactivités18. La question du financement et du modèle économique ne sera pas traitée car cet aspect ne relève pas de l’axe de recherche choisi, à savoir l’observation des mutations des formes éditoriales. De plus, à la différence de l’édition traditionnelle, ces 13

« Éditeur Web » est un des termes utilisés pour désigner le responsable des publications. Nous emploierons également le terme de webmaster. 14 Laure Bourgeaux, « Musée et bibliothèque : le patrimoine au défi du numérique », mémoire de master 2, sous la direction de Corinne Welger-Barboza et Dominique Poulot, université Paris ISorbonne, 2010. 15 Geneviève Vidal, Contribution à l’étude de l’interactivité : les usages du multimédia de musée, Bordeaux : Presses universitaires de Bordeaux, p.20. 16 Gaëlle Bru et al., Essai de typologie des sites Web de bibliothèques, mémoire de fin d’études de l’École nationale supérieure des sciences de l’information et des bibliothèques, 2001. 17 Laure Bourgeaux, op.cit., p. 75. 18 Nous pourrons aborder cela notamment avec l’exemple de l’ « Interactive Tour », Interactive tour, à l’occasion de l’exposition « Francis Bacon », 11 septembre 2008 au 4 janvier 2009, [en ligne] http://www.tate.org.uk/britain/exhibitions/francisbacon/interactive/ consulté le 22/07/2010.

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ressources mises à disposition, majoritairement en libre accès sur les sites, sont vues comme un service public remplissant la mission de démocratisation et d’accessibilité à la culture. L’objectif de cette recherche est donc de comprendre un certain paysage éditorial des musées en ligne, en prenant en compte uniquement l’édition numérique et celle en réseau. Il s’agira également de comprendre la typologie des publications, permettant de clarifier la structure de sites de musées. Qu’apportent ces nouvelles formes de publications dans l’accessibilité et la diffusion du savoir des œuvres ? Quels sont les atouts du support de l’Internet à cette médiation éditoriale des musées ? Comment ces deux formes d’activités éditoriales cohabitent-elles ? Le Web participatif est une pratique qui a changé les rôles de l’éditeur Web dans les musées. En quoi les politiques éditoriales des musées partagées entre édition numérique et édition en réseau modifient-elles les statuts des éditeurs et l’image des institutions ? Pour répondre à cette problématique, nous avons décidé de constituer deux corpus. Le premier sera utilisé pour une étude lexicale des termes utilisés par les musées pour définir leurs publications en ligne. Cette recherche s’appuiera sur l’analyse de trente et un sites Internet de musées. Nous avons essayé d’offrir le panel le plus diversifié, au niveau des tutelles et des domaines de connaissance exploités. Elle permettra d’observer les orientations et les champs lexicaux auxquels appartiennent ces termes. Le deuxième corpus s’appuiera sur un nombre plus réduit de sites de musées. Ceux-ci furent choisis parmi les exemples donnés par des spécialistes du domaine du multimédia culturel20. Nous avons échangé sur le sujet de cette recherche avec Jean-Pierre Dalbéra, chargé de mission à la direction des musées de France, ancien directeur de la Mission recherche et technologie (MRT), Mériam Bensassi, webmaster au Musée national de la marine, Pauline Bougon, responsable du site « Éducation » de la Cité des sciences et de l’industrie, le personnel du musée des Beaux-Arts de Rennes, Samuel Bausson, webmaster du site du muséum d’Histoire naturelle de Toulouse et Alain Romang, webmaster du site des Abattoirs, musée d’art contemporain de Toulouse. Diane Drubay, consultante en communication pour Buzzeum a également répondu à un questionnaire sur les questions d’édition

20

En bibliographie, les sites et blogs de spécialistes du patrimoine culturel en ligne sont cités.

10


numérique. La base Muséofile22, permettant un accès à une fiche complète de chaque musée en France, nous a été très utile pour nourrir notre premier corpus. La majorité des sites étudiés sont français. Des exemples américains et européens seront également intégrés, afin de présenter les innovations en la matière dans ces pays. Nous décrirons dans un premier temps les principales caractéristiques des publications numériques des musées puis nous complèterons cette première approche par l’analyse des acteurs, à savoir les différents types d’éditeurs, publics visés et leurs usages. À chaque étape, de nouveaux exemples de publications innovantes seront donnés pour compléter la typologie établie au début de cette étude. Enfin, la dernière partie sera consacrée plus spécifiquement aux formes de l’édition collaborative dans les musées et aux rapports entre ceux-ci et les pratiques amateurs, notamment à travers les politiques éditoriales numériques des institutions.

22

Muséofile, répertoire des musées de France, [en ligne] http://www.culture.gouv.fr/documentation/museo/ consulté le 22/07/2010.

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Partie I. Formes et contenus des publications en ligne des musées

Pour comprendre les publications numériques dans le contexte des sites de musées, nous avons choisi de travailler sur un premier corpus de sites, afin de cerner les types de contenus. Tous les termes désignant les publications numériques de trente et un musées ont été recensés et classés selon leur champ lexical. L’étude de ce large corpus permet ainsi d’observer les composantes formelles et les contenus de l’édition électronique des institutions patrimoniales. Nous avons constaté, d’une part, que les appellations de publications se réfèrent à des types d’ouvrages imprimés. D’autre part, l’univers du musée influence naturellement certains types de publications, comme l’exposition virtuelle. Le site, n’étant plus une simple vitrine publicitaire ou le porteur d’informations pratiques, il est également devenu le lieu de diffusion d’un savoir, par le biais de ce que l’on appellera « publication » ou « contenu ».

a) Diversité des publications En observant les dénominations et les caractéristiques des publications, une grande diversité de formes a émergé. La richesse des sites est observée depuis plusieurs années par les observateurs du musée en ligne. Selon l’enquête de l’OCIM, il semblerait que l’offre des musées soit de plus en plus importante, en témoigne ce constat : « Près d’un site sur deux donne accès à des ressources pédagogiques documentaires et une structure sur quatre projette de le faire »23. Jean-Pierre Dalbéra, dans un article de la revue Muséologies, souligne le développement de la production éditoriale en ligne : « Leur présence accroît fortement la richesse de l’offre culturelle sur Internet »24. À ce nombre important de contenus s’ajoute leur diversité. Celle-ci rend difficile la définition précise de ces formes. D’ailleurs, un grand nombre d’observateurs des 23

OCIM, op. cit., p. 7. Jean-Pierre Dalbéra, « Institutions culturelles patrimoniales et nouvelles pratiques numériques », Muséologies, vol. 3, n° 2, printemps 2009, p. 43. 24

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innovations multimédia utilisent des termes vagues comme celui de « contenus enrichis » pour parler des productions des musées25. Lors des rencontres nationales du CLIC qui se déroulaient en février 201026, pour présenter la tendance de l’enrichissement des contenus, Pierre-Yves Lochon illustra cette idée, par des exemples de plateformes de vidéos au sein des musées comme MoMAvideo (fig. 2)27, TateChannel (fig. 3)28. Il présenta également The Forbidden City (fig. 4)29, site présentant la modélisation de la Cité interdite de Pékin, et la collaboration entre le musée du Prado et Google Earth30 (fig. 5). Ainsi, le terme « contenus enrichis » comprend des éléments formels très différents (plateforme, site, partie d’un site, etc.). La nature des formes que recouvre cette expression est aussi très diversifiée (vidéos, 3D, textuels, etc.). Il est donc difficile de circonscrire précisément ce à quoi se réfère ce mot. D’une certaine manière, chaque publication est un contenu enrichi. Les conclusions de l’analyse lexicale permettront de définir la structure de cette première grande partie qui vise à préciser les particularités de ces ressources. Une grande partie des publications ont été évoquée lors des rencontres avec le personnel des musées. De plus, l’OCIM dans son enquête présente les différents types de publications. L’organisation recense dans les ressources en lignes : « les dossiers pédagogiques », « les ressources documentaires », la « visite des collections virtuelles », les « ressources accessibles aux personnes handicapées », « les conférences audio », les « conférences vidéo » et les « podcast ». Ces trois derniers types de contenus n’ont pas été pris en compte car nous resterons attachées à l’observation des publications proposant principalement du texte et des images. Ces premiers termes présentés par l’OCIM permettent de voir les différents types de formes présentes sur les sites. Consciente de la disparité entre les différents musées, nous avons essayé de diversifier le corpus en prenant en compte des contenus innovants et plus traditionnels, de façon à ne favoriser aucun type d’institution. Il est 25

Les auteurs du rapport PAGSI de 2001 employaient également des termes similaires pour définir les contenus éditorialisés en ligne, comme l’expression « réalisation de produits à valeur ajoutée », La Culture, l’Internet et le multimédia. La politique culturelle numérique, Plan PAGSI, 2001, p.8, [en ligne] http://www.culture.gouv.fr/culture/actualites/politique/pagsi/bilan-pagsi.pdf consulté le 04/09/2010. 26 Diane Drubay, « Retour des rencontres nationales du CLIC », Buzzeum, février 2010, [en ligne] http://www.buzzeum.com/2010/02/retour-des-rencontres-nationales-du-clic/ consulté le 20/06/2010. 27 MoMA Vidéos, [en ligne] http://www.youtube.com/user/MoMAvideos consulté le 20/06/2010. 28 Tate Channel, [en ligne] http://channel.tate.org.uk/ consulté le 20/06/2010. 29 The Forbidden City [en ligne] http://www.beyondspaceandtime.org/FCBSTWeb/Web/index.html consulté le 20/06/2010. 30 Collaboration entre le musée du Prado et Google Earth, [en ligne] http://www.google.fr/intl/fr/landing/prado/ consulté le 20/06/2010.

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possible qu’il y ait des publications qui ne soient pas inscrites dans notre relevé car, soit elles n’étaient pas inscrites dans la section « Plan du site », soit elles n’étaient pas visibles au sein de certaines architectures complexes. C’est avec attention que nous avons relevé au sein des sites Internet de chacune de ces institutions quatre-vingt trois types de publications. Ce nombre important est révélateur de la diversité des termes employés. Certains noms sont composés de plusieurs termes, dont certains sont récurrents, tels que « dossier » ou « ressources ». Ils sont souvent accompagnés d’adjectifs qualitatifs qui les différencient et affinent leur signification. Ainsi le mot « ressources » est utilisé par vingt-et-un musées mais il n’est employé seul que par trois institutions. Pour les dix-huit autres occurrences, le mot

est

accompagné

d’adjectifs

qualificatifs,

tels

que

« documentaire »,

« thématique », « éducatives, « historiques », etc. Plusieurs termes, utilisés par plusieurs musées, sont génériques, mais leur signification est affinée par la présence d’adjectifs. Dans notre corpus, plusieurs termes apparaissent tels que « Editions en ligne », « Dossiers documentaires », « Catalogue raisonné », « Bibliographies », « Fiches documentaires », « Guides et brochures », « Revue de presse », « Ressources », « Ressources

documentaires »,

« Sites

d'expo »,

« Expositions

en

ligne »,

« Expositions virtuelles », « Galerie des œuvres », « Œuvres à la loupe », « Visites virtuelles », « Une saison une œuvre », etc. L’usage de certains mots pour désigner les contenus renvoie à des médiations déjà existantes. Dans le cas présent, l’univers du musée, du livre et de l’informatique sont des modèles de référence. Cette observation avait déjà été faite sur un plus petit corpus d’expositions virtuelles par Nathalie Casemajor-Laustau dans sa thèse « Diffuser les collections photographiques sur le Web : de nouvelles pratiques de médiation », notamment dans un tableau exposant les « Univers de référence de quelques dispositifs de médiation des fonds photographiques en ligne. »31 De même, Laure Bourgeaux dans son mémoire de master avait déjà remarqué l’influence du modèle éditorial traditionnel sur les publications numériques32. La première des familles lexicales à apparaître dans notre étude est celle de l’imprimé et du livre. En effet, 67% des termes employés pour désigner une 31

Nathalie Casemajor-Laustau, « Diffuser les collections photographiques sur le Web : de nouvelles pratiques de médiation », Thèse de doctorat en sciences de l’information et de la communication, Université Charles-De-Gaulle Lille-3, 2009, p. 237. 32 Laure Bourgeaux, op. cit. p. 73.

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publication appartiennent à ce champ lexical. Sur les quatre-vingt-trois termes, cinquante-six se réfèrent à des objets imprimés. Dans ce champ, il existe des noms liés à des types de publications papier tels que « bibliographies », « journal », « revue », « fiche », « dossier » ou « catalogue raisonné ». L’importance de ce domaine est également perceptible par la mise à disposition de documents en format PDF. « Collections multimédia »

1

« Catalogue raisonné » « Dossiers de l'enseignant » « Dossiers doc » « Dossiers théma » « e-catalogues » « Édition en ligne / colloques et conférences » « Editions en ligne » « Fiches de visite » « Fiches de visite » « Fiches documentaires » « Fiches documentaires » « Fiches parcours » « Fiches parcours »

1

« Frise chronologiques » « Guides d'activités »

1 1

« Guides et brochures » « Journal » « Le petit monde des revues » « Revue de presse » « Documents pédagogiques » « Brochures » « Dossiers thématiques » « Dossiers » « Fiches objet » « Fiches objet » « Fiches pratiques »

1 1

1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1

1 1 2 2 2 2 2 2 2

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« Magazine »

2

« Fiches pédagogiques » « Dossiers de presse » « Dossiers documentaires »

3 4

« Bibliographies » « Dossiers pédagogiques » Total

5

4

8 56/83

Tableau 1. Relevé des termes. Champ lexical de l'imprimé

41% des termes employés appartiennent au champ lexical de l'informatique ou à celui de la documentation. Le mot que l’on retrouve fréquemment dans ce relevé est « ressources ». Certes, il est polysémique, mais dans le contexte de son usage – un site Internet – il désigne l’ « ensemble des moyens et richesses disponibles »33. « Multimédia » ou « Site », apparaissant plusieurs fois, complètent ce champ lexical. Celui-ci révèle la valorisation du support numérique par les musées.

« Multimédia » « Ressources éducatives » « Ressources historiques » « Ressources numériques » « Ressources scientifiques et documentaires » « Ressources thématiques » « Webographie » « Prolonger l'expo permanente » « Sites d'expo » « Mini-sites d'expo » « Ressources » « Ressources en

1 1 1 1 1 1 1 1 2 3 3 4

33

Définition du mot « ressource » : « INFORMAT. Ensemble des moyens et richesses disponibles. Ensemble des moyens dont dispose un ordinateur pour exécuter un programme ou plusieurs programmes simultanément`` (GING.-LAURET 1982).», Trésor de la langue française en ligne [en ligne] http://atilf.atilf.fr/ consulté le 22/07/2010

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ligne » « Ressources pédagogiques » « Site Internet d'exposition » « Ressources documentaires » Total

4 4 5 34/83

Tableau 2. Relevé des termes. Champ lexical de l’informatique

En troisième position des champs lexicaux les plus présents dans les termes des publications se trouve celui du domaine du musée, avec 27 % des noms utilisés. L’univers de la muséologie est représenté par des termes liés à la mise en espace des œuvres, comme « exposition virtuelle », « visite virtuelle » ou « galerie des œuvres ». Il existe également des expressions désignant des productions papier propres aux musées tels que « petit journal » et « notices d’œuvres ». Ce champ lexical confirme la transposition des éléments de la médiation traditionnelle du musée à celle sur Internet. Ce changement sera abordé à travers la notion de spatialisation et d’exposition sur le Web34.

34

« Activités »

1

« Choix d'œuvres »

1

« Espace virtuel »

1

« Expositions en ligne »

1

« Expositions virtuelles et zooms »

1

« Galerie des œuvres »

1

« Galerie de photos »

1

« Grands parcours »

1

« Notices d'œuvres »

1

« Petit journal »

1

« Œuvres à la loupe »

2

Cf, p. 28.

17


« Expositions virtuelles » « Visites virtuelles » Total

5 7 23/83

Tableau 3. Relevé des termes. Champ lexical du musée

Enfin, 7% des termes employés pour désigner une publication ne font partie d'aucune catégorie. La politique éditoriale du musée est d’exprimer la spécificité et l’originalité de l’institution par les noms des publications. Cette stratégie est comparable à celle employée par les éditeurs pour nommer leurs collections. Ainsi, des termes comme « Revuzeum », qui rappelle la terminaison finale du Muséum d’histoire naturelle de Toulouse, éditeur de cette revue en ligne, ou « Kaléidoscope », publication proposée par le musée du Louvre, échappent aux champs lexicaux que nous avons observés. « Revuzeum » « Une saison une œuvre » « Solutions sociales en ligne »

1

« Kaléidoscope »

1

« Le petit monde des revues » « En 3 dimensions » Total

1 1

1 1 6

Tableau 4. Termes n’appartenant à aucun champ lexical

Si les contenus sont très divers, les formats restent, pour l’instant, peu nombreux. Le format (appelé aussi « format de données ») désigne, selon le glossaire de la base Joconde, « convention informatique permettant de pré-déterminer la structure, la représentation et le stockage des données. »35 Le format Web est le plus présent. La 35

« Glossaire des techniques de l’information », site de Joconde, catalogue des collections des musées de France [en ligne] http://www.culture.gouv.fr/documentation/joconde/fr/partenaires/AIDEMUSEES/glossaire.pdf

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page Web constitue ce format grâce à un document en langage Hypertext Markup Language (HTML ou XHTML). Ce format est la ressource de l’Internet. Il permet de faire cohabiter facilement toutes sortes de médias. Le blog est un des types de publication du format Web ; ils seront traités dans la troisième grande partie de cette recherche36. Comme le rappelle Hubert Guillaud, spécialiste de l’édition électronique, éditeur et auteur du blog La Feuille, dans un billet intitulé « Livre numérique : comment les formats induisent-ils les contenus ? », ces types de formats sont dans le cadre de l’édition numérique, « certainement les plus nombreux mais bien souvent, ne sont pas considérés comme des “livres”. »37 La définition de ce mot, employé dans ce contexte et dans celui de cette recherche, est celle-ci : « Assemblage de feuilles en nombre plus ou moins élevé, portant des signes destinés à être lus »38. Nous avons choisi, lorsque nous évoquons le « livre », pour éviter les confusions, de ne faire référence qu’à l’objet physique

39

. De plus, le parti pris de notre étude est de

considérer ces textes, non pas comme des livres, mais comme des publications, tel que nous l’avons déjà évoqué en introduction. Ce mot, qui fait d’abord référence à l’acte d’éditer, ne tient pas en compte le support de diffusion, il désigne aussi bien des ressources sur support papier que numérique. Le PDF, issu de l’imprimé, principalement utilisé dans l’industrie du livre numérique, est le second format le plus présent sur les sites de musée, notamment dans les sections de ressources en ligne proposant des dossiers documentaires, des bibliographies, ou dans les sections de parcours de visite. Ces documents en PDF sont appréciés pour leur transportabilité vers le papier. Parfois, les deux formats sont présents, permettant une plus grande accessibilité au contenu. Notre étude des termes, confirment la diversité et de ce secteur. Les évolutions technologiques et les différents modèles de référence le rendent mouvant et difficilement cernable. Certains favorisent l’univers de la muséologie pour penser leur consulté le 26/07/2010 36 Cf. partie III, « L’édition collaborative des musées : formes et conséquences », p. 62. 37 Hubert Guillaud, « Livre numérique : comment les formats induisent-ils les contenus ? », La Feuille, 15 avril 2010, http://lafeuille.blog.lemonde.fr [en ligne], consulté le 19/04/2010. 38 Définition du mot « livre », Trésor de la langue française en ligne [en ligne] http://atilf.atilf.fr/ consulté le 22/07/2010 39 Certains éditeurs et penseurs de l’édition numérique utilisent le mot de « livre » pour parler des supports numériques aux textes. Un billet de Constance Krebs, sur son blog, propose des définitions du livre, comprenant son évolution numérique. Constance Krebs, « Définition du livre », Amontour, 25 novembre 2009 [en ligne] http://amontour.wordpress.com/2009/11/25/une-definition-du-livre-2 consulté le 26/07/2010

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site Internet, d’autres restent attachés à la tradition livresque, en la transposant sur le Web. Nous allons ainsi étudier chaque modèle plus précisément pour comprendre et définir les publications qui les composent.

b) Du papier au numérique Au moment du développement des sites de musées, ces nouveaux types de publications ont été perçus par les observateurs de sites de musée comme une « immense encyclopédie »40. L’univers de l’imprimé est devenu une des premières références pour comprendre ce nouvel objet, comme l’a révélé l’étude lexicale des noms de publications. Les brochures de communication du musée ont été les premiers documents à devenir des publications en ligne. Quelles relations les deux supports papier et numérique entretiennent-ils ? Les éditeurs traditionnels dans les musées ainsi que la RMN, chargée de valoriser les collections des musées nationaux en « éditant et en diffusant de façon commerciale des ouvrages consacrés aux œuvres qui y sont conservées »41, détiennent une place importance dans ces institutions. La circulaire du 20 mars 1998, visant à réguler l’édition publique, et la circulaire du 9 décembre 1999, qui institue une médiatrice de l’édition chargée d’observer l’activité des éditeurs publics, ont permis de mieux comprendre ce secteur. Cette forme de médiation est un des moyens de valoriser et diffuser les collections. Les livres (catalogues d’exposition, catalogues raisonnés, guide, etc.) et les documents destinés mis à la disposition du visiteur lors de la visite (parcours de visite, plan, etc.) sont devenus la première ressource pour alimenter le site Internet. Cette constatation fut confirmée par les personnes rencontrées en entretien : Mériam Bensassi expliquait que les expositions virtuelles étaient réalisées avec les éléments du catalogue d’exposition, de même le personnel du musée des Beaux-Arts de Rennes sur leur site publie tous les documents pédagogiques existant sur support papier. Cette transposition du document traditionnel dans le domaine du numérique est remarquable par le nombre important de publications en PDF, comme nous l’avons 40

En 1999, Benjamin Weil dans son article « Les Musées voient l’avenir en Net », qualifie l’Internet « d’immense encyclopédie » et note l’importance des sites de musée. Benjamin Weil, « Les musées voient l’avenir en Net », Beaux arts magazine, n° 178, Mars 1999. 41 Article 1 du décret n°90-1026 du 14 novembre 1990 relatif à la Réunion des musées nationaux, http://www.legifrance.gouv.fr [en ligne] consulté le 20/07/2010.

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déjà remarqué. Hubert Guillaud donne une explication à l’importante présence de ce format issu de l’imprimé : « Développés et mis en page pour le print, pour l’impression papier, les fichiers peuvent être “facilement” convertis pour être accessibles au format numérique.44 » Fréquemment, les PDF sont publiés dans leur version papier et mises à disposition dans l’enceinte du musée. Parfois, au contraire, les PDF en ligne ne sont pas édités et ne sont pas diffusés, comme d’autres brochures, dans l’institution. Par exemple, certaines ressources en ligne du musée des BeauxArts de Rennes et du musée d’art contemporain, les Abattoirs, ne sont disponibles que sur leur site Internet. Cette pratique est un moyen d’obliger le visiteur à utiliser l’outil numérique. Ces PDF sont parfois diffusés via des sites de lecture en ligne tels que ScribD, Calaméo ou Issuu (fig. 6)45. La production scientifique est très présente dans les exemples de transposition de formes éditoriales papier au support numérique. La Galerie nationale du Jeu de Paume propose des actes de colloque en version PDF sur leur site, dans la section « Édition en ligne »46. Ces publications sont disponibles uniquement dans cette version téléchargeable en libre accès. Un autre exemple de l’édition d’actes de colloques est celle du musée du Quai Branly sur la plateforme Revues.org (fig. 7)47. Il existe aussi des revues scientifiques de musée comme Gradhiva (diffusée sur la plateforme Revues.org) publiée par le musée du quai Branly et des périodiques publiés par le Muséum

d’histoire

naturelle

de

Paris

(Adansonia,

Anthropobotanica,

48

Anthorpozoologica, Geodiversitas, Zoosystemas) . Généralement la forme de ces revues ne présente pas de véritables exploitations du support numérique et se rapproche du modèle de la revue papier et du modèle « éditorial » que développe

44

Hubert Guillaud, op.cit. Voir par exemple, la programmation du musée Dauphinois sur le site Issuu, [en ligne] http://issuu.com/museedauphinois/docs/programme20092010 . Voir le dossier de presse du musée Lalique sur le site Calaméo, [en ligne] http://fr.calameo.com/books/000307853a067ba1c5b1b . Voir les publications des musées de Poitiers, [en ligne] http://www.scribd.com/Mus%C3%A9es%20de%20Poitiers consulté le 20/07/2010. 46 « Édition en ligne / Actes de colloques et conférence », site de la Galerie nationale du Jeu de Paume, http://www.jeudepaume.org/index.php?page=article&sousmenu=111&idArt=801 [en ligne] consulté le 30 juin 2010 47 Autre exemple : Le Bulletin du centre de recherche du château de Versailles est également diffusé via cette plateforme de revues électroniques, [en ligne] http://crcv.revues.org/ consulté le 20/07/2010. Actes de colloques du musée du Quai Branly, [en ligne] http://actesbranly.revues.org/60 consulté le 20/07/2010. 48 Présentation des publications, dont le cinq périodiques du Muséum national d’histoire naturelle, [en ligne] http://www.mnhn.fr/museum/foffice/science/science/DocScientifique/publications/presentation.xsp?i=1 consulté le 30 juin 2010. 45

21


Laure Bourgeaux dans son mémoire. Enfin, les catalogues raisonnés en ligne sont un exemple révélateur de la transposition. Dans ce domaine, la RMN est l’éditeur le plus important. D’après JeanPierre Dalbéra, il s’agit de la production la plus remarquable dans le domaine de l’édition électronique, mais il faudra dans les années à venir l’adapter à de nouveaux supports pour offrir une plus grande accessibilité aux chercheurs. La RMN possède désormais dix publications de ce type dans sa collection en ligne49. Pour présenter cet espace du site, l’institution affirme : « Les catalogues de collections en ligne s’inscrivent dans la continuité des publications dites « scientifiques » qui constituent la mémoire des collections publiques.50 »Le premier ouvrage date de 2004 et il est appelé « catalogue raisonné de la collection Grandidier » du musée Guimet (fig. 8). Les publications de ce type, qui furent publiées après ce premier essai, portent le nom de « catalogue des collections ». Ce changement de terme montre que les types de publications ne sont pas véritablement définis et que le modèle du papier pour les catalogues raisonnés a été abandonné pour celui du catalogue en ligne. Ce passage est également révélateur de la limite mouvante entre le domaine de la documentation, représenté par le modèle de la base de données, et celui de l’édition. Corinne WelgerBarboza exprime ce bouleversement de la polarité entre sources primaires et édition critique : « La partition établie entre les ressources documentaires (sources écrites, iconographiques, sonores, etc.) et la littérature critique subit un brouillage digne d’intérêt.52 » Dans ces catalogues en ligne de la RMN, chaque publication est divisée en différentes sections : un sommaire, parfois très complet, comme pour le catalogue sur la collection Grandidier qui propose une présentation riche de la pratique de la céramique53, les collections illustrées et annotées, des outils, comme une bibliographie, un glossaire et parfois une chronologie. Il existe également la possibilité pour l’internaute de créer des dossiers de fiches qu’il collecte lors de ses recherches. Un des derniers éléments, qui rapproche ces publications du modèle du

49

« Catalogue en ligne, accès libre », RMN [en ligne] http://www.rmn.fr/une-collection-en-ligne consulté le 30 juin 2010. 50 « Catalogue en ligne, une mission de service public », RMN [en ligne] http://www.rmn.fr/francais/collections-en-ligne/une-mission-de-service-public consulté le 30 juin 2010. 52 Corinne Welger-Barboza, « Les Mutants de l’édition numérique », Implications scientifiques, 10 mars 2010, [en ligne] http://www.implications-philosophiques.org/actualite/ledition-numerique/lesmutants-de-la-publication-scientifique-en-ligne/ consulté le 30 juin 2010. 53 Jean-Paul Desroches (dir.), Chefs-d’œuvre de la collection Grandidier [en ligne], http://www.guimetgrandidier.fr/html/4/index/index.htm consulté le 30 juin 2010.

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catalogue raisonné sur support papier, est la présence du nom de l’auteur sur la page d’accueil, qui est absent dans les catalogues des collections en ligne des musées. Aucune donnée chiffrée précise ne nous permet d’envisager le nombre global de téléchargements de ces PDF. Le rapport pour l’édition publique, publié chaque année, consacre depuis 2006 une partie à l’exploitation du support numérique. Le rapport donne la part payante et en accès libre des téléchargements de fichiers : la part payante de l’édition électronique est très faible comme le remarque la médiatrice de l’édition publique dans son rapport : « […] la proportion du nombre de téléchargements de documents payants apparaît globalement infime comparée au nombre de téléchargements de titres gratuits, qui dominent très largement les flux. »54 Le dernier rapport portant sur l’année 2008 est plus précis (nombre de téléchargement, recettes, nature de l’offre, etc.) mais seule la moitié des éditeurs ont fourni des indications sur leurs activités. L’analyse reste très vague quant aux formats choisis, à la fréquentation et aux prix, et ce, malgré la présence de questions sur ce sujet dans les formulaires envoyés aux institutions. Cette transposition d’un support à l’autre est également visible par la numérisation que pratiquent certains musées. Même si ce pan de l’édition électronique n’est pas traité dans ce travail, il est intéressant de le remarquer dans des musées comme celui de Mariemont, qui numérise et met à disposition des guides, des catalogues, etc. Les premières pages sont visibles sur le site Internet du musée en version PDF et il est possible de télécharger le même document dans son intégralité sous le même format océrisé. Toutes les éditions mises en ligne étant épuisés, cela permet de constituer un catalogue important de publications en ligne, tout en palliant l’absence d’exemplaires de ces documents anciens55. La diffusion des livres papier sur les liseuses n’est pas encore expérimentée par les musées. Leurs productions éditoriales traditionnelles n’est pas accessible en version numérique, bien qu’il y ait un besoin. Pourtant, cette pratique tend à se développer dans les années à venir, à l’image du marché du livre, qui propose progressivement des versions numériques de leurs ouvrages papier. L’offre du marché

54

Marianne Lévy-Rosenwald, Rapport de l’édition publique : bilan de l’année 2008, Paris : ministère de la Culture, p. 43. Disponible [en ligne] http://lesrapports.ladocumentationfrancaise.fr/BRP/104000003/0000.pdf consulté le 22/07/2010 55 Musée royal de Mariemont, « Publications épuisées en ligne », [en ligne] http://www.museemariemont.be/accueil/publications_epuisees_en_ligne/ consulté le 26/06/2010

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du livre électronique est réduite à celle du « livre homothétique »56, c’est-à-dire une forme identique au livre imprimé, bien qu’il existe de nouveaux formats de fichiers, tels que l’ePub (.epub), Mobipocket (.prc), Kindle (.azw), SonyMedia (.lrf/.lrx), principalement adaptés à des liseuses. Bien qu’ils aient été associés très vite au multimédia grâce au cédérom notamment, ces services n’ont pas investi ce secteur du livre numérique. Récemment deux initiatives dans ce domaine ont été remarquées par des spécialistes et des bloggeurs57. Aux États-Unis, le Mead Art Museum de Amherst dans le Massachusetts a publié, au mois de juin 2010, son premier livre numérique adressé aux utilisateurs de liseuses et de smartphones (Ipad, Iphone, Blackberry, etc.), et particulièrement aux possesseurs du Kindle. Le livre reprend l’historique des acquisitions et du développement des collections, déjà publié sous la forme d’un ouvrage papier en 1972. Des liens hypertextes et des illustrations en couleur ont été ajoutés à cette version numérique58. Les organisateurs de la biennale de Venise ont également investi ce domaine en proposant leur catalogue d’exposition sur iPad. Cet « ouvrage » a l’apparence d’un ouvrage enrichi puisqu’il se constitue de textes, de photographies d’œuvres et vidéos (fig. 9)59. Bien que les initiatives soient peu nombreuses, certains musées semblent avoir pris la mesure de l’enjeu. La Tate a affirmé dans sa politique éditoriale pour les années 2010-2012 sa volonté de s’investir dans

ce

domaine :

« La

Tate

Publishing

voit

d'importantes

possibilités

d'investissement, et lancera un programme d'édition numérique dans l’année 2010-11. La politique d’édition numérique a identifié les domaines potentiels suivants pour le développement commercial de la Tate Gallery et Tate Publishing contenu : ebooks, impression à la demande, e-marketing de produits Tate, applications de téléphone mobile, « freemium » services.60 » 56

L’expression est apparue dans ce que l’on appelle désormais le « rapport Zelnik » : « […] livre numérique dit « homothétique » (c'est-à-dire reproduisant à l’identique l’information contenue dans le livre imprimé, tout en admettant certains enrichissements comme un moteur de recherche interne, par exemple ». Patrick Zelnik, Jacques Toubon et Guillaume Cerutti, « Rapport création et Internet », janvier 2010, [en ligne] http://www.sacd.fr/fileadmin/actualites/2010/rapport_zelnik.pdf, consulté le 15/07/2010 57 Voir l’article suivant : « Le Premier e-book lancé par un musée américain », Club innovation et culture, Clic France, 25 juin 2010 [en ligne] http://www.club-innovation-culture.fr/le-premier-e-booklance-par-un-musee-americain/ consulté le 25/06/2010. 58 Site officiel du musée, voir la section « Bookshop » renvoyant au site Amazon pour la vente de la version dédiée au Kindle. À voir, la section « Electronic publications » montrant l’intérêt de cette institution pour le support numérique, [en ligne] https://www.amherst.edu/museums/mead consulté le 27/07/2010. 59 Présentation de l’application [en ligne] http://itunes.apple.com/it/app/ibiennale/id387333827?mt=8 consulté le 27/07/2010. 60 S.n.,« Tate Online Strategy 2010-2012 », sur le site de Tate Galery, [en ligne]

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Même si ce type de documents fait partie de la production éditoriale du musée, elle est très différente de l’édition numérique, conçue pour le Web, que nous aborderons plus loin. Certains musées choisissent des types de publication existant sur support papier et l’adaptent au numérique. C’est le cas de la Galerie nationale de Jeu de Paume, qui a créé Le Magazine du Jeu de Paume. Celui-ci retrace l’actualité du lieu sur un site indépendant, par des entretiens avec les artistes exposés, articles de personnalités du monde de l’art, etc. La structure de cet espace reprend les codes d’un magazine avec un éditorial et des articles ; un espace permettant de « multiplier les approches autour de ses activités […] générateur de débats et d’ouvertures sur d’autres sujets » 61 a été créé. Cette présentation insiste sur « La parole en jeu » qui est un espace d’expression libre pour des artistes, des commissaires d’exposition, des chercheurs, des étudiants etc. Il ne s’agit plus de reproduire exactement un livre mais d’adapter, pour le Web, les modèles et les genres de ce support. Cet exemple invite à s’interroger sur les influences entre les deux supports, le papier et le numérique, et sur la manière dont ces relations déterminent de nouvelles formes de publications. La relation entre les deux supports est, de manière répandue, vue comme un rapport de complémentarité. Cette idée a été évoquée par Jean-Pierre Dalbéra dans son article paru dans Muséologies. Cet ancien directeur de la Mission recherche et technologie (MRT) – actuellement appelé département de l'Enseignement supérieur, de la recherche et de la technologie – écrit, en parlant des publications numériques : « Complémentaires des catalogues d’expositions édités sur papier, elles [les publications] sont gratuites et destinées au grand public.62 » Il est pour l’instant difficile de pouvoir développer cette affirmation car les éditions multisupport ou les études comparant les publications papier et numérique sont peu nombreuses. Seules des témoignages d’éditeurs, travaillant sur les deux supports, et de lecteurs permettent de comprendre les influences et les relations du livre et du site. Parfois, la forme numérique vient influencer la forme du papier. L’édition de la correspondance de Van Gogh par le musée néerlandais éponyme63 sur un site et un http://www.tate.org.uk/research/tateresearch/tatepapers/10spring/stack.shtm consulté le 06/08/2010. 61 Le Magazine, [en ligne] http://lemagazine.jeudepaume.org/magazine/ consulté le 05/07/2010. 62 Jean-Pierre Dalbéra, « Institutions culturelles patrimoniales et nouvelles pratiques numériques », Ibid., p. 43. 63 Vincent Van Gogh, The Letters: the complete illustrated and annotated edition. Leo Jansen, Hans Luijten et Nienke Bakker (éd.), Amsterdam : Thames & Hudson, 2009. Version numérique : Van Gogh’s Letters, [en ligne] http://vangoghletters.org/vg/ consulté le 20 avril 2010. Ce projet fut financé par le programme de conservation de l’héritage papier portant le nom Metamorfoze63. Une subvention supplémentaire a été donnée pour proposer une version plus accessible à travers le site Memory of

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livre est révélatrice de ces interférences. Ce projet a demandé quinze ans de travail et c’est en 2004 que les éditeurs décident de concevoir, en plus du livre, la publication numérique autour de ces lettres (fig. 10). La publication de sources primaires exploite toutes les fonctionnalités du support numérique. L’ensemble du corpus de lettres dans l’édition Web est accessible par des entrées par période, destinataire, lieu et un corpus de lettres accompagnées d’esquisses est différencié. L’ensemble des lettres est traduit en anglais et accompagné d’un appareil de notes très complet. Le texte original fait face à sa version traduite. Il est également possible d’accéder aux lettres consultées grâce à une barre d’onglets conservant une trace des précédant documents consultés. Cette fonctionnalité permet de constituer son propre corpus et de pouvoir comparer les différentes lettres. Il est possible de prendre des notes et visualiser les œuvres associées à la lettre qu’on lit. À partir de ces possibilités techniques, les éditeurs ont utilisé très souvent des hypertextes permettant de renvoyer à des lettres ou à des informations. Les fonctionnalités alliées à ce travail sur les liens permettent une navigation fluide et une circulation plus rapide dans l’ensemble de l’édition. Dans un article publié lors de la conférence « Museum on the Web 2010 »64, les éditrices expliquent que la publication numérique fut destinée à la communauté de chercheurs, tandis que le livre ciblait un large public : « Avec l’édition numérique destinée aux universitaires, le livre pouvait être publié comme une édition pour un public plus large. » Elles précisent également que la partie numérique de l’ouvrage influença les choix de maquette du livre papier. L’intégration des illustrations en couleur parmi le texte fut déterminée par le site dans lequel les éléments sont disposés de manière identique. Cette influence est d’autant plus notable, que le livre devait initialement être composé de deux volumes : l’un avec du texte sans illustrations et l’autre avec uniquement les reproductions en noir et blanc. Ainsi cette longue entreprise éditoriale autour d’une source primaire montre comment les formes s’influencent et se modifient selon les supports. Le numérique peut également influencer la manière dont est produit un livre. L’exemple qui illustre cette affirmation est celui du catalogue de l’exposition « Click ! » du musée de Brooklyn. L’éditeur a en effet collaboré avec la plateforme Netherland63. 64 Marianne Peereboom et al., « Van Gogh's Letters: Or How to Make the Results of 15 Years of Research Widely Accessible for Various Audiences and How to Involve Them », dans J. Trant and D. Bearman (éd.), Museums and the Web 2010: Proceedings, Toronto : Archives & Museum Informatics, 2010, [en ligne] http://www.archimuse.com/mw2010/papers/peereboom/peereboom.html

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d’impression à la demande Blurb, pour la fabrication de l’ouvrage. Cette méthode d’impression tend à devenir de plus en plus importante pour les éditeurs, notamment dans le domaine scientifique. Même si le musée de Brooklyn est une référence en matière d’innovation technologique, notamment dans le domaine de l’édition en réseau et des modes collaboratifs de création entre le musée et ses visiteurs, l’éditeur de cette institution, dans la présentation du catalogue Click ! exprime les contradictions face auxquelles le musée peut se retrouver65 : « Cela peut sembler étrange que, depuis trois millénaires, nous continuions de communiquer en pressant des pigments contre du papier. Pourtant, bien que nous vivions à l’ère de données numériques, […] les personnes demeurent profondément attachées aux livres – à leur aspect, à leur matière, même à leur odeur. » Cette affirmation de l’éditeur rappelle la tension qui existe entre les anciennes et les nouvelles formes d’édition. Cette relation entre papier et numérique est analysée par Steffan Bankier, auteur d’une thèse intitulée « CrowdCurators : l’impact de l’évolution de nos pratiques dans la conservation d’art » : « Le contraste entre les tentatives progressives du musée à entrer dans l'ère numérique et ses efforts pour rester lié à un passé traditionnel »66. Ainsi, ce dernier exemple révèle que des relations entre les deux supports existent : ils s’influencent mutuellement, mais leur cohabitation peut être également source de tension. Malgré cette promiscuité, les départements d’édition et les pôles multimédia dans les musées sont séparés et ont rarement des contacts, d’après la majorité des personnes que nous avons interrogées. Les types d’ouvrage papier étant un modèle de référence pour concevoir les publications, aussi bien dans leur appellation que dans leur format, le musée est lui aussi sujet et source d’une autre forme éditoriale qui s’appuie sur la notion d’exposition, transposée pour la conception de contenus en ligne.

65

James Leggio « Click ! The Book », blogosphere du Brooklyn Museum, 7 juillet 2008, http://www.brooklynmuseum.org/community/blogosphere/bloggers/2008/07/07/click-the-book/ [en ligne] consulté le 16/06/2010 : « it may seem strange that in the third millennium, we still communicate by pressing pigment against the pulp of crushed trees. And yet, although we live in an age of digital data flickering on a screen, people remain deeply attached to books—to the way books look, the way they feel, even the way they smell » 66 Steffan Bankier, « CrowdCurators: The Impact of our Evolving Habits on Art Curation », thèse en études visuelles, Université de Pennsylvanie, 2010. « The contrast between the museum’s progressive attempts to enter into the digital arena and its efforts to maintain linked to a traditional past ».

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c) L’exposition et le Web Les termes faisant référence aux espaces du musée, comme « exposition virtuelle » ou « visite virtuelle », font partie du second type de publications en ligne que nous allons étudier. Il s’agit dans cette partie d’observer les publications qui se rapportent à l’exposition. Conçues spécifiquement pour le support numérique, elles ne se rapportent pas au support papier, mais sont d’autres moyens de diffusion du savoir, comme peut l’être également le catalogue d’exposition. Elles sont présentes depuis longtemps sur le Web67. France Gautier, dans sa thèse sur les expositions virtuelles, donne une définition de l’expression : « Une exposition virtuelle peut être la présentation sur Internet, selon un plan organisé, d’images numérisées, accompagnées ou non de texte, d’objets ayant une existence physique réelle […] il peut s’agir de la présentation en ligne d’œuvres entièrement virtuelles, créées spécifiquement pour le Web.68 » Concernant la première acception du terme, sa particularité est qu’elle peut être le pendant numérique d’une exposition réelle exploitée en ligne pour alimenter le site Web de l’institution. Dans ce cas, le parti pris peut être de reproduire l’espace de l’exposition dans le musée ou de s’en démarquer. Néanmoins, elle peut également être conçue uniquement pour Internet. C’est une forme qui valorise aussi bien les collections permanentes que les expositions temporaires dans un musée. Compte tenu de l’audience qu’elle peut toucher et de sa capacité à diffuser et mettre en valeur des objets d’art, cette forme de publication est désormais prise en comte par les institutions. Elle est aussi importante que l’édition du catalogue d’exposition ou du catalogue raisonné. Le support numérique est un autre moyen de diffusion du savoir élaboré lors de l’exposition. Dans le développement de sa typologie de contenus sur les sites Internet d’institutions, Laure Bourgeaux présente le type « double éditorial » qu’elle illustre par l’exemple des expositions virtuelles de la BNF69 : « La logique ici à l’œuvre consiste ainsi à considérer le nouveau média que constitue Internet comme 67

En 1994, la MRT proposait ses premiers « expositions virtuelles », voir le site de la MRT http://www.culture.gouv.fr/culture/exp/exp.htm [en ligne] consulté le 21/07/2010. 68 France Gautier, « Concevoir une exposition virtuelle en bibliothèque : enjeux et méthodologie », Mémoire d’étude, École nationale supérieure des sciences de l’information et des bibliothèques, 2002, [en ligne] www.enssib.fr/bibliotheque-numerique/document-667 consulté le 15 juin 2010, p. 5. 69 Laure Bourgeaux, op. cit., p.75-76. Le rapprochement entre la forme du livre et celle des expositions virtuelles de la BNF me semble partiellement justifié. Plusieurs éléments de l’édition audiovisuelle présents dans ces expositions viennent contredire cet état de fait.

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un simple canal de diffusion supplémentaire, vers lequel on exporte, parfois sans reformulation, des contenus élaborés pour le papier sous forme de « pages » Web […] » Toutefois, certaines potentialités du numériques sont de plus en plus utilisées dans les expositions virtuelles. Pour en étudier quelques unes, nous avons choisi deux exemples d’expositions virtuelles, celle du Musée national de marine Tous les bateaux du monde (fig. 11)70 et Les Cités végétales (fig. 12)71, exposition d’œuvres du dessinateur Luc Schuitten qui a eu lieu à la Sucrerie à Lyon. La première est intéressante car sa forme plutôt traditionnelle permet de manipuler l’information de manière plus fluide, en comparaison à l’usage du catalogue d’exposition. Certes, le texte est réduit par rapport au livre, mais le diaporama présentant des photographies de différents bateaux permet une navigation fluide, grâce au défilement des images. D’ailleurs, si les textes de présentation de chaque région sont assez brefs, les notices présentent chaque bateau de manière approfondie. L’exposition virtuelle est davantage centrée sur l’image. Dans le site Les Cités végétales, l’intention est identique mais les éditeurs n’ont pas mis en place les mêmes procédés. L’internaute a accès, comme dans Tous les bateaux du monde à une galerie d’images, et est invité, par le déplacement de la souris, à circuler dans les dessins de Schuiten. Cette exposition virtuelle offre une forme d’immersion dans l’œuvre, ce que le catalogue ne permet pas. Isabelle Rieusset-Lemarié dans un article intitulé « La Médiation éditoriale sur Internet » datant de 2001, affirme que les ressources en lignes sont « des mises en scène de parcours de lecture qui impliquent, au-delà des effets de « mise en page » et de « mise en écran », la conception d’une véritable architecture des parcours dans une démarche qui relève de la spatialisation » ; et elle ajoute plus loin : « Dans son développement sur Internet, la fonction éditoriale a vocation à interagir avec la fonction d’exposition en tant qu’elle relève d’une véritable conception.72 » Il y a ainsi une convergence entre le travail de l’éditeur Web et celui du muséographe ou du metteur en scène, comme l’affirme de nouveau Isabelle Rieusset-Lemarié dans un autre article : « Un des modèles qui permet d’éviter cet écueil est d’envisager la 70

Tous les bateaux du monde, Musée national de la marine, [en ligne] http://www.museemarine.fr/public/virtuel/touslesbateauxdumonde/index.html consulté le 09/09/2010. 71 Les Cités végétales, exposition sur Luc Schuiten, la Sucrerie, Lyon, [en ligne] http://www.citesvegetales.com/ consulté le 08/09/2010. 72 Isabelle Rieusset Lemarié « La Médiation éditoriale sur Internet », Communication et langages, 130, 2001, p. 32-46.

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scénarisation de l’exposition virtuelle selon un code plus théâtral qui permet de réintroduire la dimension de scénographie.73 » C’est à partir de cette notion de scénarisation et de mise en espace que nous étudierons l’exposition virtuelle. En 1998, selon Jonathan Bowen, Jim Bennett, James Johnson et Roxane Bernier, auteurs d’un article sur les visiteurs des musées virtuels, « 74 % des personnes espèrent voir des expositions virtuelles sur des musées en ligne »74. Au moment de l’expansion des sites Internet, à l’époque de la rédaction de cet article, cette forme éditoriale était présente en France grâce, notamment, à deux institutions : la MRT et la Bibliothèque nationale de France (BNF). Les premières expositions virtuelles de la MRT furent publiées en 1994 (fig. 13)75. Depuis cette période, l’exposition virtuelle s’est imposée. Elle reste une forme éditoriale offrant de nombreux avantages : elle accompagne le visiteur avant, pendant76 et après la visite de l’exposition réelle. Elle est une offre de savoir diffusé dans le monde entier à un large public. Elle valorise et enrichit des fonds patrimoniaux pour le support numérique. Ce type de contenus sur le site Web d’une institution permet également de valoriser celui-ci77. En 2002, lors de la conférence « Museum on the Web 2002 », des chercheurs de l’université de Singapour ont écrit un article sur le développement d’expositions virtuelles. Ils expliquent un des atouts de l’exposition en ligne: « Les étudiants du pays et du monde entier peuvent consulter à distance les expositions à la fois depuis leurs maisons et leurs écoles, à tout moment. »78 Cette forme de publication est en effet devenue très importante particulièrement dans le domaine pédagogique, comme l’affirment ces chercheurs.

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Isabelle Rieusset-Lemarié, « De l'utopie du « musée cybernétique » à l'architecture des parcours dans les musées », Publics et Musées, n°16, 1999, p. 103-128. 74 Jonathan Bowen, Jim Bennett, James Johnson, Roxane Bernier, « Visiteurs virtuels et musées virtuels », Publics et Musées, n°13, 1998, p. 109-127. 75 La première exposition virtuelle a été faite en 1994 et s’intitulait Le Siècle des Lumières dans la peinture des musées de France. Elles sont toujours consultables sur ce site http://www.culture.gouv.fr/culture/exp/exp.htm [en ligne] consulté le 21/07/2010. Un florilège est également donné sur le site des 50 ans du ministère de la Culture http://www.50ans.culture.fr/demain/creations/expositions-virtuelles/1 [en ligne] consulté le 21/07/2010. 76 Elle peut être visualisée lors de la visite grâce à des smartphones. 77 Réflexion apportée par France Gautier, dans « Concevoir une exposition virtuelle en bibliothèque : enjeux et méthodologie », op. cit., p. 17. 78 Leong Chee Khoo, Chennupati K. Ramaiah and Schubert Foo, « Design And Development of an Online Exhibition For heritage Information Awareness », Museums and the Web 2002 http://www.archimuse.com/mw2002/papers/ramaiah/ramaiah.html [en ligne] consulté le 10/06/2006. « Students from the nation and all around the world can view the exhibitions remotely both from their homes and schools any time. »

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L’exposition virtuelle n’est pas destinée à un public particulier mais elle est devenue une forme pouvant s’adapter aux capacités et aux besoins de différents internautes. Ainsi, il existe, dans certaines expositions virtuelles, différents niveaux d’accès au contenu. Bart Marable, dans son ouvrage Expérience, apprentissage et recherche. Coordonner les multiples rôles de l’exposition virtuelle, explique que cette publication peut être adressée à plusieurs publics : « Le panel des utilisateurs se déploie du visiteur ayant de l’intérêt avec peu de connaissances sur le sujet, aux enseignants recherchant du matériel pour leurs salles de classe, aux chercheurs amateurs utilisant le site comme un outil de recherche.79 » Bart Marable indique les différents types d’approches et de formes éditoriales de l’exposition virtuelle selon les publics. Pour les néophytes, il insiste sur la présence nécessaire d’un parcours balisé, voire narrativisé. Pour les étudiants et chercheurs, la navigation est moins assistée, grâce par exemple à la recherche par mots-clés. Il définit ainsi un modèle qui remplit la mission d’exposition, de recherche et d’expérience (fig. 14)80. En étudiant les expositions virtuelles, nous avons remarqué certains éléments du modèle énoncé par Bart Marable. Dans la collection multimédia du MuCEM, Cornemuses (fig. 15)81 offre en effet plusieurs entrées : une approche thématique avec les catégories « un instrument pluriel », « Imagerie et imaginaire », « Sources et renouveaux » ; une entrée plus documentaire, « Les collections du MuCEM », qui permet à une personne cherchant un élément précis d’utiliser cette base de données. Des outils transversaux permettent de compléter ces différentes approches : un glossaire pour les néophytes, une bibliographie et webographie pour approfondir les connaissances. Cette exposition virtuelle est donc composée, d’une part, de thématiques déterminées par les auteurs, accompagnée d’outils transversaux. D’autre part, le catalogue en ligne de la collection offre un contenu fragmenté, dans lequel l’internaute flâne ou peut chercher un élément précis.

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Bart Marable, « Experience, Learning, And Research: Coordinating the Multiple Roles of On-Line Exhibitions », In D. Bearman and J. Trant (éd.), Museums and the Web 2004: Proceedings. Arlington: Archives & Museum Informatics, 2004 http://www.archimuse.com/mw2004/papers/marable/marable.html [en ligne] consulté le 25/06/2010. « Users range from general interest visitors with little knowledge of the subject, to teachers looking for supporting materials for classrooms, to amateur scholars using the site as a research tool ». 80 Voir le modèle sous forme de schéma, cf. annexes, p. 105. 81 Cornemuses d’Europe et de Méditerranée, musée des civilisations Europe et Méditerranée, 2007, http://cornemuses.culture.fr/index.php [en ligne] consulté le 22/07/2010

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Ces différents niveaux d’accès sont également perceptibles dans les expositions virtuelles de la Cinémathèque française. Dans certaines expositions, une trame est proposée : elle se compose d’un texte lu et d’un diaporama. Ce contenu peut être fragmenté pour que le lecteur puisse créer son propre sens de lecture et de navigation. Ainsi, dans l’exposition virtuelle appelée « zoom » sur le film Jules et Jim de François Truffaut, sur la page d’accueil, l’internaute a la possibilité de choisir entre « la visite guidée », avec une bande-son présentant le film, sa version en texte et des extraits de films, le tout se déroulant comme un documentaire. Il peut également opter pour « la visite libre », où il pourra accéder au même contenu mais fragmenté (fig. 16)82. De plus en plus, le contenu tend à être fragmenté ou présenté par entrée thématique, comme nous avons pu l’observer dans certaines expositions telles que celles proposées par la BNF. Dans les dernières expositions en ligne, la même structure principale est adoptée ; elle peut néanmoins varier selon les thématiques. Il existe cinq types d’entrées. « En images » présente l’exposition réelle par des visites guidées ou des vidéos ayant trait à la thématique abordée, « Arrêt sur » développe les thèmes les plus importants de l’exposition, « Activité pédago » donne des outils pour les enseignants et « Gros plans » permet une visualisation optimale des objets exposés. Ainsi, l’internaute n’est pas invité à suivre un fil narratif, au contraire il est encouragé à flâner parmi ce contenu fragmenté. Ces publications sont marquées par un jeu du texte et de l’image qui se réfère soit à l’univers du livre, par le défilement ou les feuilletoirs mis en place, soit à l’univers de l’édition audiovisuelle, comme le prouvent les rubriques « Gros plans » et « visites guidées ». Ces formes sont explicitées dans l’article de 2002 d’Isabelle Rieusset-Lemarié que nous avons déjà cité. L’auteur intitule une des parties de son texte « Entre spatialisation et scénarisation : la conception des parcours interactifs dans les expositions virtuelles »83. Elle y affirme l’existence de deux modèles d’expositions virtuelles : « Cette hésitation entre deux guides dont l’un invite à suivre un itinéraire balisé, dans une logique de spatialisation, et l’autre tend à introduire un jeu plus littéraire fondé sur l’interaction entre narrateur et narrataire, témoigne d’une tension 82

Jules et Jim, Cinémathèque française, [en ligne] http://www.cinematheque.fr/zooms/julesetjim/index_fr.htm consulté le 12/09/2010. 83 Isabelle Rieusset-Lemarié, « De l'utopie du “musée cybernétique” à l'architecture des parcours dans les musées », op. cit.

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plus générale entre deux modèles qui influencent la conception des expositions virtuelles, l’un fondé sur la spatialisation qui peut aller jusqu’à l’inscription de l’exposition et du musée dans une véritable ville virtuelle, et l’autre fondé sur la scénarisation de parcours interactifs. Ces deux modèles cohabitent parfois dans un même site sans être toujours articulés dans un projet cohérent.84 » Ce long extrait nous révèle que les deux modèles apportent chacun des qualités spécifiques à l’exposition virtuelle. Isabelle Rieusset-Lemarié affirme par la suite que l’éditeur Web est obligé de trouver un équilibre entre l’une des deux possibilités de construction de son contenu. Selon le modèle favorisé, la conception du site en sera modifiée. Après plusieurs études d’expositions virtuelles, nous observons que la tendance est davantage à la spatialisation qu’à la narrativisation. Les contenus sont toujours thématisés et fragmentés ; la narrativisation est encore présente pour les contenus pédagogiques, bien que l’implication du jeune internaute, en lui proposant du contenu devant lequel il doit être actif, est également une position fréquemment adoptée, comme le prouvent les mini sites d’expositions de la Cité des sciences et de l’industrie85. La mise en forme de la spatialisation ou de la narrativisation peut être réalisée par l’utilisation de modèles de visualisation des données, comme la carte ou la frise chronologique. Pour cette dernière forme, l’exposition virtuelle consacrée au Bauhaus intitulé Bauhaus, workshops for modernity86 par le MoMA est un bon exemple (fig. 18). Elle allie le type de la frise chronologique avec celui du catalogue en ligne. En effet, les reproductions d’œuvres sont rassemblées sur une même page, sous forme de vignettes de taille identique. Elles sont classées par années et par période (en référence aux différentes villes où se trouva le Bauhaus). L’intérêt pour l’internaute est la facilité du passage entre les œuvres. La vision « macro » permet se saisir toute la production de cette école. Les œuvres sont classées par période, mais il est possible d’y accéder par un index d’artistes. Seul un petit texte accompagne chaque période, l’image est mise en avant. Cette classification des données, qui approche cette publication du catalogue en ligne, permet une clarté et une exhaustivité de l’information. 84

Ibid. Un exemple récent et représentatif est le mini site de l’exposition « Bon appétit » [en ligne] http://www.cite-sciences.fr/francais/ala_cite/expositions/bon-appetit/ consulté le 22/07/2010 (fig. 17). 86 Bauhaus, workshops for modernity, [en ligne] http://www.moma.org/interactives/exhibitions/2009/bauhaus/Main.html#/Timeline consulté le 22/07/2010. 85

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Un des exemples les plus frappants de spatialisation de ces dernières années est l’Interactive tour proposé par la Tate Galery à l’occasion de l’exposition sur Francis Bacon qui se déroula en 2008-2009 (fig. 19)87. Les propos d’Isabelle RieussetLemarié correspondent à la manière dont se déroule la navigation sur ce site : « Mettre le visiteur en position de construire son parcours dans l’exposition […] »88. Cette publication sur l’œuvre de Francis Bacon a été conçue grâce au logiciel Adobe Flash. La forme de cet Interactive Tour est inspirée d’une carte avec des îlots, appelés « room », représentant chacun un thème important de l’œuvre du peintre. Cette dernière remarque nous incite d’ailleurs à penser qu’il s’agit du plan de l’exposition réelle. D’un seul regard l’internaute peut saisir son intégralité et peut choisir de cliquer sur l’espace qu’il souhaiterait voir plus en détails. Il peut alors profiter d’images de bonne qualité, de courts textes, d’archives sonores ou audiovisuelles. L’avantage le plus remarquable, hormis la rapidité de navigation entre les différents îlots, est le réseau de relations thématiques qui est représenté par des flèches. Le passage d’une vision micro à une vue macro permet une navigation fluide entre les différentes rooms. Ce site, qui expose une spatialisation des contenus, ressemble à un logiciel en ligne à succès, éditeur de présentation, Prezi, conçu en Flash89. Ce dernier est lui aussi fondée sur l’utilisation d’une cartographie de l’information. Toutefois, cet Interactive Tour de la Tate Galery est à la frontière de différents genres de publications, entre exposition et visite virtuelle. En effet, il offre autant de contenus qu’une exposition virtuelle et ne propose pas d’immersion dans un lieu réel. Mais le nom de ce contenu et les usages de navigation qu’ils permettent, nous rappelle certaines caractéristiques de la visite virtuelle. Ce dernier type de publication est souvent composé d’une vue panoramique à 360° d’un lieu ou d’une salle dans laquelle il est possible au moins de se promener dans la vue ; l’immersion s’effectue grâce à des reproductions photographiques ou par la numérisation en 3D des lieux. L’internaute doit provoquer son déplacement dans l’espace, le plus souvent par des flèches directrices activables par la souris. Il ne faut donc pas prendre en compte dans les visites virtuelles les vidéos proposant des immersions en 3D dans un espace, telle 87

Interactive tour, à l’occasion de l’exposition « Francis Bacon », 11 septembre 2008 au 4 janvier 2009, [en ligne] http://www.tate.org.uk/britain/exhibitions/francisbacon/interactive/ consulté le 22/07/2010. 88 Isabelle Rieusset-Lemarié, « De l'utopie du “musée cybernétique” à l'architecture des parcours dans les musées », op. cit. 89 Site officiel de Prezi, [en ligne] http://prezi.com/ consulté le 22/07/2010.

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que la vidéo de la promenade en 3D proposée dans l’œuvre de Picasso Guernica, réalisée par une infographiste allemande, Lena Gieseke90 (fig. 20). Certaines expositions virtuelles sont composées de visites virtuelles. Ainsi l’exposition Louis XIV qui se déroula au château de Versailles91 propose une exposition virtuelle composée d’une visite virtuelle photographique de tout le parcours et un plan modélisé permettant de profiter de l’intégralité des chefs d’œuvres exposés, tout en choisissant les salles que l’on souhaite visiter. À cette impressionnante reproduction, il est possible d’accéder aux contenus, par un classement des œuvres et par une chronologie (fig. 21). La définition de France Gautier, qui introduisait cette partie, proposait un second sens au terme d’ « exposition virtuelle ». Certains sites de musées sont des lieux d’exposition à des œuvres qui n’existent que sur support numérique. Le site Web n’est pas uniquement le lieu présentant la reproduction d’œuvres et diffusant les connaissances liées à celles-ci. Il devient la surface d’exposition. Les musées ont pris en compte dans leur travail de conservation la présence du net art en ouvrant des « galeries » ou des « espaces virtuels » consacrés à ses pratiques artistiques. La plupart des musées diffusant ces nouvelles formes artistiques sont des institutions exposant de l’art contemporain. Ces œuvres, se présentant sous la forme de mini-sites, changent considérablement le travail du département multimédia, puisqu’il reprend le rôle du scénographe pour placer les œuvres, laissant le travail de conception Web à l’artiste. En France, le musée d’art moderne de Villeneuve d’Ascq a ainsi développé sur son nouveau site Internet une galerie de net art où sont « exposés » actuellement trois œuvres d’artistes ou de collectifs (fig. 22). Dans un texte introductif, la conservatrice du musée explique son intention de faire vivre ses œuvres sur le site mais aussi au sein des collections physiques du musée « à l’instar du Guggenheim et de la Tate »93. La Galerie nationale du Jeu de Paume a également, suite à la refonte de son site, créé un « espace virtuel », où est présenté le travail d’Agnès de Cagneux Conversation avec Miladus (du 31 mars 2010 au 17 novembre) 90

Site officiel de Lena Gieseke, [en ligne] http://www.lena-gieseke.com/ consulté le 22/07/2010 ; la vidéo de la promenade est visible sur la plateforme Youtube, [en ligne] http://www.youtube.com/watch?v=xQ_uGbQanNw consulté le 22/07/2010. 91 Louis XIV, exposition virtuelle à l’occasion de l’exposition au château de Versailles du 20 octobre 2009-7 février 2010 [en ligne], http://www.louisxiv-versailles.fr/ consulté le 27/07/2010. 93 Musée d’art moderne de Villeneuve d’Ascq, le LAM, « Galerie de net art », [en ligne] http://www.musee-lam.fr/archives/category/decouvrir/net-art consulté le 22/07/2010

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(fig. 23). L’avatar de l’artiste, se trouvant dans un univers proche de celui du jeu Second Life, invite l’internaute à discuter. Les échanges sont ensuite mémorisés et organisés par l’artiste94. De l’exposition virtuelle, comme site compagnon d’un événement du musée, à l’exposition du net art, le site Internet passe de la diffusion de contenus éditorialisés et de reproductions d’œuvres à l’exposition de travaux artistiques. Ainsi, la notion d’exposition sur le Web renvoie à plusieurs réalités pour lesquelles l’éditeur Web a un rôle différent. L’exposition virtuelle, qui peut avoir la forme d’un mini-site ou de pages liées au site de l’institution, est un contenu éditorialisé, où sont agencés des textes et des images dans le but de leur diffusion à divers publics. L’ensemble est coordonné par les auteurs et les éditeurs Web. Dans le cas de l’exposition virtuelle d’œuvres numériques, celles-ci n’existent que par leur créateur, mais le musée conserve son pouvoir légitimant en offrant des espaces à ces œuvres. À partir d’une même notion – l’exposition –, impliquant des modes de représentation particulier, à savoir une narrativisation, et surtout une spatialisation, on remarque que les catégories ne sont pas stables. Même si ces caractéristiques présentent la définition de l’exposition virtuelle, aucun modèle plus précis ne permet de circonscrire ce type de publication. Souvent, la différence entre la publication de type exposition virtuelle, visite virtuelle ou présentation d’exposition, sous la forme d’un site ou de quelques pages, sont difficiles à cerner. Les limites pour définir les types sont poreuses. Nathalie Casemajor-Loustau dans sa thèse sur les expositions virtuelles remarquait également cette multitude de formes qui mêlent les types de publications : « Dans le cas des sites Web analysés on constate que non seulement s’opère une hybridation des dispositifs en ligne et hors ligne, mais qu’à l’intérieur même des dispositifs en ligne, les catégories se brouillent dans un agencement hétéroclite.95 » Il y a peu de standard et de type, si ce n’est ceux que s’impose une institution à elle-même pour l’ensemble de sa production et pour donner une cohérence à ses publications. Les univers de références du livre et du musée nous permettent seulement de poser des repères. Faire une typologie est un travail difficile voire 94

Agnès de Cagneux, Conversation avec Miladus, du 01 avril au 17 novembre 2010 [en ligne] http://www.jeudepaume.org consulté le 22/07/2010 95 Nathalie Casemajor Loustau, « Diffuser les collections photographiques sur le WebWeb : de nouvelles pratiques de médiation ? », op.cit., 2009, p. 238.

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impossible, tant les techniques évoluent. Cette diversité des publications est également due à la diversité des éditeurs Web au sein des musées et à l’adaptation des contenus à des publics de plus en plus ciblés.

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Partie II. Éditeurs et publics, des acteurs multiples

Les nouveaux modes d’organisations du travail qu’implique l’intégration de l’édition électronique dans les musées, ont été un des facteurs des mutations des formes éditoriales. Ces changements sont également dus à une expansion du support numérique. L’accroissement des contenus s’accompagne de nouvelles formes éditoriales plus spécifiques à certains publics. Ainsi, par rapport à l’édition traditionnelle, un nouveau métier a émergé. Il reprend certes les principes fondamentaux de l’édition : choisir, valider et agencer les contenus. Néanmoins, le numérique exige de nouvelles compétences et l’intervention de nouveaux acteurs dans le processus éditorial. D’autre part, les publics visés par ces nouvelles publications se sont diversifiés avec leur développement. Il doit y avoir des contenus pour tout type de lecteurs et sur tout type de support. Ce phénomène rejoint celui de l’accessibilité.

a) Les différentes facettes du métier d’éditeur numérique dans les musées Dans son article « L’Influence des nouvelles techniques sur le management des musées », publié lors de l’ICHIM à Berlin en 200497, Jean-Michel Tobelem, chercheur travaillant sur les questions d’ingénierie culturelle et touristique, expliquait déjà les conséquences de l’introduction du numérique dans les musées, comme en témoigne l’extrait de son intervention : « À terme, l’introduction d’Internet et des nouvelles techniques constitue potentiellement un facteur de reconfiguration de l’organisation des musées.98 » La transformation de l’organigramme du musée se produit à travers une « une conception renouvelée du travail en équipe », « une 97

L’ICHIM signifie « International Cultural Heritage Informatics Meetings », conférence sur le multimédia dans les musées qui ont eu lieu de 1991 à 2007. 98 Jean-Michel Tobelem, « L’Influence des nouvelles techniques sur le management des musées », Patrimoine et culture numérique, ICHIM, Archives & Museum Informatics, 2004 [en ligne] http://www.archimuse.com/publishing/ichim04/0766_Tobelem.pdf consulté le 04/09/2010

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diffusion des nouvelles techniques dans les différents services du musée », « une conception renouvelée des processus de collaboration internes et externes » et enfin « une orientation vers une organisation plus ouverte, décentralisée, souple et réactive. » Il observait déjà les mutations que nous allons analyser au sein de l’activité de conception éditoriale multimédia dans le musées. En effet, de nouveaux acteurs du musée parfois extérieurs à celui-ci interviennent dans le processus. Ils peuvent être producteurs de contenus (membres du personnel du musée, etc.) ou aider à la conception (société de Webdesign, prestataire technique, etc.) L’image de l’éditeur traditionnel, qui publie des livres papier, a été modifiée, tout comme celle d’une partie du personnel du musée tel que les commissaires d’exposition ou les bibliothécaires99. Nous allons analyser l’identité actuelle de celui qu’on appelle « webmaster » ou « Web editor » − aucun titre précis pour ce métier ne s’est imposé. La première question à laquelle nous allons tenter de répondre est de savoir qui édite. Au début des éditions multimédia, les services éditoriaux traditionnels, qui s’occupaient de publications papier, ont conçu également les cédéroms et autres publications numériques, d’après Jean-Pierre Dalbéra. Corinne Welger-Barbora dans son ouvrage Le Patrimoine à l’ère du document numérique. Du musée virtuel au musée médiathèque expliquait la situation au début des années 2000 et rendait compte de l’introduction de ces nouveaux produits éditoriaux : « […] il faut rappeler que l’inscription du cédérom dans la gamme des productions éditoriales directement ou indirectement associées au musées − […] édition directe par l’institution, coédition avec un éditeur confirmé, pas de participation dans la production éditoriale mais participation scientifique […] − s’est effectuée sous le sceau de l’évidence et sous l’impulsion de la RMN.101 » Selon une production en interne ou externalisée, il existait différentes configurations d’acteurs. Plus loin, au sein de cette analyse de la « responsabilité éditoriale », Corinne Welger-Barboza ajoute : « La confrontation du musée patrimonial à ces nouveaux produits édités renvoie les professionnels du musée à la clarification de leur mission.102 » Alors que les contenus ont augmenté avec l’apparition des sites Internet de musées, des départements multimédia ont été créés pour prendre en charge ces nouvelles publications. D’ailleurs, Jean-Pierre Dalbéra 99

Concernant les nouveaux rôles du conservateur, on peut citer l’exemple de l’initiative « Ask the Curator » pendant laquelle les conservateurs de certains musées répondaient à des questions de visiteurs via Facebook et/ou Twitter, le 1er septembre 2010. 101 Corinne Welger-Barboza, op.cit., p. 67. 102 Ibid, p. 69.

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insista lors de notre entretien sur le « savoir-faire » des départements multimédia des musées, qui s’est construit au fil du développement des contenus numériques. La politique éditoriale numérique du Louvre, tout comme celle de nombreux établissements publics tel que la BNF, revendique la particularité de son offre numérique, à la croisée de différents domaines de compétences : « Le service Internet du Louvre est un véritable service éditorial, qui conçoit, écrit ou fait écrire des contenus originaux propres au média Internet. C'est la construction d'un savoir-faire unique qui est ici en jeu, à la confluence des pratiques de médiation culturelle et des nouvelles technologies.103 » Une nouvelle forme de médiation éditoriale est à l’œuvre dans ces départements. Les acteurs du musée se sont repositionnés selon la nouvelle forme d’intermédiation qu’impliquent ces nouveaux produits éditoriaux numériques. Depuis le début des cédéroms, les formations à la conception multimédia ont été créées. Ainsi, la plupart des webmasters rencontrés lors d’entretien avaient suivi ce genre de formation ou possédaient un cursus dans le domaine documentaire ou de l’histoire de l’art. La majorité des musées, ayant leur propre site Internet, ont une équipe multimédia. Certains font appel à des prestataires extérieurs. D’après l’enquête de l’OCIM sur les sites des musées, 46% des sites Internet des musées ont été conçus en externe ; après la création, 16% des musées gèrent leur site de cette manière. Les créations sont souvent accompagnées d’une exigence de nouvelles compétences, ainsi 73% des institutions proposent une formation aux nouvelles technologies au personnel concerné. Une fois le site créé, 72% des musées le gèrent en interne contre 12% en externe, ce qui révèle l’importance désormais de l’équipe Web dans une majorité d’institutions patrimoniales104. Il existe plusieurs types d’éditeurs Web qui sont représentatifs des différentes étapes de l’évolution du métier. Sur son blog Mixeum, dans un billet intitulé « Quelle équipe Web au musée ? », Samuel Bausson, qui s’intéresse à l’organisation et à la répartition des rôles dans le domaine du multimédia au musée, évoque les différents types de webmaster (fig. 24). Pour chacun, il trace un profil de poste : pour le premier type de webmaster, il explique qu’il « est utilisé dans le sens “classique” des 103

« Politique éditoriale du site Internet », Musée du Louvre, [en ligne] http://www.louvre.fr/llv/apropos/presentation_politique.jsp?CONTENT%3C%3Ecnt_id=10134198673 232610&CURRENT_LLV_FICHE%3C%3Ecnt_id=10134198673232610&FOLDER%3C%3Efolder_i d=9852723696500916 consulté le 04/09/2010 104 OCIM, op. cit., p. 3.

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webmasters des débuts », c’est-à-dire quelqu’un qui possède les connaissances fondamentales mais n’est pas spécialisé ou ne connaît pas de manière pointue certains langages. Puis, il trace un second portrait qui révèle les compétences de gestion éditoriale de celui que l’on nomme également « Web editor » : « Au niveau des contenus, le webmaster […] des débuts a dû s’adapter en quelques années et faire évoluer ses compétences. » Il explique les différentes phases d’évolution du métier : de l’expérimentation, à une période d’utilisation d’outils multimédia (type Flash), à la période « Web édito » : « peu après et avec la délégation de publication via les CMS il y a eu la période « Web édito », on se rendait bien compte qu’il fallait quelqu’un pour gérer les contenus et l’ensemble des contributeurs, à l’image du rédacteur en chef d’un magazine.105 » Il poursuit la description de l’évolution du métier en évoquant le nouveau rôle du webmaster avec l’intégration des réseaux sociaux par le musée et le rôle de community manager, qu’il endosse désormais. Cette personne est « chargée de médiation pour communauté Web », selon les termes de Pierre Mounier106 ; elle gère la présence de l’institution sur les réseaux sociaux, le relationnel avec les internautes et les contenus et informations à diffuser par ce biais. Dans ce dernier cas, les pratiques auctoriales ont fait évoluer le rôle de l’éditeur, notamment dans la gestion d’espace d’écriture et de publication collaborative, que nous étudierons dans la troisième partie, particulièrement à travers l’exemple des blogs. Ces changements ne sont pas sans affectation sur la répartition des tâches au sein de l’équipe Web et du musée. Nina Simon dans son ouvrage Le Musée participatif, où elle décrit toutes les formes éditoriales collaboratives, explique la configuration d’une équipe de musée pour un projet d’édition collaborative. Le chef de projet dirige la collaboration ; le community manager travaille au plus près des participants, notamment en répondant à leurs besoins ; des « instructeurs » forment les participants. Nina Simon introduit un dernier acteur les « Client representatives », qui représente les intérêts des institutions. Les rôles ne sont pas aussi définis dans les faits, mais elle insiste sur le fait de conserver une distinction notamment entre l’équipe proche du public, les instructeurs et le « Client representative ». Ce dernier doit être séparé du reste de l’équipe car il joue un rôle spécifique proche de celui de l’éditeur : « aide les participants à être 105

Samuel Bausson, « Quelle équipe Web au musée ? », Mixeum, 22 juin 2010, [en ligne] http://www.mixeum.net/post/725378670 consulté le 22/06/2010. 106 Pour une définition plus précise de ce métier, lire le billet de Pierre Mounier, « PizzaWeb. Garderons-nous le mot crowdsourcing dans notre langue ? », Blogo-numericus, 4 juin 2010, [en ligne] http://blog.homo-numericus.net/article10527.html consulté le 28/07/2010.

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responsable en leur donnant un avis qui est plus honnête (et potentiellement désagréable) que celui donné par les autres membres de l’équipe.107 » La configuration du département multimédia change ainsi souvent selon sa ligne éditoriale. Dans son article sur l’équipe Web, Samuel Bausson expose les différentes configurations du département qu’il peut exister selon la ligne éditoriale choisie. Si elle est plus axée sur l’interfaçage, le service développera davantage la présentation ou l’interactivité du site. Si les contenus sont majoritaires, l’équipe peut alors travailler sur les services ou sur l’information et la communication ou sur les contenus communautaires108. D’après les entretiens menés et les recherches entreprises, les différentes lignes éditoriales sont souvent déterminées par l’affiliation de l’équipe Web à certains services du musée. Cette observation a été confirmée par Samuel Bausson lors de notre rencontre. En effet, selon lui, il existe l’affiliation « classique », c’est-à-dire lorsque le département multimédia est lié à la communication, avec un travail sur des plaquettes en ligne. Ensuite, certaines équipes appartiennent au service des expositions. Dans ce cas, le webmaster travaille davantage sur des contenus riches, comme des visites virtuelles ou des expositions virtuelles. Il vit au rythme de l’événementiel et conçoit, en amont avec les commissaires, les publications en ligne. L’éditeur Web peut être rattaché au service informatique où il travaillera sur des services en ligne performants. Enfin, il existe des webmasters comme Samuel Bausson, affiliés au service de l’animation. Dans ce cas, les contenus communautaires sur les réseaux sociaux sont majoritaires. Désormais, la place de l’équipe Web est différente car, même si elle rattachée à un département du musée, elle est souvent à la croisée de toutes les autres activités et missions de l’institution. Parfois, le département multimédia a un statut particulier parmi les autres membres de l’institution, en témoigne les affirmations de Samuel Bausson : « Je ne pense pas que nous soyons assez intégrés à la structure de l’institution. Être coupé du reste du personnel est assez normal pour beaucoup de webmasters […]109 » 107

Nina Simon, The Museum Participatory, 2010 [en ligne] http://www.participatorymuseum.org/ consulté le 06/09/2010. 108 Voir schéma d’une équipe, cf., annexes, p. 112. 109 « His being said, I don’t think that we are integrated enough into the structure of the institution. Being cut off from the rest of the staff is pretty normal for a lot of webmasters, who tend to end up doing their own onlin e strategy rather than that of the museum ». « Being a French webmaster- and making it happen- A crossed Interview », Museumstrategy, 6 décembre 2009, [en ligne]

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Pourtant, pour nourrir son site, le webmaster va chercher à déléguer la responsabilité de parties du site à certaines personnes travaillant au musée. Comme le fait remarquer Samuel Bausson, la délégation de la publication des textes a engendré l’apparition de nouvelles fonctions pour l’éditeur Web et pour le personnel de l’institution. Dans le questionnaire que nous lui avons transmis, Diane Drubay explique les différents cas de figure de relais des responsabilités éditoriales : « En général, le webmaster va chercher les informations à travers les départements du musée ou participer aux réunions de services pour faire un point sur ce qui est à publier. D’autres musées se sont organisés pour avoir des interlocuteurs privilégiés concentrant toutes les infos d’un département. Ou bien, les musées ont identifié des chargés de publication au sein des différents départements afin de supprimer tous les intermédiaires et de laisser le webmaster se concentrer sur son travail et l’évolution du site. » Cette délégation de la responsabilité éditoriale a été remarquée au musée du Louvre ainsi qu’au muséum d’Histoire naturelle de Toulouse. Dans le premier cas, Agnès Alfandri, responsable de l’équipe multimédia explique, dans un entretien pour le site Regards sur le numérique : « J’estime à 80% du fond éditorial la production réalisée par les spécialistes des départements, et à une quarantaine le nombre de contributeurs du site au quotidien - alors que mon service comprend vingt personnes. Nous essayons donc d’aller chercher propos, commentaires et expertise à la source. Et tous les textes sont validés par les différents départements scientifiques.111 » La stratégie du Louvre est donc de miser sur une délégation de la production et de la validation des contenus pour une meilleure offre. En laissant le contrôle des contenus aux experts, cette politique de fonctionnement permet à l’équipe Web de se concentrer sur d’autres aspects de la conception du site, comme l’interfaçage. Dans le cas du muséum d’Histoire naturelle de Toulouse, les documentalistes de la bibliothèque ont en charge la partie des contenus riches du site. Les animateurs ainsi qu’une documentaliste prennent part à l’activité du musée sur les réseaux sociaux. Le personnel de l’accueil prend en charge l’agenda du site. La délégation demande un effort d’organisation, comme le dit Samuel Bausson dans un entretien pour http://www.museumstrategyblog.com/museum_strategies/Web-20/ consulté le 04/09/2010. 111 Antoine Bayet, « Le Louvre en ligne : une plateforme communautaire en septembre et un nouveau site Internet en 2011 », Regards sur le numérique, 27 juillet 2010 [en ligne] http://regardssurlenumerique.fr/blog/2010/7/29/le-louvre-en-ligne_une-plateforme-communautaire-enseptembre-et-un-nouveau-site-Internet-en-2011/ consulté le 04/09/2010.

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Archimag : « Je souhaitais intégrer et impliquer l’équipe [du musée] au projet dès le début. J’ai mis en place un comité intermédia, sorte de conférence réunissant les producteurs et diffuseurs-médiateurs de contenu du Muséum. Je tenais à éviter ce que j’avais vu dans ces postes précédents, où l’absence de coordination faisait que chacun réinventait la roue dans son coin avec au final des lignes éditoriales brouillées.112 » Il explique plus loin que ce sont des personnes spontanément motivées qui se sont rattachées à cette mission. L’organisation du muséum est révélatrice d’un phénomène. Désormais, la bibliothèque a un rôle important dans la conception et le développement de contenus en ligne. Comme le dit Soizic Hirel sur son blog Muséologique dans un billet intitulé « La Bibliothèque de musée : rôle(s) et présence en ligne ? » : « De plus, les bibliothèques peuvent mettre à disposition, au-delà d'un accès au catalogue, des produits documentaires, établir des liens avec les réalisations du musée ou d'autres structures... L'image de la bibliothèque de musée s'en trouve certainement renouvelée.113 » Les outils documentaires, que nous avons déjà évoqués pour parler des contenus riches, sont très souvent produits et validés par les bibliothèques des musées. Cette importance des services de documentation est également présente dans une institution comme la Cité des sciences. À ce service, s’ajoute également la participation importante des professeurs détachés dans cette institution qui concourent à la création et à la validation des contenus. Cette organisation demande également des systèmes informatiques adéquats à un travail collaboratif. Depuis plusieurs années, les musées exploitent leurs sites grâce à des systèmes de gestion de contenus, aussi appelé Content Management System (CMS). La plupart des webmasters que nous avons rencontrés utilisent ce type de logiciel pour permettre justement de déléguer certaines tâches éditoriales. Ainsi, Mériam Bensassi explique que chacun des départements doit s’occuper de la page qui lui est dédiée. Pour ce faire, le webmaster s’occupe de la structure et le personnel a

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« Il est absurde d’avoir un site Web 2.0 et un musée 1.0 », entretien avec Samuel Bausson, Archimag, n° 234, mai 2010, p.42-43. 113 Soizic Hirel, « La Bibliothèque de musée : rôle(s) et présence en ligne ? », Muséologique, 22 octobre 2009 [en ligne] http://museologique.blogspot.com/2009/10/la-bibliotheque-de-musee-rolespresence.html consulté le 03/08/2010. Voir également l’article de Sabine Naegelen qui présente les différents services de la bibliothèque du muséum d’Histoire naturelle de Toulouse, « Quelle bibliothèque dans le musée ? », BBF, 2009, n° 2, p. 108-109 [en ligne] http://bbf.enssib.fr consulté le 03/08/2010.

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accès à une page de back office (c’est-à-dire une partie qui permet de gérer le site) qu’elle nourrit. Ces opérations ne nécessitent pas des compétences spécifiques en informatique. Toutefois, certains sites ne fonctionnent pas avec ce type de logiciels et utilisent Dreamweaver qui appartient à la suite Adobe. Avec ce type d’outil, tous les contenus passent par le webmaster et il difficile, voire impossible, de confier la responsabilité éditoriale, comme il est possible de le faire avec un CMS. À travers ces exemples apparaît la disparité de moyens admis au service multimédia. La refonte d’un site est coûteuse, en moyens financiers et en personnel. La plupart des équipes que nous avons rencontrées sont composées de un à deux salariés. Sans compter l’investissement d’autres personnes du musée, ce chiffre est faible, surtout lorsque l’on observe l’effectif du Louvre avec vingt personnes, ou lorsqu’on lit la composition de l’équipe de la Tate donnée par Diane Drubay sur son site Buzzeum : « la Tate Online c’est 2 gestionnaires de contenu, 1 développeur java, 5 éditeurs, 1 architecte technique, 3 Web designers et 1 Web producteur. Cette fine équipe est bien évidemment assistée de 3 producteurs vidéos, 1 responsable de la communication en ligne, 1 responsable de la boutique en ligne, 1 développeur java sénior, 1 chargé des systèmes d’informations et enfin 1 chargé des bases de données.114 » Cette différence de traitement est ainsi présente entre les musées français et les musées anglo-saxons, et entre les institutions françaises elles-mêmes. Comme nous l’avons déjà évoqué, 51% des musées interrogés par l’OCIM pour son enquête de 2007 n’ont pas de site Internet115. Certains ont un blog pour tenir informés les visiteurs, comme le blog du musée Barbey d’Aurevilly116 ou le musée Raymond Lafarge117. De manière plus générale, cette disparité a été également remarquée dans la gestion des collections dans le rapport de Philippe Reichert daté de 2003118. Certains musées peuvent avoir une visibilité sur le Web en bénéficiant d’un espace sur le site d’une autre institution. D’après l’enquête de l’OCIM, « Parmi les 114

Diane Drubay, « Museum next – Matinée du 30 avril 2010 », Buzzeum, 14 mai 2010 [en ligne] Buzzeum consulté le 02/08/2010 115 OCIM, op.cit., p. 3. 116 Blog du musée Barbey d’Aurevilly, [en ligne] http://museebarbeydaurevilly.over-blog.com/ consulté le 04/09/2010. 117 Blog du musée de l’Isle-sur-Tarn [en ligne] http://musee.lislesurtarn.over-blog.fr/ consulté le 04/09/2010. 118 Le sénateur explique a expliqué la situation dans une partie de son rapport intitulée : « Un variété de situations qui révèle des lacunes préoccupantes ». Philippe Reichert, La Gestion des collections des musées, Le Sénat, [en ligne] http://www.senat.fr/rap/r02-379/r02-379.html consulté le 02/08/2010. Même si ce sujet ne concerne pas immédiatement l’édition, les publications, qui valorisent les collections, peuvent remplir cette mission seulement si les fonds des musées sont inventoriés et informatisés.

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institutions n’ayant pas de site propre, certains bénéficient d’une visibilité sur un autre site, la plupart du temps sur le site de la municipalité »119. Les musées de Paris ont ainsi une partie du site de la ville qui leur est consacrée120. L’existence de sites ou de blogs est déterminée parfois aussi par des propositions du personnel, ayant une affinité avec les nouvelles technologies. Ainsi, selon Mériam Bensassi du musée national de la Marine, c’est une question d’initiatives personnelles, plus qu’une question de statut et de tutelle de musée. Nous avons pu remarquer cela face à des blogs ou des sites de petits musées tels celui du musée d’archéologie du Pays de France121 ou le site du familistère de Guise122. Une des solutions adoptée par les musées n’ayant pas les moyens de s’offrir une présence sur le net est la mutualisation des contenus entre institutions. Ces regroupements, présents à différentes échelles, au niveau régional, européen ou international permet au site de pouvoir avoir une visibilité sur le Web et participer à l’élaboration de contenus communs. Déjà, dans le plan PAGSI, que nous avons déjà évoqué et qui a montré l’implication de l’État dans le domaine du numérique, les auteurs évoquaient « la mise en œuvre du programme de portails culturels territoriaux.123 » Le portail des musées de la Haute-Normandie est révélateur de ce regroupement des contenus. Ils proposent des ressources en lignes comme « Images pour la classe » et des « Dossiers à télécharger » selon les différents musées. Des expositions virtuelles sont en préparation, notamment une sur la Normandie et l’Amérique124. Le site des musées du Nord Pas-de-Calais Musenor propose également une base des collections des musées et des publications comme l’exposition virtuelle sur la Renaissance italienne, composée d’une visite chronologique et thématique en 3D à travers les œuvres des différentes institutions de cette région (fig. 25)

125

.

D’autres exemples peuvent être cités tels que le portail de la région Centre126, celui

119

OCIM, op.cit., p. 3. Portail des musées de la Ville de Paris, [en ligne] http://www.paris.fr/portail/loisirs/Portal.lut?page_id=4693 consulté le 04/09/2010. 121 Musée construit autour de trois lieux (musée à Louvres, le site d’Orville à Louvres et la vallée d’Ysieux) [en ligne] http://www.archea-roissyportedefrance.fr/ consulté le 04/09/2010. 122 Site du familistère, [en ligne] http://www.familistere.com/site/index.php consulté le 04/09/2010. 123 La Culture, l’Internet et le multimédia. La politique culturelle numérique, Plan PAGSI, 2001, p.8, op. cit.. 124 Normandie & Amériques. Cent ans d’histoire commune [en ligne] http://www.musees-hautenormandie.fr/rubrique8.php3?lang= consulté le 04/09/2010. Contenu à paraître courant 2010. 125 La Renaissance italienne dans les musées du Nord Pas-de Calais, [en ligne] http://www.musenor.com/vt/renaissanceitalienne/index.html consulté le 04/09/2010. 126 Musées de la région Centre [en ligne] http://www.musees.regioncentre.fr/ consulté le 04/09/2010. 120

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des musées du pays basque127, celui des musées des Landes128. D’autres régions poursuivent ce mouvement de mutualisation, notamment sous l’impulsion d’associations professionnelles comme l’Association générale des conservateurs des collections publiques de France (AGCCPF). Ainsi la région Provence-Alpes Côte d’Azur a créé la plateforme Mosaïque, qui sera disponible en octobre 2010. Comme les sites déjà présentés, elle aura une mission de communication et d’information sur l’ensemble des musées de la région. Le site se présentera sous la forme d’une cartographie, et donnera accès à du contenu audiovisuel lié à certains musées129. La création de contenus éditorialisés par ces regroupements commence seulement à se développer. Toutefois la mutualisation des collections par la numérisation et les bases de données existent depuis longtemps. En effet, au niveau national, de nombreuses bases de collections comme Joconde, Mérimée, Palissy, Portail Design ou Vidéomuseum130 existent depuis longtemps. De même, les programmes de numérisation tels que Mickael au niveau européen se sont développés. Les musées anglo-saxons ont dans ce domaine été exemplaires par la création de plateformes de contenus spécifiques, allant du e-learning aux ressources audiovisuelles131. Aux États-Unis, des initiatives sont proposées et elles dépassent la simple mutualisation de bases de données vers celle de contenus éditorialisés. La plateforme Opencontext offre la possibilité de publier des documents, qui seront en libre accès. Parmi les institutions associées à ce projet, on retrouve des musées. Ces types d’initiatives sont ainsi à intégrer dans le panorama des acteurs éditoriaux dans le 127

Sites et musées en pays basque, [en ligne] http://www.sitesetmuseesenpaysbasque.com/ consulté le 04/09/2010. 128 Sites et musées des Landes [en ligne] http://www.sites-musees-landes.fr/ consulté le 04/09/2010. 129 Le projet Mosaïque a été présenté sur le site Culture labs qui recense les projets innovants dans le domaine muséal [en ligne] http://culturelabs.culture.fr/fiche.html?id=61&tri=cat consulté le 02/08/2010. Voir également le projet de médiation sonore de l’AGCCPF Franche-Comté [en ligne] http://culturelabs.culture.fr consulté le 02/08/2010. 130 Joconde est la base des collections de France. Les monuments historiques avec la base Mérimée. Les objets classés avec la base Palissy. Archives photographiques (base Mémoire). PortailDesign recense les objets et le mobilier du XXe siècle. Videomuseum est une base spécialisée en art contemporain, composé de 59 collections, 21 100 artistes, 256 000 œuvres et 151 800 images, consultables dans chaque organisme (art moderne et art contemporain). Pour voir l’historique des bases de données, lire l’article de Martine Tayeb, « Bases de données et portails culturels », Culture et recherche, op.cit. 131 On peut citer comme exemple : le réseau mobile interne entre 9 musées américains qui permet une connexion classique mais aussi d’accéder à des contenus en podcast et des visites virtuelles (pour certains lieux) ; Artbabble qui est une plateforme de promotion et diffusion de vidéos sur l’art initiée par Indianapolis Museum, 20 musées mondiaux y contribuent ; Creatives spaces plateforme de 9 musées anglais donnant accès à leurs œuvres, à l’initiative du Victoria & Albert Museum, possibilité de créer un notebook, espace personnalisé, permettant de rassembler des œuvres, possibilité de créer des groupes autour de thèmes précis. Pour accéder à la liste complète des plateformes recensées.

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domaine culturel. Eric Kansa de l’université de Califormie et Sarah Witcher Kansa expliquaient dans un article publié au moment de l’International Cultural Heritage Informatics Meeting en 2007 l’importance de cette plateforme pour lier le musée au monde de la recherche. Les membres de la communauté universitaire peuvent profiter des collections du musée déposées sur cette base pour travailler et croiser des informations de plusieurs institutions. Cette plateforme révèle que l’intérêt d’un regroupement ne réside pas seulement dans la possibilité d’offrir une visibilité à un musée, mais aussi que les collections puissent être rassemblées. Eric Kansa et Sarah Witcher développent leur article sur le sujet de l’open access, principe qui sous-tend Open Context. Certaines collaborations entre musées aboutissent à la création d’outils d’édition spécifiques aux besoins des institutions patrimoniales. Ce fut le cas d’un outil comme Pachyderm, créé conjointement par New Media Consortium (NMC), le musée d’art moderne de San Fransisco (SFMoMA) et financé par l’Institute for Museum and Library Services (IMLS). Ce logiciel libre, fondé sur le format Flash, permet la valorisation de sources des bibliothèques et des musées, sur le modèle de l’exposition virtuelle. De même, plus récemment, Omeka, un logiciel libre permettant de créer des expositions virtuelles et de valoriser plus généralement les fonds des institutions patrimoniales, a été principalement créé par la société d’histoire de Minnesota et a été financé par l’Institute for Museum and Library Services (IMLS). Ce logiciel, fondé sur une interface proche de celle du logiciel de blogging Wordpress est utilisé par des bibliothèques, des musées, des universitaires, des archivistes, des professeurs et des « enthousiasts », pour reprendre le terme utilisé dans la présentation de l’outil132. Par rapport à Pachyderm, ce logiciel est plus stable et pérenne ; il structure davantage les données. La mutualisation des musées sur le Web ne se fait pas que par leur regroupement sur un site Internet, mais s’effectuait par la création d’outils faciles d’utilisation permettant à chaque institution d’avoir une visibilité sur le Web. L’intégration de ces logiciels nécessite de la part du personnel une formation continue. Afin de connaître les innovations techniques, une veille est indispensable pour choisir les services les plus adaptés au contenu du musée. Bien souvent, ce travail est pris en compte par le webmaster, qui s’insère dans un réseau de 132

À lire, la présentation d’Omeka [en ligne] http://omeka.org/about/ consulté le 28/07/2010. Il est intéressant de voir dans la partie « Showcase » les exemples d’utilisation de ce logiciel, [en ligne] http://omeka.org/showcase/ consulté le 28/07/2010 (fig. 26).

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professionnels des musées, à travers des manifestations tels que Museum and the Web ou la communication via des blogs de certains webmaster ou la présence de ceux-ci sur les réseaux sociaux tels que Twitter et Facebook. Comme le disait Samuel Bausson lors de notre entretien, le problème du webmaster est qu’il est souvent isolé. Ce réseau professionnel s’est créé depuis de nombreuses années, compte tenu de l’ancienneté de ces manifestations sur les musées et le numérique134. D’après Alain Romang et Samuel Bausson, il permet d’avoir des personnes de confiance avec qui communiquer et apprendre. À cela s’ajoute une forme de concurrence et de challenge entre les différents webmasters. Il est difficile de comparer le métier de l’édition traditionnelle avec le travail d’un département multimédia. Il semble qu’il y ait eu une forme de répartition de la fonction éditoriale, entre l’équipe Web, qui supervise et met en place les processus techniques et le personnel du musée qui produit et valide les contenus. Geneviève Vidal dans son ouvrage Contribution à l’étude de l’interactivité remarquait déjà cela : « Dans les musées, les services chargés de la publication des sites Web sont les services informatique, culturel, documentation, communication, édition, parfois la direction en est responsable. […] Dès lors, le projet multimédia crée des dynamiques nouvelles au sein du musée.135 » Parallèlement à ces changements d’organisation de travail, les institutions n’ayant pas de visibilité sur Internet se sont rassemblées et sont devenues des nouveaux producteurs de contenus, rassemblant les collections de plusieurs musées. Le responsable des publications possède de nombreuses facettes, qui sont déterminées par des facteurs de personnes, de structure et de moyens. Face à cette diversité d’éditeurs, les contenus à destination de publics et d’usages spécifiques sont de plus en plus importants. C’est en analysant les contenus et les supports sur lesquels ils sont diffusés que nous allons pouvoir tracer les portraits de publics ciblés par les musées.

134 135

Rappelons que la première conférence de l’ICHIM eut lieu en 1991. Geneviève Vidal, Contribution à l’étude de l’interactivité, op.cit., p.124.

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b) Les publics visés et leurs usages Ces dernières années, la politique des publics a pris une place de plus en plus importante. Alors que les études sur le public fréquentant le musée entérinaient la vision d’une institution visitée en majorité par une classe cultivée136, l’intégration du musée à Internet a changé le rapport de l’institution au public. Avec leurs sites, les musées ont renforcé leur relation avec les visiteurs. L’usage des technologies numériques est devenu une nouvelle forme de médiation, qui s’est fortement développée lors de ces dernières années par l’utilisation d’outils collaboratifs. Mais il est devenu un canal de diffusion particulier. La preuve de cette place du public est visible dans les politiques éditoriales des musées. Dans la présentation de son site, le musée du Louvre introduit « le souci du public » pour définir le projet Web de l’institution. Cet élément est développé dans le texte de la manière suivante : « Le souci des publics. Un espace pour les jeunes, un autre pour les professionnels, les journalistes, les enseignants, les handicapés : le site permet un regroupement des informations essentielles aux uns et aux autres.137 » L’enquête de l’OCIM de 2007 révèle la vision qu’ont les personnels de musée d’Internet. Les premiers objectifs du site sont de « sensibiliser le public » et de le « fidéliser »138. L’enquête développe ce sujet : « […] les musées définissent leur site Internet comme un moyen de toucher tous les publics : scolaires, étrangers, handicapés, ou encore enseignants. » L’enquête donne ensuite des extraits d’entretiens permettant de voir les termes associés à cette idée « richesse du contenu, ciblage des publics », « accessible au plus informé comme un plus novice », « la diffusion de l’information en masse et à l’international » ». Le directeur du Witney Museum, Maxwell L. Anderson, avait également vanté la possibilité pour le Web de toucher de nouveaux publics : « car nous atteindrons des publics qui jusqu’à présent considéraient les musées comme des forteresses obscures ou intimidantes »139. 136

Voir à ce propos l’étude de Pierre Bourdieu et d’Alain Darbel, L’Amour de l’art : les musées d’art européens et leur public, Paris : Minuit, 1969. 137 « À propos », histoire du projet multimédia du Louvre, [en ligne] http://www.louvre.fr/llv/apropos/fiche_apropos.jsp?CONTENT%3C%3Ecnt_id=10134198673232603 &CURRENT_LLV_FICHE%3C%3Ecnt_id=10134198673232603&FOLDER%3C%3Efolder_id=985 2723696500916 consulté le 04/09/2010. 138 OCIM, op.cit., p. 4. 139 M.L. Anderson, « L’impact des nouvelles technologies sur les recherches et l’enseignement dans les

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Une des missions du musée est d’accommoder les offres à chaque besoin, mais cela n’est pas sans difficulté, comme en témoignent ces propos de Jean-Michel Tobelem : « Après tout, les musées ne souhaitent-ils pas s’efforcer – autant qu’il est possible – de répondre aux souhaits hétérogènes de leurs différents publics : résidants de proximité, scolaires, touristes, visiteurs en groupe, etc. ? […] Comment « segmenter » cette base de données, même embryonnaire, pour proposer des services supplémentaires aux visiteurs – dans l’ordre pédagogique, touristique ou commercial – en croisant différents types d’information ? »140 Pour pouvoir offrir à chacun des visiteurs des contenus adaptés, l’Internet a permis de nouveaux modes de connaissances du visiteurs. Pourtant, d’après JeanPierre Dalbéra, les musées connaissent peu leurs internautes. Il déplore l’absence d’études sur les usages de la visite des sites Web des musées, notamment sur le parcours de l’internaute. Il constate un manque de compétence pour analyser les études d’évaluation des sites. Les seuls éléments analysés à partir des évaluations de fréquentation sont le nombre de visites par mois et leurs provenances. Il est possible de constater les sections les plus parcourus dans le site. Quand la moyenne de pages consultées sur un site est de dix à douze pages, la publication électronique a réussi à capter ses visiteurs. S’il s’agit de trois pages visitées, en moyenne, soit la forme du site n’est pas adaptée aux lecteurs le sujet n’intéresse pas. Le site Internet permet de pouvoir mieux comprendre les formes à succès, les espaces les mieux fréquentés par le public, et de mieux évaluer les besoins du lecteur. La Tate a dévoilé lors de Museum next les chiffres de fréquentation de son site. Ces chiffres permettent de définir les attentes de l’internaute et les contenus à succès. En l’occurrence, le site de ce musée reçoit un million et demi d’internautes uniques, dont 42% au-delà du Royaume-Uni. Les contenus qui remportent le plus de succès sont la Tate Channel, la Tate Kids et les collections. Diane Drubay, qui présente ces résultats dans un des billets de son blog, ne manque pas de préciser que ces observations peuvent surprendre. Elle ajoute : « […] sur la plupart des sites Internet de musées, les pages les plus visitées sont les informations pratiques puis le calendrier des événements. Nous sommes donc face à une communauté d’internautes déjà conquis,

très

fidèles

et

grands

consommateurs

de

contenus

musées », dans Jean Galard dir., L’avenir des musées, actes de colloque au musée du Louvre en 2000, Paris : RMN, 2001, p. 379. 140 Jean-Michel Tobelem, op. cit.

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(vidéos/enfants/œuvres).142 » Certains musées, pour mieux comprendre leur public et leur besoins, et donc définir une ligne éditoriale adaptée à ses internautes, décident de proposer des questionnaires à destination des utilisateurs. Depuis longtemps, des études ont déjà été menées pour connaître l’internaute. En France, en 1999, une étude avait été menée par la Direction des musées de France sur les pratiques et représentations des utilisateurs de sites de musées sur Internet143. Mais désormais, le musée fait directement appel à ses internautes pour comprendre leurs besoins. D’une méthode quantitative avec l’étude des chiffres de fréquentation, on passe à une analyse qualitative permettant de cibler les besoins. La National Gallery de Washington, après avoir effectué ce type d’étude, a définit une typologie de visiteurs dont font partie l’amateur ou le prescripteur local. Le musée Rodin a également consulté les internautes au moment de la refonte de son site Internet. La Tate Liverpool a lancé un sondage en août 2009 pour connaître les usages des utilisateurs et visiteurs de leurs sites dédiés à des expositions temporaires ; en échange, cinq personnes pouvaient gagner 100 livres Sterling. De même, le Walker Art Center a procédé de la même manière en offrant en récompense un iPod shuffle. Le MoMA a décidé de mettre en valeur les travaux en direction des publics comme les cinéphiles ou les scolaires. Les réseaux sociaux peuvent être aussi un moyen de connaître les besoins et les réactions des internautes face à des contenus. Ainsi, le MoMA a consulté ses fans sur Facebook pour connaître leurs impressions sur le nouveau site du musée. En amont, pour la refonte, ou en aval. Ces méthodes changent la manière dont les sites et les contenus sont construits. Certaines évaluations sont faites de manière plus développés comme l’a révélé l’article de Phyllis Hecht « Vision de spectateur : étude d’usage à distance » publié lors de « Museum and the Web 2006 ». Il s’agissait d’un compte rendu de l’évaluation de la National Gallery of Art de Washington qui se fondait sur une enquête sur des visiteurs au sein du musée, une étude sur des utilisateurs du site, un exercice de description libre de toutes les activités proposées sur le site et un questionnaire sans le

142

Diane Drubay, « Museumnext matinée du 30 avril 2010 », http://www.buzzeum.com/2010/05/museumnext-matinee-du-30-avril-2010/ consulté le 30/06/2010 143 Roxane Bernier et Alexandra Vol, Pratiques et représentations des utilisateurs de sites de musées sur Internet, rapport sous la direction de Bernadette Goldstein, Paris : Direction des musées de France, 1999, p. 21.

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site pour connaître les impressions des internautes et leurs besoins144. Ces informations deviennent de plus en plus importantes pour la conception de publications, mais leur existence dépend des conditions financières de l’établissement, qui parfois ne peut développer autant de moyens pour connaître ses visiteurs145. Nous allons ainsi observer du point de vue des contenus quels types de publics visés par les musées sont présents sur leurs sites Internet. Après une présentation des principaux internautes visés, nous tenterons de démontrer que les musées ciblent à la fois le grand public et des publics de plus en plus précis. Ce sont ces derniers qui retiendront notre attention. Les musées proposent depuis longtemps des services aux chercheurs. Ces services sont souvent matérialisés à travers des centres de documentation et de recherche. Toutefois, le domaine de l’édition numérique s’est également tourné vers cette communauté qui est désormais habituée à utiliser les outils numériques. Comme nous l’avons déjà évoqué dans la partie sur les contenus enrichis, certains musées possèdent un département de recherche qui a pour objectif d’animer et de diffuser les connaissances sur les collections de l’institution. D’après l’enquête de l’OCIM : « Seul un musée sur deux conçoit un site Internet culturel comme un outil à destination des spécialistes »146. Nous avons déjà évoqué les activités du château de Versailles qui diffuse des publications électroniques dédiés aux chercheurs grâce à son centre de recherche. Il édite un bulletin, des éditions critiques, des actes de colloques et des outils multimédia. À ces publications s’ajoute la mise à disposition de documents numérisés et de base de données sur des sujets liés au château147. Le musée du Quai Branly a lui aussi été plusieurs fois remarqué par ses efforts envers la communauté de recherche : le musée s'associe à plusieurs centres de formation et propose des conférences retranscrites sur le site. De la même manière que pour le château de Versailles, la diffusion par l’édition électronique s’accompagne et s’appuie

144

Phyllis Hecht, « Viewing the Viewer : remote usability testing » dans J. Trant and D. Bearman (ed.), Museums and the Web 2006: Proceedings, Toronto: Archives & Museum Informatics, 2006 [en ligne] http://www.archimuse.com/mw2006/papers/hecht/hecht.html consulté le 04/09/2010. 145 Voir l’article de Mériam Bensassi, concernant la refonte des sites, qui abordent la question de la connaissance des publics. Mériam Bensassi, « Du partage de contenus au partage d’expériences, bonnes pratiques et leçons pour une refonte », Museonet 2.0, juin 2010, [en ligne] http://www.museonet2.com/?p=908 consulté le 04/09/2010. 146 OCIM, op.cit., p. 5. 147 Centre de recherche du château de Versailles, [en ligne] http://www.chateauversailles-recherche.fr/ consulté le 04/09/2010.

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sur des données numérisées et des bases de données répertoriant les œuvres148. Enfin, le musée des Confluences propose sa revue Les Cahiers du musée des Confluences en version PDF sur son site Internet149. Mais le site est également devenu un espace pédagogique. Cette dernière expression peut recouvrir plusieurs réalités : il peut correspondre à un site proposant des ressources au grand public, aux amateurs, aux enfants ou aux professeurs. Cette dimension éducative révèle un panel de publics ciblés par les musées comme le prouve d’ailleurs la définition que donne l’OCIM d’un « site éducatif » : « un site éducatif est quant à lui pensé pour éveiller la curiosité des internautes, enrichir leurs connaissances et proposer des ressources accessibles aussi bien à l’ensemble des publics qu’à des publics ciblés, enseignants ou enfants.150 » Internet a souvent été vu comme un outil facilitant l’apprentissage. En 1998, dans un article intitulé « Les musées français et étrangers face à l'Internet »151 paru dans Le Journal des arts, Joël Girard pose la question suivante : « L’Internet sauvera-t-il l’enseignement artistique ? » en parlant du site Louvre.edu, site éducatif du musée du Louvre à destination des « élèves, mais aussi [des] enseignants ». Ce site payant, dans lequel sont disponibles des reproductions d’œuvres, des visites à thèmes, etc., est mis à disposition d’établissements pour en faire un espace ressource. Depuis, les institutions développent davantage leur espace pédagogique ou « éducation » créés en majorité pour les enseignants, leur offrant des outils pour accompagner leurs cours. Les contenus pédagogiques à destination des professeurs sont particulièrement présents sur le site de la Cité des sciences et de l’industrie. Lors de notre rencontre, Pauline Bougon, responsable des publications du site « éducation » de cette institution152, expliquait que les contenus (itinéraires de visites, documents pédagogiques, etc.) proposés par le site sont principalement adressés à des enseignants du cycle primaire qui ne sont pas des spécialistes. Des professeurs détachés travaillant à la Cité et parfois les médiateurs ou les

148

Section sur le site du musée « Enseignement et recherche » du site du musée du Quai Branly, [en ligne] http://www.quaibranly.fr/fr/enseignement.html, consulté le 04/09/2010. 149 Section du site sur le site du musée « Les Cahiers du musée des Confluences » [en ligne] http://www.museedesconfluences.fr/musee/publications/publications_scientifiques/cahiers_museedesco nfluences/ consulté le 04/09/2010. 150 OCIM, op.cit., p. 5. 151 Joël Girard, « Les musées français et étrangers face à l'Internet, part I », Journal des arts, n° 52, janvier 1998 152 Section « Éducation » du site d’Universcience [en ligne], http://www.universcience.fr/fr/education consulté le 04/09/2010.

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documentalistes sont les rédacteurs de ces contenus, ce qui permet d’offrir des ressources pouvant allier l’exposition à des sujets du programme scolaire par exemple153. Pauline Bougon a précisé que l’usage de ces contenus en ligne commence à s’étendre à des publics au-delà des professeurs. Ainsi, les responsables de centre de loisirs ou du domaine du périscolaire sont davantage sensibles à ce genre d’offre éducative, et ces contenus sont également conçus pour eux. Le domaine, de ce qu’on a appelé « l’éducatif », est composé de contenus de plus en plus spécifiques à des groupes de personnes ou des situations. Par exemple, le musée national des Arts et Métiers propose dans sa section « Scolaire et périscolaire » des contenus pour différents types de professeurs selon le niveau scolaire (de la sixième au lycée) et la discipline (des matières scientifiques à la littérature en passant par les arts appliqués)154. Pour répondre directement aux besoins des visiteurs, le Saint Louis Art Museum a mis en place un projet où des élèves ont conçu une visite virtuelle du musée avec le personnel de l’institution. Cette visite est constituée de vidéos et de « zoom » sur des œuvres accompagnées de texte. Ce contenu est destiné aux professeurs afin de préparer la visite du musée155. Quelques institutions ont développé la dimension pédagogique de leur site en offrant une plateforme d’e-learning. Certains perçoivent ces types d’initiatives comme une suite logique de l’évolution de la mission éducative, comme l’indique Joëlle Le Marec : « […] l’exploitation des sites de musées par des enseignants peut déboucher sur la conception de sites de communautés pédagogiques qui ne s’inscrivent pas dans l’espace médiatiques des sites de musées consultés, mais dans d’autres espaces médiatiques, parfois eux-mêmes institutionnels.156 » Peu d’exemples espaces d’e-learning existent. Parmi ceux-ci, on peut citer le module pour professeurs et élèves NGA Classroom (fig. 27). Cette plateforme d’e-learning fut développée par la National Galery of Art de Washington pour des professeurs et des élèves. Elle se fonde sur cinq thèmes autour desquels sont développés des activités pour les élèves, des cours et des exercices imprimables157. Les contenus ne sont pas uniquement 153

Voir l’entretien avec Pauline Bougon. Cf. annexe p. 141. « Dossiers de l’enseignant », site du Musée national des arts et métiers, [en ligne] http://www.artset-metiers.net/musee.php?P=175&lang=fra&flash=f consulté le 04/09/2010. 155 Virtual Tour of the Saint Louis Art Museum, [en ligne] http://www.sacreative.com/demos/virtualmovie/ consulté le 04/09/2010. Ce contenu composé de vidéos et de textes a été conçu par des élèves d’écoles proches du musée. Il a pour objectif de préparer les visites des enfants au musée. 156 Joëlle Le Marec, Public et musée : la confiance éprouvée, Paris : L’Harmattan, 2007, p.148. 157 Projet NGA Classroom, [en ligne] http://www.nga.gov/education/classroom/index.mhtm consulté le 154

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destinés aux professeurs enseignant des disciplines artistiques : on peut y trouver des problèmes de mathématiques qui se fonderont sur un des cinq thèmes de départ. Trois moteurs de recherche, selon les thématiques (art, genre, mythologie, etc.), les disciplines (science, géographie, etc.) et les artistes donnent accès rapidement à des contenus précis. Certaines plateformes de ce genre se sont constituées autour de plusieurs institutions. C’est le cas de Webquests (fig. 28) mis en œuvre par neuf musées anglais158 qui a été créé dans le cadre d’un projet gouvernemental intitulé The National Museums Online Learning Project (NMOLP). Ce site propose, à travers les collections des neuf institutions associées, des cours en ligne, permettant aux professeurs d’avoir leur propre espace de création de cours à partir des ressources des musées. En France, le Muséum national d’histoire naturelle, déjà impliqué dans le domaine par son travail pour l’Université virtuelle environnement & développement durable159 créée en 2005, est en train de développer une plateforme à destination des professeurs et des étudiants160. Face aux ressources pour les enseignants (qui parfois sont adressées aussi aux élèves), se trouvent des sections réservées aux enfants sur les sites de musées. Pour Universciences et le Musée national des arts et métiers, il s’agit de la partie « Junior », pour le muséum d’Histoire naturelle de Toulouse « Muzeo’jeunes ». La plupart des sites, qui développent ce type de contenus pour les enfants, propose des activités et des jeux. Ce dernier type est majoritaire ; dans le cas des musées, la visée pédagogique est toujours mise en avant, on pourrait ainsi parler davantage de serious games que de simples jeux. Un des musées les plus innovants dans ce domaine est celui de la Tate, appelé Tate Junior. Il se divise en plusieurs parties : les jeux, les activités, un espace galerie permettant à l’enfant de regrouper ces travaux et des films.

04/09/2010. 158 Webquests est rendu possible grâce au concours de La Tate, la National Gallery, le British Museum, le V&A museum, la Wallace Collection, le Natural History Museum, la National Portrait Gallery, l’Imperial War Museum et le Royal Armouries, [en ligne] http://nmolp.tate.org.uk/Webquests/ consulté le 04/09/2010. 159 Présentation de l’association UVED (Université virtuelle environnement & développement durable [en ligne] http://www.mnhn.fr/museum/foffice/science/science/Enseignement/srubElearning/ssomElearning/fiche Elearning.xsp?ARTICLE_ARTICLE_ID=17879&idx=1&nav=liste consulté le 04/09/2010. 160 Présentation de la future plateforme de formation à distance du Muséum national d’histoire naturelle [en ligne] http://www.mnhn.fr/museum/foffice/science/science/Enseignement/srubElearning/ssomElearning/fiche Elearning.xsp?ARTICLE_ARTICLE_ID=17859&idx=0&nav=liste consulté le 04/09/2010.

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Comme nous le disions plus haut, cette partie du site de la Tate est l’une des plus fréquentées,

cela

vient

confirmer

l’importance

de

ce

genre

de contenus adressés aux enfants. Ainsi, la part éducative des sites des musées est importante au vu des contenus proposés pour les professeurs, élèves et enfants. Néanmoins, comme nous l’avons annoncé au début de cette partie, les musées s’efforcent de proposer des publications pour toucher les amateurs. Ce public captif est un type de lectorat à fidéliser pour les institutions. Le blog Innova news d’Universcience est une initiative intéressante de ce domaine (fig. 29). Cet espace de veille ne concerne pas directement le monde de la recherche mais est adressé à « la communauté des internautes qui se passionne pour les nouvelles technologies, la recherche et l’innovation en général »161. Ce blog donne accès à des informations dans des domaines particuliers de la science (biologie, médecine, nanotechnologie, spatial, etc.) Il propose des billets complets et référencés sur chaque innovation. Ses auteurs sont des « spécialistes, des blogueurs, des journalistes, des entrepreneurs, des enseignants » qui appartiennent au « Club des observateurs de l’innovation ». Cette segmentation signifie également un ciblage plus spécifique, que nous avons déjà pu remarquer dans le domaine des publications éducatives. Cette spécialisation est particulièrement remarquable dans les ressources du MoMA. Ce dernier a développé dernièrement un projet qui a été remarqué lors de la conférence « Museum and the Web 2010 » qui s’intitule « Meet me »162 (fig. 30). Ce programme est dédié aux personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer. Le site indépendant attaché à ce programme propose des ressources comme des parcours de visites adaptés aux personnes atteintes de cette maladie. Ce type de publications rappelle la faible prise en compte des handicaps dans les publications en ligne et les sites Internet. Ces dernières années, l’accessibilité des contenus sur les sites publics est devenue une des préoccupations de l’État. Cette notion peut considérablement modifier les contenus en ligne si elle est intégrée dans le projet Web du musée. Un des premiers types d’amélioration peut être la traduction des contenus. L’enquête de l’OCIM révèle que 30% des musées offrent du contenu 161

S. n., « À propos », blog Innova News, [en ligne] http://www.cite-sciences.fr/innovanews/a-propos/ consulté le 04/09/2010. 162 Meet me, the MoMA’s Alzheimer project, [en ligne] http://www.moma.org/meetme/index consulté le 04/09/2010.

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traduit. Toutefois, seuls 16% des sites Internet sont accessibles aux personnes handicapées. Les auteurs de l’enquête précisent le regret des institutions de ne pouvoir offrir des contenus plus spécifiques à des publics ciblés (handicapés, jeunes, nonvoyants, etc.)163. Pourtant, une loi exige l’accessibilité des contenus à tous. La mise en application pour octobre 2010 de la loi n°2005-102 du 11 février 2005 sur l'égalité des chances stipule que « les services de communication publique en ligne des services de l'État, des collectivités territoriales et des établissements publics qui en dépendent doivent être accessibles aux personnes handicapées.164 » Les sites doivent donc prendre en compte les critères du label AccessiWeb165. Pauline Bougon de la Cité des sciences précisait que les sites publics sont en train de mettre en œuvre cette exigence : ils intégrent des logiciels de reconnaissance vocables, ils rendent accessibles les contenus au clavier et ils conçoivent plus clairement la hiérarchisation des liens. Certains sites ont déjà développé des parties accessibles comme celui du musée du quai Branly. L’agence Gaya, qui s’occupe de la maintenance du site, a conçu une partie du site dédiée aux handicapés qui est entièrement accessible. Pour les sourds et malentendants, il existe une présentation du musée en langage des signes. Pour les visiteurs aveugles et malvoyants, une série de textes décrivent les bâtiments du musée et une sélection d’objets. Un agenda des « rendezvous accessibles » est proposé166. Le site sur l’histoire de la ville de Saint-Denis, conçu par la MRT et la ville de Saint-Denis, propose, entre autres, un glossaire avec une traduction vidéo en langage des signes des textes167 (fig. 31). Une page du site intitulé « Accessibilité »168 développe d’ailleurs toutes les normes auxquelles le site est soumis, notamment celles du W3C, le consortium qui met en place les normes Web169. Ces exigences d’accessibilité déterminent le travail éditorial, qui doit allier un graphisme agréable et un contenu visible, lisible et accessible à tous. Toutefois, ce 163

OCIM, op. cit., p. 7. « Accessibilité du site », site du ministère de l’Éducation, [en ligne] http://www.education.gouv.fr/cid2587/accessibilite.html consulté le 04/09/2010. 165 AccessiWeb, Centre de ressources et de recherche sur l'accessibilité du Web [en ligne] http://www.accessiWeb.org/ consulté le 04/09/2010. 166 « Agenda les rendez-vous accessibles », site du musée du quai Branly, [en ligne] http://www.quaibranly.fr/fr/accessibilite/visiteurs-deficients-visuels/agenda-les-rendez-vousaccessibles.html consulté le 04/09/2010. 167 « Saint-Denis en images », Saint-Denis une ville au Moyen Âge, [en ligne] http://www.saintdenis.culture.fr/fr/stdimages_signes.htm consulté le 04/09/2010. 168 « Accessibilité », Saint-Denis une ville au Moyen Âge, [en ligne] http://www.saintdenis.culture.fr/fr/accessibilite.htm consulté le 04/09/2010. 169 World Wide Web Consortium, [en ligne] http://www.w3.org/ consulté le 04/09/2010. 164

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n’est pas les seuls éléments qui vont déterminer les produits éditoriaux. Les usages de publics, notamment en termes de support numérique, obligent les éditeurs Web à penser leurs contenus pour les sites et d’autres supports. Dans son article intitulé « Internet et les musées. De nouvelles offres pour de nouveaux usages », Thomas Aillagon de la Cité des sciences explique l’enjeu du numérique de ces dernières années : « Aujourd’hui, [l’] offre en ligne constitue une offre à part entière et le site Internet de la Cité doit contribuer à son rayonnement au-delà du seul site physique […]. La Cité a une véritable vocation d’intermédiation entre des producteurs de contenus (organismes de recherches, […]) et des diffuseurs de plus en plus nombreux […] »170 L’auteur rend bien compte des défis du musée, dans sa mission de médiation éditoriale. D’une part, il se doit d’être le relais de la production académique ; d’autre part, il doit offrir ce contenu sur tous les canaux de diffusion, du site au réseau social en passant par le smartphone. Le public change et ses usages aussi, donc le musée s’adapte. Thomas Aillagon explique plus loin : « Les comportements des internautes évoluent, sous les effets conjugués de la généralisation de l’usage d’Internet […] » L’usage plus répandu du smartphone oblige les éditeurs à penser des formes pouvant s’adapter à leur utilisation et à leur forme. L’édition en ligne s’ouvre alors à de nouvelles formes de contenus. Ainsi le musée d’Orsay a été à l’initiative d’un feuilleton en six épisodes intitulé Point au couteau écrit par Malika Ferdjoukh, disponible sur Iphone. Cette création littéraire accompagnait l’exposition « Crimes et châtiments »171. Beaucoup de musées souhaitent être présents sur ce genre de supports en développant des applications dédiées au musée ou en créant des contenus liés aux expositions, comme nous venons de l’évoquer avec l’exemple du musée d’Orsay172. Cela demande de se plier à différents standards. Le musée de Brooklyn a ainsi développé une application pour Apple et pour Androïd. Alors que le site est actualisé, l’application, qui présente le musée, reste identique. Le coût du développement de 170

Thomas Aillagon, «Internet et les musées. De nouvelles offres pour de nouveaux usages », Culture et recherche, n° 118-119, 2008, p. 35. 171 Nicolas Gary, « Peint au couteau, de Malika Ferdjoukh, épisode 4 à télécharger », Actualitté, 11 avril 2010 [en ligne] http://www.actualitte.com/actualite/18245-roma-feuilleton-telecharger-peintcouteau.htm consulté le 12/04/2010 ; l’intégralité des épisodes est téléchargeable sur le site d’Actualitté et sur le site du musée d’Orsay avec le texte intégral, [en ligne] http://www.museeorsay.fr/index.php?id=notice_publication&L=0&pubid=3742&no_cache=1 consulté le 12/04/2010. 172 Parmi les créations d’applications, nous pouvons citer celles du musée des beaux-arts de Lyon pour l’exposition consacrée à l’artiste Ben, celle de la National Gallery à Londres pour l’exposition « How is it » de Miroslaw Balka, l’application du musée Chagall, du Musée du Louvre, du musée Fernand léger, musée de Cluny et enfin celle du Grand Palais.

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nouvelles mises à jour est en effet trop important. Cette stratégie de visibilité sur tous supports est aussi liée à celle de l’accessibilité aux contenus, comme l’affirme l’un des responsables du musée de Brooklyn : « Grâce à plusieurs canaux de diffusion, nous espérons que cela rendra notre contenu pour téléphones mobiles le plus accessible possible.173 » L’ouverture à ces nouveaux supports de lectures que sont les téléphones portables, est également un moyen pour le musée de ne pas satisfaire qu’un public acquis. Il peut attirer de nouveaux visiteurs, comme l’affirme Agnès Alfandri, responsable du département multimédia du Louvre : « L’application iPhone du Louvre a été lancée il y a un an, elle est gratuite, et a été téléchargée à 2,5 millions de reprise : c’est évidemment un très grand succès, mais nous n’allons pas nous arrêter là ! Des développements sur d’autres systèmes d’exploitation sont en cours, et vont nous permettre de toucher un public sociologiquement plus large. C’est l’un de nos enjeux : nous savons que l’utilisation des smartphones n’est pas réservée à une élite, loin de là, et nous comptons bien nous en servir pour aller vers les gens.174 » Comme nous l’avons déjà évoqué, l’exploitation des tablettes de lecture commence à se développer. Alors que la plupart des musées ne propose pas de contenus spécialisés pour les tablettes de lecture, l’iPad a suscité davantage d’enthousiasme. Le musée du quai Branly a développé son application qui propose l’agenda complet de ses manifestations, une présentation en vidéo du musée, des promenades de découverte des collections à faire dans le musée ainsi que des informations pratiques, dont un plan d’accès interactif. Cette application, qui n’est pour l’instant que le contenu du site adapté, n’offre pas de publication à proprement parler. Le musée italien de la bande-dessinée a mis en place une visite guidée du musée sur iPad175. L’usage qu’en ont fait la plupart des institutions est souvent lié au moment de la visite176. Cette tablette a suscité beaucoup de commentaires sur les 173

“We are hoping that this makes our mobile content accessible via as many avenues as possible”. Shelley Bernstein, « Brooklyn Museum Mobile Web on iPhone and Droid », Community: bloggers@brooklynmuseum, 27 juillet 2010, [en ligne] http://www.brooklynmuseum.org/community/blogosphere/bloggers/2010/07/27/brooklyn-museummobile-Web-on-iphone-and-droid/ consulté le 04/09/2010. 174 Antoine Bayet, « Le Louvre en ligne : une plateforme communautaire en septembre et un nouveau site Internet en 2011 », op.cit. 175 « Le musée italien de la BD prépare des visites guidées par iPad », Actualitté, 2 septembre, [en ligne] http://www.actualitte.com/actualite/21210-musee-bd-italie-visite-ipad.htm consulté le 4/09/2010. 176 Voir également l’exemple de l’usage de l’iPad par le San Fransisco Museum of Modern Art (SFMoMA) présenté sur le site du Club Innovation Culture (CLIC). « Visite avec l’iPad des jardin sur le toit du SFMoMA », [en ligne] http://www.club-innovation-culture.fr/visite-avec-lipad-des-jardins-

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possibilités de son utilisation dans le cadre du parcours du musée. Le laboratoire Erasme, travaillant sur les innovations dans le domaine de la muséologie, définit cette tablette comme un « super audioguide multimédia et interactif […] ». Yves-Armel Martin, auteur de l’article, ajoute que les musée « exploiteront la plus grande taille de l’écran pour des meilleures vidéos et surtout du texte vraiment lisible »177. Comme nous l’avons déjà évoqué, il existe un exemple d’exploitation du support comme liseuse. Les organisateurs de la biennale de Venise ont en effet proposé le catalogue d’exposition sur iPad. Cet « ouvrage » a l’apparence d’un ouvrage enrichi puisqu’il se constitue de textes, de photographies d’œuvres et vidéos178. Ces formes touchent de nouveaux utilisateurs. Les publications modifient le rapport entre le visiteur et le musée qui essaye de s’adapter aux multiples besoins de l’internaute. Cette politique du public est représentative d’une tendance actuelle : le visiteur peut aussi devenir producteur. Par rapport au rôle de l’éditeur papier, l’éditeur Web endosse de nouvelles responsabilités et se trouvent face à de nouvelles tâches éditoriales. Quelles sont ces formes éditoriales qui pourraient placer le lecteur à un statut analogue à l’éditeur ? Quelles stratégies adoptent les musées face à l’édition en réseau ?

sur-le-toit-du-sfmoma/ consulté le 4 septembre 2010. 177 Yves-Armel Martin, « De l’iPad dans l’éducation, les musées ou pour les seniors », site du laboratoire Erasme, [en ligne] http://www.erasme.org/De-l-Ipad-dans-l-education-les consulté le 4 septembre 2010. 178 Cette publication fut annoncée sur le site d’Apple [en ligne] http://itunes.apple.com/en/app/ibiennale/id387333827?mt=8# consulté le 27/08/2010.

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Partie III. L’édition collaborative des musées : formes et conséquences

Une dernière forme d’édition n’a pas encore été évoquée dans cette étude. Représentant une part de plus en plus importante des activités éditoriales des musées, les pratiques du Web 2.0, c’est-à-dire les applications comme les blogs, flux RSS, ou les plateformes d’édition et d’échange de contenus (wikis, Facebook, Twitter, etc.), sont devenues ces dernières années un des secteurs qui occupent les réflexions en muséologie. Marin Dacos et Pierre Mounier, que nous avons déjà cités dans l’introduction en reprenant leur typologie de l’édition électronique, définissent ces pratiques du Web collaboratif par le terme d’édition en réseau. Selon eux, le bouleversement que provoque cette forme éditoriale est dû au fait « qu’elle se nourrit des pratiques de communication réciproques et horizontales propres à Internet […] en allant jusqu’à la production même de contenus.179 » L’étude des formes éditorialisées, à savoir le blog, les formes éditoriales que nous avons étudiées dans la première partie de cette étude auxquelles les internautes participent, et Wikipédia seront les seuls contenus que nous prendrons en compte parmi les formes de l’édition en réseau. Les informations sur les plateformes de partage telles que Facebook et Twitter relèvent davantage du domaine de la communication et de l’échange avec les visiteurs. Comme nous l’avons déjà expliqué en introduction, les sites de partages audiovisuels n’ont pas été pris en compte dans cette étude. Après avoir analysé des formes éditoriales se rapprochant davantage du modèle éditorial des publications sur support papier, cette partie déterminera les nouvelles pratiques de travail éditorial qu’implique le Web collaboratif et surtout les nouvelles relations entre l’internaute et l’éditeur dont l’enjeu est « la constitution d’un capital de confiance entre le lecteur, l’éditeur et les auteurs. La qualité des textes publiés est complétée par celle de la relation de confiance que l’éditeur parvient à

179

Marin Dacos et Pierre Mounier, op.cit., p. 88.

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construire avec le lecteur »180, selon Marin Dacos et Pierre Mounier. Ce rapport est différent de celui que nous avons étudié jusqu’à maintenant, qui correspond à ce que Laure Bourgeaux, dans la typologie des contenus des sites développée dans sa thèse, appelle « type éditorial ». Elle le définit de la manière suivante : « Modèle rassurant en ce qu’il reproduit la communication “verticale” à laquelle les institutions se réfère traditionnellement. » Elle ajoute que, même dans le cas de diffusion de contenus audiovisuels, la logique est identique, à savoir « la maîtrise totale du discours par le concepteur et la posture relativement “passive” du récepteur, d’où leur rattachement au modèle du double éditorial. »181 Nous allons donc envisager comment ces formes perturbent « les modalités de production et de réception des contenus muséaux »182. Pour plus de visibilité, les musées se rapprochent des réseaux sociaux et de plateforme de création de contenus. Toutefois, ce type d’initiative provient également d’un souci de contrôle d’image de l’institution. Les blogs, devenant de plus en plus un espace où l’institution se dévoile, sont un bon exemple de cette mise en scène du musée.

a) Formes éditoriales participatives : dévoilement du musée et espace d’expression des internautes Le blog est devenu un des piliers de la politique éditoriale numérique de plusieurs musées. Cette forme est caractérisée par son aspect proche du journal de bord et par la possibilité pour l’internaute de déposer des commentaires en réaction et à la suite d’un billet. En cela, le blog peut devenir un lieu privilégié de communication avec les visiteurs. Gaëlle Crenn et Geneviève Vidal font état des fonctions du blog dans les musées, dans leur article sur les technologies du Web 2.0 : « Le blog est un moyen, comme le musée l’expose, de présenter les actualités, de présenter les expositions, les programmes et les collections, mais également les

180

Ibid., p.87. Laure Bourgeaux, op.cit., p. 37. 182 Gaëlle Crenn et Geneviève Vidal, « Les Musées Français et leurs publics a l’âge du Web 2.0. Nouveaux usages du multimédia et transformations des rapports entre institutions et usagers ? » , in International Cultural Heritage Informatics Meeting (ICHIM07): Proceedings, Toronto: Archives & Museum Informatics, 2007, [en ligne] http://www.archimuse.com/ichim07/papers/crenn/crenn.html consulté le 04/09/2010. 181

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coulisses […] »183 Deux types de blogs se dégagent de nos observations. D’une part, cette forme a beaucoup été utilisée par les musées comme un espace de publication où l’institution s’expose et se dévoile. Des blogs présentent ainsi les coulisses des expositions ou les réserves. D’autre part, certaines institutions en font un espace d’expression pour des communautés d’internautes proches du musée. Dans un billet de son blog Amateur d’art par lunettes rouges, intitulé « Dans les réserves du musée »184, Marc Lenot, observateur de la vie culturel pour Le Monde, présente plusieurs événements s’appuyant sur la partie secrète des musées que sont les réserves. Si cet espace devient une source d’inspiration pour les commissaires d’exposition, il est également devenu la matière première de publication sur le Web. Selon Geneviève Vidal, ces types de publications répondent à une envie des internautes : « L’accès aux réserves des musées d’art et le dialogue avec les scientifiques semblent être les deux imaginaires les plus récurrents.185 » Les expositions temporaires font l’objet de blogs où sont décrites les installations et les conceptions des œuvres. Ainsi, le Musée national de la marine, pour « Les Marins font la mode », a publié un blog sur cette exposition, de son installation au démontage de la dernière robe, illustrée de photographies (fig. 32)186. La Bibliothèque nationale de France a également mis en place une plateforme de blogs dont certains sont dédiés aux expositions, tel que celui consacré à l’exposition « Babar, Harry Potter et Cie »187 qui diffuse des informations et rend compte des événements liés à cette exposition (fig. 33). Cette plateforme est également composée de blogs liés à d’autres sujets tels que celui des lecteurs de la BNF188, ou le blog Les voies ensevelies créé pour constituer par voie de votes un corpus d’œuvres musicales qui seront enterrées comme l’ont été les disques enfermés dans des urnes au sous-sol du Palais Garnier en décembre 1907189. Un des exemples intéressants de blogs liés à 183

Ibid. Marc Lenot, « Dans les réserves du musée », Amateur d’art par lunettes rouges, [en ligne] http://lunettesrouges.blog.lemonde.fr/2010/06/06/dans-les-reserves-du-musee/ consulté le 04/09/2010. 185 Geneviève Vidal, Contribution à l'étude de l'interactivité. Les usages du multimédia de musée, op.cit., p. 67. 186 Les Marins font la mode, blog de l’exposition qui a eu lieu au Musée national de la marine du 25 février au 26 juillet 2009 [en ligne] http://www.musee-marine.fr/blog/ consulté le 04/09/2010. 187 Babar, Harry Potter et Cie, blog de l’exposition qui eut lieu du 14 octobre 2008 au 11 avril 2009, Site François-Mitterrand [en ligne] http://blog.bnf.fr/babar-harry-potter-et-cie/ consulté le 04/09/2010. 188 Le Blog des lecteurs de la Bibliothèque nationale de France, [en ligne] http://blog.bnf.fr/lecteurs/ consulté le 04/09/2010. 189 Les Voies ensevelies, la présentation du blog précise : « c’est maintenant une urne virtuelle que nous 184

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des expositions temporaires est celui qui se consacrait à l’exposition « Xavier Veilhan » au château de Versailles en 2009190. Le blog a été écrit par une assistante de l’artiste, Virginie Arielle, elle-même photographe. Écrit à la première personne, ce blog donne une vision très personnelle de cette exposition (fig. 34). Des billets sont consacrés aux œuvres, à la conception de l’exposition, (description des séances de travail avec photographies et textes) et au vernissage. Contrairement à ce dernier exemple, le point de vue personnel est peu fréquent dans les blogs d’exposition, car souvent les rédacteurs de blogs de musée ne sont pas directement cités et ne sont pas mis en avant. Le point de vue se veut neutre et assez descriptif. La vie du musée est également largement partagée dans certains blogs de musées. Plusieurs exemples existent, la plupart consacrent une partie à l’actualité passée ou à venir du musée, une section aux coulisses des musées, enfin une autre dédiée à l’actualité touchant au domaine de connaissance du musée. Parmi ces exemples, nous pouvons signaler la présence de blog comme celui du château de Bouthéon. Le blog relate la vie du château de la naissance d’animaux du parc à la programmation de visite, la vie interne du château est moins abordée. Le style est très simple et certains billets peuvent se résumer à quelques photos et une phrase191. Le blog des Abattoirs est également un bon exemple. Toutefois, il diffuse davantage des contenus riches sur le musée, notamment un nombre important de vidéos d’entrevues et n’aborde que très peu les activités internes au musée. Le musée de l’Air et de l’Espace a également créé un blog très alimenté et complet sur ses différentes activités. Un des aspects remarquables de ce blog est la présence de billets présentant le personnel du musée. Les recrutements et les départs sont décrits ; les équipes d’accueil sont présentées192. Ce type de contenus permet au public d’être au plus près de la vie du musée. vous proposons où exprimer votre choix des disques qui ont marqué depuis cent ans. Votez et vous contribuez à la sélection de 100 enregistrements sonores publiés du siècle à faire réécouter en 2109. » [en ligne] http://blog.bnf.fr/voix/ consulté le 04/09/2010. En parallèle, il existe également une exposition virtuelle, [en ligne] http://expositions.bnf.fr/voix/index.htm consulté le 04/09/2010. 190 Virginie Marielle, Veilhan Versailles, le blog, [en ligne] http://www.veilhan-versailles.com/blog/ consulté le 04/09/2010. 191 S. n., « Belle journée pour des photos », Le blog du château de Bouthéon, [en ligne] http://blog.chateau-boutheon.com/belle-journee-pour-des-photos/ consulté le 04/09/2010. 192 Plusieurs billets recensent les départs et arrivées du personnel et présentent chacun des membres du musée. S. n., « Résolution de la rentrée intégrer le musée de l’Air et de l’Espace », Le Blog du musée de l’Air et de l’Espace [en ligne] http://blog.museeairespace.fr/resolution-de-la-rentree-integrer-lemusee-de-lair-et-de-lespace/#more-337 consulté le 04/09/2010. S. n., « Une équipe de choc pour vous accueillir », [en ligne] http://blog.museeairespace.fr/une-equipe-de-choc-pour-vous-accueillir/ consulté le 04/09/2010.

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Enfin, un des autres exemples de ce type de publication est le blog du muséum d’Histoire naturelle de Toulouse. Il est principalement tenu par Maud Dahlem, médiatrice culturelle qui travaille avec l’éditeur Web. Les auteurs de chaque billet sont d’ailleurs cités et donc identifiés comme tel au sein du blog. Comme pour les précédents exemples, il est un espace où sont évoqués les événements du musée, comme cela fut le cas pour la présentation de l’exposition « Pollens, au source de la diversité » ou la participation du musée à l’opération « Ask a Curator »193, pendant laquelle les visiteurs pouvaient poser des questions au personnel du musée, via Twitter ou Facebook. Une partie du blog intitulé « en coulisse » porte sur l’actualité interne au musée. Par exemple, un billet décrit l’acquisition et l’intégration de 15 000 œufs collectés entre 1908 et 1977 dans les collections du musée194. Le blog se doit d’être régulièrement alimenté pour que le musée puisse fidéliser les internautes. Ainsi, des photographies, des textes et parfois des vidéos constituent des billets, qui sont consacrés à des sujets plus larges que ceux du site Internet, souvent restreint à celui du musée. Le blog est ainsi une forme éditoriale plus libre et souple. Une autre occasion, lors de laquelle le musée crée un blog, est le moment de sa rénovation ou de son déménagement. Ainsi, le musée de l’Homme accompagne sa rénovation d’un blog, intitulé Sagablog, composé de textes de l’équipe, de scientifiques et de visiteurs195. De même, le musée des Beaux-Arts d’Agen a également créé un blog lors de son déménagement196. Le musée d’archéologie de Louvres a également ouvert un blog Archéa lors de la construction et la mise en place du musée où l’installation de l’exposition permanente est décrite (de la signalisation au soclage en passant par la description de la réalisation de films)197 (fig. 35). Un autre type de blogs de musée illustre le statut particulier de ce type éditorial par rapport au site Web. Certaines institutions offrent à travers des blogs des 193 Maud Dahlem, « Petite histoire en coulisse... la visite Pollens », Le Blog du Muséum, [en ligne] http://blog.museum.toulouse.fr/index.php/post/2010/06/11/En-coulisse-%3A-test-grandeur-nature-dela-visite-Pollens. Samuel Bausson, « Ask A Curator : Une journée spéciale pour poser vos questions et échanger en ligne avec 13 personnes du Muséum » Le Blog du Muséum, [en ligne] http://blog.museum.toulouse.fr/index.php/post/2010/08/19/Ask-A-Curator-%3A-le-museum-repond-avos-questions-en-direct consulté le 06/09/2010. 194 Maud Dahlem, « 15 000 œufs dans le panier du Muséum », Le Blog du Muséum, [en ligne] http://blog.museum.toulouse.fr/index.php/post/2010/04/09/1500-oeufs-dans-le-panier-du-Museum consulté le 06/09/2010. 195 Cette information est citée dans l’article de Gaëlle Crenn et Geneviève Vidal, op. cit. Nous n’avons pas réussi à retrouver ce blog. 196 Les Réserves tout un monde, blog tenu lors du déménagement du musée des beaux-arts d’Agen [en ligne] http://agen.musee.over-blog.com/ consulté le 06/09/2010. 197 Le Blog d’Archéa, blog tenu lors de la construction du musée d’archéologie à Louvres, [en ligne] http://archea.wordpress.com/ consulté le 06/09/2010.

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espaces d’expression pour un public acquis au musée. L’objectif est à la fois de renforcer le lien avec certaines communautés et partager la visibilité du site Internet de l’institution à des internautes proches de l’institution. Ainsi, le musée se veut être un espace fédérateur d’une communauté. Nous avons trouvé deux exemples révélateurs de cette deuxième catégorie de blogs de musée : celui du musée des Arts décoratifs et celui de la Cité des sciences. Ce dernier, intitulé Le Blog des enseignants198, a été créé il y a deux ans (fig. 36). Les articles sont envoyés à Pauline Bougon, responsable éditorial du site « Éducation » de la Cité. Les auteurs doivent y respecter une charte éditoriale. Le rôle du blog est d’être un lieu d’échange sur les pratiques d’enseignement, sur les technologies de l’information et de communication, sur les actualités de la Cité, etc. On y retrouve des discussions sur les expositions, par exemple celles sur l’exposition « Le zizi sexuel »199 qui a suscité de nombreux commentaires. Un autre exemple est celui du blog du musée des Arts décoratifs. Il est dédié et alimenté par les « étudiants de l’école Camondo, inscrits aux ateliers du Carrousel ou aux activités des musées, élèves et étudiants en arts appliqués, élèves des filières des métiers d’art, amis du design et des arts décoratifs, […] »200 (fig. 37).Une grande partie des billets sont consacrés aux travaux de fin d’années d’élèves d’établissements enseignant les arts appliqués. L’une

des

caractéristiques

fondamentales

que

révèlent

ces

blogs

(particulièrement Le Blog des enseignants) est la possibilité pour les internautes de réagir aux billets en publiant des commentaires, à la différence des sites Web où il existe peu d’espace d’expression pour l’internaute, comme le précisent Emmanuelle Lambert et Dominique Trouche : « Par ailleurs, si les institutions culturelles françaises, et muséales notamment, ont aujourd’hui largement ancré Internet dans leur politique de communication, rares sont encore celles qui donnent réellement la « parole » aux internautes sur le site Web.201 » Cette forme éditoriale, dans laquelle peuvent intervenir les lecteurs, est représentative du « caractère infiniment

198

Le Blog des enseignants, hébergé et créé par la Cité des sciences, [en ligne] http://www.citesciences.fr/blog-education/ consulté le 06/09/2010. 199 S. n., « Le Sexe est-il naturel ? », articles en deux billets sur l’exposition « Le Zizi sexuel », [en ligne] http://www.cite-sciences.fr/blog-education/category/expositions/zizi-sexuel-lexpo/ consulté le 06/09/2010. 200 Le Blog Lézard, blog des Arts décoratifs, [en ligne] http://www.lesartsdecoratifs.fr/francais/bloglezard/ consulté le 06/09/2010. 201 Emmanuelle Lambert et Dominique Trouche, « L’Exposition mise à nu par visiteurs, même ? » Semen, 26 | 2008, le 18 mars 2009 [en ligne] http://semen.revues.org/8451 consulté le 06/09/2010.

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réinscriptible du texte électronique.

202

» La plupart des billets des blogs sont

accompagnés d’un ou deux commentaires d’internautes, demandant des précisions ou réagissant aux informations fournies. Certaines institutions développent cette idée de participation du public en proposant des publications dans lesquelles les internautes deviennent auteurs. Nina Simon dans son ouvrage Le Musée participatif présente trois grandes catégories de participation du public : la contribution, la collaboration et la co-création203. Dans le premier cas, les participants recueillent des données dans un processus éditorial contrôlé. Dans le second cas, les contributeurs recueillent et analysent les données. Enfin, dans le dernier cas, les participants développent le sujet avec les personnels du musée et produisent le contenu avec ceux-ci. Nous avons repéré plusieurs exemples de publications qui sont nourries par les contributions des internautes. Certaines d’entre elles sont alimentées par des témoignages de visiteurs sur le sujet de l’exposition. Ainsi, la version virtuelle de l’exposition « Jacob Lawrence, peintre américain, The Migration Stories » organisée par la Philipps Collection, proposait aux visiteurs de laisser des commentaires sur leurs propres histoires d’immigrés204 (fig. 38). Dans les exemples intéressants mêlant contenu des internautes et production éditorialisée, il existe également une exposition interactive du musée du Textile du Canada, qui propose à l’internaute d’explorer les sensations provoquées par le tissu et de les partager en ligne (fig. 39)205. Enfin, le site du People’s Collection Walesprojet206 est conçu sur les mêmes ressorts (fig. 40). Il s’agit d’un programme d’initiation à la culture galloise à travers une grande diversité de thèmes ou de contenu. Le principe pour alimenter le site est de proposer aux professionnels comme aux amateurs de contribuer au site. Chacun peut y déposer du contenu multimédia et du texte. Ces types de projets sont à rapprocher du crowdsourcing, c’est-à-dire de « enrichissement collaboratif », selon l’expression de Pierre Mounier207. Des 202

Marin Dacos et Pierre Mounier, op.cit., p. 88. Pour déterminer cette typologie, Nina Simon se réfère à une étude du Center for Advancement of Informal Science Education (CAISE) sur les « Public Participation in Scientific Research (PPSR) ». Nina Simon, Participory Museum, [en ligne] http://www.participatorymuseum.org/chapter5/ consulté le 04/09/2010. 204 « Read Migration Stories », Jacob Lawrence, Migrations Stories, [en ligne] http://phillipscollection.org/migration_series/share/readstories.cfm consulté le 04/09/2010. 205 Textile Museum of Canada, Tissu social, [en ligne] www.textilemuseum.ca/socialfabric consulté le 04/09/2010. 206 People’s Collection Walesprojet, [en ligne] http://beta.peoplescollection.co.uk/ consulté le 04/09/2010. 207 Pierre Mounier, « PizzaWeb. Garderons-nous le mot crowdsourcing dans notre langue ? », op.cit. 203

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expositions se sont également fondées sur ce ressort ainsi que certains sites et projets multimédia de musées208. Mickael Bove Jr., chercheur au MIT Lab, affirme que ce type de travaux collaboratifs conduit vers la production de contenu proche du storytelling209. Ces initiatives permettent de donner une nouvelle fonction au visiteur, qui met en forme et produit du contenu sur sa propre expérience, au regard du thème de l’exposition. Les relations entre le public et le musée sont ainsi renouvelées. Le musée n’est pas le seul producteur de contenu sur ses collections. Parfois même des entreprises patrimoniales ne sont pas organisées par un musée, ni un réseau social, mais parfois par une entreprise comme ce fut le cas avec le projet Historypin210 (fig. 42). Les internautes déposent en ligne des photographies de lieu, celles-ci sont classées sur une carte et une frise chronologique. Il est possible ensuite pour l’internaute de raconter l’histoire de la photographie. L’ensemble du projet a été mené par Google et par un mouvement civique appelé We Are What We Do211. Face à l’augmentation de ces types d’entreprises, dans le domaine éditorial, l’appropriation d’espace et d’outil de publication, comme Wikipédia par des amateurs, éditant sur les collections de musées, incitent ceux-ci à se rapprocher de ces plateformes. Nous envisagerons à travers l’exemple de Wikipédia le rapport entre les institutions, les amateurs et ce type de réseau social.

b) Wikipédia et les musées La présence des musées sur les réseaux sociaux est depuis quelques années très importantes. Mériam Bensassi, qui a consacré un mémoire de master sur ce sujet, explique au début de son étude : « Au cours de l’année 2008, le nombre de musées entrant dans le réseau social Facebook a augmenté de manière exponentielle ; en janvier 2008 on pouvait dénombrer seulement 73 pages de musées, le 10 juin 2008 on 208

Quelques exemples de crowdsourcing : Nieuwe groeten uit, projet d’exposition crowd-curated, sur un ensemble de photographies représentatives des Pays-Bas, [en ligne] http://www.nieuwegroetenuit.nl/ consulté le 06/09/2010. Le site Solar Stormwatch, conçu par l'Observatoire Royal de Greenwich, est un exemple de crowdsourcing dans le secteur muséal. Le visiteur est invité à apporter sa contribution en repérant sur des photographies du soleil ses éruptions [en ligne] http://solarstormwatch.com/mission_briefing consulté le 04/09/2010 (fig. 41). 209 Chris Meadows, « Participation and Collaboration, the future of storytelling » [en ligne] http://www.teleread.com/2010/06/21/participation-and-collaboration-the-future-of-storytelling/ consulté le 04/09/2010. 210 Historypin [en ligne] http://www.historypin.com/ consulté le 04/09/2010. 211 We Are What We Do, [en ligne] http://www.wearewhatwedo.org/ consulté le 04/09/2010.

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en dénombre désormais 389212 ». Cette présence importante est remarquable sur les autres types de réseaux, dispositifs contributifs et collaboratifs, comme nous l’avons évoqué avec le blog : « permettant aux individus de s’exprimer, de personnaliser des contenus et de les éditer ou les diffuser via Internet »214. Ces présences changent les rôles de l’éditeur Web qui devient aussi un community manager. Plus généralement, comme le dit Samuel Bausson, « les communautés du Web sont en train de réinventer le rôle du musée »215. Notre étude se concentre sur les rapports entre les institutions et plus particulièrement Wikipédia, car il s’agit d’une plateforme d’édition de contenus riches et éditorialisés. Toutefois, il est intéressant de comprendre la tendance générale d’usage des réseaux sociaux comme outils de publication faciles d’utilisation, permettant la diffusion de contenus, telles que des photographies ou des vidéos. Par souci de visibilité, le musée en ligne migre en dehors du site Internet. Les institutions utilisent ainsi fréquemment les outils de veille tels que Netvibes (fig. 43 et 44)216 et FlickR pour présenter les collections ou faire des concours de photographies217. Geneviève Vidal voit dans cette tendance la possibilité pour les musées de toucher un nouveau public : « Les musées s'aventurent sur ces plateformes exogènes pour toucher des publics qui ne franchissent pas leurs portes et ne les franchiront probablement jamais. Ils remplissent ainsi une de leurs missions premières : diffuser leur patrimoine au plus grand nombre.218 » Particulièrement à travers l’exemple de Wikipédia, les internautes ne sont plus seulement des récepteurs d’informations mais deviennent producteurs en s’emparant d’outils d’édition. Il existe déjà plusieurs exemples comme celui de construction de folksonomies par les internautes à partir des collections de musée, grâce à la fonctionnalité du « tagging ». L’exemple le plus connu est le Steve Museum pour lequel plusieurs musées américains ont mis à

212

Mériam Bensassi, « Musée 2.0. De l’entrée des musées dans les réseaux à la remise en cause du public », mémoire de master 2 sous la direction de Corinne Welger-Barboza et Dominique Poulot, université Paris I, 2008, p. 4. 214 Emmanuelle Lambert et Dominique Trouche, op.cit. 215 Clémentine Maligorne, « La Toile s’invite au musée », L’Express, 14 mai 2010 [en ligne] http://www.lexpress.fr/culture/art/la-toile-s-invite-au-musee_891091.html consulté le 04/09/2010. 216 Voir l’espace Netvibes du musée de la Poste (qui constitue le site du musée) [en ligne] http://www.netvibes.com/ladressemuseedelaposte/#Accueil; voir aussi l’espace des enseignants Netvibes du muséum d’Histoire naturelle de Toulouse [en ligne] http://www.netvibes.com/educationmuseumdetoulouse#Infos_pratiques consulté le 04/09/2010. 217 Un exemple de ces concours : le château de Versailles proposa un concours de photographies aux internautes sur le thème « Reflets de Versailles » par un dépôt sur FlickR. 218 Clémentine Maligorne, op.cit.

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disposition leur catalogue de collections en ligne219. Ces exemples permettent d’envisager l’environnement dans lequel l’internaute agit et s’empare d’outils. Le cas de Wikipédia est intéressant par son fonctionnement et par ses collaborations avec les institutions. L’activité éditoriale est prise en charge à la fois par Wikimédia et par les contributeurs, qui deviennent éditeurs. D’une part, le processus éditorial de l’encyclopédie est régi par des règles établies par Wikimédia, auxquelles s’ajoutent des vérifications automatiques grâce au passage de « bots » qui sont des routines informatiques vérifiant automatiquement les textes. D’autre part, chaque utilisateur peut consulter l’historique des modifications des articles, ce qui permet aux contributeurs de repérer les auteurs mal intentionnés. Selon Sylvain FirerBlaess dans son article « Wikipédia, modèle pour une société hyperpanoptique »220, grâce à ce système, les relations entre utilisateurs sont caractérisées par un système « panoptique » de surveillance réciproque. Pour Marin Dacos et Pierre Mounier, Wikipédia introduit une nouvelle forme d’édition : « Fortement ancré dans le travail de gestion de communauté, le travail d’édition prend une nouvelle dimension : il ne s’agit plus seulement de travailler sur le texte, mais de travailler sur une communauté qui travaille sur le texte, de la conduire à adopter un mode de fonctionnement qui lui permettra de produire le meilleur résultat possible.221» Ainsi, la responsabilité éditoriale est répartie. Dans le cas de l’encyclopédie, les contributeurs peuvent exercer un droit de regard sur les autres articles et Wikimédia gère l’encyclopédie en imposant des normes d’édition, comme l’affirment Marin Dacos et Pierre Mounier : « Il est finalement très difficile de répondre à la question : “Qui est éditeur ?” dans le cas de Wikipédia, parce que cette fonction est répartie et partagée entre des opérateurs humains, non humains et, surtout des règles de fonctionnement.222 » Les « Wikipédiens » ont su utiliser cet outil pour devenir producteur de savoir. Plusieurs amateurs et rédacteurs assidus sur cette plateforme peuvent parfois mener de véritables recherches sur des sujets qui touchent directement les collections de musée. Sur le site de la conférence « Museum and the Web », dans le forum consacré à Wikimédia, Mark Pellegrini, un des contributeurs de Wikipédia, a écrit un billet en mars 2010 intitulé : « Les articles spécialisés de Wikipédia pour lesquels une 219

Steve Museum [en ligne] http://www.steve.museum/ consulté le 04/09/2010. Sylvain Firer-Blaess « Wikipédia, modèle pour une société hyperpanoptique », Blogo-Numericus, 1er août 2007, [en ligne] http://www.homo-numericus.net/spip.php?article275 consulté le 04/09/2010. 221 Marin Dacos et Pierre Mounier, op.cit., p. 97. 222 Ibid., p. 96. 220

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collaboration est attendue »223. L’auteur, chercheur en ingénierie informatique, administrateur et auteur sur Wikimédia, a entrepris de publier le catalogue raisonné des œuvres de Thomas Eakins intitulé « List of works by Thomas Eakins » dans l’encyclopédie

224

. Dans cet article décrivant son entreprise, il explique les raisons

d’un tel projet notamment par la présence de plusieurs catalogues incomplets et de l’absence d’une somme rassemblant l’intégralité de l’œuvre du peintre américain. Un an de recherche fut nécessaire pour constituer ce corpus composé d’une centaine d’œuvres, dont certaines ne sont pas identifiées. Dans cet article, il liste les différentes difficultés qu’il a rencontrées lors de la conception de cet article : difficulté à trouver les œuvres, la présence de catalogues de collection qui ne sont pas actualisés, la médiocre qualité des reproductions mises à disposition, peu de dialogue avec les institutions, contrairement aux rapports avec les spécialistes du peintre. L’auteur insiste sur le manque de coopération possible avec les musées (souvent ignorant de leur propre collection) et sur la nécessaire coopération avec les spécialistes pour la rédaction d’un article comme le sien. Il conclut son article comme il l’avait commencé par le souhait d’une collaboration entre Wikipédia et les musées : « Wikipédia profiterait évidemment d'avoir une liste complète des œuvres d'Eakins. Et les musées en profiteraient aussi, je pense.225 » Des initiatives comme celle-ci s’inscrivent dans l’émergence de la figure de l’amateur qu’a développée le philosophe Bernard Stiegler. L’amateur est celui qui aime mais agit. Dans le contexte des musées, l’amateur est à l’image de Mark Pellegrini, celui qui écrit et diffuse des savoirs sur les collections. Sur le site de son association Ars Industrialis, le philosophe écrit sur cette figure de l’amateur : « Face à l’économie consumériste qui épuise les désirs et s’effondre, l’économie de la contribution favorisée par le réseau Internet (ex. Wikipédia) permettrait de transformer le consommateur en amateur. […] la figure de l’amateur s’oppose à la figure du consommateur, car l’amateur goûte le donné qu’il perçoit et par là le 223

« Specific article Wikipédia where collaboration is desired », Forum du site Museum and the Web, [en ligne] http://conference.archimuse.com/forum/specific_Wikipédia_article_where_collaboration_desired. Sur le même sujet, voir également David Bearman, « Wikipédia Editorial Rules and Museum Curators », Forum du site Museum and the Web, [en ligne] http://conference.archimuse.com/forum/Wikipédia_editorial_rules_and_museum_curators_notabili consulté le 04/09/2010. 224 « List of works by Thomas Eakins », Wikipédia, [en ligne] http://en.Wikipédia.org/wiki/List_of_works_by_Thomas_Eakins consulté le 06/08/2010. 225 « I think this is an area that Wikipédia and museums can work together, and I'd like to find ways to do it. » Mark Pellegrini, op.cit.

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constitue, il participe à ce qu’il désire et par là s’individue […]. L’économie de l’amateur est donc moins une économie de la possession et de la consommation, qu’une économie de l’implication et de la circulation d’une énergie libidinale.226 » Le cas de Mark Pellegrini est d’autant plus intéressant qu’il n’appartient pas au monde de l’art et s’investit, assemble et constitue un corpus impressionnant, ce que les musées ou les éditeurs d’art n’ont pas fait. Ces types d’initiatives rappellent notre appartenance à l’ère de la « culture du contributeur », pour reprendre une expression de Bernard Stiegler. Certains personnels d’institutions sont conscients du nouveau statut de ces visiteurs et amateurs comme le prouve cette phrase tirée de la politique éditoriale de la Tate : « La consommation de contenu en ligne a changé les utilisateurs en auteurs et éditeurs, particulièrement grâce aux médias sociaux et aux plateformes de publication en ligne (blogs, YouTube, Flickr, etc.) Nous prenons en compte la créativité du public et ses ambitions.227 » Face à l’émergence de ces amateurs et à l’audience que peut capter Wikipédia, les musées ont décidé d’intégrer ces encyclopédies pour toucher un nouveau public, mais également pour faire partie des acteurs de ce processus. Comme l’écrit Evelyne Broudoux dans son article sur les amateurs : « Le succès indéniable des amateurs entraîne les acteurs traditionnels à revoir leurs stratégies de diversification »228. Pour certains musées, les réseaux sociaux, comme FlickR ou Youtube, sont des concurrents du musée, comme le dit Mickael Edson, directeur du département Web du Smithsonian Institution dans la présentation de sa politique éditoriale229. Cette tension entre pratiques amateurs et institutionnelles était déjà présente dès les débuts du Web pour les musées, puisque, par exemple, le musée du Louvre fut devancé dans la construction de son site par le Web Louvre, site non officiel créé par Nicolas Pioch, un amateur Par conséquent, certains musées décident désormais de se rapprocher de ces 226

Bernard Stiegler, « Amateur », [en ligne] http://arsindustrialis.org/amateur consulté le 06/08/2010. « Tate contentment Consumption of online content has shifted towards users as authors and editors, especially through social media and online publishing platforms (blogs, YouTube, Flickr, etc.). We shall embrace audience creativity and personal ambitions, though new end user licences, empowering them to reuse and remix Tate content. » « Tate Online Strategy 2010-2012 », sur le site de Tate Galery, [en ligne] http://www.tate.org.uk/research/tateresearch/tatepapers/10spring/stack.shtm consulté le 06/08/2010. 228 Evelyne Broudoux, « Éditer et publier en ligne : la proximité entre amateurs et auteurs », dans Enjeux et usages des TIC : Mutations des logiques éditoriales, actes de colloque international EUTIC : 8-10 novembre 2007, 2008 [en ligne] http://archivesic.ccsd.cnrs.fr/docs/00/19/11/67/PDF/BroudouxEutic.pdf consulté le 06/09/2010. 229 Mickael Edson, « Open, and Transparent: Developing the Smithsonian's Web and New Media Strategy », Museum and the Web 2010, Toronto: Archives & Museum Informatics [en ligne] http://www.archimuse.com/mw2010/papers/edson/edson.html#ixzz0yI9y4jc3 consulté le 06/09/2010. 227

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plateformes collaboratives pour bénéficier de leur succès. Dans un article paru lors de « Museum and the Web 2010 », Thomas Tunsch du Staatliche Museum de Berlin démontre que Wikipédia et les musées ont des objectifs similaires : « La communauté des Wikipédiens recueille des données et des informations afin de créer des articles, crée des catégories et construit des portails, comme la communauté des chercheurs dans un musée qui écrit des monographies, monte des expositions et publie des catalogues. »230 Ainsi, la ville de Toulouse est la première en France à signer un accord avec la célèbre encyclopédie. En effet, le muséum d’Histoire naturelle et les archives municipales se sont engagés à mettre à disposition de Wikimédia commons, base photographique de Wikipédia universelle, des photographies libres de droits de qualité professionnelle d’objets issus des collections des deux institutions. Certains musées ont même utilisé le modèle du wiki pour construire leur site Internet, comme le Withney Museum of American Art. La responsable multimédia de cette institution présente dans un des articles paru lors de « Museum and the Web 2010 » les avantages de cette forme : « Le nouveau site whitney.org est un wiki qui propose à la fois un système de publication et une interface entre le personnel du musée, les conservateurs, les artistes et le public […]. Cette approche offre un degré exceptionnellement élevé de flexibilité répondant à la croissance actuelle et future du musée.231 » Cette implication des musées dans Wikipédia est également le signe d’un besoin de maîtrise sur les contenus qui touchent l’institution, par l’offre d’une expertise. Gaëlle Crenn et Geneviève Vidal affirment que la position des musées face au Web collaboratif et ses formes éditoriales est de conserver son statut de producteur : « Les musées veulent garder le privilège de désigner les savoirs et les formuler […]. L’autorité de l’institution, détentrice exclusive du savoir autorisé, peut être remise en question par la collectivité des usages créateurs de contenus.232» Même s’il est vrai que les initiatives de collaboration sont plutôt rares, certains musées vont plus loin dans la coopération : plusieurs programmes invitent les contributeurs de l’encyclopédie à venir dans le musée pour préparer, en collaboration 230

Thomas Tunsch, « Museum Documentation and Wikipédia.de: Possibilities, opportunities and advantages for scholars and museums », Museums and the Web 2007: Proceedings, Toronto: Archives & Museum Informatics, 2007 [en ligne] http://www.archimuse.com/mw2007/papers/tunsch/tunsch.htm 231 Dina Helal, Brad Henslee, Barn Raising: « Building a Museum Web Site Using Custom Wiki Tools ». Museums and the Web 2010: Proceedings. Toronto: Archives & Museum Informatics, 2010 [en ligne] http://www.archimuse.com/mw2010/papers/helal/helal.html consulté le 06/09/2010. 232 Gaëlle Crenn et Geneviève Vidal, op. cit.

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avec l’équipe de conservateurs, la rédaction d’articles. Il existe un réseau réunissant les acteurs des galeries, bibliothèques, archives et musées, appelé « GLAM » (acronyme pour « Galleries, libraries, archives and museums ») et Wikipédia. À Canberra les 6 et 7 août 2009, plusieurs institutions se sont regroupées pour discuter des moyens et des fondements d’une collaboration dans le cadre du programme GLAM. Pendant cette conférence, des recommandations pour les gouvernements, les institutions et Wikipédia – présents lors de la conférence – ont été fixées afin de former une coopération durable entre ces différents acteurs. Parmi ces recommandations, des normes éditoriales à l’attention des contributeurs sont citées. Une des requêtes faite à Wikimédia est la suivante : « Organiser des “Académies Wikimédia” pour former et faire des démonstrations sur les processus d'édition et les politiques sur le contenu. »233 Au sein du programme GLAM, un travail entre Wikipédia et le British Museum a débuté en avril 2010. Les contributeurs anglais avaient un accès libre aux réserves du musée. Liam Wyatt, directeur de Wikimédia Australie, fut le représentant de Wikipédia en résidence au British Museum pour organiser la rédaction des articles sur des domaines du musée peu abordés dans l’encyclopédie en ligne. Son expérience est relatée à travers un blog et une newsletter. Grâce à ses textes, on peut remarquer les règles de rédaction et les normes auxquelles étaient soumis les contributeurs. Le musée récompensait les articles de qualité. Ainsi « Johnbod » auteur d’un article sur la coupe de sainte Agnès reçut un prix offert par le musée. D’autres d’articles de qualité furent récompensés, notamment celui sur la pierre de Rosette et celui sur l’Épiphanie de Michel-Ange234. Lors de cette collaboration eut lieu également le « défi Hoxne » qui était une journée consacrée à l’écriture d’un article sur le trésor de Hoxne. Ainsi, lors de cette collaboration, le musée a pu intervenir sur la ligne éditoriale de l’encyclopédie par la proposition d’idées d’articles sur des parties des collections peu présentes et visibles sur le Web. Cette coopération a été commentée notamment par le New York Times dans un article intitulé « Le vénérable British Museum s’engage dans

233

« Glam-Wiki recommendations », recommandations issues de la conférence « GLAM-WIKI : finding the common ground » du 6 et 7 août 2009, [en ligne] http://meta.wikimedia.org/w/index.php?title=GLAM-WIKI_Recommendations/fr&uselang=fr consulté le 08/08/2010. 234 Pour voir les précisions sur les prix du British Museum aux contributeurs de Wikipédia, voir « Featured Article Prize », [en ligne] http://en.Wikipédia.org/wiki/Wikipédia:GLAM/BM/Featured_Article_prize consulté le 08/08/2010.

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la révolution Wikipédia » de Noam Cohen235. Cet article permet de comprendre quelle est la stratégie et le but du musée dans cette collaboration. Comme le dit Matthew Cock, le responsable du site Internet du musée, « Ce travail offrit la possibilité au musée de proposer l’accès à des objets moins connus ou des œuvres qui peuvent être l’objet d’article, permettant de diversifier les contributions sur le British Museum236. » Noam Cohen met en avant la complémentarité des deux acteurs : l’un possède les œuvres et les experts, l’autre l’audience. Jonathan Williams, conservateur du département Préhistoire et Europe au British Museum, dit de ce projet : « Je suis ravi des excellents résultats de cette nouvelle relation entre le British Museum et Wikipédia. Nous avons beaucoup appris sur la manière dont Wikipédia fonctionne et sur comment elle peut être un merveilleux support pour les personnes qui veulent apprendre l’histoire et l’archéologie. Et cela m’a permis d’entrevoir les publics potentiels que le musée peut toucher en travaillant plus étroitement avec la communauté Wikipédia. Durant ces 600 ans d’Histoire, la coupe d’or royale a appartenu aux rois de France, de Grande Bretagne et d’Espagne. Mais être sur la page principale de Wikipédia sera cependant son heure de gloire ! 237» Malgré ces initiatives238, les relations entre Wikipédia et les institutions sont compliquées. En 2009, la National Galery engage une procédure contre un des membres de Wikimédia pour l’utilisation de la reproduction d’ œuvres tombées dans le domaine public239. Face à ce type de réaction de défiance, un article de plusieurs « Wikipédiens », « Travailler avec et non contre les institutions »240, fut publié pour affirmer la volonté de collaboration de la communauté du réseau social avec les institutions patrimoniales. Dans son blog, Lyam Wyatt a consacré un article, divisé en

235 Nom Cohen, « Venerable British Museum Enlists in the Wikipédia Revolution », New York Times, 4 juin 2010, [en ligne] http://www.nytimes.com/2010/06/05/arts/design/05wiki.html consulté le 09/09/2010. http://www.nytimes.com/2010/06/05/arts/design/05wiki.html consulté le 08/08/2010. 236 Ibid. 237 Bastien Guerry, « Wikipédia rencontre le British Museum autour de la coupe royale », Blog Wikimédia, 20 juillet 2010, http://blog.wikimedia.fr/Wikipédia-rencontre-le-british-museum-autour-dela-coupe-dor-royale-1837 consulté le 29/07/2010. 238 Il existe également « Wikipédia Loves Art » dont le principe était un concours de photographies destinées à illustrer les meilleures articles de Wikipédia pendant une période de un mois.[en ligne] http://en.Wikipédia.org/wiki/Wikipédia:Wikipédia_Loves_Art consulté le 04/06/2010. 239 Tous les documents retraçant cette procédure ont été mis en ligne par le contributeur attaqué (il porte le surnom suivant « Dcoetzee »), [en ligne] http://commons.wikimedia.org/wiki/User:Dcoetzee/NPG_legal_threat consulté le 04/06/2010. 240 Durova, et al., « Working With, Not Against, Cultural Institutions » [en ligne] http://en.Wikipédia.org/wiki/Wikipédia:Wikipédia_Signpost/2009-07-13/Open_letter consulté le 04/06/2010.

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deux parties, sur les façons de valoriser le programme GLAM pour les institutions et pour les contributeurs. Il rappelle l’intérêt pour les institutions de contribuer à l’encyclopédie en ligne, et de quelle manière les musées peuvent mettre à disposition des contenus pour les « Wikipédiens ». Il explique les conflits d’intérêt qui existent entre les deux acteurs, même si les relations se sont détendues, surtout depuis que des rédacteurs venant d’institutions patrimoniales ont rejoint le groupe des contributeurs de Wikipédia. Dans la deuxième partie de son article, il donne des conseils aux institutions souhaitant publier du contenu sur Wikipédia. Il conseille par exemple aux institutions de rédiger des articles qui ne se réfèrent pas constamment au site Web de l’institution. Il illustre indirectement le conflit de visibilité entre le site Web du musée et Wikipédia. Il s’étonne du nombre réduit de collaborations par rapport à celles qu’ils existent pour une initiative comme FlickR Commons. Il ajoute pour expliquer son étonnement : « Wikimédia a des avantages énormes […] nous n'avons aucune publicité, et sommes à but non lucratif […]241 » Les rapports sont donc contrastés entre d’une part des projets de rapprochement entre le réseau social et les établissements publics et, d’autre part, des réticences, voire des conflits entre ces acteurs, notamment parce que Wikipédia peut être perçue comme une entreprise concurrente à la production éditoriale des musées242. La collaboration avec Wikipédia et l’usage du blog permettent en effet à l’institution de perdre son caractère inaccessible et de partager davantage d’activités avec les visiteurs. L’implication des institutions dans les plateformes collaboratives comme Wikipédia illustre l’action du musée sur la ligne éditoriale de l’encyclopédie. Même si ces initiatives sont assez peu nombreuses, elles prouvent la remise en cause du sens de communication verticale entre le musée fournissant des informations et les utilisateurs les recevant. D’ailleurs, Internet a souvent été vu comme un moyen pour le musée de se rapprocher de ses visiteurs, en changeant son image. En 2003, Peter Walsh écrivait un article intitulé « L’Internet et la voix inattaquable »243 où il engage 241

Liam Wyatt « Making Wikipédia Glam Friendly », Witty Lama, 1er novembre 2009, [en ligne] http://www.wittylama.com/2009/11/part-2-making-Wikipédia-glam-friendly/ consulté le 06/06/2010. 242 Extrait d’un message de la newsletter de Liam Wyatt du 20 juin 2010 sur la collaboration entre le Birtish Museum et Wikipédia : « that this nomination might receive extra scrutiny from those in the Wikipédia community who believe that collaborating with professional organisations like museums is borderline conflict of interest/paid editing ». 243 Peter Walsh, «The Web and the Unassailable Voice », dans A. Witcomb, Re-Imagining the museum beyond the mausoleum, London: Routledge, 2003, p. 120.

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le musée à s’adapter au Web afin de perdre son autorité lui donnant parfois un aspect « monolithique ». Toutefois, la maîtrise des contenus sur les réseaux sociaux n’est pas intégrale. Mériam Bensassi, sur son blog Museonet 2.0, rend compte de la fermeture du réseau « Ning », alors que la progression de son trafic était de 300%. Elle finit son article par cette préconisation : « Le site Internet proprement dit reste le point d’ancrage du musée sur la toile. Continuité virtuelle du musée, il se distingue par la richesse de son contenu qui se doit ensuite d’être partagé et diffusé hors du site sur les réseaux de toutes sortes. Les réseaux sociaux vont évoluer inévitablement – c’est le propre d’Internet –, mais leur fonction reste la même quel qu’ils soient, ce sont des liens entre le public et le musée.244» Cette maîtrise du contenu est d’autant plus importante que les contenus ont un effet direct sur l’image du musée en dehors du site. Par conséquent, le site est parfois régi par des politiques éditoriales numériques des musées. Publiées sur les sites de musées par les équipes Web, elles permettent de positionner les objectifs du site et des publications, mais aussi de donner une certaine image de l’institution, à l’heure où celles-ci se dévoilent davantage, à travers des formes éditoriales collaboratives.

c) Politiques et responsabilités éditoriales numériques Ces formes d’édition en réseau ont fortement changé les façons de travailler en créant de nouvelles formes de fonctions pour l’éditeur, comme nous l’avons déjà vu. Elles obligent également les institutions à fixer leur pratique, pour avoir une ligne éditoriale claire et définie par le visiteur. Dans son article sur les tendances dans les musées en 2010, l’auteur du blog Museum Next, blog de la conférence portant le même nom, annonce l’importance des « policy », c’est-à-dire les politiques éditoriales en s’appuyant sur les témoignages de personnels de musée souhaitant créer ces guides245. Dans les pays anglo-saxons, la pratique commence à être plus répandue. Les « online strategy » et « social media strategy » ou « social media policy », pour 244

Mériam Bensassi, « Ning chronique d’une mort annoncée ? », Museonet 2.0, 9 mai 2010, [en ligne] http://www.museonet2.com/?p=792 consulté le 26/06/2010. 245 S. n., « Museum Marketing Trends 2010 », MuseumNext Blog, 31 décembre 2009, [en ligne] http://www.museummarketing.co.uk/2009/12/31/museum-marketing-trends-2010/ consulté le 18 août 2010.

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les réseaux sociaux, sont de plus en plus présentes et téléchargeables sur les sites des institutions. Parmi les musées proposant ces guides, on peut citer l’Indiana Museum of Art246, le Powerhouse Museum247, le Smithonian Institut of Art248 et enfin le Walker Center of Art249. En France et dans les pays francophones européens, nous avons également trouvé quelques exemples de musées publiant des textes sans titre présentant les sites Web des institutions, que certaines appellent parfois « politique éditoriale ». Le centre de recherche du château de Versailles, la Cité de la musique, le musée de Mariemont, le musée de Nouvelle-Calédonie, le musée du Louvre et la Galerie du Jeu de Paume (uniquement pour son Magazine), les Arts décoratifs et la Cité des sciences ont été les institutions qui ont diffusé leur objectif par ce biais. Certaines de ces politiques éditoriales déterminent les règles pour l’édition numérique, d’autres pour celles qui touchent les contenus collaboratifs, par exemple les blogs. Il est intéressant d’étudier ces textes, car ils révèlent la manière dont le musée veut se montrer, quelle image il veut donner de lui en tant qu’éditeur. Nous verrons que les collaborations et les productions sont pour certains musées au cœur de leurs politiques numériques. Certaines placent ainsi au centre des missions du numérique le visiteur. Traitant des nouvelles formes d’édition en réseau, ces politiques sont également révélatrices d’une nouvelle forme de responsabilité éditoriale. La présentation des politiques numériques éditoriales qu’on a pu lire sur les sites français, résument généralement les missions du musée. Le site Internet est un moyen de remplir ces objectifs, comme le rappelle Marianne Lévy-Rosenwald dans son rapport sur l’édition publique en 2008 : « […] leur politique éditoriale se trouve intimement liée, voire explicitement subordonnée à l’activité et aux programmations

246

Les différents musées cités ont été recensés dans cet article : s. n., « Social Media Policy for a Museum », MuseumNext Blog, [en ligne] http://www.museummarketing.co.uk/2010/01/14/socialmedia-policy-for-a-museum/ consulté le 18 août 2010. S. n., « Blog Guidelines », Indiana Museum of At, [en ligne] http://www.imamuseum.org/blog/wp-content/uploads/IMA-Blog-Guidelines-3.3.09.pdf consulté le 18 août 2010 247 S. n., « Communication Using Public Facing Museum Blogs - Policy », Powerhouse Museum, avril 2007 [en ligne] http://www.powerhousemuseum.com/dmsblog/wpcontent/powerhouse_museum_blog_policy_2007.pdf consulté le 18 août 2010. 248 S. n., « Smithsonian Web and New Media Strategy », Smithsonian Institution, 29 juillet 2009, [en ligne] http://smithsonian-Webstrategy.wikispaces.com/Strategy+--+Table+of+Contents consulté le 18 août 2010. 249 S.n., « Blog Guidelines », sur le site du Walker Art Center, 20 mars 2009, [en ligne] http://newmedia.walkerart.org/nmiwiki/pmwiki.php/Main/WalkerBlogGuidelines consulté le 18 août 2010.

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culturelles de leur établissement de rattachement.250 » Il est notable de rappeler un des principes qui régit les politiques éditoriales sur support papier et numérique. Les collections permanentes doivent autant être valorisées que les expositions temporaires. Les fonds du musée sont diffusés par des publications telles que les catalogues en ligne, les ressources documentaires, les veilles documentaires, les catalogues raisonnés, etc. ; l’événementiel est porté par des expositions virtuelles, des petits journaux, des actes de colloques et conférences, etc. Cette répartition inhérente au musée divise la politique éditoriale des musées. L’auteure du blog Museumstrategie définit la relation entre ces deux composantes de la mission patrimoniale

par

l’expression

« lutte

fratricide »251.

Certaines

institutions

patrimoniales valorisent davantage un des deux types de publication. Ce fut le cas du musée Maillol, avec l’exposition « Vanités », qui consacra intégralement son site à cet événement. Les politiques éditoriales numériques mettent en valeur la volonté de rendre accessibles les richesses du musée au plus grand nombre. On peut le voir notamment dans celle proposée par le Louvre et celle également du musée de Mariemont. Cette dernière institution en fait la preuve en mettant en ligne des livres épuisés. La création de contenus originaux est également valorisée dans les politiques éditoriales ainsi que des informations actualisées, comme le précise l’équipe multimédia du Louvre : « créer des contenus originaux mettant les technologies les plus récentes au service de la médiation culturelle.252 » Le muséum d’Histoire naturelle de Toulouse est allé plus loin dans la mise en place de sa stratégie en définissant le site comme un des « lieux » de l’institution, et non une simple vitrine. Même si la présentation du site est assez courte, celui-ci est présenté comme tel, et cette idée est reprise dans plusieurs entrevues avec membres de l’équipe Web du muséum. Maud Dahlem, conceptrice multimédia et médiatrice scientifique en ligne, explique dans un entretien intitulé « Le Muséum de Toulouse à la pointe du 2.0 » : « Au Muséum de Toulouse, il est inscrit dans la politique

250

Marianne Lévy-Rosenwald, Rapport du médiateur de l’édition publique pour l’année 2008, Paris : Documentation française, 2009. Disponible en ligne : [en ligne] http://lesrapports.ladocumentationfrancaise.fr/BRP/104000003/0000.pdf consulté le 07/09/2010. 251 Irene Popoli, « Temporary exhibitions VS collections? A fratricidal fight! », Museumstrategie, 29 juin 2010, [en ligne] http://museumstrategies.wordpress.com/2010/06/29/temporary-exhibitions-vscollections-a-fratricidal-fight/ consulté le 2 juillet 2010. 252 S. n., « Politique éditoriale du site Internet », Musée du Louvre, op.cit.

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d’établissement que le muséum en ligne est un lieu à part entière »253. Les politiques éditoriales des musées sont une manière de légitimer et reconnaitre l’importance du numérique et les spécificités du site Web dans les médiations du musée. Enfin, les institutions mettent de plus en plus au cœur de leur politique éditoriale toutes les formes de collaborations. Dans le domaine de l’édition traditionnelle, elle est déjà fortement encouragée, notamment à travers la coédition. Dans l’univers du numérique, les coopérations entre institutions sont également encouragées, comme le prouve la politique éditoriale numérique du centre de recherche du château de Versailles : « Le Centre peut aussi soutenir des projets d’édition provenant de l’extérieur et publier des ouvrages en collaboration avec des institutions254 ». Le musée du quai Branly, ainsi que le musée de Nouvelle-Calédonie, dont les politiques éditoriales sont en ligne, favorisent également la mise en place de partenariats. La collaboration n’est pas uniquement possible entre les institutions mais elle peut aussi signifier la coopération entre l’institution et les visiteurs. Certains musées mettent au cœur de leur politique ce rapprochement avec le visiteur. Toutes les initiatives des musées que nous avons déjà évoquées, comme les blogs ou les formes éditoriales collaboratives, révèlent cette volonté de coopération. La politique éditoriale du Magazine du Jeu de Paume présente illustre en effet cette volonté : « De la relecture de l’histoire de la photographie à l’analyse des processus de production, de diffusion et de réception des pratiques visuelles les plus innovantes, Jeu de Paume, le magazine a pour objectif de devenir une plate-forme de débats et de réflexion.256 » La politique éditoriale de la Tate est divisée en plusieurs points, dont les trois premiers placent au centre des préoccupations du musée, la collaboration avec le public : « Le site Internet est pour le public […]. Le site Internet est une plateforme de publication et d’interaction […]. Le site Internet doit prendre vie avec des pensées, des conversations, des avis, des échanges.257 » L’institution doit pouvoir rendre accessible du contenu qui pourra être partageable, susciter des discussions et être une 253

Stéphanie Giraud, « Le Muséum de Toulouse à la pointe du 2.0 », Etourisme.info, 1er juin 2010, [en ligne] http://www.etourisme.info/article/1137/le-museum-de-toulouse-a-la-pointe-du-20 consulté le 06/06/2010. 254 S. n., « Politique éditoriale », site du Centre de recherche du château de Versailles, [en ligne] http://chateauversailles-recherche.fr/francais/editions-31/politique-editoriale consulté le 06/06/2010. 256 S. n. « Jeu de Paume le magazine », site de la Galerie du Jeu de Paume, [en ligne] http://www.jeudepaume.org/index.php?page=article&idArt=1211&lieu=0&PHPSESSID=077bdbe761f e878f96bd13a797 consulté le 05/05/2010. 257 S.n., « Tate Online Strategy », sur le site de la Tate Gallery, op.cit.

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source d’interaction avec les visiteurs. Il est intéressant de remarquer un changement dans l’attitude de la Tate. Alors que l’institution est reconnue comme producteur, éditeur et diffuseur de contenus, le musée souhaite également que son site devienne un lieu de collaborations et d’échanges : « Cependant, nous ne devrions plus voir le site Web seulement comme un canal pour diffuser du contenu provenant de la Tate ; nous devrions le voir comme une plateforme interactive.258 » Cette réflexion est révélatrice d’une volonté des musées de posséder les potentialités du Web 2.0. Le rapprochement avec le visiteur peut se faire par l’élaboration avec lui de la politique éditoriale, comme l’a fait la Smithsonian Institution. Celle-ci affirme notamment la volonté de construire un nouveau modèle d'apprentissage, l’utilisation des nouveaux médias, le renforcement des relations avec le public, la volonté de faciliter le dialogue et toucher le plus grand public. Ce texte a été créé grâce à un processus que le Smithsonian définit comme « rapide et transparent »259. Il se composait d’ateliers, d’une conférence et de dialogues sur Twitter et autres réseaux sociaux. Un wiki fut créé pour organiser ce travail : il joua le rôle d’atelier de la politique de l’institution. Naturellement, le choix de la forme du wiki est très significatif quant à l’intention du musée de mettre au cœur de leur mission la collaboration. Le Smithonian Institution a présenté lors de la conférence « Museum and the Web 2010 » sa stratégie : « deux diagrammes, trois thèmes, huit objectifs, cinquante-quatre recommandations […] toutes écrites dans un langage simple et hébergé sur le wiki public sur lequel la stratégie a été créé.260 » (fig. 45). Cet article est intéressant car il présente les raisons pour lesquelles l’institution a écrit ce texte. Selon l’auteur, les politiques ne sont pas bien considérées, tant que des problèmes de gestion ne se produisent pas. Dans le cas du Smithonian Institution, des normes étaient plus que nécessaires puisque l’institution est divisée en vingt-huit musées distincts et centres de recherche. Ce processus a permis notamment l’élaboration d’une enquête élargie sur le public. Cette expérience illustre la place du visiteur dans les politiques éditoriales, ce qui rejoint également le constat que nous avions pu faire lors de l’étude des usages et des publics. Dans plusieurs cas, ces politiques permettent de réguler le rapport entre les 258

Ibid. S. n., « Process Defined and validated by Web Practinioners », Smithsonian, Web and New Media Strategy, [en ligne] http://smithsonian-Webstrategy.wikispaces.com/Process+At-a-Glance consulté le 08/07/2010. 260 Michael Edson, op.cit. 259

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internautes et l’équipe Web. Elles se rapprochent alors davantage de « Social media policy ». Dans plusieurs cas, ces politiques donnent à la fois des directions éditoriales (fond et forme). Dans notre étude, il est intéressant de voir comment ces politiques éditoriales normalisent le type d’usage pour chaque réseau social utilisé. Pour chacun, des règles d'utilisation ou des codes de conduite sont introduits. Dans le texte qu’a mis en place le Powerhouse Museum, les responsabilités de l’équipe utilisant le blog, les restrictions d’usage et les règles de modération sont par exemple explicitées. Au regard de ces textes, il est intéressant d’observer que deux types de responsabilités éditoriales se dégagent. D’une part, le musée est le garant du contenu dans le cadre de l’édition numérique. D’autre part, lorsqu’il s’agit de publications collaboratives, la responsabilité est partagée entre l’internaute et l’institution. Parfois même, l’éditeur Web n’assume plus sa responsabilité éditoriale. La particularité du blog, permettant au lecteur de pouvoir laisser un commentaire ou de devenir contributeur, a en effet des conséquences sur les relations entre l’éditeur et l’internaute. Dans la charte éditoriale du Blog des enseignants, dans lequel l’internaute est contributeur, il est précisé : « La Cité des sciences et de l’industrie ne garantit pas l’exactitude des contenus publiés. Les commentaires permettent à tous de rectifier ou de débattre d’un point de vue.261 » Gaëlle Crenn et Geneviève Vidal dans leur article remarquent le même type de positionnement avec le cas du blog du Fine Art Museum of San Francisco (FAMSF), qui a été une des premières institutions à adopter cette forme éditoriale. Il est en effet indiqué que « bien que le musée tente d’assurer la validité des informations présentées sur le blog, les articles ne passent pas par un processus éditorial et des erreurs peuvent survenir ». Gaëlle Crenn et Geneviève Vidal en concluent une responsabilité éditoriale particulière : « d’un régime auctorial spécifique […] à mi-chemin entre autorité institutionnelle et contenus exogènes. Les commentaires sont encouragés, […] dans les limites acceptées par les modérateurs, membres du personnel du musée. L’autorité du musée est ainsi mise en perspective en détaillant deux processus d’attribution de l’auctorialité des contenus, pour les notices des collections, pour les contenus du blog.262 » Ces types de mention sont la preuve d’une nouvelle forme de fonction éditoriale « comme un accompagnement aux nouveaux modes de lecture-écriture en 261

S. n., « Charte éditoriale », Le Blog des enseignants, [en ligne] http://www.cite-sciences.fr/blogeducation/charte-editoriale/ consulté le 08/07/2010. 262 Gaëlle Crenn et Geneviève Vidal, op. cit.

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offrant des espaces d’interaction éditoriale »263 et de la nouvelle place des publics sur les sites Internet des musées. Selon Isabelle Rieusset-Lemarié, ces nouveaux rapports engendreraient une « fonction éditoriale partagée »264. L’adoption de l’édition en réseau par les musées change les méthodes de travail et modifie l’image de l’institution. Une identité numérique du musée se construit. Olivier Ertzscheid définit ce terme au sens où : « L’identité numérique peut être définie comme la collection des traces (écrits, contenus audio ou vidéo, messages sur des forums, identifiants de connexion …) que nous laissons derrière nous, consciemment ou inconsciemment, au fil de nos navigations sur le réseau.265 » En dehors du site du musée, le community manager a la responsabilité de cette image. La collaboration de musée avec des plateformes comme Wikipédia est un moyen de maîtriser son identité. Dans leur site, certaines institutions décident par exemple d’accompagner chaque contenu en ligne du nom de son auteur, comme le fait le musée des Arts décoratifs ou certains musées dans leur blog, comme le muséum d’Histoire naturelle de Toulouse. L’identité numérique de l’institution est ainsi déterminée par la reconnaissance des interlocuteurs et des auteurs de contenus en ligne. Ces politiques éditoriales révèlent le partage des publications, entre des contenus traditionnels, répondant à un processus éditorial proche de celui que l’on connaît dans l’univers du papier – quoique différent par la multiplication des types d’éditeurs –, et des contenus utilisant les fonctionnalités d’interaction du Web 2.0. Ces derniers induisent de nouveaux sujets et changent l’image du musée. Ces types de contenus sont les signes d’un rapprochement du musée au Web collaboratif, que certaines institutions ont développé par des partenariats avec Wikipédia, par exemple.

263

Isabelle Rieusset-Lemarié, « La Médiation éditoriale sur Internet », op.cit.. Ibid. 265 Olivier Ertzscheid, « Les Évolutions de l’information : le Web collaboratif et la gestion de l’identité numérique », Affordance, », 25 mars 2008, [en ligne] http://affordance.typepad.com/mon_Weblog/2008/03/les-volutions-d.html consulté le 23/06/2010. 264

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Conclusion Alors que le numérique et l’Internet intégraient l’univers des musées, certains observateurs avaient émis des réticences quant à la place de cette nouvelle forme de médiation. Jacques Thuillier, professeur au Collège de France et observateur de la vie culturelle s’interrogeait : « L’Internet et le multimédia offrent-ils l’occasion longtemps souhaitée de développer la diffusion artistique, ou faut-il craindre de trahir la mission véritable du conservateur et les intérêts du patrimoine pour passer du côté des médias, quatrième pouvoir et véritable dictateur de notre temps ? 266» Depuis, les acteurs des musées, face à la généralisation de l’usage d’Internet, ont créé, malgré ces réticences, des contenus numériques, qui a hissé le site à un statut plus élevé que celui de simple vitrine du musée. Cette étude a eu pour objectif d’analyser ces publications, à travers la tension qu’il existe entre des modèles d’édition traditionnel, hérités de l’industrie du livre, et l’univers du Web et de la conception multimédia. Nous avons observé que le modèle du papier est encore très présent dans les contenus en ligne, que ce soit au niveau de la forme des contenus (documents en version PDF, etc.) qu’au niveau des termes employés pour définir ces ressources. Face à ce modèle qui perdure, les contenus utilisant les fonctionnalités du Web, comme celles d’interactivité, deviennent de plus en plus importants. On le remarque notamment dans les expositions virtuelles. L’utilisation des fonctionnalités du Web est également visible par la création de contenus collaboratifs, impliquant une nouvelle responsabilité éditoriale partagée entre celle du musée et celle de l’internaute. Ces nouvelles formes, qui reposent sur les interactions entre acteurs, engendre de nouveaux contenus sur le musée. Le blog est très souvent le lieu où le musée se dévoile, au bonheur des internautes, demandeurs de ce genre de contenus, comme l’explique Gaëlle Crenn et Geneviève Vidal : « […] le blog apparaît ainsi comme un moyen de transmettre un autre contenu et une autre image du musée : l’institution s’ouvre et offre un contenu autrefois confidentiel : les coulisses permettent aux visiteurs de pénétrer l’intimité de l’institution, et ainsi de créer un lien de proximité plus fort avec les publics.267 » Le musée s’ouvre aux internautes mais également à la communauté des amateurs, par le 266 267

Propos extraits dans Joël Girard, op. cit. Gaëlle Crenn et Geneviève Vidal, op.cit.

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biais de Wikipédia. Pour favoriser une présence sur cette plateforme et se rapprocher des rédacteurs, des programmes sont mis en place. Ces types de formes éditoriales obligent le musée parfois à définir les caractéristiques de sa présence sur ces plateformes collaboratives et à préciser les rapports qu’il entretient avec les internautes. Des textes indiquant le statut et les objectifs du musée en ligne sont parfois produits et accessibles en ligne. Ces textes sont d’autant plus importants que les producteurs de contenus ont multiplié. Certes, l’éditeur Web, responsable du site reste le référent principal, mais sa responsabilité a été déléguée à d’autres membres du personnel du musée comme les bibliothécaires ou les personnes chargée du département de recherche. D’ailleurs, biens souvent, ces personnes sont également celles qui écrivent et éditent les contenus. Ces politiques éditoriales sont également importantes car elles fixent les types de publics à cibler. Le musée a développé une stratégie déterminée par le public. Il faut désormais essayer de répondre aux besoins, notamment ceux d’accessibilité et d’usage. On a donc pu observer un travail sur les contenus dits « grand public » mais également la volonté de proposer des publications adaptées aux besoins de publics précis. Cette recherche pourrait s’élargir à d’autres publications. Nous n’avions, en effet, pas pris en compte certaines publications, comme les visites virtuelles. Ce type éditorial ne s’intégrait pas à la problématique que nous voulions étudier, à savoir la tension entre modèle d’édition traditionnelle et le modèle de conception Web. La visite virtuelle repose sur les fonctionnalités du Web, comme celle d’interaction et de modélisation. Nous avons pu tout de même aborder le sujet notamment lors des entretiens. Ces formes immersives rencontrent un certain succès et sont de plus en plus adoptées par les musées. Pour Samuel Bausson et Alain Romang, elles sont l’avenir des contenus sur le Web et sur les supports mobiles. Michel Berthelot, chercheur au CNRS pour le laboratoire MAP (Modèles et simulations pour l’architecture, l’urbanisme et le paysage), écrit dans un article paru dans la revue Culture et recherche 272: « La numérisation 3D répond aujourd’hui à deux préoccupations : la conservation, par la prise « d’empreintes numériques », et la valorisation, par sa capacité à donner à voir et à comprendre au plus grand nombre les 272

Modèles et simulations pour l’architecture, l’urbanisme et le paysage, FRE 3315 MAP, [en ligne] http://www.map.archi.fr/ consulté le 22/07/2010.

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objets étudiés. »273 Ce chercheur résume les objectifs de ces processus d’immersion, dont la visite virtuelle fait partie. Parmi les exemples qui pourraient être étudiés, il existe la visite virtuelle de la chapelle royale intitulée Une chapelle pour le roi 275, qui permet de la visualiser à 720 . Il serait également possible d’intégrer dans ce modèle de « l’immersion », celui des musées virtuels qui n’existent que sur le Web. Le site n’est plus le reflet d’une réalité, ni la vitrine d’une institution. Il devient le lieu d’exposition alimenté par des reproductions d’œuvres. Le musée d’art virtuel d’Uruguay279 reconstitue l’espace d’un musée réel, en reprenant les principes de la visite virtuelle. Il permet d’accéder à des œuvres appartenant, notamment, à des collections privés. Le musée virtuel des arts et des traditions du Gabon 280 donne une visibilité aux œuvres du pays. Cet espace sur le Web est une solution aux difficultés financières qu’implique la construction d’un musée réel. L’étude de ces types de publications complèterait celle que nous venons d’apporter.

273

Bertrand Rondot, « Le Petit Trianon, le virtuel, une réalité historique », Culture et recherche, n° 118-119, automne-hiver 2008-2009, p. 19. 275 Une chapelle pour le roi, visite virtuelle de la chapelle royale du château de Versailles, [en ligne] http://www.chapelle.chateauversailles.fr/ consulté le 22/07/2010. 279 Le musée d’art virtuel d’Uruguay, financé par le journal El Pais, [en ligne] http://muva.elpais.com.uy/ consulté le 22/07/2010 280 Le musée virtuel des arts et des traditions du Gabon, [en ligne] http://www.gabonart.com/ consulté le 22/07/2010 ; Pour compléter ces exemples, retrouver les articles liés à cette thématique des musées virtuels, Buzzeum, [en ligne] http://www.buzzeum.com/tag/musee-virtuel/ consulté le 22/07/2010 ; pour avoir plus de renseignements sur les sites de musées en Afrique, Roberta Cafuri, « Les musées africains en ligne », Cahiers d'études africaines, 176 | 2004, [En ligne] http://etudesafricaines.revues.org/index4856.html consulté le 29 juillet 2010.

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Élise Gruselle Master 2 Lettres modernes appliquées à l’édition Numéro d’étudiant : 10906191 Paris IV- Sorbonne

Les publications numériques des musées

Sous la direction de Jean-Michel Ollé Volume 2 : volume d’annexes.

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Sommaire

Les sites en images _________________________________________97

Sites et publications recensĂŠs ________________________________125

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Les sites en images

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Figure7. Actes de colloques du musée du Quai Branly, [en ligne] http://actesbranly.revues.org/60 consulté le 20/07/2010.

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Figure17. Bon appĂŠtit [en ligne] http://www.cite-sciences.fr/francais/ala_cite/expositions/bonappetit/ consultĂŠ le 22/07/2010.

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Figure20. Extrait du film de Lena Gieseke, [en ligne] http://www.lena-gieseke.com/ consulté le 22/07/2010 ; la vidéo de la promenade est visible sur la plateforme Youtube, [en ligne] http://www.youtube.com/watch?v=xQ_uGbQanNw consulté le 22/07/2010.

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Figure21. Louis XIV, exposition virtuelle à l’occasion de l’exposition au château de Versailles du 20 octobre 2009-7 février 2010 [en ligne], http://www.louisxiv-versailles.fr/ consulté le 27/07/2010.

Figure22. Musée d’art moderne de Villeneuve d’Ascq, le LAM, « Galerie de net art », [en ligne] http://www.musee-lam.fr/archives/category/decouvrir/net-art consulté le 22/07/2010

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Figure29. Innova News, [en ligne] http://www.cite-sciences.fr/innovanews/a-propos/ consulté le 04/09/2010

Figure30. Meet me, the MoMA’s Alzheimer project, [en ligne] http://www.moma.org/meetme/index consulté le 04/09/2010

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Figure31. « Saint-Denis en images », Saint-Denis une ville au Moyen Âge, [en ligne] http://www.saint-denis.culture.fr/fr/stdimages_signes.htm consulté le 04/09/2010

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Figure35. Le Blog d’Archéa, blog tenu lors de la construction du musée d’archéologie à Louvres, [en ligne] http://archea.wordpress.com/ consulté le 06/09/2010.

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Figure37. Le Blog Lézard, blog des Arts décoratifs, [en ligne] http://www.lesartsdecoratifs.fr/francais/blog-lezard/ consulté le 06/09/2010.

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