Edgar Magazine Numéro 101

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JonOne jazzman du graffiti il improvise dans la rue (et sur la toile) 2 roues éléctriques Autos : cabriolets Mode : vintage et attitude contemporaine Art : plein d’expos Cinéma : Donnie Yen




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SOMMAIRE

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10 EDITO Du nouveau chez Edgar

Actualité 12 LA PHOTO Sur la ligne de départ 14 GAINSBOURG Les dessous d’une photo

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72 BANGKOK Une ferme urbaine sur les toits de l’université

Voitures 34 MOTO Les 2 roues électriques 44 AUTO Le moment Cabriolets Aston Martin les grands couturiers de l’acier

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Mode

54 TENDANCES L’air du temps TATRAS

Couverture 20

CONVERSATION L’artiste JonOne, peintre et graffeur « expressioniste » vous invite dans son atelier parisien, à découvrir son univers

Cinéma 66 L’OEIL DU TIGRE Donnie Yen


BMW C 400 GT EDITION CITY

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Crédit photos : Mirum France

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SOMMAIRE 101

Lifestyle

70 SON Platine vinyle : un nouvel âge

Culture

71 SPORT Le surf de rivière

88 EDG’ART Centre Pompidou Metz 20 ans déjà

78 DESIGN Los Angeles : une maison respectueuse de la nature. Aldo Bakker : des courbes sensuelles à l’essence organique, les créations saisissantes de ce designer hollandais ensorcellent autant qu’elles échappent à toute grille de lecture.

98 PORTRAIT Guillaume Desanges, commissaire d’exposition et critique d’art

102 STORY Pierre Vasarely : un bel et lourd héritage Interview avec Flavien Gaillard Adrien Gloaguen : hôtelier décomplexé Les cigars Olivia

100 Edition Digitale



Maison McLaren Paris, immersion dans la passion McLaren Un nouvel écrin a été inauguré dans la ville lumière pour le plaisir des passionnés et clients, avec l’ouverture ooicielle de la Maison McLaren Paris qui réunit sous son toit : art, culture, lifestyle et haute performance. Venez y découvrir l'élégante GT. Une beauté saisissante. La voiture la plus légère et la plus performante de sa catégorie en matière d’accélération. La GT est une supercar fascinante, alliant raainement, dynamisme et séduction. Au premier coup d'œil, le profil épuré paraît sobre et élégant. Mais en regardant de plus près les contours fluides, vous découvrirez vite le design et l'ingénierie innovants qui sont au cœur de chaque McLaren. Créez de nouvelles règles, vivez des sensations de supercar dans un équilibre subtil. Un seul mot d’ordre : le raainement. McLaren Paris 19 Rue du Calvaire 92210 Saint-Cloud 01.86.65.02.31

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ÉDITO L’homme moderne, homme curieux et branché, s’intéresse à tout. Aux voitures superbement carrossées, aux motos merveilleusement effilées, et à leurs modes de propulsion encore plus s’ils sont électriques. Il demeure très cinéphile malgré la période. Il suit de près les mutations climatiques et leur réponse écologique. Pour lui la mode n’est pas un petit sujet. Il faut simplement qu’elle casse les codes. Il est demandeur de nouveautés. Il a soif d’esthétisme, de ces créations artistiques qui viennent changer notre façon de voir les choses. C’est que le design, encore plus qu’hier, s’est installé puissamment dans le monde sans doute parce qu’il est plus une fonction qu’une simple forme, aussi élégante soit-elle. Il a ainsi conquis de nouveaux territoires, les a envahis, les a marqués : dans nos salles de bains, nos cuisines, il a dessiné nos ordinateurs, nos souris, nos voitures, nos avions. Tout est design.

La rédaction Edgar

C’est pourquoi ce numéro d’Edgar fait une si large place à ces artistes, créateurs de tendances, à ces initiateurs de visions. Il n’oublie pas ceux qui les font mieux connaitre, comme les galeristes ou ceux qui les confrontent au marché à travers leurs maisons de vente. Enfin ce numéro consacre ses plus belles pages à un artiste bien dans son époque, bien dans ses couleurs et bien dans son extravagance : un graffeur nommé JonOne. A découvrir. Michel Comboul

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LA PHOTO

L’oeuvre de Zao Wou-Ki traverse les débats esthétiques qui marquent le développement de l’art moderne.

Sur la ligne de départ Par Clément Sauvoy

Le 8 novembre dernier, aux Sables d’Olonne, Alan Roura a pris le départ de son second Vendée Globe : course à la voile, autour du monde, en solitaire, sans escale et sans assistance. Le jeune homme sera - comme il y a quatre ans lors de sa première participation - le plus jeune concurrent à s’élancer pour «L’Everest des Mers» ! A 27 ans seulement, le benjamin reste à ce jour le plus jeune skipper à avoir terminé le Vendée Globe. De nationalité suisse, Alan Roura a vécu sur un bateau sur le lac Léman avant de partir avec sa famille, alors qu’il n’a que 8 ans, pour une navigation autour du monde d’une durée de onze ans... Ce champion né commencera alors la navigation en solitaire aux Antilles à l’âge de 14 ans. Après une belle 12ème place pour son premier Vendée Globe, c’est avec des ambitions à la hausse, un partenaire fidèle La Fabrique et un bateau plus récent (doté de foils au premier semestre 2018) que le navigateur Genevois de génie reprend la barre pour un nouveau tour du monde !

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TÉMOIGNAGE

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| LA PHOTO

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TÉMOIGNAGE

Gainsbourg Les dessous d’une photo

par Michel Bonnin

De ces quelques photos (quand même très originales), le photographe Xavier Martin en a fait un livre qui se lit d’autant mieux qu’il fourmille de ces petits détails annexes qui font le sel d’une histoire.

propose bien un cliché en famille avec Jane et les enfants. Mais, allez savoir pourquoi, il veut être seul. De fait être admis dans les pages du magazine ressemble à une formidable consécration. Voilà la base de ces clichés assez peu courants.

Celle qu’il raconte, c’est sa rencontre avec Serge Gainsbourg. Il est déjà célèbre mais pas assez pour que Paris Match accepte de publier un cliché de lui, mais de lui tout seul. Pourquoi cette lubie ? La seule fois où il a eu les honneurs de Match c’est en photo avec Mstilslav Rostropovitch. Le violoncelliste fêtait son anniversaire à l’Elysée-Matignon. A l’époque on y croisait aussi bien Alain Delon que les Stones.

Alors Xavier Martin, pour essayer de forcer les portes du grand magazine, propose à Serge Gainsbourg de le photographier dans son bain. « Non seulement, écrit-il, il a accepté tout de suite – avec une petite remarque caustique sur sa réputation d’homme négligé qui allait enfin sauter –, mais il m’a proposé de venir dès le lendemain après-midi chez lui pour faire cette séance photo. »

L’histoire, c’est cette question du chanteur au photographe : « Que faut-il faire pour passer dans Paris-Match ? ». Il le demande, mais en plaisantant à moitié. Comment faire pour être en photo -mais tout seul- dans Match. On lui

On est en 1980, Gainsbourg a 52 ans, et il vient de composer « Dieu est un fumeur de havanes. » pour le film Je vous aime dans lequel il joue avec Catherine Deneuve. Xavier Martin se rend donc le lendemain, rive gauche,

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Rue de Verneuil, la maison de Gainsbourg aujourd’hui. Photos Laura Emir

rue de Verneuil dans la maison de Gainsbourg, dont la façade, aujourd’hui, est toujours couverte de tags -du street art de circonstance- devant lesquels certains viennent encore se recueillir. Le photographe est arrivé avec son lourd matériel et beaucoup de bain moussant. Serge est seul dans la maison. Ils discutent puis montent à l’étage et s’installent dans la salle de bains. Xavier est un peu gêné : son flash Blacar, sa base de 10 kg et son parapluie prennent toute la place. Mais il remarque les nombreux flacons et boites d’onguent partout sur les étagères. Il lui demande de se raser pour que lui-même puisse « ajuster ses cadrages et sa lumière ». Enfin Gainsbourg entre dans la baignoire « pleine de mousse légère et pétillante ». Après quelques échanges, quelques poses, quelques sourires, enfin la bonne prise. « Et là, c’était la photo parfaite : symétrie du cadrage, pose superbe, un de ces rares moments de grâce où naît la certitude d’avoir réussi. » Le

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bonheur : l’œil du photographe ne se trompe pas. La séance avait duré deux heures et trois pellicules de 36 prises. Xavier Martin en profitera pour demander à Serge de bien s’habiller pour un cliché devant une très belle tapisserie qu’il avait remarquée au rez-de-chaussée. Et Serge, figurant docile, revient habillé comme un dandy, costume à belles rayures et cravates du meilleur goût. Le reportage devait paraître dans le numéro suivant du magazine. Mais, curieusement, les photos seront oubliées par Paris Match. Et ne seront publiées dans l’hebdomadaire que trente ans après, en 2014, bien après la mort de Gainsbourg. Elles seront aussi exposées ensuite à Beaubourg. Xavier Martin confie volontiers que de toute sa production ce sont ces clichés dont on lui parle le plus souvent… Gainsbourg rue de Verneuil – Histoire d’une photo mythique (éditions Hervé Chopin) www.hc-editions.com


TÉMOIGNAGE

Xavier Martin a fait ses classes comme photographe de presse d’abord à l’agence Angeli, où il se spécialise rapidement dans les portraits de célébrités, puis à Sipa Press, comme reporter-photographe d’actualités et enfin dans les grands quotidiens d’information. En 1980 il se met à son compte pour la presse internationale. Il est sans doute le photographe contemporain qui a à son actif le plus grand nombre de portraits des grandes figures -parfois mythiquesde ces cinquante dernières années. Il a toujours su gagner la confiance puis rentrer dans l’intimité des plus grands, comme il le montre avec Serge Gainsbourg.

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JonOne

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Photo : Gwen Le Bras

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JonOne

COMVERSATION

JonOne Peintre, catégorie Puncheur L’artiste-star d’origine dominicaine, né dans le quartier de Harlem à New York a fait sortir le street art de la rue et des ghettos. Montrées à Lille actuellement, ses dernières toiles explosives nous parlent d’égalité, de liberté et de fraternité. Rencontre avec un « ex » graffeur hyperactif qui n’a de cesse de prendre le pouls de son époque. Par Clément Sauvoy

et les sentiments les plus sincères hors de toute chapelle. Là est certainement la force et l’ADN unique de sa signature que sont venues très vite chercher des maisons prestigieuses comme Hennessy, Guerlain ou Lacoste. Portées par un rythme effréné, ses œuvres ne sont pas sans rappeler cette évolution radicale de l’univers du métro vers celui des galeries comme Rabouan Moussion et Provost Hacker qui, toutes deux, lui consacrent des solo shows à Paris et à Lille. Mais aussi la Fondation Agnès B qui accompagne cette approche allant du support urbain – de l’époque du collectif 156 All Starz à New York en 1984 - à celui de la toile aujourd’hui. En s’affranchissant très tôt des codes de

« Le métro est un musée qui traverse la ville »

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la culture « graff », l’impétueux artiste – qui aime à dire que « le métro est un musée qui traverse la ville » - dévoile une personnalité libre et échappant à toute catégorie de lecture : « Tous les jours, je peins avec mon ventre, mes tripes : je fais ce que j’aime. Mais je n’ai pas toujours eu la belle vie. J’ai même été homme-pipi à New York. C’était mon meilleur boulot. Je ne veux pas être dans un ghetto de riches, ni de pauvres. Je veux pouvoir jongler avec ces différents mondes » confie-t-il le plus sérieusement du monde.

Photo : Gwen Le Bras

John Andrew Perello, alias JonOne, 56 ans, est l’un des artistes les plus cotés en France où il réside désormais depuis près de quatre décennies. Ce pur produit de la rue new-yorkaise, décoré par la République française et ayant débuté en taguant le nom « Jon156 » se définit aujourd’hui comme un « peintre graffiti expressionniste abstrait » et ne cesse de construire sa légende sans renier son parcours de vie digne d’une vraie « success story ». Jouissant d’une côte de popularité tous azimuts auprès des différentes tranches d’âges et catégories socioprofessionnelles, cette belle gueule de la planète art fédère en effet tous les publics avec une aura où affleurent l’émotion brute


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JonOne

«Tous les jours, je peins avec mon ventre, mes tripes : je fais ce que j’aime.»

Photo : Gwen Le Bras

L’atelier parisien de JonOne

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Photo : Gwen Le Bras

« Si je ne veux pas exploser, je dois me dépenser physiquement… »


JonOne

Photo Courtesy Galerie Rabouan Moussion Paris

une gestuelle artistique sans concessions Depuis son atelier parisien et son autre espace partagé de 350 m2 de Roubaix, JonOne « crache » sa peinture sous un rythme forcené de sportif de haut niveau car ce boulimique de travail exprime une gestuelle artistique sans concession à côté de son inséparable punchingball dictant ses lois au milieu d’un amoncellements de brosses et d’empilements de pots de peintures éventrés : « Si je ne veux pas exploser, je dois me dépenser physiquement… » déclare-t-il dans un sourire radieux. Dans un démarquage délibéré de ses pairs, le champion s’est émancipé progressivement des canons du graffiti en conservant toutefois les fondamentaux dont cette rapidité d’exécution et cette

projection de couleurs propres à la pratique. C’est grâce à la rencontre déterminante avec l’artiste et producteur de disque Bando (de son vrai nom Philippe Lehman) que l’autodidacte JonOne, n’ayant reçu aucune éducation artistique académique,

débarquera un jour à Paris et développera son sens de l’observation : « Je venais de New York, les gens me voyaient donc comme le représentant du graffiti new-yorkais. Pourtant ce que je faisais n’était pas représentatif de ce qu’ils pouvaient imaginer. J’étais plus free que technique, j’étais dans l’imaginaire. Comme je possédais la technique, je pouvais la laisser derrière moi et créer, mélanger des centaines d’informations, prendre des raccourcis graphiques tout en me laissant porter par la vague... » se rappelle le peintre-puncheur dont les yeux se mettent à briller autant de reconnaissance que d’envie de faire. Avant de libérer un puissant crochet du droit !

Infinity - JonOne

Photo Courtesy Galerie Rabouan Moussion Paris

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JonOne

Photo : Gwen Le Bras

Ce pur produit de la rue new-yorkaise, décoré par la République française se définit aujourd’hui comme un « peintre graffiti expressionniste abstrait »

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JonOne

ACTUALITÉS Exposition « ROCK ! »

Du 10 décembre 2020 au 13 février 2021 à la galerie Provost Hacker dans les deux espaces : au 40, rue Voltaire, 59000 Lille et au Hall des Assurances Deleplanques, au 46 Rue Négrier, 59800 Lille.

Photos : Bruno Brouch

www.galerie-provost-hacker.com

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Photo : Gwen Le Bras

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Photo : Alexis deforges

JonOne

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MOTO 2 ROUES ÉLÉCTRIQUES

Le roadster LiveWire se montre en ville d’une facilité et d’une docilité extrême. Et électrique en plus. C’est aussi ce qui plait à notre pilote.

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La voisine en Harley D Le roadster LiveWire se montre en ville d’une facilité et d’une docilité extrême. Et électrique en plus. C’est aussi ce qui plait à notre voisine pilote.

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MOTO 2 ROUES ÉLÉCTRIQUES

Harley-Davidson LiveWire Qui aurait cru qu’un jour Harley-Davidson produirait une moto électrique ? Les temps changent, notre modèle de société évolue et nos esprits aussi. Depuis son lancement fin 2019 j’avais hâte d’enfourcher cette “HD” hors du commun. Je n’ai pas été déçu. Par Dominique Peltier

Commençons par le début ; c’est-à-dire l’esthétique. Pas d’erreur c’est un roadster sportif. La moto montre ses muscles, mais sans exagération. Bien proportionnée et à la finition soignée, elle commence à exciter les pupilles. Pas une pure beauté qui vous décrocherait la mâchoire, mais un ensemble agréable qui va flatter votre ego lorsqu’une vitrine reflètera votre image. Je le sais, je l’ai fait et j’ai bien aimé. C’est puéril j’en conviens. Ensuite, on enfourche la bête sans la moindre appréhension. Basse de selle (780 mm) et relativement légère (251 kg) il est alors facile de la redresser et d’apprécier la position de conduite naturelle, et plus encore en roulage. Lors de l’allumage j’ai eu une pensée émue pour les propriétaires passionnés qui ne jurent que sur l’énorme V-Twin de Milwaukee et ses coups de pistons monumentaux, source d’un bonheur éternel… Là… Rien ! Silence. Ai-je bien allumé le bazar ? On tourne d’un quart de millimètre la poignée d’accélérateur, on cherche la poignée d’embrayage qui a disparu et la moto avance : magique. Aussitôt je me faufile dans les rues étroites d’une ville que je connais parfaitement (Cannes). Il ne faut pas plus d’un kilomètre pour trouver ses marques. Le roadster LiveWire se montre en ville d’une facilité et d’une docilité extrême. Un monde parfait. Allons vite chercher des routes pour voir ce que cette “pile” a dans le ventre. Même si l’on sait qu’un moteur électrique est redoutable en termes

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de départs canons, les premières accélérations franches sont pour le moins spectaculaires. Ça pousse fort, très fort, voire très très fort et ça semble ne vouloir jamais s’arrêter. Reprenons un rythme plus humain pour vérifier ce que l’on subodore déjà, à savoir un comportement sain sur des routes à virages. Le roadster parfaitement suspendu et doté d’un cadre rigide en aluminium révèle alors un vrai tempérament sportif. Hyper ludique à piloter on se prend vite au jeu, on ne touche quasiment pas aux freins, profitant de l’énorme frein moteur servant à la régénération de la batterie. Du grand spectacle qui s’éteint après 158 kilomètres. Environ 33 900 € - Remerciements chaleureux au concessionnaire Harley-Davidson Factory (Frédéric Bourel) qui nous a permis de réaliser cet essai. HD Factory 16 chemin des Espartes 06800 Cagnessur-Mer.

Page de droite Roadster Harley-Davidson LiveWire Le plein de sensations et du grand spectacle.


LiveWire se montre en ville d’une facilité et d’une docilité extrême. Et électrique en plus.

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MOTO 2 ROUES ÉLÉCTRIQUES

SYMPA, DESIGN ET CONNECTÉ

NIU NQI GTS SPORT Autant le dire d’emblée, c’est avant tout son look qui nous a séduit. Atypique autant que sympathique le Niu GTS Sport est également un compagnon fidèle pour le quotidien. Son moteur électrique équivaut à un 125 cm3 et est parfaitement taillé pour tirer son épingle du “jeu” en milieu urbain ou péri-urbain. Doté de trois modes de conduites intelligents : Save privilégiant l’autonomie, Dynamic (idéal en ville) bridant le scooter à 50 km/h et enfin le mode Sport où toute la cavalerie est lâchée afin de profiter à 100 % de son généreux

moteur. Vous pourrez filer alors à plus de 70 km/h. Son autonomie est d’environ 100 kilomètres, ce qui est parfait pour ce genre de véhicule servant dans la grande majorité des cas à rejoindre son travail. Le Niu est équipé de 2 batteries amovibles, elles peuvent être rechargées en 5 heures et si vous avez le bonheur de disposer d’une prise classique à proximité, la recharge se fait directement sans avoir besoin d’extraire les batteries. Un scooter très sympa et bien sûr connecté grâce à une application dédiée, il est à vous contre 3 599 €.

COUP DE FOUDRE

VESPA ELETTRICA 70 KM/H Outre ses filets bleus évoquant l’électricité, cette très jolie petite Vespa respecte à la lettre les fondamentaux du design maison. Un style néo-rétro qui va parfaitement avec l’esprit de cette Vespa du XIIe siècle. Car si le plumage vous invite dans l’Italie des années 60, le ramage brille par son silence. Avec elle plus de fumée bleue et odorante, mais le simple silence d’un fonctionnement sans heurt. D’ailleurs avec elle tout est d’une grande simplicité. Depuis son démarrage, en passant par sa prise en main et jusqu’à sa conduite, tout est limpide et naturel. Elle dispose bien sûr de plusieurs modes d’utilisations selon vos préférences avec une autonomie d’environ 100 kilomètres en mode ECO et 70 kilomètres en mode Power, avec une durée de recharge complète de 4 heures. Connectée comme il se doit, la vespa Elettrica bénéficie des nombreuses fonctionnalités du système multimédia Vespa MIA permettant de raccorder votre smartphone au scooter et de gérer le tout via l’écran TFT couleur du véhicule. Coup de foudre pour cette œuvre d’art contemporaine. À partir de 6 690 €

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UNE TROTTINETTE ÉLECTRIQUE ASSEZ. INCROYABLE

MiniMotors Dualtron Storm

La marque coréenne MiniMotors a été créée en 1999 et son rayonnement est aujourd’hui mondial. Son savoirfaire ne fait aucun doute privilégiant puissance, confort et sécurité. Avec la trottinette Dualtron Storm, nous sommes ici en présence d’un petit monstre qui revendique des performances de championne tout en offrant confort et sécurité. Mais comment une petite trottinette électrique peut se métamorphoser de cette manière ? Pour le constructeur de Busan (Corée du Sud) il s’agit d’y mettre tout simplement les meilleurs ingrédients. Ça commence par deux moteurs de 6640W en crête permettant d’obtenir une vitesse maximale de plus de 100 km/h (sur piste privée évidemment). Sa vitesse d’origine (bridée) est de 25 km/h. Quant à son autonomie, elle flirte avec les plus de 110 kilomètres. Chaussée de pneus larges tubeless de 11 pouces, d’un freinage hydraulique puissant et de suspensions performantes, la Dualtron Storm peut parcourir de longues distances en ville sans épuiser son pilote et peut même se mesurer à des pentes allant jusqu’à 35°. Elle pèse 46 kilos, peut supporter jusqu’à 150 kilos de charge et s’échange contre 4 490 €.

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Zero Motorcycles SR/S Joueuse et joyeuse En bientôt 15 ans d’existence la marque californienne propose une large gamme de motos 100 % électriques. La SR/S est la toute dernière. Un roadster sportif rapide comme l’éclair à l’énergie folle. Par Dominique Peltier

Il n’y a pas si longtemps quand on parlait d’une moto puissante, on disait qu’elle avait des watts. Hé bien ! Cette SR/S en a tout un stock qu’elle délivre généreusement. Son moteur électrique Z-Force annonce 110 chevaux pour un poids total de 229 kilos. Ce qui est parfaitement dans la bonne moyenne si on compare cette SR/S à un roadster bicylindre voire 4 cylindres (essence). Équipée d’un carénage intégral parfaitement étudié et à la finition soignée, la SR/S gagne selon le constructeur 13 % d’autonomie par rapport au roadster SR/F. Un vrai plus qui a ici une importance primordiale. Eh oui, quand on aborde le sujet électrique, l’autonomie est la première question qui vient à l’esprit, juste après avoir évoqué les accélérations foudroyantes

évidemment ! En cycle urbain l’autonomie frôle les 260 kilomètres, 175 kilomètres en cycle mixte et “seulement” 132 kilomètres sur autoroute. Nous sommes d’accord, l’autoroute à moto n’a que très peu d’intérêt, sauf si l’on désire s’ennuyer. La SR/S est faite pour la route, la vraie, avec des virages, des montées, des descentes, des freinages, des accélérations franches au sortir d’une courbe, bref, piloter sa moto, s’amuser, prendre du plaisir et puis recommencer… À ce jeu, le roadster sportif californien répond présent à la moindre sollicitation et comme tout véhicule électrique, la réponse est immédiate et joyeusement affolante. Le 0 à 100 km/h est balayé en 2,5 secondes. Prix du ticket d’entrée : 21 720 €

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3 questions à Umberto Ucceli Après l’élégant modèle SR-S, peut-on imaginer dans un avenir proche un modèle GT ou un modèle Custom ? Notre formidable équipe de designers et d’ingénieurs travaille en permanence sur de nouveaux concepts et développe de nouvelles idées. Donc oui, nous pouvons imaginer que de nouveaux produits seront bientôt présentés. Mais il est fort probable que la réalité surprendra et surpassera toutes nos attentes. Nous avons vu de nombreuses marques annoncer la mise sur le marché de nouvelles motos qui n’ont finalement jamais été produites. Chez Zero, nous sommes fiers de faire le contraire. Ce n’est que lorsque nous sommes prêts à produire un modèle et à le livrer aux clients que nous l’annonçons. Peut-être même que nos designers travaillent en ce moment sur de nouveaux concepts ou sur la réinterprétation d’un type de moto, que la technologie de la propulsion électrique favorise. Je n’en sais pas plus. Mais ce que je sais, c’est que nous avons récemment lancé les Zero SR/F et SR/S. Les deux sont très belles, offrent des performances de pointe et connaissent un grand succès depuis leur lancement. Quel est le profil de vos clients en Europe ? En France ? Intelligents, en avance sur leur temps, ils envisagent l’avenir avec optimisme et sont plus jeunes que la moyenne des motards. Nos motos sont souvent les deuxièmes ou troisièmes dans leur garage et deviennent

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MANAGER ET DIRECTEUR EUROPE DE ZERO MOTORCYCLES

généralement les seules qu’ils utilisent... Le conducteur de 11kW est très souvent un motard déjà expérimenté qui n’a pas besoin de trop de puissance pour s’amuser en roulant le week-end ou simplement en se rendant au travail. Ou bien un nouveau motard, qui entre dans le vaste monde du deux-roues, sous sa forme la plus simple, la plus pure et la plus directe.

Nous sommes fiers d’avoir attiré vers les deux roues de nombreuses personnes, contribuant ainsi à élargir le monde des passionnés de moto. J’aime à imaginer que tous nos clients sont aussi des rêveurs, qu’ils veulent changer le monde ou du moins apporter leur petite contribution pour le rendre meilleur jour après jour. Tous les motards me donnent un certain sentiment de pureté et de sainteté, ils ne font qu’un avec leur moto et ont mon plus

grand respect. J’aime imaginer les motards «électriques» comme étant ceux qui ont le plus de rêves, prêts à se mêler au monde de manière plus respectueuse tout en gardant le facteur plaisir, ce qui inclut un couple excitant. Le triste épisode de Covid-19 va-t-il, selon vous, changer les mentalités et révéler l’intérêt des 2 roues électriques au plus grand nombre ? Si l’on considère un motard et son mode de déplacement, il me semble que l’on donne des indications sur la conduite à tenir pour se protéger du virus : gants, protection du visage, air frais, distanciation sociale. En outre, la moto est une solution aux embouteillages et aux difficultés de déplacement qui, avec le Coronavirus, sont devenues plus importantes. Les vélos électriques sont également très intéressants, dotés d’un bon couple, et sont propres. La pollution est toujours un problème et nous contribuons intrinsèquement à réduire l’empreinte carbone des deuxroues. Les gens s’orientent déjà vers les deux roues électriques et le processus de changement des mentalités en faveur des motos électriques est devenu très clair. Peut-être que ce triste temps COVID-19 va accélérer ce processus. Ce serait logique, mais il nous faut maintenant être en mesure de tourner la page le plus rapidement possible pour envisager l’avenir avec optimisme.


2 100 % électrique, la SR/S est un roadster sportif rapide comme l’éclair à l’énergie folle.

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Cabriolets le moment Est-il encore utile de présenter le plus iconique des cabriolets japonais ? Le MX-5 roadster découvrable 2 places a fêté l’année dernière ses trente ans en seulement 4 générations de modèles. Une voiture indémodable, adorable et abordable. Par Dominique Peltier

Mazda MX-5 44

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AUTOMOBILE

MAZDA MX-5

La toute première MX-5 née en 1989 annonçait 90 chevaux dans sa version d’entrée de gamme pour un poids de seulement 950 kilos. Un bon rapport poids/puissance. Une version 115 et 130 chevaux était également proposée à une clientèle plus argentée ou plus motivée… Le succès fut immédiat au Japon, en Europe et aux ÉtatsUnis. Il est encore aujourd’hui le roadster le plus vendu au monde avec plus d’un million d’exemplaires. Rien de plus normal, car ce petit roadster, a concentré sa stratégie sur le plaisir de conduire. En effet, le petit roadster japonais est un véritable concentré de bonheur. Une prise en main immédiate, une puissance suffisante pour profiter de son châssis, une direction précise et un comportement global excellent permettant pas mal de fantaisie. Mais le MX-5 n’est pas seulement un “jouet” ludique, c’est également un petit cabriolet confortable, bien équipé, à la finition soignée. (…)

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AUTOMOBILE MAZDA MX-5

LE SOURIRE AUX LÈVRES (...suite) La gamme actuelle propose 2 motorisations, ne cherchez pas de diesel évidemment, politiquement incorrect sur un roadster. Tout d’abord un 1.5 litres de 132 chevaux et un 2.0 litres de 184 chevaux que vous pourrez utiliser avec une boîte mécanique ou automatique. Quant à la capote Mazda laisse le choix entre une capote souple ou un toit rigide rétractable électriquement. Cette dernière génération offre naturellement plus de caractère et des performances en hausse, mais l’esprit est bien toujours le même : vous donner le maximum de plaisir. À partir d’environ 28 000 €

MINI SIDEWALK CONVERTIBLE

3 motorisations pour cette série spéciale Edgar est abonné aux voitures iconiques et cette Mini Sidewalk ne déroge pas à la règle. Si la Mini standard a déjà un fort pouvoir attractif, cette version agit comme un aimant sur votre volonté. La couleur de la carrosserie est la première force d’attraction. Ce bleu (Deep Laguna), même si d’autres coloris sont proposés, fait monter d’un cran votre intérêt pour ce cabriolet. Ensuite, comme-ci cela ne suffisait pas, la marque a ajouté d’autres éléments esthétiques. Parmi eux, les jantes en alliage bicolores de 17 pouces ou encore une capote stylisée comportant une série de flèches. Même les bandes sur le capot ont été spécialement conçues pour ce modèle Sidewalk. L’habitacle est d’évidence toujours aussi soigné avec notamment une sellerie cuir surpiquée, des seuils de portes en aluminium portant le logo Sidewalk que l’on retrouve également sur les sièges et le volant. Déclinée en 3 motorisations 102, 136 et 192 chevaux, cette Mini spéciale adopte une boîte mécanique à 6 rapports de série ou une séquentielle en option (7 rapports) sur les modèles 136 et 192 chevaux. Parfaitement dotée, la Mini Sidewalk est disponible à partir d’environ : 32 000 €. 46

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FIAT 500 “LA PRIMA”

UN PETIT BOLIDE ZÉRO ÉMISSION Une Fiat 500 toute nouvelle, totalement revue, se révélant plus spacieuse, plus stylée et beaucoup plus technologique. 100 % électrique, 100 % découvrable, la 500 se réinvente en conservant bien sûr son ADN joyeux où liberté, jeunesse et insouciance caractérisent cette diva populaire. Toujours aussi active, la 500 est équipée d’une batterie lithium-ion de 42 kWh lui offrant une autonomie de 320 kilomètres en cycle WLTP. Elle bénéficie également d’un chargeur rapide de 85 kW qui peut fournir en seulement 5 minutes 50 kilomètres d’autonomie ou 80 % en 35 minutes. Particulièrement intelligente, la 500 est dotée d’une caméra frontale permettant de contrôler toutes les zones de la voiture. Surveillance des angles morts, limiteur de vitesse adaptatif

(IACC), maintien de la voiture sur sa voie ou encore une vue verticale de la voiture pour faciliter le stationnement. Elle est, vous vous en doutez, totalement connectée intégrant même un mode miroir de votre smartphone tout en offrant un écran tactile HD de 10,25”.

À cela vous ajoutez la navigation, l’assistance, la localisation du véhicule ou encore la Wi-Fi intégrée et vous obtenez un petit bolide zéro émission en prise direct avec le monde. À partir de 22 900 € en intégrant le prime d’aide du gouvernement.

SMART EQ CABRIOLET

Une reine de la ville 100 % électrique

Aujourd’hui Smart est la seule marque au monde à ne disposer que de modèles électriques. Alors voici la fortwo décapotable électrique qui est et restera l’outil le plus parfait pour circuler sur 4 roues dans nos villes saturées. À l’époque du thermique, elle était déjà LA solution, c’est encore plus vrai aujourd’hui. Pas de pollution, ni sonore, ni atmosphérique, une autonomie bien adaptée à son usage urbain et péri-urbain, une facilité de conduite évidente et je ne vous parle pas du demi-tour dans un mouchoir de poche, la Smart fortwo est indiscutablement la reine de la ville. Avec son moteur synchrone de 40 kW la fortwo cabrio offre des accélérations de l’ordre de 4,8 secondes pour atteindre 60 km/h. De quoi bondir d’un feu à l’autre sans le moindre effort. Hyper connectée, hyper intelligente et hyper intuitive, la petite smart est définitivement entrée dans une nouvelle ère. Elle reste également un objet design de notre quotidien, c’est rassurant, on est en confiance, ultra pratique, elle est notre meilleure partenaire pour suivre le rythme trépident de nos vies, avec vue sur le ciel. À partir de 29 800 €

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AUTOMOBILE

LAND ROVER DISCOVERY SPORT

Aller au bout de ses rêves C’est sur la neige que j’ai pu essayer le Discovery Sport. Un essai life style et rafraîchissant pour un modèle familial qui n’a pas froid aux yeux. Franchisseur, baroudeur et ô combien convivial le “Disco” est un séducteur né. Par Dominique Peltier

Le Land Rover Discovery est tout simplement pour la firme le modèle le plus vendu au monde. Un succès légitime au regard de son large éventail de possibilités. Véhicule familial par excellence, capable même en option d’obtenir sept places, il revendique son extrême polyvalence en s’adaptant à toutes les situations. Lors de cet essai (sous la neige) la marque n’a pas hésité à sortir des sentiers battus en empruntant des pistes totalement enneigées ; et quand la neige disparaissait, une boue grasse et épaisse tentait de nous barrer la route. Évidemment le Disco a gagné, mais il a fallu pour cela utiliser savamment la technologie embarquée (le Terrain Response, diaboliquement efficace) et également apprivoiser la conduite 4x4 où l’on apprend avec humilité le précepte : aussi vite que possible, aussi lentement que nécessaire. Si à l’approche

d’une montée boueuse affichant de profondes ornières l’angoisse vous noue la gorge, vous êtes quelques instants plus tard étonné de votre vélocité et de votre niveau de conduite en condition extrême. Certes, vous savez au fond de vous que c’est au seigneur Discovery que vous devez l’admiration de tous, mais c’est si bon de s’offrir un petit moment de gloire.

Sur la route, toutes les routes, votre rythme cardiaque retrouve sa sérénité. Les 240 chevaux de mon modèle d’essai délivrent leur puissance avec onctuosité. La force est bien présente, rassurante, elle veille sur votre plaisir, en distillant son couple généreux sur les quatre roues tout en veillant sur votre confort et celui de vos passagers. Que du bonheur ! La route serpente et me conduit ensuite au bord d’un lac gelé. La température extérieure frôle les -1, quelques flocons m’accompagnent : un bon café sera le bienvenu. Mais vous le savez sans doute, avec Land Rover il y a toujours le désir farouche d’aventure.

50 ans séparent ce modèle de 1970 et le Discovery d’aujourd’hui.

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Land Rover Discovery Sport. À partir de 38 100 €


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CONSEILLER DÉDIÉ

TARIFS1 FLOTTE(1) 1

ASSURANCE IMMÉDIATE(2) 24h/24 sur amv.fr

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AUTOMOBILE

Sous la pluie en Aston Martin Les douze (ou huit) cylindres chantent à la perfection aussi sous la pluie. Un chant plus profond, plus grave pour le premier; plus métallique, plus aiguë pour le second. Le baryton ou l’alto. Un rayon de soleil entre les gouttes...

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AUTOMOBILE

Les grands couturiers de l’acier Le mariage entre l’Art et l’industrie. C’est par cette jolie formule que Luc Ferry avait parlé un jour des prestigieuses automobiles de collection. Aujourd’hui, les concepteurs de ces chefs-d’œuvre ont pour la plupart disparus. Par Gérard Mangold

Chassés par la standardisation qui prévaut désormais sur le cousu-main et par la norme qui a balayé l’imagination parfois un peu folle, il faut bien le reconnaître, des grands couturiers de l’acier. Et pourtant, aujourd’hui existent encore, et c’est tant mieux, quelques rares survivants. Aston Martin est de ceux-là. Depuis 1913, sous l’impulsion initiale de Lionel Martin et Robert Bamford, la marque n’a jamais quitté le domaine de l’Art. Et son dernier modèle, la DB 11, en est la parfaite illustration.

Un grand cru, dirait-on pour emprunter à la viticulture. Un hymne à la beauté ou un hymne à l’amour, comme le chantait Edith Piaf, pour l’heureux homme qui en fera l’acquisition. Dès qu’il aura signé le gros chèque (plus de 200 000€) sur lequel se grefferont les taxes « punitives « (30 000€ environ), il se verra octroyer le droit d’insérer son joyau dans le petit monde gris et terne de la circulation d’aujourd’hui. Et sous les regards envieux des uns, désapprobateurs des autres et plus rarement admiratifs d’une minorité de connaisseurs, il lui faudra alors tenir son rang d’automobiliste d’exception. Car il « pilotera » bien en l’occurrence une automobile d’exception : sa ligne ... d’un autre monde, ses performances hors normes (plus de 300 km/h) et la mélodie envoûtante et grisante de son huit ou douze cylindres (au choix). Dès lors, notre automobiliste ne passera plus inaperçu. Il sera regardé, photographié, parfois filmé. Pas lui bien sûr mais la voiture, on l’aura deviné. Bref, satisfaction de l’ego garantie tout de même. Reste la route. Eh bien la route, pour accorder des circonstances atténuantes à notre homme

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La puissance sous la pluie. Mais la maîtrise est toujours de rigueur.

qui par son acquisition a foulé aux pieds les principes d’une écologie pure et dure, il faut savoir qu’aux vitesses autorisées, les moteurs d’une Aston Martin de par leur technologie poussée consomment moins que ce à quoi on pourrait s’attendre : 11 litres environ sur autoroute à 130. Si on veut se faire un petit plaisir, c’est bien sûr autre chose ... Alors, que nous réjouissent encore longtemps ces survivances des mariages de l’Art et de l’industrie. C’est un peu le sel de la vie et la preuve que l’homme restera toujours un grand enfant.

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MODE

LI NING

l’athlesure au cœur Créée en 1990 par l’ancien athlète médaillé olympique Li Ning, cette marque de sportwear chinoise mise sur un haut de gamme et confirme l’engouement récent pour la tendance actuelle de l’athlesure en Occident. A mi-chemin entre gymwear et streetwear, le vestiaire défend des pièces fonctionnelles pour le quotidien tout en s’appuyant sur un univers à l’esprit futuriste. Dans ce bel entre-deux, la marque sportive entretient un rapport au modulaire qui se vérifie dans des conceptions associant multi-poches et multi-tissus. On aime cette approche ciblée cherchant à toujours optimiser la performance de ses collections inscrites dans un art du mouvement addictif. Amples dans leur globalité, les silhouettes révèlent des matières techniques dans un travail de coupe rigoureux et peuvent, avec humour, rendre hommage, comme en 2019, à la star du kung fu Jackie Chan via une collection capsule de dix pièces révélées dans une jungle de néons et de paysage 3D. On sait déjà que cette marque à succès compte élargir sa distribution dans les deux ans à venir. (www.lining.eu). 54

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PAR CLÉMENT SAUVOY

Ten dances GMBH

Underground toujours Fondé en 2016 par Serhat Isik et Benjamin Alexander Huseby, le collectif berlinois mise pour sa dernière saison sur un vestiaire qui combine sans complexe les codes du clubbing et du workwear sans perdre de vue une inspiration venue de la scène techno. La collection défend un style iconoclaste marqué par une forte empreinte venue du clubbing alternatif et de l’underground berlinois. On aime cet esprit noctambule contestant le consumérisme à tout va et cet ADN quelque peu énigmatique n’oubliant pas complètement le sportwear. Une approche qui va au-delà des sentiers battus en cultivant la radicalité d’un jeune label très prometteur apte à exprimer des actes de résistance. Chaque silhouette de GmbH (en français Société à responsabilité limitée…) nous renvoie dans un univers filmique proche de la science-fiction. Derrière ce pseudonyme et ce collectif souhaitant vivre sans nom, la créativité et le multiculturalisme bat son plein via des jeux de textures et des croisements d’identités artistiques saisissants. Particularité étonnante de cette marque du moment : cette dernière change de logo à chaque saison ! (www.gmbhgmbh.eu).

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MODE

GUNTHER

Classiques revisités Plaçant l’artisanat au cœur de son processus de création, cette très jeune marque pour hommes qui fait des étincelles, lancée en 2018, par Naomi Gunther (une ex de la fameuse Parsons The New School for Design de New York) associe la culture parisienne et un environnement créatif croisant les disciplines. Repérée par le rappeur Offset, elle combine grosses mailles luxueuses faites main et des formes oversized confortables dans une sensibilité contemporaine revisitant les classiques de la garde-robe masculine. On aime cet esprit précurseur et cette audace que l’on retrouve dans des silhouettes inscrites pleinement dans leur temps en puisant dans la culture streetwear à satiété. Une griffe sous les feux des projecteurs à suivre des très près car habitée par un vrai parti styliste mais aussi attentif aux matières nouvelles. C’est déjà beaucoup et les commandes affluent ! (www. guntherparis.com). C.S

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SMALTO

Nouvelle vague Prenant le Paris des années 60 comme point de départ, cette dernière collection nous rappelle le lien très fort que la célèbre Maison Smalto entretient depuis toujours avec le monde des arts et plus précisément avec celui du cinéma. Le savoir-faire du luxe masculin à la française s’exprime ici dans un nouveau souffle salvateur et grisant porté par des nouveaux talents de la mode comme Louis Gabriel Nouchi qui défend cette modernité urbaine via une dizaine de looks emprunts de liberté. Et où les touches légères de beige et de camel croisent le bleu iconique de Smalto autour des codes identitaires du lapis-lazuli et de l’oeillet. On aime par-dessus tout cette collection au chic absolu tournée vers l’avenir associant le casual, le formel et le sport dans des coupes signées et parfaitement ajustées. Nous faisant toujours garder à l’esprit la possibilité soudaine d’un élégant smoking au col pointe. (www.smalto.com). C.S

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MODE

TATRAS AUTOMNE HIVER 2020-21

L’air du temps Par Clément Sauvoy

1. On retrouve au cœur de cette collection des tissus techniques haute performance exprimant un esprit d’innovation 2. La marque mise sur une sophistication simple et au niveau d’un savoirfaire irréprochable 3. Les looks cultivent une nouvelle idée du luxe moderne 4. La grande attention portée aux détails est inscrite dans l’ADN de TATRAS.

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Portrait de Raphaël, coup de cœur du maître de maison qui l’a beaucoup inspiré.

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Tel un théâtre de la vie, la collection AutomneHiver 21 est construite comme un voyage ouvert dans le temps en alliant une influence vintage à une attitude contemporaine.

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Entre expérience et expérimentation, la collection cultive autant la nostalgie que l’espoir.

Le mélange détonnant des matières dialogue avec des couleurs intenses dans une confrontation établie entre temps passé et futur.

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TATRAS

Des silhouettes coordonnées Fonctionnels, gais mais aussi protecteurs, les looks renvoient au monde de l’enfance avec des messages étiquetés qui lancent un message positif au monde. La couleur émerge dans une appréciation de la vie tournée vers l’amour sans jamais se prendre au sérieux. Les silhouettes sont coordonnées autour du motif et des volumes et livrent des « créatures futuristes » mises en lumière par le biais du nylon et du vinyle. Le propos créatif se résume à vivre dans un bonheur immédiat et une certaine forme de plénitude (www.tatras-official.com). C.S

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TATRAS

Une Nouvelle idée du luxe Fondée en 2006 par Masanaka Sakao - TATRAS s’est d’abord fait connaître en proposant une nouvelle idée du luxe moderne sur le marché international avec des parkas haut de gamme devenues désormais pièces signature. En 2010, TATRAS a ouvert son premier showroom à Milan en Italie, qui a également servi de magasin phare. Jusqu’à aujourd’hui, la marque s’est développée pour être présente dans plus de 350 magasins à travers le monde et détient trois magasins phares en Asie et un en Europe. C.S.

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CINÉMA

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Donnie Yen L’œil du tigre

Par Jean-Pascal Grosso

Superstar chinoise du cinéma d’action, Donnie Yen, 56 ans, a tissé des liens avec Hollywood sous pavillon Disney. Après une incursion dans l’univers Star Wars, l’acteur revient avec l’ambitieux Mulan, adaptation en prises de vues réelles du grand classique du cinéma d’animation.

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CINÉMA

Vous avez été initié très tôt aux arts martiaux par vos propres parents. Quel regard portiez-vous, jeune pratiquant, sur leurs nombreuses transpositions au cinéma ? Disons que j’ai très vite su faire la différence entre les arts martiaux, qui étaient pour moi une philosophie de vie, et ce qu’on appelait alors les « films de kung fu ». D’ailleurs, à l’époque, jamais cela ne me serait venu à l’idée de devenir acteur un jour. Maintenant que j’en ai fait mon métier, j’essaye toujours de transmettre aux spectateurs les valeurs qui restent pour moi fondamentales : le courage, l’humilité, la noblesse dans les actes, la rédemption... Il faut quand même souligner que le cinéma d’arts martiaux est un genre très ardu. Vous devez sans cesse améliorer votre technique, trouver de nouveaux styles, saisir la moindre opportunité de vous perfectionner. Tout en peaufinant votre jeu. Et en cherchant des histoires inédites. C’est un genre très apprécié. La production est pléthorique. Il faut être sur plusieurs fronts à la fois. Comment arrive-t-on sur une production de grand studio américain comme Mulan ? Cela s’est fait très facilement. Je tenais énormément à faire partie du projet. L’histoire de Mulan, c’est un classique. Et puis, c’est Disney ! Avec ma fille, qui a quinze ans maintenant, nous avons dû regarder le dessin animé plus d’une centaine de fois ensemble. Autre chose importante, c’est que ce film est mis en scène par Niki Caro. Une femme. Et que Mulan a pour personnage central une héroïne. Dès que je peux soutenir la cause des femmes, je le fais. C’est une question actuelle très importante. En tant que citoyen du monde, cela signifie beaucoup pour moi autant que pour ma famille. Vous y incarnez le commandant Tung qui introduit la jeune Mulan aux arts du combat. Étiez-vous en charge des chorégraphies martiales ? Lorsque je suis arrivé sur le tournage, les principales chorégraphies avaient déjà été préparées en amont. Les équipes me les ont montrées et j’ai pu ainsi donner mon avis. J’étais très curieux de ce que cela allait donner, très ouvert aux différentes collaborations. J’ai profité à fond de cette

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expérience en me laissant totalement transporter. Le commandant Tung est aussi un personnage profond. Il y a de très belles scènes de dialogues entre lui et Mulan. Sous un aspect très strict, militaire, c’est un homme de passion avec de grandes visions intérieures.

Comme lorsque les réalisateurs de Hong Kong, quand une formule faisait un tabac dans les salles, épuisaient le filon en se copiant les uns les autres. Il faut toujours avoir un coup d’avance. Ça ne marche pas à chaque fois. Mais, au moins, je tente ma chance.

Votre secret pour durer dans la profession ? Anticiper les modes. Rester proche des jeunes spectateurs. S’ils s’ennuient devant un de vos films, c’est mal parti. Alors, j’essaye de rester le plus jeune possible dans ma tête et de garder une certaine ouverture d’esprit. J’écoute beaucoup mes enfants par exemple. Je prête attention à ce qui les intéresse, à ce qui les rend heureux...

La caractère patriotique voire ouvertement nationaliste des films chinois ne peut-il pas être un frein à leur exportation en Occident ? Pas plus que pour les grands films commerciaux produits par Hollywood. Ils sont tous patriotiques. Regardez Captain America ! Débarquer sur une production comme Mulan, estimée à 290 millions de dollars, cela doit vertigineusement changer des films d’action nerveux made in Hong Kong… Ce qui m’a impressionné par-dessus tout, ce sont les investissements derrière chaque décor et la préparation des personnages. Les moindres détails ont été respectés, c’est à peine croyable. Ils n’ont pas regardé à la dépense, ni au temps, ni à la main d’œuvre, pour que chaque acteur, au moment de se placer devant la caméra, soit fin prêt. C’est la preuve d’un grand professionnalisme.

« Tourner en Amérique, oui, mais uniquement si je me sens investi en tant que comédien. »

Avec la saga Ip Man, vous semblez avoir trouvé le rôle de votre vie… Mais après le premier Ip Man, il y a douze ans, et le succès qu’il a rencontré, je me suis retrouvé entre deux eaux. J’aurais pu faire dix films exactement dans le même style. Trouver d’autres grandes figures historiques de la boxe chinoise et c’était réglé. Mais ça ne m’aurait pas satisfait. Et le public, même s’il est toujours friand du genre, aurait fini par se lasser. Cela aurait été comme un retour en arrière.

Vous verriez-vous poursuivre votre filmographie aux États-Unis ?


« Des blessures à la colonne vertébrale, la nuque, le dos, les épaules… Ça fait partie du métier. »

Je reçois beaucoup de propositions de rôles. Maintenant, les perspectives pour un acteur chinois restent tout de même très restreintes là-bas. Et il y a peu de choses que je trouve réellement intéressantes. Tourner en Amérique, oui, mais uniquement si je me sens investi en tant que comédien. Être considéré comme un acteur à part entière semble très important à vos yeux… En fait, pendant des années, aucun metteur

en scène ne s’est demandé si j’étais réellement capable de jouer. J’étais l’homme d’action de service. Et puis, au contact d’autres comédiens, qui, eux, avaient très sérieusement fréquenté les écoles d’arts dramatiques, j’ai compris que je devais m’améliorer. J’ai suivi leur conseil : « Si tu veux durer, il faut savoir jouer. » La maturité, l’expérience, ont fait le reste. Je ne suis réellement devenu acteur qu’ il y a une quinzaine d’années. Avant, ça allait. Je tenais des seconds-rôles. J’arrivais à composer. J’avais du « potentiel ». Aujourd’hui, je suis capable d’adapter mon style de combat selon le personnage : élégant et fluide lorsqu’il s’agit d’Ip Man, sec et brutal dans un polar, plus solennel dans un film en costume... Combien de fractures au cours votre carrière ? Je ne les compte plus. Il y en a eu énormément. Des blessures à la colonne vertébrale, la nuque, le dos, les épaules… Ça fait partie du métier. Comme chez les athlètes. J’essaye de ne pas trop y penser.

Un récent article du South China Morning Post s’est penché sur le déclin du cinéma de Hong Kong, longtemps un fleuron culturel en Asie. Question finale et épineuse : l’industrie a-t-elle été tuée par la rétrocession de 1997 ? Je reste assez partagé. Bien sûr, cela a pu nuire à l’influence qu’ont longtemps eu les cinéastes de Hong Kong non seulement sur l’industrie asiatique mais également sur le reste du monde. Les production chinoises ont pris naturellement le pas sur les productions locales. Mais cela est aussi dû au fait que nombre de metteurs en scène sont partis travailler directement à Pékin. La Chine est un marché énorme. Ils ont pu jouir de budgets beaucoup plus conséquents et signer des films plus ambitieux. Au final, je pense que cela n’a fait – pas systématiquement, mais la plupart du temps - qu’améliorer la qualité de leur travail. Mulan de Niki Caro avec Liu Yifei, Gong Li, Donnie Yen… Disponible sur la plateforme Disney+ à partir du 4 décembre.

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SON

Platine vinyle :

un nouvel âge d’or ? JÉRÔME TRÉ-HARDY ET FRANCK THARAULT, FRINGANTS QUADRA ET QUINQUAS, NÉS AU CŒUR DES ANNÉES « RENAULT 16 », ONT SU DÉPISTER ET ACCOMPAGNER LA FOLIE VINTAGE, CETTE SCHIZOPHRÉNIE QUE L’ON DIT EXPONENTIELLE. ET CELA MARCHE AUSSI FORT QUE LE SON D’UN AMPLI À LA FAÇADE EN ALU BROSSÉ AUX HYPNOTIQUES VU-MÈTRES. PAR BERNARD DE BAUDINIÈRE

Jérôme et Franck sont les deux fondateurs de MAPLATINE.COM, référence dans le monde feutré de l’audiophile. Jérôme, lui vient du monde du jeu vidéo. En 2010, en poste à Rennes, il croise Franck, l’homme de la technique, dans un magasin culte fréquenté par le must de la clientèle audiophile. Il faut dire que Rennes, depuis la fin des années 70, affiche le titre de capitale française de la scène musicale en général, de la pop rock en particulier. Transmusicales, Daho, Niagara, Darcel, le regretté Philippe Pascal et Marquis de Sade, le berceau de Maplatine.com est entouré de bien jolies fées ! Jérôme et Franck font le même constat, en reniflant l’air du temps… Envie d’un vrai son, associé à un bel objet, lui même proposant une surface d’expression créative à nul autre pareil : le disque vinyle ! Et pour l’écouter : la platine vinyle. Plus qu’un objet, un phénomène tant économique que sociétal. Certes, les puristes ne l’ont jamais abandonnée. Pour autant les lecteurs CD, puis le MP3, et surtout les Spotify et autres prédateurs de la création musicale sont passés par là. C’est pendant les années compilations, quand le monde du disque a eu accès à la publicité à la 70

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télévision, qu’une logique très simple s’était imposée. La musique étant un produit de consommation comme un autre, sans limite, autant lui choisir des outils adaptés à la grande distribution ! Ces marchands du Temple ont alors démultiplié les canaux de diffusion, abaissé les coûts de fabrication, banalisé la création et, surtout, fait que pour la première fois dans notre histoire, on va dégrader volontairement l’écoute musicale d’une œuvre, au profit d’une pseudo démocratisation, bien pratique pour faire du volume. Jérôme et Franck ont alors l’idée de proposer sur le net une offre de platines vinyle mise en musique par de vrais conseillers compétents et attentifs. Des marques références de platines, d’abord. De Thorens à Rega, en passant par Project. De l’écoute, de l’analyse. Pas de discount bariolé. Pour Jérôme, il y a trois types de clientèle : les « 50 et plus », à forte capacité d’achat, et qui souhaitent avoir le meilleur, en connaisseurs avisés. Comme Christian Clavier dans le film « Une heure de tranquillité » qui s’isole pour écouter Le morceau orchestré et gravé sur le vinyle au son à nul autre

Une offre de platines vinyle mise en musique par des conseillers compétents et attentifs. pareil.Et puis aussi les quadras fascinés par le geste attentif de celui qui pose le bras de l’engin à entrainement direct et tout ce qu’il représente d’un passé sans doute regretté. Et enfin, plus simple, le ou la née en 2000, ou un peu avant, qui découvre un jour, souvent dans l’appartement d’un ami que le son de son groupe préféré est tout autre que celui qu’un lui a imposé. Celui là a besoin d’être guidé, accompagné, afin d’inverser la tendance subie et imposée par les marchands de malbouffes musicales. C’est encore la même histoire pour eux, à savoir une redécouverte du goût, du vrai et aussi de la diversité de l’offre, parallèle aisée avec la saisonnalité. C’est d’ailleurs pour eux que sont proposées des « entrées de gammes » accessibles, sans renier la qualité, mais adaptées à une période de vie évidemment moins argentée. Tout cela nourrît ce formidable engouement pour un phénomène qui affiche une croissance insolente de prés de quarante pour cent par an. www.maplatine.com


SPORT

River surfing Des Vagues sans fin programmées et réglables LES SURFEURS AVENTUREUX SURFENT SUR LES VAGUES D’EAU DOUCE DANS LES RIVIÈRES LOIN DE L’OCÉAN DEPUIS PRÈS DE 30 ANS EN AMÉRIQUE DU NORD ET EN EUROPE. PAR KENNETH CAMERON

Des villes comme Munich, Montréal et Québec ont développé d’importants espaces de surf fluvial. Dans les fleuves ou rivières qui les traversent des «ondes stationnaires» se forment dans certaines sections d’eau vive générant une accélération du courant. Mais il y a encore mieux: Grâce à une combinaison de technologies de pointe, d’une ingénierie réfléchie sans oublier des collectivités locales créatives, les villes de l’ouest des États-Unis développent avec succès des «parcs d’eau vive» utilisant des vagues réglables pour répondre aux souhaits des kayakistes et des surfeurs de rivière. Le résultat a été la création d’attractions majeures pour des villes comme Boise dans l’ Idaho et Bend dans l’Oregon pour n’en nommer que quelques-unes. Les vagues qui ont été conçues à Boise et Bend font partie d’un nouveau genre de vagues à ajustement dynamique en cours de construction dans les parcs aquatiques des États-Unis. Elles permettent

de surfer toute l’année dans diverses conditions de débit d’eau. La capacité d’ajuster la forme des vagues selon le débit d’eau est un facteur clé pour produire une expérience de surf constante toute l’année. Au printemps et en été, lorsque les débits d’eau augmentent considérablement, les vannes hydrauliques (ou les vessies) sont ajustées par un “shaper” de vagues à l’aide d’une tablette ou d’un smartphone pour produire des «vagues vertes» propres et continues plutôt que d’être submergées par l’eau qui coule

et la production de mousse blanche. À la fin de l’été et à l’automne, lorsque les débits fluviaux baissent, les “shapers” de rivières sont capables d’ajuster les vannes (et les vessies) pour s’assurer que les vagues restent surfables lors des faibles débits. Bien que le coût de la technologie ne soit pas négligeable, les avantages sont évidents. Il est maintenant possible de créer des vagues sans fin pour une variété de surfeurs et de passionnés d’eau vive pour n’importe quelle ville ou village traversé par une rivière. Les collectivités locales d’Amérique du Nord et d’Europe commencent à profiter pleinement des avantages récréatifs, touristiques, immobiliers et commerciaux que les parcs aquatiques peuvent apporter à leurs villes respectives. Les villes et villages dépensent des millions de dollars pour créer des vagues statiques de classe mondiale dans l’espoir d’attirer de jeunes passionnés d’eau vive et les avantages économiques q u ’ i l s apportent avec eux. Avec de tels succès, de nombreuses villes d’Amérique du Nord et d’Europe emboîtent le pas. Qui sait, si vous avez une rivière à proximité, votre ville natale pourrait construire la prochaine grande vague sans fin. À bientôt dans le line up.

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ÉCOLOGIE

Bangkok : 2 hectares de toits nourriciers En Thailande, l’université Thammasat accueille sur ses toits la plus grande ferme bio urbaine d’Asie. Au coeur de la crise climatique, les villes doivent commencer à utiliser leurs espaces résiduels pour produire de la nourriture de manière efficace et durable. Par Alan Campbell

Une vision durable pour le future des villes.

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ÉCOLOGIE

L

’urbanisation sauvage des grandes villes d’Asie du Sud-Est les ont conduites à perdre leur statut de société agraires, autrefois abondantes. C’est pour contrebalancer cette évolution souvent dramatique que, à Bangkok, l’université Thammasat a lancé un formidable projet écologique : utiliser près de deux hectares de toit pour produire de la nourriture de manière efficace et durable.

attendent sur chaque aile, atténuant et stockant les précipitations excessives pour une utilisation future en cas de sécheresse. Taillant dans l’architecture montagneuse, TURF maximise le terrain pour créer des espaces publics multifonctionnels et un grand amphithéâtre avec une vue panoramique à 360 degrés de Bangkok. Dernier plus de cet étonnant projet : le toit est équipé de panneaux solaires, capables de produire jusqu’à 500 000 watts par heure pour irriguer la ferme urbaine et alimenter le bâtiment en dessous.

aux futurs dirigeants de s’éduquer, de s’adapter et de relever les défis climatiques, en construisant des villes durables pour les générations à venir.

C’est ainsi que Thammasat peut présenter aujourd’hui une solution climatique stupéfiante avec la plus grande ferme de toit biologique d’Asie - Thammasat University Rooftop Farm (TURF). En intégrant l’architecture du paysage à l’ingéniosité des rizières en terrasses traditionnelles elle réussit à intègrer la production alimentaire durable, les énergies renouvelables, les déchets organiques, la gestion de l’eau et l’espace public. Avec justement ce terrassement de rizières en terrasses et une technologie de toit vert moderne, le toit en cascade absorbe, filtre et ralentit le ruissellement vingt fois plus efficacement que les toits de béton conventionnels. Alors que l’eau de pluie zigzague sur les pentes, TURF cultive de la nourriture pour nourrir le campus. À la fin de son voyage, quatre bassins de rétention

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Le TURF est bien une solution réaliste, pleine d ’ e s p o i r, qui remet les citadins au courant des pratiques agricoles. Les leçons sur l’agriculture thaïlandaise, le paysage et le sol indigène sont intégrées dans le TURF et le message est clair : aux futurs dirigeants de s’éduquer, de s’adapter et de relever les défis climatiques, en construisant des villes durables pour les générations à venir. LANDPROCESS est une agence d’architecture de paysage et de design urbain basée à Bangkok, fondée en 2011 par l’architecte paysagiste Kotchakorn Voraakhom.


TURF fournit jusqu’à 20 tonnes (80 000 repas) d’aliments biologiques chaque année. Les cantines du campus complètent le système de production alimentaire durable du début à la fin, réduisant les émissions de CO2 et les déchets sous forme de compost pour fertiliser les cultures pour la prochaine récolte.

Au coeur de la crise climatique, la pénurie de nourriture et d’eau pose d’énormes menaces à la civilisation.

TURF cultive plus de 40 espèces comestibles, y compris le riz, les légumes et herbes indigènes et les arbres fruitiers. Allant de la tolérance à l’eau à la résistance à la sécheresse, chacune convient au microclimat unique créé par l’exposition au soleil, la courbure, l’écoulement de l’eau, l’élévation du toit et ses ailes.

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ÉCOLOGIE

En réutilisant 22.000 m2 d’espace sur les toits gaspillés, TURF s’engage à apporter des solutions adaptatives à la crise climatique grâce à la sécurité alimentaire, au toit solaire pour les énergies renouvelables, à la gestion de l’eau sur place, à la biodiversité urbaine et à la réduction de la pollution de l’air.

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4. TURF récompense ceux qui montent au sommet avec une vue panoramique à 360 degrés de l’université centrée dans la ferme urbaine à ciel ouvert. Un grand amphithéâtre offre un espace récréatif et éducatif accessible et flexible pour tous les visiteurs. 5. Poursuivi par plusieurs générations d’agriculteurs qui ont appris leur métier des terres et de l’eau avec lesquelles ils vivaient, le TURF résume l’histoire de l’agriculture thaïlandaise, des paysages et des sols indigènes, incorporés comme des leçons à adapter et à accepter pour les défis climatiques. Inspiré par l’ingéniosité des pratiques agricoles traditionnelles sur les terrains montagneux de l’Asie du Sud-Est, TURF a intégré le terrassement des rizières en terrasses avec la technologie moderne des toits verts. Diverses plantations en cascade atténuent les risques d’inondation tout en cultivant de la nourriture pour nourrir la communauté. 6. La ferme sur les toits de l’Université Thammasat fournit une plate-forme pour apprendre et partager dans diverses disciplines. Grâce à des ateliers organisés toute l’année sur l’agriculture durable, il apporte de nouvelles connaissances à 40 000 résidents du campus et à la communauté environnante pour les utiliser à la maison. 4 6

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DESIGN

Los Angeles une maison dans le respect de la nature

Le bureau à domicile offre un accès direct au jardin de l’atrium, qui luimême s’ouvre sur la bibliothèque et salle média. Un coffret sur mesure, intégré en chêne rift et en acier noirci, présente la vaste collection de musique en vinyle du mari, son équipement audio haute performance et une variété d’effets personnels, d’objets et d’art. 78

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Photos : Taiyo Watanabe

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Nichée dans le canyon de Santa Monica, cette résidence s’intègre parfaitement dans son environnement boisé tout en servant de toile de fond à une collection d’art très haut niveau. Par Alan Campbell

Les experts en architecture organique Kristopher Conner et James Perry ont été mandatés par un couple à la fois fortuné et profondément enraciné dans la région de Los Angeles pour concevoir une maison qui s’adapte parfaitement à leur famille et à leur style de vie, tout en présentant une collection d’art en se fondant sans effort dans un secteur du canyon de Santa Monica qu’ils adorent. S’inspirant des chênes et des eucalyptus environnants, les architectes ont conçu une résidence qui permet la réflexion, l’ouverture et la sérénité. Les principales caractéristiques : des fenêtres qui encadrent les arbres magnifiques, des avant-toits en porte-à-faux allongés en forme de canopée et des murs extérieurs en verre entièrement empilés qui s’ouvrent

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sur une cour centrale pour offrir l’équilibre parfait entre la vie intérieure et extérieure. Chaque vue de la maison a été conçue pour une osmose avec la nature ou l’art Les nouveaux propriétaires totalement amoureux des arbres majestueux environnants ont demandé que l’on réutilise le bois d’eucalyptus abattu trouvé sur la propriété non seulement en mobilier d’extérieur mais aussi en éléments clés de la maison notamment pour les grandes portes d’entrée. C’est pourquoi les matériaux extérieurs de la nouvelle maison ont été sélectionnés pour leur nature organique, leur capacité à vieillir sur place et leur compatibilité avec le climat, tels que le revêtement en bois carbonisé (Shou Sugi Ban), le cuivre, l’acier apparent et le béton. Les matériaux intérieurs ont

été choisis pour refléter la nature extérieure, y compris un mélange de calcaire gris massangis et de chêne français pour le sol, du laiton patiné, des éléments en acier noirci et une variété de marbres et de carreaux, y compris les carreaux d’art de Lubna Chowdhary. Conner + Perry Architects Photos Taiyo Watanabe

1 Le «Perch», avec un lit de repos intégré en Eucalyptus personnalisé niché entre les chambres, offre un endroit unique et calme parfait pour méditer, se prélasser et contempler les arbres. 2 En utilisant des eucalyptus récupérés sur

des arbres abattus sur la propriété et du matériel vintage fourni par la collection personnelle des clients, Conner + Perry a créé une superbe porte à double pivot personnalisée comme porte d’entrée de la résidence lumineuse.


DESIGN

Photos : Taiyo Watanabe

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DESIGN

Les portes vitrées encastrées permettent à la maison de s’ouvrir sur le paysage. 1

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1 Des portes vitrées totalement encastrées de chaque côté de la cuisine et de la salle à manger permettent à la maison d’être entièrement ouverte sur le paysage. 2 À l’avant de la maison, on est accueilli par les chênes vivants de Californie et les eucalyptus qui définissent le paysage local et restent proportionnés à la maison généreuse, tandis que la porte de garage de style hangar d’avion, finie avec un revêtement carbonisé, disparaît lorsqu’elle est fermée.

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DESIGN

Slow Motion Aldo Bakker

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Aldo Bakker beautés habitées

PAR CLÉMENT SAUVOY

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Photo: Erik & Petra Hesmerg

A Paris, la Carpenters Workshop Gallery lui consacre un sublime solo show sous le signe du « Slow Motion »

ertains experts diront que la rigueur de son travail est à la hauteur de son opiniâtreté et que sa quête insatiable du sens dans la forme de l’objet le place dans la catégorie de l’hors-norme. En effet, pour ce designer et artiste néerlandais l’expérimentation de la matière et des matériaux puise dans une poésie et une temporalité des plus singulières. Énigmatiques et douées d’une étrange « beauté habitée » les créations de cet autodidacte – dont le père n’est autre que le fondateur de Droog Design – expriment un langage extrêmement dessiné qui trouve un écho aussi bien au niveau de la rétine que dans les régions les plus reculées de l’esprit. Si bien que les plus belles maisons (Sèvres, Puiforcat, Georg Jensen, Karakter...) ont fait appel à son talent, fascinées par ses objets-bijoux attrape-regards évoquant parfois des sortes de créatures autonomes. Au sein de cette exposition exceptionnelle, au numéro 54 de la rue de la Verrerie, à Paris, sont exposées quelques-unes des plus grandioses pièces (une vingtaine au total) du répertoire de cet ovni de la planète design qui garde en mémoire les années heureuses passées auprès de sa mère la célèbre joaillière Emmy van Leersum (disparu alors qu’il était très jeune ) et qui comme lui aujourd’hui avait cette exigence absolue et ce rapport filial à l’objet.

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DESIGN

Three Pair (Marble) Aldo Bakker

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Sitting Table (urushi) Aldo Bakker

Flirtant avec l’extraordinaire, les familles de pièces-sculpture du très réservé Aldo Bakker privilégient la lenteur, échappent à toute théorie et débordent largement le cadre du design stricto sensu car ici la recherche de la fonctionnalité, presque secondaire, arrive après. A 48 ans, le travail du designer-star - qui a été très influencé par des personnalités comme Carlo Mollino, Francesca Torzo, Carlo Scarpa, Terunobu Fujimori, Isamu Nogushi – a été montré dans les plus prestigieuses institutions (Mudac, Centre Pompidou, Zuiderzeemuseum d’Enkhuizen, Victoria and Albert Museum, Central Museum d’Utrecht...). La Carpenters Workshop Gallery rend ici hommage à un homme et à une vision au raffinement suprême faisant de l’épure un mantra revisitant les arts décoratifs dans un mystère s’exerçant aussi bien sur un tabouret, une console, une carafe ou une saucière. Semblant presque se mouvoir, les formes amicales inattendues qu’il façonne apparaissent de façon quasi accidentelle et évoquent un vocabulaire archétypal présent dans la mémoire collective. Animées d’une personnalité et d’un caractère propres, elles laissent ensuite à l’usager le soin de décider de leur fonction et de la théâtralité sous-jacente. En mot de la fin Aldo nous confiera ceci : « Le détail, même invisible, permet à l’objet de trouver toute sa cohérence. Chaque objet vit sa propre vie. Aucune pièce n’a de raison d’exister, rien n’est nécessaire. Elle ne trouve sa raison d’être que dans la mise en danger de soi-même, de l’envie d’apporter un peu plus de sérénité et de bien-être ». Amen ! www.carpentersworkshopgallery.com

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Photos : Presse

Une vision faisant de l’épure un mantra.

Newel (Vase) Aldo Bakker

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EDG’ART

CENTRE POMPIDOU METZ 10 ans déjà PAR CLÉMENT SAUVOY

N’ayant pas de collections propres mais présentant les trésors de son grand frère parisien le Centre Pompidou à Beaubourg, l’établissement lorrain de 5000m2 attire chaque année dans ses trois salles d’expositions des publics toujours plus nombreux. Près de 350.000 visiteurs sont attirés chaque année par des programmations exceptionnelles. Au-delà de sa position privilégiée – à proximité de l’Allemagne, du Luxembourg et de la Belgique - le Centre Pompidou de Metz est avant tout un projet hors-norme qui a vu le jour grâce à la volonté de deux personnalités visionnaires : Jean-Jacques Aillagon (ministre de la culture de 2002 à 2004) et Jean-Marie Rausch (le maire de Metz de l’époque) animés par une passion

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sans bornes pour l’art. Face au succès du musée Guggenheim de Bilbao, le tandem est conforté dans l’idée de créer un lieu qui serait lui-même une œuvre d’art. L’oeuvre architecturale saisissante, en forme de chapeau chinois - signée par le duo Shigeru Ban et Jean de Gastines - a accueilli depuis ses débuts des expositions magistrales qui ont toutes fait date : Daniel Buren en mai 2011, Picasso en novembre 2012, Andy Warhol en août 2015, Fernand Léger en juillet 2017... Dans cet édifice emblématique de la ville de Metz, dominé par sa flèche de 77 mètres de hauteur, les projets s’enchainent avec un constant succès et ne se ressemblent pas. Depuis 2019, la passeuse Chiara Parisi -

Chiara Parisi

qui a succédé à Emma Lavigne - préside à son heureuse destinée en nous promettant pour les mois qui viennent des rendez-vous rares et immanquables. A noter d’ores et déjà les expositions consacrées notamment à Yves Klein et à Chagall. Sans oublier les installations de Giuseppe Penone et de Susanna Fritscher ! www.centrepompidou-metz.fr


Expos retour sur les expositions marquantes de 2020 Établissant des dialogues entre poétique et rationalité, perception et imagination, ses œuvres effacent les frontières entre espaces et territoires. Elles témoignent de plusieurs réalités spatio-temporelles piochant dans l’univers des sciences et l’histoire des techniques : « Mes tableaux, par glacis successifs, sont dans la majorité, entièrement construits et inventés. Je ne travaille quasiment jamais d’après la photographie » déclare-t-il. Fonctionnant dans une logique de perméabilité, ses recherches livrent des dualités faisant se côtoyer la forme et le présage dans une approche où le réel est sujet au doute.

Edouard Wolton Royaume de la vision

Photo : Henri Coutant

Le spectateur appréciera - au cœur du Marais - ces toiles, ces sculptures, ces œuvres imprimées et ces installations constituant un territoire fictionnel propre et des expériences visuelles aussi puissantes que troublantes tournées vers un ailleurs. Explorant les notions de phénomènes et d’atmosphères transitoires, l’artiste - qui a travaillé sa technique un temps lors d’une résidence à Leipzig - développe l’idée de sensations irréelles dans des paysages allégoriques imbibés de lumières rasantes en proie au mystère. Nous plongeant au cœur d’une odyssée du regard et de la pensée, glissant vers le rêve éveillé, Edouard Wolton développe une liberté plastique célébrant un absolu indépassable ! www.edouardwolton.com

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| SON

OSCAR MURILLO : Acte de résistance « La contestation du monde occidental et son effacement sont deux concepts qui habitent mon travail depuis plusieurs années... » indique t-il. Interrogeant les liens interculturels dans une économie globalisée, ses œuvres développent une intensité visuelle et formelle jouant sur les notions de signification et de création de sens. A travers la transformation et l’oblitération du langage, elles suggèrent via son lot de fragments et de matériaux recyclés une résistance aux systèmes d’autorité. En effet, la pratique artistique du colombien Oscar Murillo – lauréat du Turner Prize 2019 - puise au creuset que constituent les expériences personnelles dans des

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ruptures esthétiques captant une expérience transformatrice. Le regardeur appréciera ici, jusqu’à la fin décembre, au cœur de

Les derniers travaux d’Oscar Murillo ont été réalisée en Colombie durant la période du confinement.

cette exposition parisienne magistrale, ces nouvelles peintures saisissantes maintenant le présupposé de l’universalité de l’expérience humaine et démontrant les possibilités d’émergence de nouveaux récits. On aime tout particulièrement la troublante série Manifestation donnant à voir des répétitions de lettres et de mots dans un processus physique de marquage d’une énergie explosive. Et revendiquant, dans une problématique de l’exil les champs de la mixité culturelle et de la communauté ! www.davidzwirner.com 108, rue Vieille du Temple, Paris


EDG’ART

Goodbye, Pink Ring. 2018

« J’aime penser à la scène d’amour en tant que genre. Même dans un film qui n’est pas une romance, vous devez avoir une scène d’amour. Alors, je pense à la peinture qui est la scène d’amour. Elles existent dans un corps plus large que l’œuvre et sont présentées comme une sorte d’ordinaire. Il y a un équilibre chaud / froid qui est important…” a-t-il confié récemment.

Ridley Howard Gestuelle romantique

Articulées dans leur propre décor par des objets finement décrits, ses oeuvres explorent la nostalgie et le désir émotionnel dans des espaces délicatement construits presque flottants. En effet, la démarche artistique de Ridley Howard confronte la grandeur de l’espoir et la maladresse de la réalité dans une sensualité poignante révélant l’éphémère de l’existence. Vues - au sein de cette première exposition personnelle de l’artiste en France - ces sublimes toiles où s’expérimentent les forces élémentaires de la peinture dans un calme persistant et des relations d’apparents détachements. On a aimé tout particulièrement cette gestuelle portée par une simplicité trompeuse et qui s’empare des sentiments d’aliénation et de monumentalité dans des instants capturés. A voir jusqu’au 9 janvier 2021 ! www.andrehn-schiptjenko.com

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BOJAN SARCEVIC L’Extime C‘est sous ce titre percutant signifiant que même nos sentiments les plus intimes peuvent nous devenir étranges et étrangers, que cet artiste de 46 ans au sommet de sa forme - vivant et travaillant à Bâle – présente ses dernières sculptures fascinantes en marbre comme venues d’un autre monde. Les ensembles de Bojan Sarcevic s’emparent de la fascination technoïde de notre société actuelle pour imaginer les reliques troublantes d’un futur où les corps et les machines communient dans une intimité si étrange qu’elle en devient une « extimité ». Jusqu’au 27 février prochain, la

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célèbre galerie du Marais (disposant d’un second espace à Dallas) offre au regard ces entités évidées nous invitant en effet

Homo Sentimentalis 2020 Photos Claire Dorn

à découvrir des formes en train de devenir autre chose qu’elles-mêmes : des blocs minéralogiques ingérant des machines de réfrigération artificielle, et des figures de morphing prises dans un processus de pétrification, comme fossilisées sous une nouvelle forme d’espèce humanoïde hybride. www.frankelbaz.com


EDG’ART

Artiste Jerome Zonder

Group Show L’homme gris

Jusqu’au 31 janvier prochain, l’institution phare et forum de l’art contemporain fait preuve d’une audace qui devrait ravir un très large public en s’attaquant aux représentations non-archétypales du Diable dans l’art contemporain. En effet, c’est autour du concept et de théorie de « l’homme gris » qu’est née cette exposition éponyme évoquant et invoquant les dissimulations réflexives ou le recours à l’anonymat comme armes stratégiques. Un projet conduit sous le commissariat de Benjamin Bianciotto qui questionne avec brio cette fascinante faculté d’adaptation qui a permis au « démon » de traverser l’histoire de l’art - et des hommes - sans jamais faiblir. Alors que la manière dont il s’éclipse, se transforme, s’infiltre lui permet de revendiquer une position d’autant plus dangereuse, puissante, ou libératrice, il offre aux artistes deux voies possibles à explorer. Leur choix oscille ainsi entre la coquille vide, le costume à endosser, l’image pure, et une insaisissable et constante métamorphose. Au programme un group show de haut vol : Jérôme Zonder, David Tibet, Andres Serrano, Alex Bag, Christine Borland, John Urho Kemp, Marnie Weber, Elodie Lesourd... ! www.casino-luxembourg.lu Artiste Julie Langendorff www.edgarmagazine.com

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1 1. Représenté par la galerie Bruxelloise AEROPLASTICS Contemporary, le travail virtuose de Cédric Tanguy aborde ici les notions de la transfiguration à travers un monde baroque saisissant. Photo Aeroplastic 2. Face à l’oeuvre vibrante « Nice things are done Slowly » le visiteur plonge dans l’univers singulier et parodique de Cédric Tanguy. Photo courtesy artiste et Aeroplastic 3.

2 Sous le nom de « La Forêt qui coure », l’impressionnante sculpture de Basserode questionne avec brio à la fois l’éphémère, le nomadisme et les forces de la nature. Photo Chateau du Rivau 4. Irving Penn, Italian Still Life

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EDG’ART

Chateau du Rivau Le goût de l’art Conçue avec flegme et audace par Patricia Laigneau, mécène et directrice artistique du célèbre château - connu pour son soutien à l’art contemporain - cette grande exposition collective était assurément un temps fort de cet été 2020.

On prend donc la direction de Lémeré en Touraine - où se trouve le domaine du Rivau et sa superbe forteresse seigneuriale - pour se pencher sur les thématiques suivantes : le symbole de la pomme, la nature morte et la jouissance alimentaire, les trophées de chasse détournés, les ustensiles de la cuisine érigés en icônes, le Eat-Art mais également les festins d’aujourd’hui ou la dimension sociale de la relation de l’homme à l’aliment. Un rendez-vous immanquable qui nous rappelle que ce lieu singulier - à moins de deux heures de Paris - célèbre cette année les vingt ans de son ouverture au public.

© Ivring Penn

Réalisée en sept chapitres, elle illustre l’intérêt des artistes contemporains pour le goût et le comestible. Breuvage de plaisir, fruits défendus, mets délicats ou malbouffe, la trentaine d’artistes invités (dont Corine Borgnet, Damien Deroubaix, Rachel Labastie, Fabien Verschaere, Pierre Ardouvin, Lilian Bourgeat ou Antoine Roegiers...) font ici la dénonciation du glissement de la représentation des scènes de table ou des plaisirs gustatifs du bon vers le mauvais goût.

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www.chateaudurivau.com www.edgarmagazine.com

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Fondation Venet 2020 Photo Courtesy Venet Foundation

Venet Foundation - Lawrence Weiner, Diverted with (Détourné par), 1979 - Dimensions variables © Crédit photo Jérôme Cavalière, Marseille, Archives Bernar Venet, New York

Olivier Masmonteil

Lignes d’horizons Le Pôle Art Moderne et Contemporain de Cannes présente cet été - et jusqu’au 6 décembre prochain - les incursions captivantes du peintre dans le paysage réel ou fantasmé. Au sein de la résidence d’artistes « Le Suquet des Artistes » sont exposées les œuvres de l’inimitable Olivier Masmonteil connu pour sa manière unique d’interpréter le style français dont il revisite les genres picturaux du portrait aux paysages, des natures mortes aux vanités « J’appartiens à une génération à qui on a dit que la peinture était un outil du passé. Comme beaucoup d’artistes de ma génération, plutôt que de me décourager,

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ça m’a encouragé et à peindre et, en même temps, à me plonger dans l’histoire de l’art » explique-t-il. Mêlant sous-bois crépitants, cours d’eau scintillants et ciels vaporeux, ses huiles sur toile sont des expériences esthétiques dévoilant des espace-temps qui happent le spectateur dans des voyages baignés de métamorphoses. Et qui sont parcourues d’émotions propices à faire du paysage un concept nourris de superpositions et de couches successives dans un renouvellement constant du geste. www.thomasbernard.com


EDG’ART

LAWRENCE WEINER Énoncés conceptuels Ravivant les pratiques qui ont présidé à l’éclosion de l’art conceptuel dans les années 60, le confinement a fait resurgir une pratique artistique qui passionne. Ainsi durant tout l’été, la fondation Venet au Muy dans le Var a présenté une installation monumentale de l’artiste américain Lawrence Weiner s’adaptant – pour répondre au contexte sanitaire exceptionnel - à un parcours concentré uniquement sur les espaces extérieurs. L’occasion de se replonger dans les statements et la quête de dématérialisation de cet acteur majeur et historique de l’art conceptuel. Tout autour, on y a découvert les œuvres du parc de sculptures signées Richard Long, Robert Morris, Larry Bell,

Richard Deacon, Arman, Sir Anthony Caro, Philip King, Tony Cragg, Robert Morris ou encore Sol LeWitt qui déclarait ceci : « Les artistes conceptuels sont des mystiques plutôt que des rationalistes. Ils tirent des conclusions que la logique ne peut atteindre. Si des mots sont utilisés et procèdent d’idées sur l’art, alors ils sont de l’art et non de la littérature ; les chiffres ne sont pas des mathématiques ». Enfin, les sept hectares dédiés à la découverte de l’art

conceptuel et aux installations de Bernar Venet permettaient aussi aux visiteurs de prendre part à un environnement naturel d’une beauté inouïe.

de son propre corps. Ayant bénéficié déjà d’expositions importantes dans des institutions prestigieuses, la vidéaste américaine trentenaire dévoile un regard aussi curieux qu’attachant sur le monde !

www.lafayetteanticipations.com

www.ventefoundation.org

Rachel Rose Questionner l’humain

Ses œuvres nous immergent dans des états d’être intermédiaires entre fiction et réalité. Invitant à un voyage labyrinthique qui remonte d’abord le temps - depuis la naissance vers l’enfance – puis le prolonge vers l’au-delà, elles explorent notre rapport à l’environnement naturel. En effet, la pratique artistique de Rachel Rose s’interroge sur les moyens que nous mettons en place pour modifier, améliorer voire échapper notre condition. Au sein de cette remarquable exposition ont été dévoilées dernièrement cinq installations vidéo et un ensemble de sculptures explorant la métamorphose des corps et des états en cours de vie. Pour chacun de ses films, l’artiste a effectué des recherches approfondies en amont de leur production. Elle nous parle d’un laboratoire de cryogénie en Arizona et de différents zoos aux EtatsUnis où la réalité rejoint la science-fiction. Mais aussi d’expériences extracorporelles consistant à projeter hors de soi la vision

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Guillaume Desanges: horizons curatoriaux Quelques mots sur «Work Method» ? Je suis arrivé à l’art contemporain en autodidacte, et j’ai vite compris que je devais m’autonomiser pour développer mes projets sans attendre qu’on me propose une place institutionnelle. Cette situation d’indépendance n’a donc pas été choisie, mais pas non plus subie. C’est pourquoi j’ai créé dès 2006 une structure, Work Method, qui est une agence de production, de réflexion et de mise en œuvre de projets. Elle me permet de travailler en équipe, d’être flexible, de pouvoir tout faire, et de répondre à des exigences pratiques auxquelles certaines institutions ne peuvent

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pas répondre. Mais plus profondément, avoir ma propre structure me permet d’assurer une continuité d’esprit, de garder une forme d’intégrité malgré la multiplicité des interlocuteurs. Les manières de faire, les éthiques de travail déterminent les formes finales et je crois que cela se ressent dans les expositions. Comment a débuté votre collaboration avec La Verrière à Bruxelles ? La fondation d’entreprise Hermès, par l’intermédiaire de son président d’alors Pierre-Alexis Dumas et de sa directrice

d’alors Catherine Tsekenis, m’a contacté en 2013 pour me proposer de reprendre la programmation de La Verrière, un lieu historique pour la maison Hermès car il a été le premier consacré exclusivement à l’art contemporain. Il avait été dirigé pendant plus de dix ans par Alice Morgaine, qui en avait fait un espace reconnu de la scène bruxelloise. J’ai reçu cette proposition comme un cadeau : une liberté totale de programmation dans un magnifique espace, avec du temps, des moyens de production et la possibilité de continuer mon activité en freelance, avec de nombreux projets en parallèle (comme la grande

Photo : Jean-Luc Flémal

COMMISSAIRE D’EXPOSITION INDÉPENDANT ET CRITIQUE D’ART, LE FONDATEUR DE L’AGENCE PARISIENNE WORK METHOD IMPRIME SA VISION À LA TÊTE DE LA VERRIÈRE : LA DISCRÈTE FONDATION D’ENTREPRISE HERMÈS À BRUXELLES. AVEC UNE PROGRAMMATION ARTISTIQUE AUSSI POINTUE QU’EXIGEANTE. RENCONTRE ! PAR CLÉMENT SAUVOY


PORTRAIT

exposition sur les contre-cultures françaises à la maison rouge en 2017). La Verrière étant un projet régulier, j’ai décidé d’y travailler par cycles thématique, dépliés sur plusieurs années. Le premier cycle, « Des gestes de la pensée », a associé des artistes aussi divers que Hubert Duprat, Isabelle Cornaro, Nil Yalter ou Ann-Veronica Janssens. Cette manière de creuser une question, exposition après exposition, de proposer aux artistes une relation sur le long terme, est un luxe dans un monde de l’art trop souvent soumis à une logique évènementielle, une recherche de la rentabilité immédiate, avec pour conséquence l’obsolescence programmée des artistes et des œuvres. Qu’est ce qui constitue d’après vous l’ADN si spécifique de ce lieu ? La Verrière est d’abord un espace magnifique avec une lumière zénithale, très inspirante pour les artistes et pour moi en tant que commissaire. C’est aussi un lieu dont la topographie est déterminante, puisqu’il est situé au fond d’un magasin Hermès. De cette situation pas forcément évidente, j’ai tenté de créer une identité particulière, en l’imaginant comme un espace dérobé, protégé par le magasin. J’invite les artistes à y tenter des expériences qu’ils ne feraient peut-être pas ailleurs. De fait, la fondation d’entreprise Hermès ne collectionne pas, et si nous accueillons beaucoup de visiteurs, nous n’avons pas les exigences des institutions publiques en termes de remplissage. Ni soumis au marché, ni à l’audimat, La Verrière un lieu dans lequel on peut prendre certains risques. Irene Kopelman y a imaginé un jardin avec de vrais arbres et des plantes, Ismail Bahri un puits de lumière qui aveuglait l’espace, Jean-Luc Moulène y a fait circuler des miroirs robotisés qui reflétaient les œuvres au mur, Dora Garcìa a proposé une exposition presque vide avec des performeurs en action. J’aime imaginer La Verrière comme un lieu où tout est possible, puisqu’il n’y a d’autres règles a priori que celles dictées par les désirs, les intuitions et l’intelligence des artistes. Qu’est-ce que le cycle « Matters of concern » ? Ce troisième cycle, que j’ai lancé en 2019, est emblématique de la manière dont je tra-

vaille à La Verrière. A l’occasion de l’urgence écologique, il s’agit de montrer d’autres manières de faire, qui repensent les modes d’usage et de production de l’art dans un régime de l’attention (l’idée de « concern » en anglais) et du soin (« Matières à panser » est la traduction française volontairement erronée du titre). Il s’agit de rendre compte d’un retour revendiqué à la matière, mais investi de préoccupations spirituelles, symboliques ou magiques comme une alternative aux modes dématérialisées de l’économie dominante. J’y associe des pratiques très diverses : art, artisanat, design, pratiques amateurs, militantes ou thérapeutiques, sans hiérarchie. En bref, un cycle d’exposition comme un écosystème ou un jardin, avec la cohabitation d’espèces différentes qui s’entrecroisent et se nourrissent, dans une indifférence au statut des objets.

lée Paper/Midwestern Ocean, que nous présentons, et qui est à la fois critique et spectaculaire. Son invitation dans ce cycle d’expositions motivé par une réflexion écologique fait suite à sa relation aux paysages, à la nature qui représente pour lui la plus pertinente des architectures, mais aussi à sa pratique que je qualifierai « d’écologique » au sens où elle se contente souvent de projets éphémères et réversibles, voire uniquement documentaires ou simplement rêvés. Pour autant, cette architecture mentale ne manque ni de formes ni de séduction, ni même d’expérience physique. Si sa pratique est qualifiée de « radicale », ce n’est pas dans l’acception d’une étape finale, mais, au contraire dans son sens étymologique d’un retour à la « racine », qui pourrait bien avoir d’autres boutures et susciter de nouvelles idées.

Quelques mots sur le choix Gianni Pettena pour l’exposition qui se tient actuellement ? L’exposition actuelle de la Verrière présente les œuvres d’une figure originale, Gianni Pettena, sorte d’architecte-théoricien déviant, issu de la scène florentine des années post-1968, qui se définit lui-même comme un « anarchitecte ». Son œuvre à la fois hybride, provocatrice et drôle renverse complètement les fondements de sa discipline dans une logique libératrice, puisqu’elle refuse par principe le caractère autoritaire et dominant de la construction. C’est donc un architecte sans bâtiments, mais qui les remplace par des démarches conceptuelles et artistiques, qui sont autant de manières libres et alternatives d’habiter le monde. Des maisons entièrement recouvertes de glace ou de terre à une structure de bois qui récupère des boules d’herbe sauvage, des photographies de paysages naturels ou d’habitations vernaculaires intitulées « Architectures inconscientes » au décollage d’une partie d’un mur intérieur pour le faire « respirer », il s’agit à chaque fois de proposer des expériences sensorielles et conceptuelles inédites, à l’image de cette grande installation immersive intitu-

Comment choisissez-vous en tant que curator les artistes dont vous exposez le travail à Bruxelles ? C’est un trouble mélange de connaissance, de recherches spécifiques et d’intuition. Il n’y a que trois expositions par an à La Verrière, ce qui me permet d’être précis dans mes choix. Néanmoins, je tache de rester libre par rapport aux thématiques. Je ne veux pas des œuvres qui les illustrent, mais plutôt qui viennent les enrichir, voire les contestent. Entre les marqueteries virtuoses de Camille Blatrix et les collages punks de Babi Badalov, l’écart est grand. Pourtant ils se retrouvent dans une attention extrême portée aux objets et aux matières, et une pratique autonome, quasi-obsessionnelle, qui s’intéresse peu de savoir où elle se situe exactement dans le système de l’art. Le point commun entre tous les artistes que j’invite, plus que style, c’est l’intensité.

Ni soumis au marché, ni à l’audimat, la Verrière est un lieu dans lequel on peut prendre certains risques

En 2016, vous avez également initié le cycle « Poésie balistique » à La Verrière. De quoi s’agit-il ? Dans le but de dépasser des contradictions, le cycle portait sur les liens entre l’art conceptuel et la poésie, deux pôles qu’on a trop souvent opposés.

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A ne pas manquer La Fondation d’entreprise Hermès L’exposition « Forgiven by Nature » de Gianni Pettena à La Verrière. Du 15 janvier au 13 mars 2021.

EXPOSITION

Barbara Chase Riboud

EXPOSITION

Gianni Pettena Ice House

GIANNI PETTENA

Rumble Sofa

GIANNI PETTENA

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Un architecte sans bâtiments, qui les remplace par des démarches conceptuelles et artistiques, autant de manières libres et alternatives d’habiter le monde.

Photos : Courtesy La Verrière

GIANNI PETTENA

Des maisons entièrement recouvertes de glace ou de terre, des photographies intitulées « Architectures inconscientes » il s’agit de proposer des expériences sensorielles et conceptuelles inédites.


PORTRAIT

Du photographe américain Christopher Williams au britannique Tris Vonna-Mitchell ou la belge Jacqueline Mesmarker, tous ces artistes ont des pratiques rigoureuses, analytiques ou rationnelles, mais dont la forme garde une part de mystère, voire d’opacité. Comme si le message initial avait déraillé et qu’une grande part en avait été effacée. Mais cette part insaisissable, ce décalage entre le programme et son résultat, que j’appelle ici poésie, est précisément ce qu’il y a de plus beau dans l’art. C’est un abyme qui permet l’imagination, le désir, le rêve. Il s’agissait de partager quelque chose de très personnel avec le public : je viens de l’art conceptuel, et pourtant l’art que je continue à aimer est celui que je ne comprends pas. Ce cycle m’a aidé à comprendre que ce n’était pas un problème… mais une solution. C’était même la base de ma passion pour ce métier : ne pas choisir entre l’intelligence et la sensualité. Comment se porte et fonctionne l’art contemporain en Belgique ? Je suis basé à Paris, mais je travaille depuis longtemps en Belgique, et avant La Verrière j’avais déjà organisé des expositions au SMAK à Gand, au STUK à Louvain, ou la biennale de Louvain-la Neuve avec l’artiste bruxellois Michel François. Idéalement placée en l’Europe, bénéficiant de plusieurs racines culturelles et de deux langues officielle, riche d’un réseau puissant de collectionneurs privés et d’institutions fortes, ce pays a des atouts considérables. Je peux mesurer combien la scène belge est dynamique, surtout que depuis de nombreuses années, elle est une destination privilégiée pour des artistes et des professionnels de l’art venus d’Europe et au-delà, qui dynamisent les initiatives à toutes les échelles. Mais ce que j’aime, surtout, est invisible. C’est une facilité relationnelle de travail, un sens de l’humour et un sens de l’hospitalité dont on devrait ici s’inspirer. Pourriez-vous également nous dire deux mots sur vos projets avec le Palais de Tokyo ? J’ai organisé deux projets au Palais de Tokyo. En 2004 avec Thomas Hirschhorn, « 24h Foucault », était un magnifique et épuisant marathon pendant la Nuit Blanche, qui transformait radicalement le lieu en un espace surchargé, suractif, où le public

pouvait écouter, voir, lire, photocopier, travailler, créer, boire, dormir, etc… J’en garde un souvenir impérissable, d’autant plus que c’était l’année de ma première exposition (« Pick-Up » dans un artist-run space parisien), ma première conférence (« Une histoire de la performance en 20 minutes », qui a beaucoup tourné depuis) et donc mes premiers pas dans le monde de l’art. Le deuxième, pas moins audacieux, fut l’exposition « L’ennemi de mon ennemi » avec Neil Beloufa en 2018, une énorme installation hybride et tentaculaire avec des centaines d’objets, de reproductions, images, films, œuvres, documents, inspirée des musées d’histoire et de propagande. C’était un chaos de formes et de faits, mu en permanence par des robots dans l’espace, qui proposait une ambigüité entre le bien et le mal, le vrai et le faux, les postures et les impostures. Vous avez également sévi du côté de Chicago... Oui, depuis 2015, j’y organise notamment, en lien avec les services culturels français, une résidence qui s’appelle la « Méthode Room ». Chicago est une ville passionnante, plus collaborative et moins compétitive que New York, ou des enjeux sociaux, raciaux, politiques et écologiques sont très enrichissants pour la scène française. C’est aussi une scène artistique très sharp avec des figures internationales comme Latoya Ruby Frasier, Kerry James Marshall, Dan Peterman, William Pope L ou Theaster Gates. C’est pourquoi j’ai pensé qu’il était intéressant d’y envoyer des artistes ou écrivains avec un projet spécifique, très préparé en amont, qui travaillent ce contexte local de manière active. Ce fut le cas à chaque fois, comme la chaîne de télévision animée par l’architecte Xavier Wrona ou l’exposition et le film produits sur place par le collectif curatorial « Le Peuple qui manque ». En tant que critique d’art, comment abordez-vous votre approche critique sur le travail d’un artiste ? L’écriture fait partie intégrante de ma pratique, et je la considère comme une forme d’exposition dont l’espace serait le texte. Je pratique une critique « de la réception », c’est-à-dire fondée sur un regard subjectif, plus que sur le discours ou les intentions de l’artiste. Il ne s’agit pas

« J’invite les artistes à tenter des expériences qu’ils ne feraient pas ailleurs » de chercher une vérité de l’œuvre, ni une explication, mais plutôt de considérer l’art comme un puissant levier pour l’imaginaire et les idées. Cela me permet d’être libre dans la manière d’écrire, et de convoquer des références parfois inattendues. Dans les derniers textes que j’ai écrits, je peux faire des liens entre la peinture de Farah Atassi et la tradition des peepshows, ou entre Rocky Balboa et Marcel Duchamp. En ce moment je travaille sur une relecture critique de l’histoire de l’art pour un cycle de conférences pour le Musée d’Art Contemporain de Bordeaux. La première s’appelle : « Art : une histoire de la violence ». L’épisode du Coronavirus sur le monde de l’art aujourd’hui vous inspire quelles réflexions ? Les conséquences sont totalement imprévisibles, mais il est certain que tout le système de l’art est déjà impacté, et notamment les plus fragiles, qui ne sont pas toujours ceux ou celles qu’on suppose. Comme beaucoup de personnes, j’espère que passée la période de sidération, cet épisode sera une occasion de repenser des modes de production et des manières de faire, fondés sur le qualitatif plus que le quantitatif. Depuis mes débuts, je m’intéresse à l’art et au curating « en état d’urgence », c’est-à-dire comment travailler avec des moyens limités, à des échelles très petites, très dématérialisées ou très locales, dont les expositions comme « Jiri Kovanda vs le reste du monde » (une exposition en photocopies, qui tient dans une valise), la « Curated session » avec Dora Garcìa au Perez Art Musuem de Miami en 2015 (une exposition curatée en public et en une journée) ou les conférences-performances, sont des exemples. www.guillaumedesanges.com

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Pierre Vasarely un bel et lourd héritage Petit-fils du père de l’Op Art Victor Vasarely, légataire universel, titulaire du droit moral sur l’ensemble de son œuvre, Pierre, homme solaire, a réhabilité la Fondation Vasarely d’Aix-en-Provence. Aboutissement d’un imbroglio juridique. Par Anne Marie Cattelain Le Dû

Longtemps, son grand-père, dont il est l’unique petit-fils, fut son compagnon de jeu. De la maison de Gordes à l’atelier d’Annet-sur-Marne, près de Paris, le gamin passait ses vacances chez ses grandsparents paternels, Claire et Victor. « Aux premiers jours de l’été, confiet-il, mes grands-parents sacrifiaient à la traditionnelle transhumance vers la garrigue, les Monts du Vaucluse, Gordes. Camion et voiture transportaient les humains, le matériel et les chiens. Dans le Midi, mon grand-père entrecoupait son travail d’une pause natation le matin, et d’une partie de pétanque, en fin d’après-midi. Toujours

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avec moi. Lorsque j’ai eu 8 puis 10 ans, les échecs se sont invités à ces récréations et plus tard le billard. » Pierre, regardait aussi pendant de longues heures son grand-père peindre.

sacrifié sa carrière pour la gloire de son mari, toute une intelligentsia heureuse de découvrir ces villages quasi abandonnés du Luberon qu’elle sauva en rachetant des maisons. Années de pur bonheur !

Enfant joyeux, sociable, il s’étonnait, sans être outre mesure impressionné, de croiser dans le jardin et l’atelier des personnalités qu’il entrevoyait d’ordinaire sur l’écran de télévision, le président Georges Pompidou et son épouse, précoces collectionneurs des œuvres de Vasarely, mais aussi David Bowie, Johnny Hallyday et bien d’autres. Gordes, l’été, rassemblait autour de l’artiste et de son épouse, elle aussi artiste, qui avait

« J’avais 37 ans, quand mon grand-père est décédé à 91 ans et 16 ans à l’inauguration de sa Fondation. C’est dire si j’ai engrangé des souvenirs, des paroles, des souhaits, si j’ai passé des étés avec lui, voyagé à travers le monde, l’accompagnant pour des vernissages, des conférences, des expositions. Nous étions fusionnels. J’ai tenté de suivre son exemple : peindre. Une catastrophe, désordonné, brouillon, tachiste


Ces toiles monumentales, jamais accrochées, ont été montrées pour la première fois cet été. Elles témoignent de la formidable originalité de l’artiste. Alvéole 5 Gestalt (au fond)

alors que lui était rigoureux, esthétisant. Il me répétait : ne t’inquiète pas, Petit Pierre, tu seras directeur de ma fondation. Tu vivras l’art par procuration. » Sa prédiction s’est réalisée. Quand même semée d’embûches. Lorsqu’en 2009, Pierre Vasarely reprend la fondation en main, elle est au bord du dépôt de bilan. Les bâtiments mal entretenus fissurés, rouillés, laissent filtrer l’eau, risquant de dégrader les œuvres. A la suite de deux arbitrages de justice, rendus peu de temps avant la mort du peintre, placé sous tutelle, pour régler le litige opposant la Fondation à la dernière épouse de l’artiste Michèle Taburno, 430 œuvres et Pierre Vasarely, homme solaire.

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Les travaux de la fondation Vasarely à Aix-en-Provence enfin achevés cette année, permettront de lui donner encore plus d’éclat et de reconnaissance.

En souvenir de son grand-père, Pierre se bat comme un beau diable pour sauver le bâtiment, aujourd’hui classé monument historique. 20 000 sérigraphies sont attribués à cette personne et aux deux fils du peintre, au détriment de la Fondation, placée alors sous administration provisoire. En souvenir de son grand-père, Pierre se bat comme un beau diable pour sauver le bâtiment, récupérer la majorité du fond artistique. En 2013, la Fondation est classée Monument Historique. La même année, Pierre Vasarely saisit la justice et parvient à faire annuler la vente de 21 tableaux provenant des 430 « dérobés ». Enfin en 2015, la Cour de Cassation annule définitivement les arbitrages frauduleux demandant la restitution de toutes les œuvres. Petit à petit, la Fondation les

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récupère. Et, les travaux de remise en état du bâtiment terminés cette année, elle inaugure une nouvelle ère et une nouvelle saison, poursuivant le but de Victor Vasarely, rendre l’art accessible à tous. Depuis le 12 juin et jusqu’au 18 août, la Fondation montre des toiles monumentales jamais accrochées, trente œuvres récupérées et 22 données par l’un des fils, des photos à l’échelle d’œuvres dont la détention par Michèle Taburno à Porto Rico est toujours contestée. A partir de septembre et jusqu’au 31 janvier, la fondation, en partenariat avec le Centre Pompidou de Paris invite à voir « Sud Est »,

exposition regroupant 24 œuvres majeures de 20 artistes qui venus d’Europe de l’Est et d’Amérique du Sud ont suivi Vasarely et pris, pour la plupart la nationalité française. En 2018 la Fondation recevait 55 000 visiteurs, 100 000 l’an dernier. Elle pensait, cette année, avec la fin des travaux, et la multiplicité des activités battre ce record. Monsieur Covid 19 l’a freinée dans son élan. Mais, en décembre prochain, officiellement reconnue Musée de France, les collections seront définitivement sécurisées. Petit Pierre, devenu grand, suit avec réussite, passion et amour, le chemin tracé par son grand-père lorsqu’ils jouaient ensemble.


STORY

FLAVIEN GAILLARD des Puces à Christie’s pour ce grand amoureux du design

COLLECTIONNEUR ÉCLAIRÉ AU FLEGME IMPARABLE, AYANT FAIT SES ARMES AUX PUCES DE SAINT-OUEN, LE DIRECTEUR DU DÉPARTEMENT DESIGN DE CHRISTIE’S A SU « DYNAMISER ET MODERNISER » LES VENTES. UNE PERSONNALITÉ QUI NOUS LIVRE SON PARCOURS D’EXPERT ET SA VISION DE SPÉCIALISTE PASSIONNÉ. ÉCHANGE À BÂTONS ROMPUS ! PAR CLÉMENT SAUVOY

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1. Vente Design Christie’s Paris – 2020. JEAN ROYÈRE (1902-1981) Canapé ‘Boule’ dit ‘Ours polaire’, le modèle créé en 1947, celui-ci réalisé en 1962 Frêne tapissé de son velours d’origine Prix réalisé : €1,090,000

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3. Vente Design Christie’s Paris – 2020. JEAN ROYÈRE (1902-1981) Applique à six lumières ‘Liane’, commande spéciale, 1962 Métal peint ; abat-jours en Rhodoïd d’origine Prix réalisé : €1,570,000

Comment a été nourrie à vos débuts votre expertise en design et arts décoratifs ?

Quelques mots sur cette vente exceptionnelle de juin dernier chez Christies...

Durant mes études à l’IESA (Institut Européen des Sciences de l’Art) j’ai eu l’occasion de réaliser de nombreux stages importants auprès de différentes galeries comme Jousse Entreprise ou Yves Gastou, (qui vient malheureusement de nous quitter). Ils m’ont permis de toucher les œuvres, de les démonter, afin de mieux comprendre leur création. Évoluer dans les réserves de ces galeries a été un moment privilégié où j’ai pu être en tête à tête avec les œuvres. L’accès à leurs archives et documentation a aussi été le déclic pour mieux comprendre les époques et l’art associés à ce mobilier. J’ai toujours été fasciné par la machine industrielle, la culture du produit dérivé, décliner pour des raisons sociales, économiques ou culturelles. Derrière chaque objet se cache une histoire passionnante qui dépasse bien la fonction de celui-ci.

Nous avons réalisé un chiffre exceptionnel (12 millions d’€) pour cette vente avec un nouveau record du monde pour Jean Royère (570 000 € pour l’applique Liane). Initialement programmée le 20 mai puis déplacée le 30 juin en plein COVID-19, ce résultat qui a dépassé toutes nos attentes, a envoyé un signal très fort à notre marché. Plus de 30 nouveaux clients de 5 continents et près de 16 pays différents qui n’avaient jamais enchéri chez nous ont été enregistrés. Les collectionneurs nous ont fait confiance et ont compris l’importance des pièces sélectionnées. La collection d’origine de mobilier créé par Jean Royère y est pour beaucoup. Une collection exceptionnelle de 19 lots commandés en 1962 directement à Royère et restés dans leur état d’origine a été vendue pour 6 800 000 € et a été l’évènement de la saison.

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4 2. Vente Design Christie’s Paris – 2020. JEAN ROYÈRE (1902-1981) Canapé ‘Boule’ dit ‘Ours polaire’, le modèle créé en 1947, celui-ci réalisé en 1962 Frêne tapissé de son velours d’origine Prix réalisé : €1,090,000


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Commandés directement à Jean Royère en 1962, ces objets sont restés dans leur état d’origine. Avec un record pour l’applique « Diane » : 1 570 000 €

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4. The Exceptional sale : Dialogue avec Hervé van der Straeten – Christie’s Paris – 2017. AGATHON LÉONARD 1841-1923 Le vampire ou La chauve-souris, vers 1903 Bronze patiné et doré, partiellement peint (usures) Prix réalisé : €367,500 5. Vente Design Christie’s Paris - 2020 JEAN ROYERE (1902-1981) Enfilade, commande spéciale, 1951 Chêne et marqueterie de paille Estimation : €550,000-650,000

Votre collaboration avec Simon Andrews à Londres reste gravée dans les mémoires... Oui, c’est une belle aventure. Un client qui passe à l’accueil sans photo et qui souhaite s’entretenir avec un spécialiste. On discute, mais il ne me laisse pas son téléphone et dit qu’il va repasser. Entre temps, j’achète le livre sur l’artiste, Agathon Léonard. Je découvre une histoire passionnante mélangeant art nouveau, spiritisme, Loïe Fuller. Après de nombreux échanges, le client revient enfin avec la pièce et nous découvrons une pièce superbe par sa taille, patine, et rareté. Simon et moi avions pressenti le potentiel de l’œuvre mais souhaitions mettre une estimation raisonnable de

60 000/80 000 £. Le jour de la vente, de très nombreux téléphones étaient enregistrés avec des profils de clients très sérieux. Et là, le jeu des enchères s’est mis en place et nous avons adjugé l’œuvre pour plus de 500 000 £ avec les frais, après une très belle bataille d’enchères. J’ai d’ailleurs eu le plaisir d’en présenter une seconde quelques années plus tard, le client me contactant suite à ce résultat. Nous avons vendu cet exemplaire 367 500 €. Vos projets en cours et à venir en 2021 ? Le Design sera représenté en exclusivité dans notre prochaine vente prévue le 2 décembre durant laquelle nous présente-

rons une collection inédite de meubles en marqueterie de paille de Jean Royère, un bureau pièce unique de Philippe Hiquily, un bahut Ferembal de Jean Prouvé et d’autres lots que je ne peux pas encore dévoiler. Nous aurons, comme à notre habitude, trois jours d’exposition avant la vente durant lesquels seront exposés en même temps art africain, art océanien, art précolombien, art contemporain et Design. Un rendez-vous à ne pas manquer pour tous les passionnés que nous serons ravis d’accueillir chez Christie’s. Pour 2021, nous travaillons sur des ventes à thèmes mélangeant Design et Art Contemporain. Un nouveau tournant pour moderniser et dynamiser nos ventes.

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Photos : Christie’s Images Limited 2020

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Votre passion est marquée par le mobilier d’architecte et de décorateurs du XXème siècle... Créer un meuble semble pour beaucoup moins intéressant qu’un tableau. A l’époque, on s’intéressait au mobilier pour sa fonction première : j’ai besoin de ranger, je cherche donc une bibliothèque. Le Design dans sa définition simpliste est de donner une forme à un fond, une fonction. Mais derrière cela, de nombreuses questions rentrent en jeux : pour quel public ? quels matériaux ? quels lieux ? Quand j’ai démarré mes études, nous pouvions choisir entre les filières tableaux ou mobilier. En ce qui me concerne, je voulais toucher les objets, les démonter, comprendre leur patine, leur histoire. On dit souvent qu’un meuble qui a du vécu ne ment jamais. Son usure et ses dégâts sont les marques du temps et lui donnent son essence et sa personnalité. (Voir la lampe ‘Bilboquet’ d’Alberto Giacometti ci-dessous.) Vivre

6. Vente Design Christie’s Paris – 2020 JEAN PROUVÉ (1901-1984) Bicyclette, vers 1941 Acier inoxydable peint, aluminium, acier inoxydable, caoutchouc, cuir, plastique et laiton (restaurée) Prix réalisé : €50,000

avec des meubles qui vous ressemblent et vous touchent, c’est fantastique. Et les faire converser et évoluer avec d’autres créations comme l’art africain et l’art contemporain, est aujourd’hui considéré comme étant un véritable art de vivre. Ensuite, il y a les pièces inattendues qui vous parlent et les paris de présenter des choses nouvelles et uniques. Je pense au superbe vélo de Jean Prouvé de notre dernière vente. Moins de 10 exemplaires produits par le plus grand designer français. Tous différents, très peu ont survécu. Présenter des choses nouvelles et inattendues est aussi un défi qu’on essaye de relever à chaque saison pour surprendre nos collectionneurs et attirer leur attention.

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Ces années passées au marché Paul Bert comment les voyez-vous aujourd’hui ? Quand j’ai démarré le métier, mon objectif était d’être brocanteur/antiquaire. Pour moi, le passage obligé était d’aller faire mes premières armes aux Puces de Saint Ouen. J’y ai appris beaucoup. J’ai surtout côtoyé des marchands exceptionnels, tous différents dans leur approche du métier. Comprendre les dynamiques de marchés (qui vend quoi et pourquoi ?) a été une étape clé. Pourquoi celui-ci vend-il plus cher que l’autre à 10 mètres ? Se confronter à ses premiers clients, faire des bons et des mauvais achats… A l’époque, à presque chaque sortie (puces, brocantes, ventes aux enchères, salons spécialisés), on trouvait des objets qui pouvaient se revendre facilement. J’ai beaucoup appris durant ces années et cela m’a permis de tisser des liens solides avec certains marchands et collectionneurs avec lesquels je continue de collaborer. Aujourd’hui, le jeu est différent mais la chasse aux œuvres reste toujours le cœur de mon métier.

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7. Vente Design Christie’s Paris – 2019. ALBERTO GIACOMETTI (1901-1966) Lampe ‘Bilboquet’, le modèle créé vers 1939, celle-ci réalisée vers 1939 Terre cuite Prix réalisé : €298,000

8. Vente Design Christie’s Paris – 2019. DIEGO GIACOMETTI (1902-1985) Paire de tabourets en X, troisième version, vers 1984-1985. Bronze patiné et cuir Prix réalisé : €394,000

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J’ai beaucoup de chance d’avoir pu travailler avec Yves Gastou et Philippe Jousse. Des personnalités charismatiques et talentueuses hors du commun avec des approches très personnelles. Philippe Jousse, avec le Design des années 50, à l’époque situé rue Louise Weiss dans le 13e pendant l’exposition Georges Jouve ; et avec Yves Gastou, à l’occasion de l’un de mes premiers PAD Paris, où nous présentions du mobilier des années 70 en confrontation avec du mobilier des années 40… De superbes souvenirs ! Quel a été le parti pris au cœur des deux expositions monographiques consacrées à Max Sauze et JeanLouis Avril ? Max Sauze a été mon mémoire de fin d’études à l’IESA, je voulais absolument faire une exposition sur son travail. Pour ces deux designers, c’est une rencontre inattendue avec une pièce qui a tout déclenché. Les luminaires de Max Sauze sont superbes dans leurs proportions et lumière.

Pour Jean-Louis Avril, faire du mobilier en carton avec des couleurs pop, ça ne pouvait que me séduire. Toute la chambre de mon fils est aménagée avec des créations de Jean-Louis Avril et c’est un vrai plaisir. L’utopie de ces années 70, ces recherches liées aux nouveaux matériaux sont très en avance sur leur temps. Quelques mots en tant qu’expert sur le marché français... Pour ma spécialité, je suis privilégié d’être au cœur de ce marché si dynamique. Tous les grands noms, Jean Prouvé, Charlotte Perriand, Claude et FrancoisXavier Lalanne, les frères Giacometti … pour ne citer qu’eux, ont créé des choses en France qui restent encore à découvrir. Chaque année des découvertes et des redécouvertes sont faites et dynamisent notre offre et demande. Bien sûr, il y a toujours des pièges à éviter… Faire aujourd’hui des ventes de Design à près de 10 millions d’euros était impensable il y a dix ans. Mais le nombre de nouveaux acheteurs et les prix atteints sont en hausse chaque année. Le plus difficile est de trouver les œuvres qui font la différence.

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9. Vente Design Christie’s Paris – 2019. ALBERTO GIACOMETTI (1901-1966) Lampadaire ‘Osselet’, deuxième version, le modèle créé vers 1936. Bronze patiné Prix réalisé : €286,000

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Photos : Christie’s Images Limited 2020

Votre passage par les galeries Yves Gastou et Jousse a été déterminant...

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Du pull en laine pour rester bien au chaud au sweatshirt trendy pour enfant.

Collection Alpine mode & accessoires COLLECTION 1955

La marque ALPINE ne se contente pas de fabriquer des voitures sportives, racées et élégantes, sous la double tutelle de l’esthétisme et du plaisir (de conduire).

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Ce que l’on sait moins c’est qu’on la découvre dans d’autres secteurs, très éloignés de l’automobile, mais quand même avec un fil conducteur : l’innovation et la beauté.

Voici donc la collection 1955 mode & accessoires. Du pull en laine pour rester bien au chaud au sweet trendy pour enfant, sans oublier le sac idéal pour 48h de détente, la collection 1955 d’Alpine, et ses prix raisonnables, s’adresse à toute la famille. Par exemple, la veste homme est à 70 €, le pull laine femme à 90 €, le sac week end à 90 €. Et le blouson unisex à 65€. (e-shop Alpine)

C’est ainsi que l’on retrouve Alpine dans la mode et les lunettes. Pour être bien au volant et pour bien voir en conduisant. On est dans le lifestyle qui combine tout ce qui fait le bonheur de vivre.

Pour les lunettes Alpine a choisi de décliner sa nouvelle collection Alpine Eyewear en trois versions : Altitude, le modèle haut de gamme composé de matériaux d’exceptions ; Légende, qui reprend le look de certaines

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lunettes iconiques au look intemporel ; et enfin Chrono, la gamme sportive au design affirmé. A l’instar de la première édition, l’ensemble des modèles - à partir de 149 €sont proposés en optique, et solaire à la vue. www.alpine-eyewear.com


STORY

Adrien Gloaguen Hôtelier décomplexé TRENTENAIRE ASSUMÉ, TANT DANS SON STYLE DE VIE QUE DANS SA FAÇON DE MENER SES AFFAIRES, ADRIEN GLOAGUEN, TRACE SON CHEMIN AU HASARD DES RENCONTRES, DES OPPORTUNITÉS. PAR ANNE MARIE CATTELAIN LE DÛ

Voix posée, cheveux en bataille, barbe hirsute, tee-shirt sur jean, Adrien Gloaguen 38 ans, s’inscrit naturellement dans la galerie de portraits des chefs d’entreprise et hôteliers qui, mine de rien, bousculent la donne. C’est au hasard d’un job d’été, dans un hôtel à Londres, alors qu’il commence des études de commerce, qu’il pénètre les coulisses. Tout l’interpelle, l’intéresse : le rythme, les process, les clients, les différents métiers qui forment un tout. Dès lors, pour mieux approfondir ses connaissances, il accomplit différents stages étudiant dans l’hôtellerie, diligente quelques missions puis accepte un poste de réceptionniste dans un trois-étoiles. Son seul objectif : développer dans la capitale française ce qu’il a vu à Londres, des hôtels style auberge de jeunesse à la décoration et aux prix sympas, pour des clients, plutôt jeunes mais pas que, ne trouvant plus leurs marques dans l’hôtellerie classique. En 2008, il repère le Sophie Germain dans

le XIV e, trois étoiles dans son jus, idéal pour « se faire la main ». Reste à convaincre une banque de le suivre. Il essuie sept refus… Mais il est tenace, à l’image de son père, Philippe Gloaguen, qui à 22 ans, en 1973, se heurte au dédain de 19 éditeurs avant de lancer son Guide du Routard. Depuis, année après année, le Routard enrichit Hachette grâce à ses ventes astronomiques. Pour Adrien, le huitième banquier sera le bon, celui qui lui accorde le prêt pour acheter le Sophie Germain « mais pas pour le remettre en état, sauf s’il double le chiffre d’affaires en un an, sans rénovation ». Pari relevé. En 2011, il achète son deuxième établissement, le Paradis, dans le 10e, fief bobo. Cette fois, c’est son banquier qui l’incite à élargir son portefeuille. En 2013, Gloaguen revend Sophie nouveaux projets : l’hôtel des Deux Gares, 40 chambres, entre gare du Nord et gare de l’Est et, son premier projet hors frontières, 60 chambres à Londres dans le quartier de Paddington. Avec toujours le même objectif : imaginer en relation étroite avec des décorateurs des univers très tendance, actuels, gais. Dorothée Meilichzon avec ses couleurs heurtées, ses mélanges de style s’attelle à ses premiers établissements. Il confie à Luke Edward Hall, 30 ans,

designer londonien, la mise en scène des Deux Gares et choisit Fabrizio Casiraghi, Milanais, installé en France, au cœur du 9e arrondissement, pour Londres. Même si Adrien Gloaguen vient de regrouper tous ses établissements sous une même identité « Touriste », il n’aime parler ni de stratégie de groupe, ni de collection, laissant le hasard, les rencontres, le feeling, guider ses pas. Soucieux avant tout, malgré ces derniers mois compliqués, qu’il a surmontés grâce à une trésorerie saine, de préserver ses 130 salariés et vaille que vaille de créer des hôtels. Pour prendre de la distance, Adrien se détend, en tribu et en famille, vrai papa poule pour ses trois filles, posant ses valises entre maison de famille et hôtels à l’ADN assumé comme le Sénéchal sur l’île de Ré, proposant des chambres une étoile à cinq étoiles. Ou Les Roches Rouges, à Piana en Corse, ouvert en 1912 avec sa salle de restaurant inscrite aux Monuments Historiques, hôtellerie ancrée dans le paysage. Ce sont ces belles histoires, ces lieux marqués, ces personnes croisées qui marquant l’imagination de l’étudiant l’ont entraîné vers les rivages de ceux que les Anglo-saxons appellent l’Hospitality Business. www.edgarmagazine.com

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STORY

De volumes en volutes LE JEUNE PDG DU GROUPE VCR (VADERMARLIERE CIGAR FAMILY), QUI POSSÈDE ENTRE AUTRES DANS SON PORTEFEUILLE LA VÉNÉRABLE MARQUE NICARAGUAYENNE OLIVA, SE CONFIE SUR LE DÉCONFINEMENT DANS L’INDUSTRIE DU CIGARE ET PARLE DE SON AVENIR GLOBAL FACE À UNE TEMPÊTE DE LÉGISLATIONS NOUVELLES. PAR JEAN PASCAL GROSSO Quel regard portez-vous rétrospectivement sur la crise du COVID ? Chaque secteur mondial a été touché plus ou moins gravement. Pour l’industrie du cigare, cela a été, je pense, un peu différent. Moins destructeur peut-être. D’un côté, nous avons la fabrication du produit. De l’autre, sa vente. Dans certains pays, comme la France, l’Espagne, l’Italie, les débits sont restés ouverts. Si vous vous vouliez un bon cigare, vous pouviez toujours en trouver. Plus globalement, dans d’autres parties d’Europe, aux États-Unis, en Extrême-Orient, où les magasins ont été fermés plusieurs semaines, cela a été plus douloureux. Sachant que le cigare a un fonctionnement particulier entre les récoltes, le séchage, la fabrication, le confinement a-t-il tout de même été périlleux ? Pour Oliva, comparé à d’autres secteurs, nous ne pouvons pas nous plaindre. Quant à la production, nous avons eu la chance de ne pas arrêter de produire au Nicaragua, contrairement au Honduras pour qui cela a été une catastrophe. L’avantage, c’est que les usines à Estelí (ville où se concentre la majeure partie de la production du cigare au Nicaragua, ndlr) n’ont pas fermé. Nous avons 112

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imposé des mesures très strictes de travail sur place. Il y a eu des cas de COVID, comme partout, mais c’est resté sous contrôle. Au Sri-Lanka, où notre groupe possède également des usines, cela a été en revanche la fermeture pure et simple. Comment la manufacture Oliva a-t-elle géré la crise ? Comme nous produisons au Nicaragua, nous gardons toujours en tête l’instabilité politique du pays. Tout peut arriver comme il y a encore deux ans de cela. Et une crise peut revenir un jour. C’est pourquoi nous travaillons avec plusieurs mois de stock d’avance. Aussi bien pour les feuilles de tabac que le produit fini. Face à la crise du COVID, nous avons simplement concentré plus de main d’œuvre sur l’emballage des cigares déjà fabriqués et ainsi pu continuer à satisfaire les commandes en Europe et aux États-Unis. Combien produisez-vous par an ? Chez Oliva, autour de 20 millions d’unités. Et nous avions un stock d’environ six mois. Où se sont situées vos pertes les plus conséquentes ? En Asie, cela a été très difficile. Pour l’Europe, c’est presque trois mois consécutifs de baisse des ventes, allant de -30 à -60 %. Au contraire, dans certaines régions, nous avons vu nos ventes augmenter. Soyons réalistes,

Photo: Presse

Frederik Vandermaliere

cela n’a pas été pour nous la « fin du monde ». Nous n’avons pas souffert comme le tourisme ou l’événementiel. Le fait que les États-Unis pratique le e-commerce a-t-il été une chance pour vous ? C’est indéniable. Cela a permis, là-bas, de maintenir les ventes si ce n’est parfois les augmenter. Mais les débitants ont aussi activement travaillé. Ils ont fait preuve d’une grande flexibilité. Des cavistes spécialisés en vin se sont mis à vendre des cigares, etc. Tout cela a évité la « claque ». Comment se porte le groupe VCR aujourd’hui ? Bien entendu, cette année, nous ferons moins de bénéfices : le coronavirus va nous coûter plusieurs millions d’euros. Mais nous ne tomberons pas. Nous restons stables. La crise nous a touchés, il y a eu pas mal de stress, mais cela aurait pu être bien plus grave. Vos objectifs pour l’année 2021 ? Le cigare est un travail de longue haleine. Nous continuons à installer Oliva là où la marque doit encore s’imposer. Dans certaines parties de l’Europe, au Moyen-Orient, en Afrique… Il reste encore de nombreux endroits où faire découvrir nos produits. Ensuite, nous poursuivons nos essais, nos mélanges, nos innovations. Nous travaillons intensément en interne. Le marché mondial du cigare est en forte évolution. Comment imaginez-vous l’industrie globale dans les cinq années qui viennent ? A l’avenir, le gros souci viendra principalement des gouvernements. Chaque nouvelle législation devient tellement complexe que cela fragilise de plus en plus notre industrie. Mais je doute réellement que les marques disparaissent. Le marché mondial reste assez grand. Si les pays optent, comme au Canada, pour le « paquet neutre », cela risquera en effet de réduire le nombre de gammes proposées aux clients. La force d’un marché, ce qui le stimule, c’est l’arrivée constante de nouveaux acteurs. Je reste optimiste : on fumera encore des cigares dans 100 ans.


LE LIVRE

De la pensée au geste Par Clément Sauvoy

ZAO WOU-KI CATALOGUE RAISONNÉ des peintures

A

rtiste au croisement de plusieurs mondes, Zao Wou-Ki - né en 1920 dans une famille aux lointaines origines impériales - quitte la Chine à l’âge de 28 ans pour venir à Paris dans le quartier de Montparnasse au moment où l’ « Art Vivant » commence à se partager entre les États-Unis et la France.

Son œuvre traverse les débats esthétiques qui marquent le développement de l’art moderne et - s’il appartient à une scène parisienne qu’il apprécie - il perçoit très tôt la vitalité de la peinture américaine. Progressivement, il renoue aussi avec certains traits de la peinture chinoise dont il s’était écarté de façon volontaire. En 1964, avec le soutien d’André Malraux, l’artiste - dont la peinture est considérée comme appartenant au courant de l’Abstraction Lyrique - se fait naturaliser français. Au sein de ce superbe catalogue raisonné relié de 400 pages comptant pas moins de 600 illustrations, le collectif d’auteurs (Dominique de Villepin, Gilles Chazal, Eric Crosby, Philippe Dagen, Eric, Lefebvre, Daniel Marchesseau, Melissa Walt, Ankeney Weitz) - sous la direction de Yann Hendgen - dévoile

les premières œuvres de l’artiste chinois de génie sous un exceptionnel volume 1 : 19351958 qui nous rappelle au fil des pages que Zao Wou-Ki n’aime pas le mot « paysage » auquel il préfère celui de « nature ». Ses rapports avec le monde extérieur sont faits de découvertes et de voyages, de rencontres fécondes dont les premières furent avec Henri Michaux et le compositeur Edgar Varèse. Poésie et musique demeureront pour lui jusqu’à sa mort en 2013 deux pôles d’attraction permanents, comme une tension nécessaire avec la peinture – donnant sens, à mesure que son art monumental s’affirme, à l’expression que l’artiste a inspirée très tôt à Michaux : L’espace est silence ! Prix : 150 euros. www.editions.flammarion.com

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RÉDACTEUR EN CHEF & DIRECTEUR DE LA PUBLICATION Michel Comboul - michel@edgarmagazine.com CONSEILLERS EDITORIAUX Jean-Pascal Grosso - jeanpascalgrosso@gmail.com Clément Sauvoy - clementsauvoy@gmail.com DIRECTION ARTISTIQUE Agence Persistence of Vision Design - info@pov-lab.com ONT COLLABORÉ À CE NUMÉRO Bernard de Baudinière, Michel Bonnin, Kenneth Cameron, Alan Campbell, Anne-Marie Cattelain-Le-Dû, Laura Emir, Jean-Pascal Grosso, Gwen Le Bras, Gérard Mangold, Dominique Peltier, Clément Sauvoy COMPTABILITÉ Sogecompta - 151, avenue Galliéni - Bâtiment C93170 Bagnolet - 01 49 72 82 00 PUBLICITÉ | REGIES COMMERCIALES TAKEOFF MEDIAS - 2 Villa Wagram, Saint Honoré, 75008 Paris jerome@takeoffmedias.com - 09 86 24 41 73 CHAPCOM MEDIA (Rhône-Alpes) - 11, rue Hector Berlioz – 69009 Lyon – 04 26 03 47 90

Photo : Stephan Vanfleteren

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