Je suis une personne d'abord

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je suis une

personne d’abord

éditions d’une certaine gaieté


édito Chères amies, Chers amis, Voici notre roman-photo. Il va vous expliquer nos combats. Nous parlons de notre vie de tous les jours et cette vie n’est pas toujours facile. Nous avons choisi de mener nos combats par nous-mêmes, c’est nous qui disons ce qui devrait changer. Nous nous autoreprésentons. Nous parlons : De notre participation dans les différentes réunions qui nous concernent ; Du travail ; De la famille ; De la vie affective, relationnelle et sexuelle ; De la parentalité ; Des institutions ; Du logement ; De notre santé ; Des formations que nous aimerions faire ; De l’accessibilité des transports en commun… Et de beaucoup d’autres choses qui nous concernent. Nous voulons être avec tout le monde dans la société. Tout cela est expliqué dans ce roman-photo. J’espère qu’il vous ouvrira les yeux sur nos conditions de vie. Qu’il vous permettra de comprendre notre vécu et nos rêves. Nous souhaitons une vie digne, inclusive, dans la diversité. Que ce livret permette d’ouvrir le débat pour une bonne écoute de notre parole. Si vous vous reconnaissez, si vous vous sentez concernés, n’hésitez pas à venir nous rejoindre. Bonne lecture,

Xavier Lacroix Président du conseil de gouvernance


Antoine a quarante-cinq ans et vit depuis dix ans dans le centre de nuit La tulipe

Comme chaque matin, un éducateur passe dans la chambre On se dépêche, c'est l'heure de la douche !

Lève les bras, je vais te laver ! On se croirait à l'armée !

Les déjeuners au réfectoire sont souvent identiques Je voulais un thé sans sucre ! C’est toi qui a mis du sucre dans mon thé !?

Des disputes à tous les repas ! Je m'en vais ! Quoi !? Tu m’accuses ? C’est ça !?

J'en ai marre ! Je sais me laver tout seul ! Je ne suis plus un gamin !


9h00. Antoine arrive dans le centre de jour Les Tournesols où il va passer la journée à confectionner des savons. Il y restera jusqu'à 15h30.

Voilà la paye du mois ! Il y en a qui ont bien travaillé ce mois-ci !

Aïe, j'ai pas du tout bien travaillé, je n'ai eu que cinq euros !

Et moi j'ai bien travaillé ! J'ai eu vingt-cinq euros !

C'est quand même fou ce qu'on nous donne par mois. On travaille cinq jours semaine et on est payé une misère. J'ai l'impression d'être dans un atelier chinois.


16h00. De retour au centre de nuit, la journée d'Antoine n'est pas encore finie. Il faut qu'il prenne un rendez-vous médical. Bonjour Antoine ! Tu es occupé ?

Je suis en train de rédiger un mail pour avoir un rendez-vous à l'hôpital.

Ne fais pas le malin ! Je venais justement t’annoncer la sanction pour le téléphone de la chambre que tu as cassé.

Je t'ai déjà dit qu'il m'a glissé des mains. Je ne l'ai pas fait exprès !

Je crois bien que la semaine prochaine, je vais aller à la réunion du Mouvement Personnes D'Abord ! Je pense que ça me fera du bien !

N'oublie pas de prévenir madame la Directrice. Autrement, tu risques une sanction.

A vos ordres, commandant !

Ta sanction est de rester dans ta chambre pendant deux jours !

Quand vont-il arrêter de nous traiter comme des gamins !


Gabrielle a trente ans et a fait ses études dans l'enseignement spécialisé. Elle décroche ensuite un contrat Awiph à mi-temps dans une grande surface où elle s'occupe de la gestion du stock. Un jour, on lui demande de travailler à temps plein, sans rémunération supplémentaire. Un année s'écoule et son contrat Awiph se termine. Le patron doit alors l'engager sur fonds propres, mais il refuse sous prétexte qu'elle coûterait trop chère. Gabrielle tente de remonter la pente…

Comment vas-tu ? Tu as été chez le médecin récemment ?

Ça va, je vais mieux. Ma dépression commence à partir.

Je me suis sentie très humiliée. Mais maintenant, il faut que j'aille de l'avant !

J'ai une bonne nouvelle ! Il reste des places pour une formation en agro-alimentaire. Ils sont prêts à te recevoir dès la semaine prochaine !

Merci maman. Il faut que je sois au top pour le rendez-vous !


Pour être sûre de ne pas perdre ses droits au chômage, Gabrielle s'inscrit à une formation agro-alimentaire en complément des cours de français et de mathématiques.

Gabrielle apprend à éplucher les légumes.

Gabrielle apprend à faire la vaisselle.

Gabrielle apprend le français.


Gabrielle décroche ensuite un emploi d’ouvrière polyvalente dans un hôpital de sa ville. Il s'agit d'un contrat Awiph d'une durée d'un an. A la fin du contrat, l'histoire se répète.

Gabrielle, je tenais à te dire que tu as effectué du très bon travail. Mais nous ne pouvons malheureusement pas te garder.

Mais si je travaille bien, pourquoi vous ne me renouvelez pas mon contrat ?

Entre nous, Gabrielle, tu nous coûterais trop cher ! Tu es lente !

Ben oui, c'est ça, vous voulez des gens qui travaillent 24 heures sur 24, 7 jours sur 7 pour un salaire de misère et qui n'arriveront jamais à leur pension parce qu'ils seront morts avant !

Calme-toi Gabrielle !

Me calmer !? C'est la quatrième fois qu'on me met à la porte à la fin d'un contrat Awiph !


Gabrielle se retrouve encore une fois au chômage. Elle prend rendezvous avec la job coach de l'AWIPH pour trouver un emploi.

Après quinze jours, Gabrielle est de retour dans le bureau de la job coach.

Je viens de perdre mon travail et j'aimerais en trouver un autre, voilà pourquoi je suis ici.

J’espère qu'elle m'a trouvé du boulot ! Je vais encoder vos données et on se revoit dans quinze jours.

Alors, où en êtes-vous dans votre recherche d'emploi ?

Je vois. Pour cette fois, je vais vous laisser un peu plus de temps. On fixe un nouveau rendez-vous dans un mois.

Ma recherche d'emploi ? Euh… Nulle part !

Après son rendez-vous, Gabrielle reçoit un appel d'une amie. Comment s'est passé ton rendez-vous ? Je suis complètement découragée ! Elle n'a pas de boulot pour moi !

Je vais au Mouvement Personne D'Abord ce soir. Tu n'as pas envie de venir avec moi ? Je pense que cela te changerait les idées.

Bonne idée, à ce soir !


Robert a trente-cinq ans. Plus jeune, il n'avait pas confiance en lui et ne savait pas comment s'y prendre avec les femmes, jusqu'au jour où…

Luc, je vois que tu n'es pas bien, que se passe-t-il ?

Je me sens mal dans ma peau. J'aimerais trouver une copine mais je ne sais pas comment faire.

Elles m'ont appris à me découvrir, et à comprendre ce qu'est l'amour. À me sentir bien dans ma peau et à avoir confiance en moi. Elles m'ont appris la vie, quoi ! Mais, mais … pourquoi as-tu fait ça ? Tu n'avais pas mieux à faire ?

Quand j'étais plus jeune, j'avais aussi du mal avec les filles et je n'avais pas confiance en moi. Alors, je me suis offert les services des travailleuses du sexe. Tu as fait ça ? Mais pourquoi ?

Non. Je préférais aller chez les prostituées plutôt que d'ennuyer les filles dans la rue. Depuis, j'arrive à aller vers elles !

Mais c'est quand même cher ?! Courage Luc ! Là, je dois te laisser, j'ai rendez-vous avec Anne, ma copine. Ça c'est vrai ! Ce n'est pas donné. Mais elles rendent des services de qualité !


Robert a rencontré Anne il y a quatre mois chez une amie. Anne vit dans une institution et Robert a rendez-vous là-bas. La visite est prévue depuis quinze jours car Anne doit prévenir le directeur longtemps à l'avance.

Je viens voir Anne Dupont, vous pouvez me dire où est sa chambre ?

Bonjour ! Vous êtes l'amoureux, je présume ?

Oui.

Il faut d'abord remplir cette fiche avec nom, prénom, adresse et numéro de GSM.

Vous avez besoin de toutes ces infos ?! Je viens juste voir ma copine !

On se croirait en prison...


Robert arrive dans la chambre d'Anne. Tu veux boire quelque chose ?

Non merci, j'ai juste envie de t'avoir près de moi

Tu m'as manqué !

Toi aussi !

Ça va faire cinq mois qu'on est ensemble et j'aimerais passer à autre chose. Robert, tu sais que te voir, aller se promener, manger au resto ou voir une expo ensemble me font très plaisir.

C'est-à-dire ?

Oui à moi aussi, j'aime bien passer du temps avec toi

J'aimerais qu'on ait des rapports plus intimes. Des rapports sexuels quoi ! Quelques heures plus tard

Quelle misère que la vie en Institution!

On ne peut pas faire l'amour ici ! C’est contre le règlement d'ordre intérieur.


Dix jours plus tard, Robert invite Anne dans son appartement pour un souper entre amoureux.

C'est délicieux !

Le repas terminé, ils se détendent en dansant un slow.

C'est à base de gingembre. C'est aphrodisiaque !

Enfin le moment tant attendu…

Anne passe la nuit chez Robert.


Le lendemain, Anne est de retour à son institution. À l’accueil, le directeur est là.

Anne, où étais-tu cette nuit ?

J'ai passé la nuit chez Robert !

Tu sais que tu dois nous prévenir une semaine à l'avance quand tu déloges ? Tu n'as pas respecté le Règlement d'Ordre Intérieur !

Tu apprendras à le faire ! Je t'interdis de vous voir pour les deux prochaines semaines !

Vous pouvez pas faire ça ! Oui mais bon, dans la vie, on ne peut pas tout prévoir!


Et j’espère que vous avez pris des précautions et que vous vous êtes lavés après les rapports, comme écrit dans le règlement…

Ben oui, on est peut-être débiles, mais pas à ce point !

Anne appelle Robert pour lui annoncer la mauvaise nouvelle.

Je viens de me faire engueuler, humilier et punir par le directeur. On pourra pas se voir pendant deux semaines.

Ça ne peut plus durer. Il faut trouver une solution. Dans deux semaines, on ira ensemble au Mouvement Personne D'Abord. Tu verras, il y a des chouettes gens qui pourront nous aider.


Antoine, Gabrielle, Robert et Anne se retrouvent lors d'une permanence dans le local du Mouvement Personne D’Abord.

Emma. Je suis au Mouvement depuis quatre ans.

Yves. Au Mouvement depuis un an.

Isabelle. Je suis au Mouvement depuis cinq ans.

Bonjour, je m'appelle Louis et je suis président du Mouvement. Je suis ici depuis seize ans.

Julien. Je suis au Mouvement depuis deux ans aussi.

Françoise. Je suis une personne ressource et je travaille sur l'antenne de Namur. Florence. Je suis une personne ressource dans le Mouvement et je travaille sur l'antenne de Liège et de Verviers.

Tu vis où ?

Je m'appelle Antoine. J'ai pris connaissance du Mouvement avec un prospectus.

Je suis en institution à Liège, mais j'ai envie d'aller vivre seul. La vie n'est pas facile. Je n'ai pas de liberté, on me traite comme un gamin et il y a plein de disputes.



Prenez-nous comme nous sommes ! Notre autonomie, notre inclusion, l’autoreprésentation Nous parlons d’autoreprésentation, au Mouvement Personne D’Abord, du fait que les personnes se représentent elles-mêmes dans une démarche individuelle et participative au sein du groupe, pour aboutir à des initiatives collectives. « On y parle beaucoup de soi pour travailler ensemble, nos thèmes collectifs ». ‘« Nous avons chacun notre réalité. Nous avons le droit de vivre nos expériences. Quand on est enfant, les parents ont l’habitude de parler à notre place. Pour les jeunes qui n’ont pas nos difficultés, ils ont la possibilité de s’affirmer. C’est normal, cela fait partie de l’adolescence et puis quand ils sont adultes, ils vivent leur vie. Nous on dirait qu’on n’a pas d’adolescence, pas de vie d’adulte, que nous restons toute notre vie des enfants ». Côté parents, il n’est pas simple de considérer son enfant qui présente une déficience intellectuelle comme un adulte capable de mener une vie relativement autonome et, peutêtre, une vie de couple. Peur qu’il ne s’en sorte pas, qu’on l’exploite, peur de l’avenir … Faire confiance ne va pas de soi ! Mais tout être humain grandit et vit des besoins d’adultes, d’autonomie, d’intimité, d’une vie affective et sexuelle qui effraie des parents, qui se sentent toujours responsables de leur progéniture. [1] Notre travail parle de notre place dans la société, nous voulons enlever les étiquettes que la société nous met, transformer les préjugés des gens (leur ignorance) en leur parlant, en nous impliquant dans différentes actions pour aider les gens à une autre représentation de notre personne, pour être acceptés, pour donner notre avis, nos idées, nos expériences, comme nous sommes. Le Mouvement Personne D’Abord permet aux personnes de se retrouver, de s’exprimer sur leur vie quotidienne et de prendre la parole au sujet de tout ce qui les concerne. Autrement dit, de prendre leur place en adulte dans la société d’aujourd’hui : « Il faut qu’on arrête de décider à notre place ! ». Ils s’expriment clairement quant à leurs souhaits : « nous aimerions, comme tout citoyen, pouvoir voter (avec une aide éventuelle), vivre seuls dans un logement, faire des choix au quotidien (en matière d’horaire, de sorties, de rencontres, d’achat, sans devoir tout justifier ou de choix d’un médecin…), être écoutés quand nous prenons la parole. Et encore, être libres affectivement et sexuellement, libres de nous marier, d’avoir accès au travail adapté, voire au circuit de l’emploi ordinaire » [1] Le Mouvement Personne D’Abord pour nous, c’est trouver un sens à sa vie. C’est avoir une image positive de nous-mêmes.

On évolue. Cela nous aide à progresser. Nous gagnons de la confiance en nous, nous gagnons de l’autonomie. L’autoreprésentation implique l’autodéfense des droits de la personne. Nous avons le droit de prendre la parole, de donner notre avis, de connaître nos droits, de revendiquer nos droits. Le Mouvement Personne D’Abord, c’est apprendre à oser prendre la parole d’abord dans le groupe, et puis après devant des responsables politiques, des professionnels, nos parents. C’est un long parcours. Nous y parvenons en nous réunissant chaque semaine pour parler de nous-mêmes ensemble. Là, nous disons nos problèmes et écoutons ceux des autres. Cela renforce notre personne. Nous nous entraidons, nous nous aidons les uns les autres. Tout cela est réfléchi, discuté dans nos réunions hebdomadaires et lors de notre conseil de gouvernance, ce qui nous permet de nous positionner. On ne nous a pas appris à donner notre avis sur la vie, la citoyenneté, sur nous-mêmes. Là, nous l’apprenons. Tout cela renforce notre potentiel, nos compétences pour arriver à l’autoreprésentation. Notre originalité est que nous ne dépendons ni des parents, ni des institutions, ni d’autres associations. Donc, notre parole est exprimée en direct sans intermédiaire. C’est difficile de parler en notre propre nom face aux professionnels, face aux parents, face aux représentants politiques… C’est difficile d’être acceptés dans nos critiques, avec les exemples que nous donnons de notre vie pour arriver à proposer des changements qui nous conviennent. Pour cela, il faut du courage, beaucoup de courage. (1) Article paru dans « Le Ligueur », Thérèse Jeunejean venue au Mouvement Personne D’Abord interviewer les autoreprésentants.


Il y a trois antennes du Mouvement Personne D’Abord À Verviers, rue des Minières 8 ; 087.2250.55 – 0495.51.74.46 personne.dabord@skynet.be À Liège, rue Hazinelle 6 ; 04.223.70.86 – 0471.45.11.73 g.demeyer.personnedabord@gmail.com À Namur, rue des Brasseurs 177 ; 081.26.02.11 -0495.54.80.98 g.mathy.personnedabord@gmail.com Notre site internet www.mouvementpersonnedabord.be

La connaissance n’est pas le pouvoir mais elle est la liberté Gilles Lamere

Voici l’article 24 de la convention ONU, relative aux droits des personnes handicapées. Tous les articles sont d’une extrême importance, nous en relevons un et vous encourageons à prendre connaissance de toute la convention relative aux droits des personnes handicapées ratifiée par la Belgique le 02 juillet 2009. Article 24 Éducation 1. Les États Parties reconnaissent le droit des personnes handicapées à l’éducation. En vue d’assurer l’exercice de ce droit sans discrimination et sur la base de l’égalité des chances, les États Parties font en sorte que le système éducatif pourvoie à l’insertion scolaire à tous les niveaux et offre, tout au long de la vie, des possibilités d’éducation qui visent :

a) Le plein épanouissement du potentiel humain et du sentiment de dignité et d’estime de soi, ainsi que le renforcement du respect des droits de l’homme, des libertés fondamentales et de la diversité humaine ; b) L’épanouissement de la personnalité des personnes handicapées, de leurs talents et de leur créativité ainsi que de leurs aptitudes mentales et physiques, dans toute la mesure de leurs potentialités ; c) La participation effective des personnes handicapées à une société libre. Vous souhaitez parler à un collaborateur du Centre pour signaler une discrimination ou poser vos questions ? Appelez le numéro gratuit 0800 12 800



Je te comprends, moi aussi j'ai vécu en institution. Maintenant je vis dans un appartement supervisé.

Je viens d'en faire la demande, mais je ne sais pas si elle va être acceptée.

Il ne faut pas te décourager, cela va prendre du temps et il va falloir se battre ! Mais nous sommes là, on va te soutenir !

Pour nous, tout changement dans la vie est un réel combat, que ce soit dans la famille, dans l'institution, etc.


Toujours à la permanence du Mouvement, c'est au tour de Gabrielle de se présenter.

Je m'appelle Gabrielle et j'habite Liège. C'est mon amie Emma qui m'a proposé de venir ici ce soir.

Oui, parce que je pense que ça va lui changer un peu les idées.

Je passe de contrat Awiph en contrat Awiph1, c'est très décevant à la longue.

Les contrats Awiph arrangent les patrons mais pas nous ! Nous sommes juste exploités !

[1] Contrat d'adaptation professionnelle (CAP). Stage en entreprise financé par l’Agence Wallonne pour l'Intégration des Personnes Handicapées

Toujours la même histoire ! Les patrons profitent durant un an du contrat Awiph et après ils nous mettent dehors ! Ils ne veulent pas nous engager de manière ordinaire, car ils disent qu'on est lent… Par contre, pas de problème pour travailler en noir.


Pour le moment, je vais chez la Job/coach de l'Awiph. Mais elle a toujours pas de boulot pour moi.

C'est toi qui dois chercher un travail, ce n'est pas elle qui va te le trouver ! Ah bon !? Je pensais que c'ĂŠtait le contraire.

Je ne sais pas comment faire, par oĂš commencer ?!

Si tu en as envie, la prochaine fois, je te montrerai.


C'est au tour d'Anne de se présenter... Je suis la copine de Robert et c'est lui qui m'a proposé de venir aujourd’hui.

On traverse une mauvaise passe, ça nous fait du bien de voir du monde.

Anne a écopé d'une punition parce qu'elle a dormi chez moi sans prévenir. On n'a pas pu se voir pendant quinze jours. En plus, au boulot, c'est pas le top. J'ai dû accepter des déplacements car sinon je risque de perdre mon emploi. Et avec la chasse aux chômeurs, ça craint ! Depuis qu'on est ensemble, c'est très difficile. Ma famille n'accepte pas notre relation. De plus, je vis en institution où avoir une vie affective et sexuelle est pratiquement impossible.

Il faut pas se laisser abattre ! Il faut que vous preniez les choses en main ! Personne ne peut vous empêcher de vous aimer !


Quinze jours plus tard, tout le monde se retrouve à Namur au Mouvement Personne D'Abord. Pour Antoine, plusieurs réunions ont eu lieu avec l'Institution pour son projet d'appartement, mais ils estiment qu'ils n'est pas assez autonome.

Antoine, tu as des nouvelles par rapport à ton projet d'appartement ?

Antoine, j'ai pensé à toi cette semaine. Je me dis qu'il faut aller à l'attaque. Il faut que tu te trouves un appartement toi-même !

Ils disent toujours la même chose : « Vous n'êtes pas assez autonome ». Certes, si on me traite comme un gamin, comment je peux leur montrer que je suis autonome ?

Oui, mais comment ? Et il me faut des meubles aussi.

Une chose à la fois. D'abord, je vais te montrer où et comment chercher un appartement. Tu cherches sur Liège ? Combien tu peux mettre ?


De l'autre côté de la pièce, Gabrielle apprend à chercher du travail avec l'aide de Florence, une des personnes ressources du Mouvement.

Gabrielle repère les offres d'emploi intéressantes.

C’est un journal où il y a des offres d'emploi. Il faut entourer celles qui t’intéressent. Ensuite, il faut leur envoyer un CV et une lettre de motivation.

Gabrielle vient de terminer sa recherche d'emploi.

Gabrielle apprend à faire son CV.

Maintenant, on fait ton CV. Dans le CV, il y a tes données personnelles et il reprend tes expériences de travail, tes formations...

On a très bien avancé. La prochaine fois, on apprendra à écrire une lettre de motivation et à passer des entretiens téléphoniques.


Anne et Robert viennent de visiter un très bel appartement. Ils prévoient d’y emménager dans les prochains mois.

Il est vraiment magnifique l'appartement. Il y a beaucoup d'espace ! Tu sais Anne, un jour, j'aimerais beaucoup avoir des enfants avec toi.

Oui, il est très lumineux aussi !

Anne, je t’aimerai toujours, avec ou sans enfant.

Robert, je ne pourrais jamais te donner d'enfant ! Mes parents m'ont fait opérer à l'âge de dix-huit ans en me disant que je ne serais jamais capable de m'occuper d'un enfant.


Anne et Robert participent à une permanence au MPDA de Verviers.

On a une bonne nouvelle à vous annoncer. Anne et moi, on va emménager ensemble. On a trouvé un très bel appartement !

Mais c'est super ça !

Même si ma mère trouve que je suis encore jeune ! J'ai quand même trente-trois ans !


Michel et Dominique, deux membres du MPDA, reviennent de vacances.

Ma mère m'a dit la même chose quand, avec Michel, on lui a annoncé qu'on allait se marier le mois prochain !

On se mariera le 20 Décembre à l’Hôtel de Ville de Liège.

Félicitations ! Vous êtes tous et toutes invités


Quelques semaines plus tard au MPDA de Liège.

Mais qu’ène affaire de chercher du boulot !

J'ai toujours dit que chercher du travail, c'est un boulot en soi !

Mais c'est super ! En plus dans un milieu ordinaire, comme tu le voulais, non ?

Je viens d'être prise pour un boulot dans une boulangerie artisanale. Je commence après demain. Toujours avec un contrat Awiph, mais on verra plus tard.

Oui ! Cela m'aide à m’améliorer, plus qu'en milieu protégé.


Moi, ça fait dix jours que j'appelle mon administrateur de biens et il ne m'a toujours pas donné l'argent pour aller chez la coiffeuse ! J’espère que je l'aurai au moins pour le mariage de Dominique et Michel.

J'ai trouvé un appartement et, avec Yves, je suis allé chercher des meubles de seconde main.

C'est super !

C'est quand qu'on vient t'aider à faire le déménagement ?


Anne confie à une amie sa douleur de ne pas pouvoir avoir d'enfant.

Robert m'a demandé d'avoir un enfant et ça me fait beaucoup de peine. Pourquoi ? Tu as été opérée aussi ?

Oui, à dix-huit ans. Ils m'ont dit que je ne serais pas capable de m'occuper d'un enfant.

Moi, c'était la même chose quand j'étais enceinte de ma fille

Comment ça s'est passé ?

Regarde, elle a six ans maintenant. Elle est épanouie. Et je montre à tout le monde que je peux l’élever seule. Ça a été dur de dépasser les préjugés et les mauvaises langues de mon entourage.


Pour Antoine, un combat de gagné dans sa vie. La solidarité prime au sein du Mouvement Personne D'Abord : tout le monde est venu l'aider pour son déménagement.

Ils traînent, ils traînent pour nous lâcher 30 euros, alors que c'est notre propre argent !

Alors, tu as eu des nouvelles de ton administrateur de biens ?

Toujours pas !

Je crois que je vais le harceler au téléphone, sinon je ne pourrai jamais aller chez le coiffeur avant le mariage.

Ils ne veulent pas nous donner de sous pour que les comptes épargnes gonflent, ainsi que leur rétribution de 3%.


Le jour du mariage de Dominique et Michel est arrivé. Tout le monde se retrouve à l’hôtel de ville de Liège.

Elle est superbe ta coiffure !

Oui, j'ai eu les sous à temps !

Les fiancés s’échangent les alliances devant l’échevine


Remerciements Le Mouvement Personne D'Abord qui a permis la réalisation de ce roman-photo, tout particulièrement les participant(e)s à la rédaction du scénario, les membres actifs et les personnes ressources ; Cap 48 et le Kiwanis de Welkenraedt-Trois Frontières ; L'AWIPH pour son soutien dans le cadre des initiatives spécifiques et le café La Toccata de Liège.

Ont participé [Par ordre alphabétique] Christelle Alexis, Johnny Bartholomé, Véronique Bertrand, Vanessa Chapelle, Jean-Pol Coppée, David Dalier, Vanessa D’Angelo, François Dardenne, Stéphane De Campos, Gwendoline Demeyer, Donatella Fettucci, Martine Geoffroy, Xavier Lacroix, Gaëlle Leurquin, Irène Libon, Garance Mathy, Joel Napolillo, Marc Pallen, Pierre Paquot, Albert Perau, Monique Perau, Rababe Abadi, Nat Ryckewaert, Robin Stevens, Danielle Tychon, Michel Vandermiège, Aurore Vanhoven, Christophe Verbraeken, Didier Walter, Xavier Wauters, Christian Wouters, Tiziana Zoyo. Conception Maquette | Joel Napolillo, assisté d’Arnaud Ferrante Animation et scénario | Donatella Fettucci, assistée de Robin Stevens Dessins | Chris Damaskis Photos | Delphine Fedoroff Supervision | Joel Napolillo Imprimerie Print-up, Herstal Editeur responsable Agnès Lejeune, 9/11 rue des Mineurs 4000 Liège. Juin 2015


Les éditions d’Une Certaine Gaieté proposent une série de romans-photo présentant chacun un milieu socioprofessionnel différent. Chaque microcosme social est simultanément auteur et sujet. Les participants sont invités à s’approprier le scénario et à la construire pas à pas, jouant leur propre rôle face à l’objectif, et traduisant au mieux leurs préoccupations quotidiennes, leurs frustrations et leurs joies, les conflits qui les opposent, les passions qui les animent. L’ensemble des romans-photos vise à constituer une vaste fresque kaléidoscopique sur un support décalé et ludique. Une juxtaposition de milieux d’ordinaire imperméables les uns aux autres qui, à terme, mettrait en perspective la notion même d’altérité. Mr et Mme tout le monde sont capables de poser sur leur milieu d’origine un regard aussi riche et acéré que les sociologues.

Mouvement

Personne D’Abord asbl

D/2015/10.070/30 ISBN 978-2-930-759-02-9

D’une certaine gaieté asbl 9-11, Rue des mineurs 4000 Liège, Belgique Tél : +32 04 222 12 46 www.certaine-gaite.org


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