JA 2659-60 DU 25 DECEMBRE 2011 AU 7 JANVIER 2012

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Maghreb & Moyen-Orient

TUNISIE

Ménage à Après l’adoption d’une petite Constitution provisoire et la formation du gouvernement, la coalition formée par Ennahdha, le Congrès pour la République et Ettakatol peut enfin se mettre au travail. Mais l’enchevêtrement des prérogatives pourrait lui compliquer la tâche.

ABDELAZIZ BARROUHI,

S

à Tunis

idi Bouzid, le 17 décembre 2011. À la cérémonie marquant le premier anniversaire du déclenchement de la révolution par l’immolation de Mohamed Bouazizi, il n’y avait ni portrait du nouveau chef de l’État ni slogan à sa gloire. Signe que l’ère du leader tout-puissant est bel et bien révolue, il n’y avait pas un seul « président » à la tribune officielle, mais trois, côte à côte : Moncef Marzouki, président de la République ; Mustapha Ben Jaafar, président de l’Assemblée nationale constituante (ANC) ; et Hamadi Jebali, président (c’est l’expression en arabe) du gouvernement. Un protocole conforme à l’esprit de la coalition formée après les élections du 23 octobre par leurs partis respectifs – le Congrès pour la République (CPR, gauche nationaliste), Ettakatol (gauche) et Ennahdha (islamiste) –, et qui traduit l’équilibre voulu par la « petite Constitution » provisoire organisant les pouvoirs publics et adoptée par l’ANC, seule et ultime dépositaire de la souveraineté populaire. Aux termes de cette miniloi fondamentale temporaire, les deux chefs de l’exécutif, Marzouki et Jebali, sont tenus d’agir de concert, sous le contrôle de l’ANC. Un système original (lire

trois

l’encadré) mais qui n’en a pas moins soulevé des critiques. Les prérogatives des trois triumvirs sont tellement enchevêtrées que les ténors de l’opposition, après avoir reproché à l’ANC de n’avoir pas conféré au chef de l’État suffisamment de pouvoir, se sont mis à relever tout ce qui, à leurs yeux, constitue de sa part des « empiètements » sur les attributions du gouvernement. Il est vrai que le nouveau président a surpris tout le monde par un départ en trombe, pendant que Jebali planchait sur la composition du gouvernement (lire p. 68). Lors de sa première semaine à la magistrature suprême, Marzouki s’est ainsi rendu, en toute discrétion, dans plusieurs villes du pays pour visiter des familles de martyrs (sur les tombes desquels il s’est recueilli) et des blessés de la révolution, ou pour saluer de vieux militants anti-Ben Ali qui ne pouvaient plus se déplacer ; mais cela, nul ne peut le lui reprocher. Il a reçu successivement, en l’absence de Jebali, les membres du Conseil supérieur des armées et ceux du Conseil supérieur des forces de sécurité intérieure, mais aussi les représentants de l’opposition, du patronat et de la principale centrale syndicale, appelant à une trêve sociale et politique de six mois afin de favoriser la relance de l’économie. Il a également annoncé que les « palais », hormis celui

Préparatifs des CÉRÉMONIES COMMÉMORATIVES DU DÉCLENCHEMENT DE LA RÉVOLUTION,

à Sidi Bouzid, le 17 décembre.

PRINCIPALES ATTRIBUTIONS DU CHEF DE L’ÉTAT • Représente l’État tunisien • Commandant suprême des forces armées • Nomme et révoque, avec l’accord du chef du gouvernement, les cadres de l’armée, les hauts fonctionnaires des Affaires étrangères et les diplomates • Définit la politique étrangère en accord avec le chef du gouvernement • Reçoit les lettres de créance des représentants des États N o 2659-2660 • DU 25 DÉCEMBRE 2011 AU 7 JANVIER 2012

et organisations régionales et internationales • Signe et promulgue les lois votées par l’ANC • Nomme le chef du gouvernement • Exerce l’amnistie • Nomme le gouverneur de la Banque centrale avec l’accord du chef du gouvernement et du président de l’ANC. Une nomination soumise à l’approbation de la Constituante JEUNE AFRIQUE


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