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Ý FIDÈLES DE L’ÉGLISE SHOUWANG, congrégation réformée aujourd’hui frappée par la répression.
Elles voient ainsi la main des États-Unis derrière le bourgeonnement des mouvements évangéliques, que la presse officielle accuse régulièrement d’être financés par des mouvements sectaires américains. Du côté catholique, c’est évidemment le Vatican qui est montré du doigt. Les relations diplomatiques entre la Chine et le Saint-Siège sont rompues depuis que celui-ci a reconnu officiellement Taiwan, en 1951. À l’époque, son ambassadeur avait trouvé refuge dans l’île après avoir été expulsé par Pékin. En 1957, cette rupture a été entérinée avec la création par le régime communiste de l’Église patriotique de Chine. Depuis, les périodes de tension et d’apaisement se succèdent au rythme des ordinations concurrentes d’évêques par Rome et Pékin. Dernier épisode en date : l’ordination épiscopale, fin novembre 2010, du père Guo Jincai dans la ville de Chengde (nord du pays). Une ordination « illégale et nuisible aux relations JEUNE AFRIQUE
En une génération, un demi-milliard de ses habitants sont passés de la pauvreté à l’abondance. Ils habitent dans des villes immenses et peuvent connaître un sentiment de vacuité. Le communisme a détruit une grande partie de la société traditionnelle et des valeurs confucianistes. Aujourd’hui, les religions prennent leur revanche. » Selon le professeur, la Chine est « une terre d’évangélisation ». De fait, on estime que dix mille Chinois se convertissent chaque jour. À ce rythme, la République populaire pourrait « devenir le plus grand pays chrétien au monde, avec, peut-être, 200 millions de croyants d’ici au milieu du siècle ». Au cœur du quartier commerçant de Pékin, à une encablure de la place Tiananmen, l’église Saint-Joseph de Wangfujing est effectivement toujours bondée. Chaque week-end, plusieurs messes y sont célébrées. Le plus souvent, les fidèles sont contraints d’y faire la queue, voire de prier à l’extérieur. Le prêtre a été nommé par le Parti communiste, ses prêches sont relus et validés. Il règne en ce lieu de culte, surnommé la « cathédrale de l’Est », des airs de kermesse. On y joue avec son téléphone portable, on y emmène les enfants pour prier en famille… « C’est tellement agréable de venir à l’église, raconte une jeune femme. C’est calme, reposant. On peut méditer sur sa vie et demander des conseils. » Pour ces fidèles, le sociologue chinois Liu Xiaofang a inventé le terme de « chrétiens culturels », sympathisants mais peu
constructives qui ont été nouées récemment » entre les deux parties, a déclaré le porte-parole du Vatican. C’était en effet la première fois depuis quatre ans qu’un évêque était ordonné sans le feu vert papal. La crispation a atteint son apogée une dizaine de jours plus tard : le 1 er décembre, le « On estime que chaque jour pape Benoît XVI a lancé dix mille Chinois se convertissent un appel en faveur de au christianisme. » l’Église de Chine, qui « vit JEAN-PIERRE CABESTAN, sinologue des moments particulièrement difficiles ». Au même moment, Pékin préparait « son » conclave, pratiquants. Ils sont sensibles à l’aspect l’Assemblée des représentants cathomoderne de cette religion venue de l’extérieur. Une religion teintée d’exotisme liques officiels. Positions totalement dans ce pays où bouddhisme et taoïsme inconciliables, la messe était dite. règnent depuis des siècles. Mais lorsqu’on les interroge sur les catholiques réprimés TERRE D’ÉVANGÉLISATION. Malgré ce et sur le pape, ils tournent les talons. « On contexte tendu, le christianisme est, en ne fait pas de politique ici », répondent Chine, en plein essor. « Ce pays a soif les fidèles de Saint-Joseph de Wangfujing. de spiritualité, souligne le professeur Li Un rêve de parti unique. ● Tianming, du département de théories STÉPHANE PAMBRUN, à Pékin religieuses de l’université de Renmin. N 0 2625 • DU 1 ER AU 7 MAI 2011
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