Dessine-moi l'univers

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À

Vandermarlière - Millot

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q uoi ressemble notre Univers ? Pourquoi est-il tel qu’il est ? Est-il fini ou infini ? Ces questions hantent l’Humanité depuis la nuit des temps.

Dans cet ouvrage, vous découvrirez comment en tentant d’y répondre, l’Homme a inventé la science telle qu’on la conçoit actuellement.

Dessine-moi l’Univers

De l’Antiquité grecque jusqu’à nos jours, les idées ont évolué au gré des découvertes des savants et surtout des mutations dans leurs positionnements face à ces problèmes. D’abord prisonniers des considérations d’ordres religieuses ou philosophiques, ils ont dû accepter de regarder le monde différemment pour le rendre intelligible. C’est cette aventure humaine et scientifique que ce livre décrit en insistant sur la façon dont sont nés les concepts qui ont permis à la physique de prendre son envol. Accessible au néophyte grâce à son mode d’expression sous forme de dialogue, comme Galilée le fît en son temps, il regorge d’informations scientifiques. Cela le rendra indispensable à l’amateur d’histoire des sciences, d’astronomie et à toute personne désireuse de comprendre facilement les idées incontournables qui ont modelé la façon dont on voit le monde…

Venez assister à la naissance de la science moderne !

ISBN : 978-2-8041-8286-1

9 782804 182861 DEMOUN

www.deboeck.com

Conception graphique : Primo&Primo

Julien Vandermarlière et Cédric Millot sont titulaires d’une maîtrise de sciences physiques obtenue à l’université de Montpellier II et d’un CAPES de sciences physiques. Ils sont tous les deux professeurs certifiés de sciences physiques depuis près de 10 ans.


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Dessine-moi l’Univers… Julien Vandermarlière Cédric Millot

« Un missionnaire du Moyen Âge raconte qu’il avait trouvé le point où le ciel et la Terre se touchent »1

1 Cette gravure est un pastiche dû à Camille Flammarion et publié en 1888 dans « L’atmosphère : météorologie populaire » sous le titre « Universum »

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Pour toute information sur notre fonds et les nouveautés dans votre domaine de spécialisation, consultez notre site web : www.deboeck.com

De Boeck supérieur s.a., 2013 Rue des Minimes, 39 B-1000 Bruxelles

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Maquette intérieure : Tous droits réservés pour tout pays. Il est interdit, sauf accord préalable et écrit de l’éditeur, de reproduire (notamment par photocopie) partiellement ou totalement le présent ouvrage, de le stocker dans une banque de données ou de le communiquer au public, sous quelque forme et de quelque manière que ce soit. Imprimé en Belgique Dépôt légal : Bibliothèque nationale, Paris : septembre 2013 Bibliothèque royale de Belgique : 2013/0074/192 ISBN : 978-1-1007-5054-5

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Table des matières

Remerciements . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

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Préface . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

9

Avant-propos . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 11

1

Les premières représentations de l’antiquité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 13

2

Aristote . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 21

3

Copernic . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 29

4

Galilée . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 39

5

Kepler . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 57

6

Newton . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 63 Épilogue Des premiers pas d’Albert aux mystères actuels. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 71 Annexe 1 – Biographies . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 75 Aristote (Stagire, Macédoine, 384 – Chalcis, 322 av. J.-C.) . . . . . . . . . 75 Copernic (Torùn, 1473 – Frauenburg, 1543) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 75

TABLE DES MATIÈRES

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Galilée (Galiléo Galiléi) (Pise, 1564 – Arcetri, 1642) . . . . . . . . . . . . . . . 76 Kepler (Wurtenberg, 1571 – Ratisbonne 1630) . . . . . . . . . . . . . . . . . . 78 Newton (Grantham, 1642 – Kensington, 1727) . . . . . . . . . . . . . . . . . . 79 Annexe 2 – La Terre est ronde ! . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 81 Annexe 3 – Mesurer la Terre grâce à desbématistes . . . . . . . . . . . . . . . . . 83 Annexe 4 – La leçon de géométrie de Galilée . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 85 Annexe 5 – Montrer que la Terre tourne sur elle-même . . . . . . . . . . . . . 87 Annexe 6 – Montrer que la Terre tourne autour du Soleil . . . . . . . . . . . . 89 Annexe 7 – Démonstration de la loi d’attraction gravitationnelle.. . . . . 93 Annexe 8 – Des billes de plomb pour peser la Terre . . . . . . . . . . . . . . . . 95 Annexe 9 – Conséquences de la loi de Newton . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 99

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Remerciements

Quel chemin parcouru ! Entre l’idée qui avait germé dans la tête de deux étudiants en Maîtrise de sciences physiques et ce livre, près de dix ans se sont écoulés ! Tout d’abord, merci à un ami, Grégory Drouin, qui en souhaitant lire notre mémoire a fait renaître en nous l’envie de l’améliorer et de le publier. Merci à Mme Muriel Guedj, maître de conférences à Montpellier, spécialiste en épistémologie et histoire des sciences, qui fut notre tutrice en Maîtrise. Sa patience et son envie de partager ses connaissances sont pour beaucoup dans ce qui fut la première version de ce texte. Qu’elle trouve ici une marque de notre profonde gratitude. Pour compléter et enrichir notre texte, la rencontre avec James Lequeux, astronome émérite à l’observatoire de Paris, a été décisive. Sa grande connaissance du sujet et son expérience éditoriale nous ont permis de transformer notre mémoire d’étudiant en livre. Merci infiniment pour ce soutien, indispensable à la réussite de ce projet. Enfin, pour finaliser le texte, une approche littéraire était nécessaire. Merci à Cynthia Zanet, professeur de français, pour avoir pris le temps nécessaire de relire l’ébauche de ce livre.

REMERCIEMENTS

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Préface

Les auteurs de ce livre nous invitent à une promenade à travers les représentations successives que l’Homme s’est faites de l’espace qui l’entoure. D’abord, la Terre : au début, l’Homme n’en connaissait qu’une minuscule portion, si bien qu’elle se réduisait pour lui à une galette aplatie entourée d’eau. Puis, les navigateurs découvraient que la Terre était arrondie, et on a considéré que c’était un cylindre, puis une sphère flottant dans l’espace, ce qui témoigne d’une faculté d’abstraction considérable. Pour ce qui entoure la Terre, à de rares exceptions près, les savants de l’Antiquité et du Moyen Âge ont conçu un Univers géocentrique : c’était naturel, puisqu’on voit le Soleil, la Lune, les planètes et le ciel étoilé tourner chaque jour autour de la Terre. L’abandon de ce modèle géocentrique, qui a dominé pendant près de deux millénaires, a nécessité un nouveau saut dans l’abstraction et un reniement de principes métaphysiques hérités de l’Antiquité et adoptés par le christianisme. Ce renoncement a coûté cher à Giordano Bruno et à Galilée. Même la rotation de la Terre sur elle-même, qui nous paraît si commode pour éviter de faire tourner autour d’elle un Univers immense, n’a pas été facile à accepter. Aujourd’hui encore, une grande partie de l’humanité reste persuadée que le Soleil tourne autour de la Terre. Et d’ailleurs, il a été difficile de montrer par l’observation que c’est bien la Terre qui tourne autour du Soleil – il a fallu attendre en 1725 la découverte par Bradley de l’aberration de la lumière des étoiles. Quant à la rotation de la Terre sur elle-même, c’est le pendule de Foucault qui l’a confirmée en 1851. Le grand mérite de ce livre est de ne pas nous cacher que la démarche qui a présidé à l’évolution de nos conceptions de l’Univers a été longtemps dominée non seulement par des observations immédiates souvent trompeuses, mais aussi par des préjugés et des considérations métaphysiques ; c’est seulement avec Galilée,

PRÉFACE

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le premier des grands physiciens, que cette démarche a commencé à être réellement scientifique. Pour expliquer tout cela, les auteurs ont utilisé le langage le plus simple possible et des images parlantes, ce qui rend leur livre accessible à un public étendu, notamment aux adolescents. Cependant, il demande au lecteur beaucoup d’attention pour se familiariser avec les raisonnements des philosophes anciens, qui nous semblent aujourd’hui bien étrangers. Même les raisonnements de Galilée et de Newton ne nous paraissent pas évidents et ne peuvent être suivis sans effort. Il faut rendre grâce aux auteurs d’avoir osé ce qui ne l’a guère été auparavant : présenter de façon claire et vivante au grand public des notions qui sont, le plus souvent, l’apanage des philosophes et des historiens des sciences. Souhaitons que le succès couronne cette entreprise hardie et réussie. James Lequeux Astronome émérite à l’Observatoire de Paris

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Avant-propos

Il y a peu de temps, j’ai lu un livre qui, paraît-il, est pour les enfants. Il s’appelle Le Petit Prince et possède de nombreux passages très intéressants. J’aimerais vous en faire partager un : « Les grandes personnes aiment les chiffres. Quand vous leur parlez d’un nouvel ami, elles ne vous questionnent jamais sur l’essentiel. Elles ne vous disent jamais : “Quel est le son de sa voix ? Quels sont les jeux qu’il préfère ? Est-ce qu’il collectionne les papillons ?” Elles vous demandent : “Quel âge a-t-il ? Combien a-t-il de frères ? Combien pèse-t-il ? Combien gagne son père ?” Alors seulement elles croient le connaître. Si vous dites aux grandes personnes : “J’ai vu une belle maison en briques roses, avec des géraniums aux fenêtres et des colombes sur le toit…”, elles ne parviennent pas à s’imaginer cette maison. Il faut leur dire : “J’ai vu une maison de cent mille francs.” Alors elles s’écrient : “Comme c’est joli !” ». Les chiffres l’emportent ainsi sur les idées. Ayant fait ce constat, j’ai eu envie d’écouter les conseils du Petit Prince : oublier les nombres, et les longues lignes de calcul pour m’intéresser uniquement aux concepts qui permettent à ces même nombres d’être utilisés. C’est alors qu’une idée toute simple est née. Exposer les différents concepts qui ont permis à l’Homme de se représenter l’Univers. Pourquoi ce sujet ? Tout simplement parce qu’étudier l’évolution du Cosmos, le plus grand laboratoire existant, revient à se pencher sur l’avènement des notions qui constituent les bases de la physique moderne. En outre, il serait vain de tenter de comprendre les grands enjeux scientifiques actuels si l’on n’a aucune notion de l’histoire des sciences. Comment analyser le présent, si l’on ignore le passé ? À ce stade, il fallait choisir un mode d’expression qui en permet une exposition simple. Le dialogue m’apparut alors le meilleur moyen. En effet, c’est de cette

AVANT- PROPOS

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façon que de nombreux savants ont choisi de développer leurs idées. C’est en quelque sorte marcher sur les pas de Platon, Descartes ou Galilée. L’aventurier que j’ai choisi de faire intervenir s’appelle Albert et c’est au cours d’un voyage imaginaire, pendant un de ses rêves, qu’il va rencontrer les grands acteurs de la science, lui permettant ainsi, de voyager encore un peu plus loin…

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1 Les premières représentations de l’antiquité

Il faisait sombre depuis quelques heures lorsque le sommeil emporta tout doucement le petit Albert. Une question animait son esprit nuit et jour et c’est en rêvant qu’il allait trouver sa réponse. Albert eut la sensation de se réveiller. Il tenta d’ouvrir grand les yeux mais la luminosité était aveuglante. Il faisait chaud et Albert pouvait observer une mer calme et bleue avec de nombreux bateaux. Il s’approcha alors d’une grande personne qui semblait se promener sur les quais et observer le mouvement des bateaux : « Où sommes-nous monsieur ? » Et la grande personne lui répondit : « Mais vous êtes à Milet mon petit ! » Albert ne savait pas où se situait cette ville et la grande personne, étonnée, lui dit que cette ville était en Grèce. Puis elle commença à s’éloigner lorsque la petite voix d’Albert l’interpella : « S’il te plaît… dessine-moi l’Univers. » La grande personne fut très surprise et enchantée par cette question. Il se présenta, au petit Albert, comme étant Thalès de Milet1 et lui fit alors un beau dessin2.

1 On est aux alentours de 624 avant J-C. Thalès est considéré comme le premier physiologue, où physis signifie nature et « -physio-logos » désigne « l’étude de la nature ». On lui doit le fameux théorème qui porte son nom. 2 En réalité, ce dessin est réalisé à partir des textes de Thalès. Il n’existe pas de dessin fait par Thalès sur son système du monde.

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« Tu vois, la Terre est une simple galette entourée d’eau et les étoiles se trouvent toutes fixées sur la voûte céleste. » Cette idée est bien curieuse, se dit Albert. La Terre serait posée sur une vaste étendue d’eau et c’est tout.1 Thalès reprit : « Regarde autour de toi. La mer s’étend à perte de vue et après plusieurs jours de bateaux, on peut accoster sur de nouvelles terres. Il est donc évident, que l’eau qui nous entoure, constitue un support pour la Terre. Cette hypothèse est vérifiée par la présence de jets d’eau chaude2 qui transpercent la galette terrestre et que j’ai pu observer au cours de l’un de mes voyages. » Albert, qui entamait son premier voyage, n’avait guère d’arguments pour entretenir la conversation. Il mit son premier dessin dans sa poche et s’en alla à la recherche d’une autre explication. Albert croisa sur les quais de nombreuses grandes personnes. Mais ces rencontres furent peu fructueuses : elles ne parvenaient pas à l’éclairer sur l’Univers. Elles s’embrouillaient, balbutiaient, s’agaçaient. Albert était un peu désemparé. Il aperçut soudain un grand monsieur bien bâti qui griffonnait frénétiquement sur

1 Dans la préface du livre Une brève histoire du temps, de Stephen Hawking, cette notion de support pour la Terre apparaît. En effet, lors d’une conférence publique, une personne lui a rétorqué que la Terre était posée sur une tortue ! Et il demanda sur quoi reposait cette tortue. Ben, voyons, sur une autre tortue… On est en 1988 ! 2 Il s’agissait en fait de geysers.

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des morceaux de papiers. C’est ainsi qu’il fit la connaissance d’Anaximandre1, un grand philosophe grec. Il lui demanda : « S’il te plaît… dessine-moi l’Univers. » Peu après, Anaximandre tendit fièrement son dessin à Albert. Anaximandre était assurément un meilleur dessinateur que Thalès car son dessin était bien plus précis, se disait le petit Albert. Il lui dit que les étoiles, le Soleil, la Lune n’appartenaient pas à la voûte céleste mais étaient éloignées2. Cette idée parut intéressante à Albert. Mais ce qui le frappa était le dessin de la Terre qui n’apparaissait plus comme une galette mais comme un cylindre qui s’incurvait du nord au sud. De plus, la Terre flottait sans support matériel !3 Roue du Soleil

Trou du Soleil

Lumière

Sphère des étoiles

Terre

Trou de la Lune Roue de la Lune

1 Né en 610 avant J-C, il est parfois considéré comme étant le premier « scientifique ». On lui doit par exemple la naissance d’un concept qui s’apparente à notre infini et qu’il appelait « apeiron ». 2 De même que pour Thalès, il n’existe pas de dessin réalisé par Anaximandre. Dans ses explications, ce dernier donnait même des proportions précises pour la disposition des astres. Elles étaient fantaisistes, mais on lui doit l’idée, pas si évidente, d’éloigner les astres les uns des autres. On attribue aussi à Anaximandre l’exploit d’avoir déterminé le plan de l’obliquité de la Terre. 3 En quelque sorte Anaximandre avait compris que sous la Terre, il y avait encore du ciel, ce qui pour l’époque est assez étourdissant ! Karl Popper dit d’ailleurs à ce propos : « Selon moi cette idée d’Anaximandre [que la Terre est suspendue dans l’espace] est l’une des idées les plus audacieuses, les plus révolutionnaires, les plus prodigieuses de toute l’histoire de la pensée humaine ! »

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Perplexe, Albert interrogea Anaximandre : « Je crois plutôt que la Terre est une galette. Il te suffit de voyager, comme Thalès, et tu pourras observer que cette hypothèse de cylindre est ri-di-cu-le. – Ridicule, dis-tu ? ! ? Il ne faut pas se fier aux apparences et Thalès n’est pas un assez bon observateur. Car au cours de mes voyages, j’ai longuement observé les cieux et en me déplaçant du nord au sud, j’ai remarqué que la hauteur de l’étoile Polaire1 au-dessus de l’horizon variait. Alors qu’en allant d’est en ouest, elle ne variait pas. Pour expliquer ce phénomène, il te suffit de considérer la surface de la Terre comme un cylindre et tu aboutiras au même dessin que moi. » Albert vit que son premier dessin contenait des imperfections et qu’Anaximandre apportait de nouveaux éléments sur l’architecture de l’Univers. L’idée de donner du volume à la Terre séduisait beaucoup Albert et les arguments d’Anaximandre à ce sujet lui semblèrent très convaincants. De plus, sa conception permettait aux astres de passer sous la Terre alors que cela était impossible dans la vision de Thalès : c’était un gros progrès ! Il relança la discussion : « Pourquoi y a-t-il de grandes roues circulaires ? » La réponse d’Anaximandre fut immédiate : « La trajectoire parfaite est un cercle et lorsque l’on considère les corps célestes, ils ne peuvent se mouvoir autrement que selon un mouvement circulaire. Ces grandes roues sont opaques et contiennent du feu. Chacune d’entre elle est percée d’un trou de sorte que de la lumière peut s’en échapper. Quand on regarde le Soleil ou la Lune, c’est cette lumière que l’on voit ! Ainsi, en considérant que ces trous se déplacent, on peut comprendre le mouvement apparent des astres, et même les éclipses : parfois les trous se bouchent et on ne voit plus la lumière ! – Quelles preuves peux-tu me donner que cette histoire de roues est exacte ? J’avoue que cela me semble très étrange », rétorqua le petit Albert. Anaximandre ne répondit rien. Il s’agissait là d’une conviction solide, d’une croyance ancrée au plus profond de lui mais dont rien ne pouvait démontrer l’exactitude. Drôle de personnage, se dit Albert et pensant avoir tout appris de lui, il s’en alla, avec son nouveau dessin et, sur les conseils d’Anaximandre, partit à la recherche de ceux que l’on nommait les Pythagoriciens… Il marcha de nombreux jours en direction de l’Italie. Une fois, arrivé il dut de nouveau marcher et parcourir tous les sentiers possibles. Il savait que les Pythagoriciens 1 Cette étoile, qui appartient à la constellation de la Petite Ourse, servait de repère aux marins. Elle indique la direction du Nord et sa position ne varie presque pas au cours de la nuit, car sa direction est très proche de celle de l’axe de rotation de la Terre.

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se cachaient car ils étaient considérés comme appartenant à une secte, dont les différents disciples communiquaient peu avec le monde extérieur. Alors qu’il se trouvait dans le sud de l’Italie, il rencontra une grande personne sur un chemin peu emprunté, et, fatigué par ses recherches, Albert dit, tout doucement, comme une chose très sérieuse : « S’il te plaît… dessine-moi l’Univers. » « Rien de plus facile, mon petit. Que veux-tu que je te dessine ? » La grande personne se mit à dessiner et finalement arriva à ce résultat1 :

Planètes Lune Soleil Hestia Anti-Terre Terre

Puis il se mit à l’expliquer. Au centre, se trouve un foyer central qu’il appelle Hestia. Le feu étant la matière la plus noble, il est normal qu’il soit à la place la plus noble, le siège de toutes les divinités : le centre de l’Univers ! Il lui dit aussi que si on ne le voit pas c’est parce que sur la Terre, la face habitée par les humains lui tourne toujours le dos. En revanche, le soleil qui est semblable à du verre reflète la lumière d’Hestia tel un miroir et nous éclaire. Cela explique par exemple l’alternance du jour et de la nuit. En effet, selon la position respective du Soleil et de la Terre, il arrivait certaines fois que la lumière reflétée par le Soleil touche la Terre : c’est le jour. Puis, le Soleil et la Terre se déplaçant l’un par rapport à l’autre, il arrive aussi que le reflet d’Hestia dans le Soleil ne touche plus la Terre : c’est la nuit. Un autre détail surprit Albert : l’anti-Terre. C’est une planète identique à la Terre mais

1 II s’agit là encore d’une interprétation de sa vision de l’Univers.

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que l’on ne voit jamais car, comme pour Hestia, on lui tourne toujours le dos. Ce qui ne manqua pas d’étonner notre petit aventurier. « Comme tu ne la vois jamais, comment sais-tu que l’anti-Terre existe ? » La grande personne réfléchit un instant. « Le nombre dix, appelé encore Tétraktys, est sacré1. Et dans toute chose divine, comme l’Univers, ce nombre doit apparaître. Ainsi pour que le Tétraktys soit respecté autour d’Hestia, j’ai su qu’il fallait introduire un nouveau corps céleste encore inconnu jusque-là. » – Comment sais-tu qu’il t’en manque seulement un ? – Voyons petit, tu devrais savoir qu’à la Terre et la Lune s’ajoutent Mercure, Mars, Vénus, Jupiter, Saturne, le Soleil et la sphère des fixes ce qui fait neuf. Quant au corps céleste manquant, il s’agit de l’anti-Terre. – Mais si le Tétraktys n’existait pas, ton dessin serait faux ! – Oui, mais le nombre dix est sacré et doit être respecté dans l’Univers. On ne peut le remettre en cause. » L’enfant, qui décidemment n’aimait pas mélanger sciences et croyance, ne sembla pas convaincu par cette explication… Il demanda à la grande personne si elle savait où se trouvaient les pythagoriciens. Albert pensait que cette aide pourrait lui être précieuse face à ce dessin quelque peu mystique. La grande personne décontenancée par la question de l’enfant sourit : « Je m’appelle Philolaos et j’appartiens justement à cette grande Ecole Pythagoricienne que tu recherches. » Albert examina Philolaos et intrigué lui lança : « Sur ton dessin, tous les corps célestes, y compris la Terre sont sphériques, comment l’expliques-tu ? – La sphère est la figure géométrique qui offre une symétrie maximale. De part sa perfection, cette forme doit se retrouver dans les corps célestes. » Albert comprit, que tout comme Anaximandre, ce système du monde reposait sur des croyances divines. Mais ces dessins lui plaisaient, le fascinaient. La Terre et les corps célestes étaient, selon Philolaos, des sphères, ce qui était bien plus esthétique. De plus, la Terre n’était plus au centre de l’Univers, ce qui était nouveau. Il mit précieusement ses dessins au fond de sa poche… 1 « Tout est nombre », telle était la devise des Pythagoriciens. Ils voient dans les entiers le principe des choses. Cette conception repose sur l’observation qu’on peut produire des ensembles harmoniques par diverses combinaisons de nombres. Ainsi, tout triangle de côtés proportionnels à 3, 4, 5 est rectangle ; ce théorème de Pythagore était cependant connu des Babyloniens un millénaire avant lui.

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Le petit Albert fit alors le bilan de ce qu’il avait appris grâce à eux. La Terre lui avait été présentée comme étant une galette, qui par la suite a pris de l’épaisseur et ressemblait à un cylindre. Finalement, une nouvelle hypothèse, celle d’une Terre sphérique, lui avait été proposée. Cette évolution lui paraissait logique mais il lui manquait des preuves concrètes qui valideraient cette représentation. De plus, il ne savait toujours pas quelle était la place de la Terre dans l’Univers. Les dessins qu’on lui avait donnés étaient bien trop compliqués à ce sujet. Afin d’obtenir d’autres réponses et d’autres dessins, Albert poursuivit son voyage…

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De l’Antiquité grecque jusqu’à nos jours, les idées ont évolué au gré des découvertes des savants et surtout des mutations dans leurs positionnements face à ces problèmes. D’abord prisonniers des considérations d’ordres religieuses ou philosophiques, ils ont dû accepter de regarder le monde différemment pour le rendre intelligible. C’est cette aventure humaine et scientifique que ce livre décrit en insistant sur la façon dont sont nés les concepts qui ont permis à la physique de prendre son envol. Accessible au néophyte grâce à son mode d’expression sous forme de dialogue, comme Galilée le fît en son temps, il regorge d’informations scientifiques. Cela le rendra indispensable à l’amateur d’histoire des sciences, d’astronomie et à toute personne désireuse de comprendre facilement les idées incontournables qui ont modelé la façon dont on voit le monde…

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