CUTE Magazine - Automne 2019

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Cette intégration du choc des idées au sein d’une culture du débat développée en commun et valorisée en tant que telle, audelà de toute personnalisation et de toute dynamique de gang, est peut-être ce qui a le plus manqué aux coalitions pour la rémunération des stages, et particulièrement pendant la tentative de GGI à l’hiver 2019. Si la question de l’aspect fondamentalement féministe de la campagne est un exemple de lutte de tendances qui a su fournir un dynamisme positif à l’organisation et rallier un grand nombre de tendances politiques au-delà des intérêts concurrents et des blessures d’orgueil, on ne peut pas en dire autant de toutes les questions qui ont été l’objet de conflits et de débats au sein des coalitions. S’ils ont commencé, comme celui sur le féminisme, dans les assemblées de la Coalition montréalaise, plusieurs de ces débats ont malheureusement été interrompus, étant perçus comme des chicanes nous détournant des objectifs politiques de la campagne, ou pire encore, se sont poursuivis sur les médias sociaux, où la possibilité de construire une éthique de la confrontation est sabotée à l’avance, et où même les meilleures intentions ne font que paver le chemin du ressentiment et du repli sur la communauté, réflexes grégaires et anti-politiques. La pratique des amendements étant à la base de la démocratie et s’étant maintes fois portée garante d’une politique en mouvement et ouverte à l’imprévisible, nous proposons de mettre à jour la liste de recommandations de Jo Freeman pour rajouter, comme huitième point, l’éthique du débat et de la confrontation. Une pratique cohérente de l’autonomie politique implique de continuellement actualiser les propositions du passé pour les garder vivantes.

Luttes pour un salaire

Rétroactif, en espèces,

partout, pour tout et maintenant Par Annabelle Berthiaume, Nicholas Bourdon et Phil Mathieu

A

u cours des dernières années, nous avons vu les initiatives d’étudiant.e.s et de stagiaires de plusieurs endroits dans le monde se multiplier pour revendiquer la fin de leur travail gratuit. Sur le continent africain, des enseignant.e.s stagiaires du Maroc et du Gabon font la grève pour réclamer le placement en emploi après études et la régularisation de leur statut de travailleur.euse.s, alors qu'en Tunisie les stagiaires de l'hôtellerie font la grève pour exiger des conditions d'études décentes. Les mobilisations ont également gagné l'Europe, où, notamment, le mouvement étudiant du Luxembourg demande la rémunération de tous les stages (et obtient gain de cause)1. La Global Intern Coalition, regroupant des associations d'Italie, de Grande-Bretagne, d'Australie, du Portugal, de la France, des Pays-Bas, d'Autriche, du Kosovo, du Nigeria, de Belgique et de Suisse, a aussi lancé, depuis 2013, plusieurs appels à la grève pour des stages rémunérés et des protections légales. Plusieurs CRIS et CUTE ont d'ailleurs initié et co-signé des appels internationaux durant cette campagne, que ce soit dans le cadre de la Global Interns Day2 le 10 novembre 2017 avec des groupes politiques affinitaires et syndicaux ainsi que des associations étudiantes du Canada, des États-Unis et du Mexique, ou encore lors de la venue du G7 au Québec en juin 2018.

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1. Thomas Holzer, « Tous les

stages

seront

ré-

munérés au Luxembourg »,

À l'automne 2018, la rencontre entre une militante du CUTE UQAM et quelques groupes étudiants en Europe a également permis de tisser des liens de solidarité autour de la revendication d'un salaire étudiant et de la lutte contre le travail gratuit. Une première collaboration a abouti en un appel à

L'Essentiel, 29 mai 2019. 2. Journée internationale des stagiaires, 10 novembre 2017, www.globalinternsday.org/fr/accueil/

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